Mosquée Faik-Pacha
La mosquée Faik-Pacha (en turc : camii Faik Paşa, en grec moderne : τζαμί Φαΐκ Πασά / tzamí Faḯk Passá), connue localement sous le nom d'Imaret d'Árta (Ιμαρέτ Άρτας), est un édifice ottoman situé à Árta, en Grèce. Du nom du conquérant ottoman de la ville en 1449, la mosquée formait un complexe composé notamment de bains, d'un imaret et d'une madrassa.
Mosquée Faik-Pacha Imaret d'Árta | |
La mosquée vue depuis le sud-ouest. | |
Présentation | |
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Nom local | Τζαμί Φαΐκ Πασά |
Culte | Musulman |
Type | Mosquée |
Rattachement | Ministère de la Culture et des Sports |
Fin des travaux | Vers 1455 ou 1492-1493 |
Autres campagnes de travaux | Restauration : 1994 |
Style dominant | Ottoman |
Date de désacralisation | Peu après 1913 |
Protection | Site archéologique de Grèce |
Géographie | |
Pays | Grèce |
Périphérie | Épire |
District régional | Árta |
Ville | Árta |
Coordonnées | 39° 09′ 57″ nord, 20° 58′ 22″ est |
Localisation
La mosquée Faik-Pacha est située dans l'ancienne localité de Maráti[1] - [2], près du village de Marathovoúni (el), sur la rive droite du fleuve Árachthos et à environ 1,5 km au nord du pont d'Árta (en). À l'époque ottomane, la zone entourant l'édifice portait le nom général de Top-Alti, terme turc décrivant le secteur qui se trouvait à portée de canon du château d'Árta (el)[3] - [4]. Plus précis, le voyageur Evliya Çelebi évoqua le village musulman de Karye-i Imaret[5], duquel découle le toponyme grec Maráti[6].
Histoire
La mosquée Faik-Pacha fut vraisemblablement érigée à l'emplacement d'une église byzantine dédiée à Saint-Jean-Baptiste[7] - [8]. Son commanditaire est Faik Pacha, conquérant de la ville[9] et vizir ottoman[10]. Deux hypothèses de datation coexistent. La première, formulée par le métropolite d'Árta Seraphim de Byzance, fait remonter l'édifice vers 1455. Selon des informations orales recueillies au milieu du XVIIIe siècle auprès d'un habitant ottoman, Faik Pacha nomma un imam pour la mosquée mais à la mort de celui-ci, ne trouvant pas de digne remplaçant, le pacha décida de se retirer de l'armée et d'endosser lui-même la fonction d'imam. Faik Pacha serait resté imam pendant environ quarante ans, jusqu'à sa mort en 1499. Sur la base de ces informations, le métropolite d'Árta data la construction de la mosquée de l'époque du sultan Mehmed II. La seconde hypothèse place la construction de la mosquée en 1492-1493, sous le règne de Bayezid II[11] - [12] - [13]. Cette datation apparaît plus affermie que la conjecture précédente, dans la mesure où l'historien ottoman Aşıkpaşazade fit référence vers 1478 à la mosquée comme étant à l'état de projet et que la charte de fondation (vakıf) de l'institution de Faik Pacha, comprenant un imaret et une madrassa, date de 1493[5] - [12].
L'institution tirait ses revenus de terres agricoles dans les villages de Vígla (el) et Maráti, qui appartenaient avant l'occupation ottomane au monastère de la Panagía de Rodiá[14], ainsi que de propriétés près de Thessalonique et Giannitsá[5].
Durant la guerre d'indépendance grecque, la zone fut le théâtre de combats durant le siège d'Árta (el). La mosquée fut un camp de retranchement pour Yánnis Makriyánnis, Márkos Bótzaris et quelques centaines d'hommes, qui résistèrent aux assauts de la garnison ottomane le [15] - [16] - [13]. Quelques années plus tard, le lieu fut visité par François Pouqueville, qui souligna la présence de roseaux de Perse, d'oliviers, de citronniers et d'orangers[17], tandis qu'en 1835, William Martin Leake le décrit comme riche en noisetiers[18].
Lors de la guerre gréco-turque de 1897, la zone autour de la mosquée fut à nouveau un champ de bataille entre les forces grecques du colonel Thrasývoulos Mános et ottomanes d'Ahmed Hifzi Pacha (en)[19]. Après la libération d'Árta, la mosquée fut convertie en une église dédiée à saint Jean le Russe (en)[20].
En 1938, l'édifice fut déclaré site historique protégé par décret royal[21]. En 1994, des fouilles permirent la découverte de plusieurs membres architecturaux du porche et des travaux de restauration conduisirent à la remise en état du sol pavé[22]. Fin 2019, les études de restauration générale du monument furent approuvées par le Conseil archéologique central (en)[23] et les travaux mis aux enchères à l'été 2022[24]. Le site est placé sous la responsabilité du 8e Éphorat des antiquités byzantines du ministère de la Culture et des Sports[9].
Architecture
La mosquée Faik-Pacha est composée d'une salle de prière carrée aux dimensions extérieures de 11,5 m de côté, surmontée d'un dôme[2] dont le tambour est orné de « triangles turcs »[25]. Sur la façade principale, au nord, s'élevait autrefois un porche (revak) dont les vestiges sont encore visibles. Construite en appareil cloisonné[26], la maçonnerie intègre certains matériaux provenant de l'église byzantine de la Panagía Parigorítissa[18] - [27], de l'ancienne Nicopolis ainsi que de divers bâtiments antiques d'Ambracie[28]. Des éléments architecturaux du porche effondré proviennent ainsi du monastère voisin de la Panagía Pantánassa, fondée au milieu du XIIIe siècle par Michel II Doukas[29]. À l'angle nord-ouest s'élève un minaret en briques conservé jusqu'au balcon[2], vraisemblablement reconstruit pour la dernière fois au XIXe siècle[30]. À l'intérieur, le monument conserve les traces de sa double utilisation comme mosquée et église : le mihrab occupe le centre du mur méridional tandis que des restes de l'iconostase sont observables sur le mur oriental[31].
Hormis la mosquée, les vestiges des bains situés à quelques dizaines de mètres au nord-ouest sont les seules traces parvenues jusqu'à nous du complexe monumental de Faik Pacha[32].
Galerie
- Vue distante de la mosquée depuis l'ouest.
- Intérieur de la mosquée depuis le nord-ouest.
- Photographie de Machiel Kiel dans les années 1970.
- Minaret à l'angle nord-ouest.
- Détail de l'inscription dédicatoire.
Notes et références
Notes
- (el) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en grec moderne intitulé « Τζαμί Φαΐκ Πασά » (voir la liste des auteurs).
Références
- Heath W. Lowry, 2009, p. 18.
- (el) Aféndra Moutzáli, « Άρτα: Οι μεταμορφώσεις του αστικού τοπίου », Archéologie et Arts, no 112, , p. 73–81 (ISSN 1108-2402, lire en ligne), p. 77.
- (en) Myrto Veikou, Byzantine Epirus: A Topography of Transformation. Settlements of the Seventh-Twelfth Centuries in Southern Epirus and Aetoloacarnania, Greece, Leyde, Éditions Brill, , 623 p. (ISBN 978-90-04-22151-2, lire en ligne), p. 409.
- Seraphim de Byzance, 1884, p. 378.
- Semavi Eyice 1995, p. 103.
- Heath W. Lowry, 2009, p. 18 et 19.
- Seraphim de Byzance, 1884, p. 147.
- Varvára Papadopoúlou et Aglḯa Tsiára 2008, p. 61.
- (en) Tásos Mikrópoulos (dir.), Elevating and Safeguarding Culture Using Tools of the Information Society: Dusty traces of the Muslim culture, Ioánnina, Earthlab, , 491 p. (ISBN 978-960-233-187-3, lire en ligne), p. 446.
- Semavi Eyice 1995, p. 102.
- Ahmed Ameen 2017, p. 22.
- Heath W. Lowry, 2009, p. 17 et 18.
- (tr) Machiel Kiel (en), « Karlı-ili. Batı Yunanistan’da bir Osmanlı sancağı [« Province de Karlı. Un sandjak ottoman en Grèce occidentale »] », dans Türkiye Diyanet Vakfı İslâm Ansiklopedisi, vol. 24, (lire en ligne), p. 499–502.
- Seraphim de Byzance, 1884, p. 172 et 328.
- (en) Paschalis M. Kitromilides et Constantinos Tsoukalas (eds.), The Greek Revolution: A Critical Dictionary, Cambridge, Harvard University Press, , 800 p. (ISBN 978-0-674-25931-7, lire en ligne), p. 212.
- (el) Kóstas Détsikas, Καραϊσκάκης. Ο στρατάρχης [« Karaïskákis. Le maréchal »], Athènes, Iliotrópio, , 692 p. (ISBN 9789603423706), p. 174–175.
- François Pouqueville, Histoire de la régénération de la Grèce : comprenant le précis des évènements depuis 1740 jusqu'en 1824, vol. III, Paris, Firmin Didot, , 578 p. (lire en ligne), p. 308.
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- Evángelos Kontogiánnis 2014, p. 58.
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Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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- (el) Fótis Vrákas, Η Ήπειρος του χτες – Η Ήπειρος της οθωμανικής περιόδου 15ος - 20ος [« L'Épire d'hier – L'Épire de la période ottomane 15e-16e siècle »], , 100 p. (lire en ligne).