Oléoduc d'Afrique de l'Est
L'olĂ©oduc d'Afrique de l'Est, en anglais East African Crude Oil Pipeline (EACOP), Ă©galement connu sous le nom de UgandaâTanzania Crude Oil Pipeline (UTCOP)[3] - [4], est un projet en construction[5] destinĂ© Ă transporter du pĂ©trole brut Ă partir de nouveaux puits ougandais vers le port de Tanga, en Tanzanie sur l'ocĂ©an Indien[6]. S'il est achevĂ©, le pipeline devrait ĂȘtre le plus long pipeline de pĂ©trole brut chauffĂ© au monde[7].
Oléoduc d'Afrique de l'Est | ||
Informations géographiques | ||
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Pays | Ouganda et Tanzanie | |
Tracé | De l'Ouest à l'Est | |
Carte de la pipeline de pétrole brut d'Afrique de l'Est | ||
Informations générales | ||
Type de produits | Oléoduc | |
Mise en service | 2025 (Estimée)[1] - [2] | |
Longueur | 1 443 km | |
Propriétaire(s) | TotalEnergies (62 % en 2021) | |
Ce projet suppose des conséquences gravement problématiques aux niveaux éthique et environnemental : déplacement à grande échelle des communautés et de la faune, destruction d'aires protégées de biodiversité, émissions massives de gaz à effets de serre[8], risques pesant sur l'approvisionnement en eau de 40 millions de personnes, les scientifiques et les groupes écologistes mondiaux protestent contre sa construction et son financement[9] - [10]. Malgré l'implication des Organisations non gouvernementales ougandaises telles que AFIEGO (Africa Institute for Energy Governance) dans les protestations contre ce projet[11], les gouvernements d'Ouganda et la Tanzanie ont critiqué ces protestations comme étant du néocolonialisme niant leur souveraineté[12].
Approvisionnement et tracé
L'objectif est d'exploiter le pĂ©trole prĂ©sent sous le lac Albert, en Ouganda, oĂč quatre cents puits doivent ĂȘtre forĂ©s Ă partir de dĂ©cembre 2022, dont 132 dans la zone naturelle protĂ©gĂ©e des Murchison Falls, pour l'acheminer jusqu'Ă la cĂŽte est de la Tanzanie.
Le projet d'oléoduc prévoit un départ dans le sous-comté de Buseruka, district de Hoima, dans la région occidentale de l'Ouganda. Il devrait s'orienter dans une direction générale sud-est pour traverser le district de Rakai en Ouganda, Bukoba en Tanzanie, boucler autour des rives sud du lac Victoria, continuer à travers Shinyanga et Singida, pour se terminer à Tanga[13] sur une distance d'environ 1 410 km[14].
Aperçu
L'Ouganda a des réserves prouvées de pétrole dépassant 6,5 milliards de barils, dont environ 2,2 milliards de barils sont récupérables[15]. Le pays prévoit de construire une raffinerie dans la région occidentale pour répondre à la demande locale et régionale, le reste étant exporté par pipeline vers la cÎte de l'océan Indien[16].
L'Ouganda avait précédemment accepté de construire un oléoduc conjoint Ouganda-Kenya vers le port Kenyan de Lamu[17] - [18].
Des préoccupations concernant la sécurité et les coûts ont toutefois motivé des négociations parallÚles avec la Tanzanie concernant un tracé plus court et plus sûr vers le port Tanga, avec le soutien du conglomérat pétrolier français TotalEnergies[19] - [20].
Lors du 13e sommet des chefs d'Ătat du corridor nord Ă Kampala en avril 2016, l'Ouganda a officiellement choisi la route tanzanienne pour son pĂ©trole brut, de prĂ©fĂ©rence aux routes de Mombasa ou de Lamu au Kenya. Les prĂ©sidents du Kenya et du Rwanda Ă©taient prĂ©sents, ainsi que des reprĂ©sentants de l'Ăthiopie, du Soudan du Sud et de la Tanzanie[21] - [22]. Lors du mĂȘme sommet, le prĂ©sident Uhuru Kenyatta annonce que le Kenya construirait lui-mĂȘme l'olĂ©oduc de pĂ©trole brut du Kenya, abandonnant ainsi l'olĂ©oduc de pĂ©trole brut Ouganda-Kenya[23] - [24].
Le budget de construction des 1 445 km pipeline est de 3,5 milliards de dollars américains[25] - [26]. L'oléoduc devrait avoir une capacité de production de 216 000 barils de pétrole brut par jour[25]. Il sera de 61 cm de diamÚtre, et l'Ouganda paiera à la Tanzanie 12,20 dollars US pour chaque baril passant par l'oléoduc[27].
En , le parlement de l'Ouganda adopte le projet de loi sur les dispositions spéciales de l'oléoduc de pétrole brut d'Afrique de l'Est dans la législation ougandaise. Une loi similaire est adoptée par le parlement tanzanien, en . La nouvelle loi du parlement régit la participation du comté à la construction, à l'exploitation et à l'entretien estimés à 3,5 milliards de dollars de l'EACOP. La contribution de l'Ouganda est estimée à 293 millions de dollars, dont 130 millions ont été payés d'avance[28].
Coût, financement et calendriers successifs
La construction devait initialement commencer en et durer trois ans pour un coĂ»t budgĂ©tĂ© de 4 milliards de dollars amĂ©ricains, fournissant environ 15 000 emplois dans la construction et 1 000 Ă 2 000 emplois permanents[29]. En , le Daily Monitor rapporte que Total E&P Ă©tait prĂȘt Ă dĂ©penser 4 milliards de dollars US pour financer la construction de ce pipeline[14]. Ă la suite de rĂ©unions entre les dĂ©lĂ©gations conduites par les ministres du pĂ©trole de la Tanzanie et de l'Ouganda, tenues Ă Hoima en , il est annoncĂ© que la construction des 1 443 km de pipeline commencerait en [30]. L'achĂšvement Ă©tait prĂ©vu alors pour 2020[31].
Le , TotalEnergies et le gouvernement ougandais signe le Host Government Agreement (HGA) pour le projet EACOP, à State House Entebbe. Cela devrait conduire à la décision finale d'investissement, d'ici à la fin de 2020[32] - [33].
Deux jours plus tard, le président Yoweri Museveni de l'Ouganda et le président John Magufuli de la Tanzanie signe un accord à Chato, s'engageant à construire conjointement l'EACOP pour un coût estimé à 3,5 milliards de dollars. Les travaux sur le pipeline devaient commencer d'ici la fin de 2020[34]. Une fois commencée, la construction du pipeline devrait durer environ 36 mois[33].
Le , TotalEnergies et le gouvernement tanzanien signe un HGA pour régir les relations des deux entités concernant le projet EACOP, dont 70% passeront par le territoire tanzanien. Le début de la pose du pipeline est reporté au premier trimestre de 2021[35].
Le 11 avril 2021, les présidents Yoweri Museveni d'Ouganda et Samia Suluhu de Tanzanie rencontrent à Entebbe, en Ouganda, Patrick Pouyanné, le président-directeur général de Total SA et Chen Zhuoubiao, président de CNOOC Ouganda, ainsi que des technocrates, des avocats et des ministres ougandais et tanzaniens, en vue de signer un certain nombre d'accords, permettant le début de la construction de l'EACOP[36]. La construction devait alors commencer en , avec une premiÚre livraison de pétrole prévu en 2025.
En , le coût total du projet est réévalué à 5 milliards de dollars américains. Sur ce montant, 2 milliards de dollars seront levés par les propriétaires du pipeline sous forme d'investissement en actions. Les 3 milliards de dollars restants seront empruntés à des financements externes[37].
Propriétaires
En , la liste des partenaires potentiels comprenait plusieurs parties prenantes, comme indiqué dans le tableau ci-dessous[38] :
Les nĂ©gociations et la recherche de prĂȘteurs internationaux sont en cours. L'Ouganda et la Tanzanie sont conseillĂ©s par Standard Bank of South Africa, tandis que TotalEnergies est conseillĂ© par Sumitomo Mitsui Banking Corporation. Le cabinet d'avocats basĂ© Ă Londres Clifford Chance conseille TotalEnergies sur les questions juridiques, tandis que CNOOC est conseillĂ© par la Banque impĂ©riale de Chine[38].
En , Tullow Oil Plc a vendu « l'intĂ©gralitĂ© de ses intĂ©rĂȘts dans le projet de dĂ©veloppement du lac Albert en Ouganda, y compris l'olĂ©oduc de pĂ©trole brut d'Afrique de l'Est », Ă TotalEnergies, pour un montant de 575 millions de dollars amĂ©ricains. Total assumera toutes les dettes fiscales liĂ©es Ă la transaction[39]. En , la propriĂ©tĂ© du pipeline Ă©tait telle que reprĂ©sentĂ©e dans le tableau ci-dessous[40]. Cette propriĂ©tĂ© a changĂ© en avril 2021, lors de la signature des accords d'investissement dĂ©finitifs[41].
Rang | Nom du propriétaire | Propriété en 2020 (%) | Propriété en 2021 (%) |
---|---|---|---|
1 | TotalEnergies | 45,0 | 62,0 |
2 | Société nationale chinoise du pétrole offshore | 35,0 | 8.0 |
3 | Société nationale ougandaise du pipeline | 15,0 | 15,0 |
4 | Société tanzanienne de développement pétrolier | 5.0 | 15,0 |
Total | 100,00 | 100,00 | |
DĂ©cision finale d'investissement
Le , le président ougandais Yoweri Museveni ; le vice-président de la Tanzanie Philip Mpango ; le Président-directeur général de TotalEnergies, Patrick Pouyanné ; le président de CNOOC Uganda Limited, Chen Zhuobiao ; les ministres ougandais, les technocrates pétroliers ougandais et tanzaniens et d'autres invités se sont réunis à Kololo à Kampala, pour assister à la signature de la décision finale d'investissement, par TotalEnergies et CNOOC[42].
Les autres parties liées à l'EACOP, représentées lors de la signature de l'accord final d'investissement, comprenaient Uganda National Oil Company, CNOOC Uganda Limited, Petroleum Authority of Uganda, TotalEnergies Uganda et Tanzania Petroleum Development Corporation[43].
Raffinerie de pétrole
Une raffinerie de pĂ©trole devrait ĂȘtre construite dans l'ouest de l'Ouganda pour traiter le pĂ©trole destinĂ© Ă ĂȘtre utilisĂ© dans la CommunautĂ© de l'Afrique de l'Est. Le projet de 2,5 milliards de dollars doit ĂȘtre dĂ©veloppĂ© dans le cadre d'un partenariat public-privĂ©, avec 50% du projet dĂ©tenu par un dĂ©veloppeur privĂ© et 10% dĂ©tenu par Jk Minerals Africa d'Afrique du Sud. Les 40 % restants seront rĂ©partis entre les pays d'Afrique de l'Est[44]. Le , la Tanzanie accepte d'acheter 8 % des actions de la raffinerie pour 150,4 millions de dollars[45].
Impact social et environnemental
Le projet « déplacera des milliers de petits agriculteurs et mettra en danger les principaux habitats fauniques et les eaux cÎtiÚres »[9]. En 2022, selon l'ONG Les Amis de la Terre - France et L'Usine nouvelle, 100 000 personnes ont été expropriées[46] - mais seule une petite partie d'entre elles ont été relogées, et de nombreuses violations des droits de l'homme sont dénoncées[47]. Le pipeline étant à proximité immédiate des lacs Albert et Victoria, il menace en cas de fuites l'approvisionnement en eau potable de 40 millions de personnes[48] - [49].
Selon un rapport de l'Institut Africain pour la Gouvernance de l'Energie (eo), le projet doit gĂ©nĂ©rer des Ă©missions de COÂČ Ă hauteur de 34 millions de tonnes par an[48]. Ces Ă©missions seraient Ă©quivalentes Ă 25 fois les Ă©missions totales actuelles de la Tanzanie et de l'Ouganda[8].
263 organisations de la sociĂ©tĂ© civile ont demandĂ© aux agences de financement de ne pas soutenir le projet, citant les dommages sociaux et environnementaux potentiels que le pipeline causera[10] - [49] - [50]. En septembre 2022, le parlement europĂ©en vote une rĂ©solution en urgence, dĂ©nonçant des « violations des droits de lâhomme », « actes dâintimidation », « harcĂšlements judiciaires », ainsi que les « immenses risques et incidences » sur les communautĂ©s locales, lâenvironnement et le climat. Il demande au groupe Total l'arrĂȘt des forages, et le presse d'Ă©tudier un tracĂ© moins destructeur pour l'environnement et les populations, ainsi qu'une solution alternative basĂ©e sur des Ă©nergies renouvelables. Il rĂ©clame aussi la libĂ©ration des dĂ©fenseurs des droits de l'homme arrĂȘtĂ©s de façon arbitraire dans le cadre de ce projet, ainsi que l'indemnisation des personnes expropriĂ©es ou empĂȘchĂ©es d'accĂ©der Ă leurs terres[51].
Notes et références
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- Lorianne BIAOU, « 263 ONG appellent les banques Ă ne pas financer la construction de lâolĂ©oduc ougando-tanzanien », sur Agence Ecofin (consultĂ© le )
- (en-US) « SA's Standard Bank Group Faces Protest Over Pipeline Funding Plan », Naija247news, (consulté le )
- « Deux mĂ©ga projets pĂ©troliers de TotalEnergies en Ouganda dĂ©noncĂ©s par le Parlement europĂ©en », Le Monde.fr,â (lire en ligne, consultĂ© le )
Annexes
Articles connexes
- Industrie pétroliÚre en Ouganda
- Gazoduc Tanzanie-Ouganda
- Autorité pétroliÚre de l'Ouganda
- Pipeline de produits pétroliers Kenya-Ouganda-Rwanda
- Pipeline de produits pétroliers Hoima-Kampala
- Gazoduc Tanzanie-Ouganda
- Moniteur mondial de l'énergie de l'oléoduc Ouganda-Tanzanie
Liens externes
- (en + sw) Site officiel
- Stop EACOP (site des opposants au projet)
- RĂȘves d'olĂ©oducs : dans le cadre des pourparlers sur l'olĂ©oduc Ouganda-Tanzanie Au 18 mars 2019.
- Afrique de l'Est: la RD Congo montre son intĂ©rĂȘt alors que l'olĂ©oduc Ouganda-port de Tanga se prĂ©pare Ă la vitesse supĂ©rieure
- L'Ouganda et la Tanzanie discutent d'un oléoduc