Mission San Juan Capistrano
La Mission San Juan Capistrano est une mission catholique qui se situe dans la ville de San Juan Capistrano entre Los Angeles et San Diego, en Californie. La mission San Juan Capistrano a Ă©tĂ© fondĂ©e une première fois par le père FermĂn LasuĂ©n le mais elle dut ĂŞtre abandonnĂ©e rapidement Ă cause des menaces amĂ©rindiennes. Elle fut restaurĂ©e le par des moines franciscains Ă une Ă©poque oĂą la Haute-Californie faisait partie de la Nouvelle-Espagne, une rĂ©gion de l’AmĂ©rique coloniale espagnole. Elle fait partie d’un rĂ©seau de 21 missions fondĂ©es entre 1769 et 1823, destinĂ©es Ă Ă©vangĂ©liser les AmĂ©rindiens, mais aussi Ă mettre en valeur les terres et Ă contrĂ´ler le territoire.
La Mission San Juan Capistrano a été baptisée en l’honneur de Giovanni da Capistrano, un théologien italien du XVe siècle. Sa chapelle sert de cadre aux offices religieux depuis 1782.
Histoire
Contexte
La mission San Juan Capistrano fut fondée sur le territoire des Amérindiens Juaneños qui constituaient un groupe de 1 000 personnes autour du site vers 1770[1]. Les Juaneño actuels, dont les ancêtres vivaient dans les comtés de San Juan et de San Mateo Creek, préfèrent se nommer par le mot indigène « Acjachemen ». Ils parlaient une langue proche de celle des Luiseño[2]. La plupart de leurs villages se trouvaient en aval de la San Juan River, où la mission s’est établie[3]. Ils étaient organisés en clans politiquement indépendants, mais qui entretenaient des relations économiques, sociales et religieuses. La société était hiérarchisée et dominée par les chefs de clan appelés Nota, qui présidaient les rites religieux avec le conseil des anciens. Les villages étaient composés de huttes ; la maison du chef et le lieu des cérémonies se trouvaient au centre[4].
Les sociĂ©tĂ©s amĂ©rindiennes du sud de la Californie sont connues grâce Ă l’explorateur Juan RodrĂguez Cabrillo qui explora la rĂ©gion en 1542[5] et grâce au frère GerĂłnimo Boscana, qui fut moine Ă la mission San Juan Capistrano Ă partir de 1812.
1769-1833
Au dĂ©but de l’annĂ©e 1775, Don Antonio MarĂa de Bucareli y UrsĂşa, Vice-roi de Nouvelle-Espagne autorise l’établissement d’une mission Ă mi-chemin entre la Mission San Diego de Alcalá et la Mission San Gabriel Arcángel. Il choisit de la placer sous le patronage de saint Juan Capistrano. Le site se trouve Ă environ 26 lieues au nord de San Diego, Ă 18 lieues au sud de San Gabriel et Ă une demi-lieue de l’ocĂ©an Pacifique. Une pergola est amĂ©nagĂ©e, deux cloches de bronze sont suspendues Ă un arbre et une croix en bois est montĂ©e Ă cet endroit. Les fondations de la mission (La MisiĂłn de San Juan Capistrano de Sajavit) sont consacrĂ©es par le Père FermĂn LasuĂ©n de la Mission San Carlos Borromeo de Carmelo le , près d’un village amĂ©rindien appelĂ© Sajavit. Huit jours après, le Père GregĂłrio AmĂşrrio vient de la Mission San Luis Obispo avec des produits et du bĂ©tail. Au mĂŞme moment, les moines de San Juan Capistrano apprennent que les AmĂ©rindiens ont attaquĂ© la mission de San Diego et que le Père LuĂs Jayme a Ă©tĂ© assassinĂ©[6] - [7]. Craignant une rĂ©action hostile des AmĂ©rindiens, ils dĂ©cident d’enterrer rapidement les cloches et d’abandonner l’endroit. Un an plus tard, le Père Serra, accompagnĂ© des Pères AmĂşrrio, Pablo de Mugártegui et de onze soldats, reviennent sur le site le 30 ou le [8]. Ils dĂ©terrent les cloches, construisirent une nouvelle pergola et trouvent la croix en bois toujours debout[9]. Le Père Serra cĂ©lèbre l’eucharistie le . Cependant, le manque de ressources en eau pousse la communautĂ© Ă dĂ©mĂ©nager la mission d’environ 4,8 km vers l’ouest, près du village d’Acágcheme[10]. Le nouveau site se trouve Ă proximitĂ© de deux cours d’eau, le Trabuco et le San Juan. La Mission San Gabriel envoya du bĂ©tail et des hommes pour aider la communautĂ© Ă se dĂ©velopper. Le Père AmĂşrrio procède au premier baptĂŞme le [11] et le premier mariage fut cĂ©lĂ©brĂ© par le Père Mugártegui le . La première inhumation dans le cimetière de la mission a lieu le [12]. Le registre des baptĂŞmes, des confirmations, des mariages et des dĂ©cès est d’ailleurs conservĂ© intact Ă la mission. Dès les premières annĂ©es, les missionnaires rĂ©ussissent Ă Ă©vangĂ©liser les AmĂ©rindiens : les archives de la mission rĂ©vèlent qu’ils Ă©taient 700 Ă s’être convertis au catholicisme vers 1790 et que 1649 furent baptisĂ©s en 1796. 4639 individus sont devenus chrĂ©tiens entre 1776 et 1847[13].
La première chapelle en adobe est bénie en 1778 ; elle est remplacée par un édifice plus grand (la chapelle Serra, 35 mètres de longueur) en 1782-1783, qui est aujourd’hui considéré comme l’un des plus anciens de Californie. Pendant les travaux de construction de la chapelle, les bâtiments consacrés à la vie quotidienne et économique de la mission sont érigés, formant un rectangle au sol (cuadrángulo). La première vigne de Californie est plantée en 1779 : elle produit du vin pour la messe, du vin de table rouge et blanc, du vin muté appelé « Angelica ». En 1794, sept bâtiments en adobe sont élevés pour accueillir les Amérindiens de la mission.
Pour construire une plus grande Ă©glise, les moines font appel Ă IsĂdro Aguilár de Culiacán[14]. La nef est coiffĂ©e de six petites coupoles en pierre (bovedas), comme le voulait le Père Aguilar, ce qui la distingue des autres Ă©glises missionnaires construites dans la rĂ©gion. Le chantier de la grande Ă©glise de pierre commence le . Son plan a la forme d’une croix latine longue de 55 mètres sur 12 mètres de large et 15 mètres de hauteur. Un clocher de 37 mètres de haut est ajoutĂ© Ă cĂ´tĂ© de l’entrĂ©e principale[15]. Selon la lĂ©gende locale, cette tour pouvait ĂŞtre aperçue Ă 16 km et ses cloches pouvaient ĂŞtre entendues Ă une plus grande distance encore[16]. Les murs en grès reposaient sur des fondations profondes de 2,1 mètres. Le chantier nĂ©cessita la participation des AmĂ©rindiens. Les pierres Ă©taient acheminĂ©es depuis les ravins et le lit des cours d’eau jusqu’à 10 km de distance et transportĂ©es dans des charrettes tirĂ©es par des bĹ“ufs. Le mortier fut fabriquĂ© Ă partir de calcaire rĂ©duit en poudre. Le , un sĂ©isme Ă San Diego provoqua des fissures dans l’édifice nĂ©cessitant des rĂ©parations[17]. L’église fut achevĂ©e en 1806 et bĂ©nie par le Frère EstĂ©van TapĂs le .
Le , une série de secousses sismiques détruisit une grande partie de l’édifice (à l’exception du transept et de la sacristie) et tua une quarantaine d’Amérindiens qui étaient présents à la messe[18]. Le tremblement de terre fut la dernière catastrophe de l’année marquée par une tempête et des inondations qui provoquèrent de nombreux dégâts et détruisirent une partie des récoltes. L’année suivante fut érigé un nouveau campanile (campanario) pour abriter les cloches, et, en 1815, on tenta vainement de reconstruire l’église à partir des éléments restant debout. Les Pères José Barona et Boscana supervisèrent les travaux d’une petite infirmerie en 1814. Pour soigner les malades de la mission, on utilisa la médecine amérindienne[19].
En , le commandant RuĂz envoya une trentaine d’hommes conduits par Santiago ArgĂĽello pour protĂ©ger la mission contre une attaque du corsaire français Hippolyte de Bouchard[20]. Bouchard demanda des provisions Ă la mission et essuya un refus. Il lança une attaque menĂ©e par 140 hommes pour se ravitailler de force[21]. Les hommes chargĂ©s de dĂ©fendre la mission furent dĂ©faits ; les magasins furent pillĂ©s par les assaillants qui mirent le feu Ă plusieurs bâtiments[22]. De nos jours, cet Ă©vĂ©nement est toujours commĂ©morĂ© chaque annĂ©e dans la mission[23].
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Mission San Juan Capistrano » (voir la liste des auteurs).
- Kroeber 1925, p. 636
- Sparkman 1908, p. 189
- O'Neil 2002, p. 68-78
- Boscana 1933, p. 37
- Yenne 2004, p. 8
- Yenne 2004, p. 72
- Wright 1950, p. 37
- Engelhardt 1922, p. 6
- Saunders et Smeaton Chase 1915, p. 22
- Kelsey 1993, p. 10
- Engelhardt 1922, p. 213
- Engelhardt 1922, p. 195
- Engelhardt 1922, p. 183
- Camphouse 1974, p. 30
- Krell 1979, p. 154, 275
- O'Sullivan 1912, p. 14
- Engelhardt 1922, p. 39
- Engelhardt 1922, p. 251
- Engelhardt 1922, p. 57
- Bancroft 1884-1890, p. 240
- Jones et Klar 2007, p. 170
- Bancroft 1884-1890, p. 241
- Yenne 2004, p. 77
Annexes
Articles connexes
Liens externes
- Ressources relatives Ă l'architecture :
- (en) Mission San Juan Capistrano
- (en) Paroisse San Juan Capistrano
Bibliographie
- Hubert Howe Bancroft, History of California, vols. i – vii (1542-1890), San Francisco, The History Company, 1884-1890
- GerĂłnimo Boscana, Chinigchinich : A Revised and Annotated Version of Alfred Robinson's Translation of Father GerĂłnimo Boscana's Historical Account of the Belief, Usages, Customs and Extravagancies of the Indians of this Mission of San Juan Capistrano Called the Acagchemen Tribe, Santa Ana, Phil Townsend Hanna, ed. Fine Arts Press,
- Lowell John Bean et Thomas Blackburn, Native California : A Theoretical Retrospective, Socorro, Ballena Press,
- Marjorie Camphouse, Guidebook to the Missions of California, Los Angeles, Anderson, Ritchie & Simon, , 126 p. (ISBN 0-378-03792-7)
- David M. Cathers, Furniture of the American Arts and Crafts Movement : Stickley and Roycroft Mission Oak, The New American Library, Inc., , 275 p. (ISBN 0-453-00397-4)
- George Davidson, Pacific Coast Pilot : Coast of California, Oregon, and Washington Territory, Washington, U.S. Coast and Geodetic Survey,
- Donald Duke, Santa Fe : The Railroad Gateway to the American West, Volume One, San Marino, Golden West Books, (ISBN 0-87095-110-6)
- Zephyrin Engelhardt, San Diego Mission, San Francisco, James H. Barry Company,
- Zephyrin Engelhardt, San Juan Capistrano Mission, Los Angeles, Standard Printing Co.,
- Alexander Forbes, California : A History of Upper and Lower California, Cornhill, Londres, Smith, Elder & Co.,
- Philip L. Fradkin, Magnitude 8 : Earthquakes and Life Along the San Andreas Fault, Berkeley, California, Los Angeles, University of California Press, , 348 p. (ISBN 0-520-22119-2, lire en ligne)
- Lee Gustafson et Phil Serpico, Santa Fe Coast Line Depots : Los Angeles Division, Palmdale, Omni Publications, (ISBN 0-88418-003-4)
- Pamela Hallan-Gibson, Images of America : San Juan Capistrano, San Francisco, Arcadia Publishing, , 128 p. (ISBN 978-0-7385-3044-4, lire en ligne)
- « Historic San Juan Mission », Mission San Juan Capistrano (consulté en )
- Theodore H. Hittell, History of California, Volume I, San Francisco, N.J. Stone & Company,
- (en) Terry L. Jones et Kathryn A. Klar, California Prehistory : Colonization, Culture, and Complexity, Lanham, AltiMira Press, , 394 p. (ISBN 978-0-7591-0872-1 et 0-7591-0872-2, lire en ligne)
- Harry Kelsey, Mission San Juan Capistrano : A Pocket History, Altaden, Interdisciplinary Research, Inc., , 40 p. (ISBN 0-9785881-0-X)
- Dorothy Krell, The California Missions : A Pictorial History, Menlo Park, Sunset Publishing Corporation, (ISBN 0-376-05172-8)
- Alfred L. Kroeber, « The Religion of the Indians of California », University of California Publications in American Archaeology and Ethnology, vol. 4, no 6,‎ , p. 318–356
- Alfred L. Kroeber, « A Mission Record of the California Indians », University of California Publications in American Archaeology and Ethnology, vol. 8, no 1,‎ , p. 1–27
- Alfred L. Kroeber, Handbook of the Indians of California, New York, Dover Publications,
- Roger W. Jones, California from the Conquistadores to the Legends of Laguna, Laguna Hills, Rockledge Enterprises,
- Randy Leffingwell, California Missions and Presidios : The History & Beauty of the Spanish Missions, Stillwater, Voyageur Press, Inc., (ISBN 0-89658-492-5)
- McGroarty, John Steven, « The Mission Play », Western Washington University (consulté en )
- « Mission San Juan Capistrano », San Juan Capistrano Historical Society (consulté en )
- Rexford Newcomb, The Franciscan Mission Architecture of Alta California, New York, Dover Publications, , 74 p. (ISBN 0-486-21740-X)
- Joshua Paddison, A World Transformed : Prénom1hand Accounts of California Before the Gold Rush, Berkeley, Heyday Books, , 344 p. (ISBN 1-890771-13-9)
- Stephen O'Neil, The Acjachemen in the Franciscan Mission System : Demographic Collapse and Social Change (Master's thesis), Department of Anthropology, California State University, Fullerton,
- St. John O'Sullivan, Little Chapters about San Juan Capistrano, inconnu,
- « Peppertree Schinus molle », National Register of Big Trees (consulté en )
- W.W. Robinson, Land in California, Berkeley, Los Angeles, University of California Press,
- Terry Ruscin, Mission Memoirs, San Diego, Sunbelt Publications, (ISBN 0-932653-30-8)
- Marah Ellis Ryan, For the Soul of San Rafael, Chicago, A.C. McClurg & Co.,
- Charles Francis Saunders et J.J. Smeaton Chase, The California Padres and Their Missions, Boston, New York, Houghton Mifflin,
- « Schinus molle », National Register of Big Trees (consulté en )
- Philip Stedman Sparkman, « The Culture of the Luiseño Indians », University of California Publications in American Archaeology and Ethnology, vol. 8, no 4,‎ , p. 187–234
- Jean Stern et Gerald J. Miller, Romance of the Bells : The California Missions in Art, Irvine, The Irvine Museum, (ISBN 0-9635468-5-6)
- Ralph B. Wright, California's Missions, Arroyo Grande, Hubert A. and Martha H. Lowman,
- Bill Yenne, The Missions of California, San Diego, Thunder Bay Press, , 191 p. (ISBN 1-59223-319-8)
- Stanley Young et Melba Levick, The Missions of California, San Francisco, Chronicle Books LLC, (ISBN 0-8118-3694-0)