Mazet
Un mazet, ou maset, est une petite construction rurale à pièce unique, en maçonnerie liée (enduite ou non de mortier) et à couverture de tuiles, que l'on rencontre dans le Languedoc et notamment dans les départements du Gard, de l'Ardèche et de l'Hérault, où elle servait autrefois de maisonnette dominicale aux petites gens des bourgs et des villes.
Origine du terme
Ce terme, diminutif en languedocien de mas (« ferme », « mas »), est aujourd'hui figé dans la littérature touristique ou immobilière régionale dans l'acception de maisonnette champêtre, mais il a eu jadis un emploi plus lâche : il désignait ainsi la cabane de pierre sèche à La Vacquerie-et-Saint-Martin-de-Castries dans l'Hérault, une façon de dire que la cabane est, tout comme le maset, une habitation temporaire ou saisonnière[1].
Utilisation
Le maset était au XIXe siècle l’« auxiliaire indispensable du travail agricole » dans les zones d’habitat groupé (les villages) mais aussi dans celles d’habitat dispersé (les mas). Les parcelles cultivées éloignées justifiaient la présence d’un maset pour ranger les outils, abriter temporairement les hommes et bêtes en cas d’orage, serrer provisoirement la récolte[1].
Ces petites constructions étaient, en général, très prisées en fin de semaine pour quelque partie de campagne en famille ou entre amis et voisins à la fin du XIXe siècle et au début du XXe[2].
Masets de l'Uzège
Plans
La plupart des masets rencontrés en Uzège sont des bâtiments à pièce unique, de plan rectangulaire ou carré. Certains possèdent un étage avec plancher. La toiture est souvent à deux pentes, mais il existe des toitures à une pente, voire, plus rarement, à quatre pentes (ou en pavillon). Les dimensions varient d’un maset à l’autre. Elles sont au sol de 3,50 m sur 3,75 m pour les plus petits et 5 m sur 6 m pour les plus grands, avec une hauteur estimée variant entre 3,50 m et 6,50 m. Les ouvertures sont l’entrée (munie d’une porte cloutée, en larges planches) et les fenestrons. Elles regardent principalement le sud, plutôt que le nord à cause du vent. Elles peuvent se trouver aussi bien en pignon qu’en gouttereau, selon la situation de l’édifice par rapport au terrain et au sud[3].
Charpentes et couverture
Sur les masets à toiture à deux pentes, la charpente se réduit à une panne faîtière et, si la profondeur l’exige, à deux pannes intermédiaires en plus de la panne faîtière. La majeure partie des masets ont leur toiture recouverte de tuiles canal. Quelques-uns ont un toit de tuiles mécaniques. Dans la plupart des cas, les tuiles sont posées sur des chevrons rapprochés. Quelquefois, des voliges s’interposent entre chevrons et tuiles pour assurer l’étanchéité à la poussière. Très rarement, des carreaux de terre cuites (ou parefeuilles) jouent ce même rôle. De grosses pierres posées tout au long des rives et des rampants servent de protection contre le Mistral. Pour protéger les rampants des pignons, les couvreurs font déborder légèrement la rangée de tuiles canal qui les borde. Signe du rang social et économique du propriétaire, une génoise de deux ou trois rangs de tuiles canal vient orner le haut des gouttereaux (voir aussi des pignons dans de rares cas) de certains masets. Ce dispositif assure l’étanchéité contre la pluie, la neige et le vent entre le haut du mur et les tuiles canal[3].
Maçonnerie
Le matériau des murs est constitué par des moellons calcaires d’origine locale : calcaire dur blanc ou gris, calcaire coquillier et calcaire gréseux. La pierre de taille est réservée aux encadrements de baies et aux chaînages d’angle. Sur quelques masets, les parois extérieures sont enduites d’un mortier de chaux puis d’une couche de chaux bien lissée[3].
Ouvertures
Portes et fenêtre sont réparties sur le mur regardant le sud, qu’il soit pignon ou gouttereau. Quelques fenestrons éclairent les autres murs, à l’est ou à l’ouest mais jamais au nord en raison du vent froid. On trouve cependant, dans le mur nord, au niveau du grenier, des couvertures rectangulaires très étroites (pour observer les grives ?). Les encadrements des ouvertures sont en pierres de taille. Le linteau de l’entrée ou des fenestrons peut être protégé par une grande pierre plate ou plusieurs placées côte à côte, en saillie sur le mur, en guise de larmier[3].
Inscriptions
Les linteaux et piédroits des baies portent de nombreuses inscriptions (initiales de noms, dates). L’ensemble des dates désigne la deuxième moitié du XIXe siècle comme l’âge d’or des masets : l’agriculture uzégeoise est alors prospère et le propriétaire de parcelles est alors en mesure de faire la dépense, soit des matériaux dans le cas d’une auto-construction, soit des services d’un maçon dans le cas d’un prix-fait. À l’intérieur de certains masets, des inscriptions indiquent parfois l’état de la récolte d’olives[3].
Eau
Les masets étaient voués à la culture de la vigne et de l’olivier. Pour la culture de la vigne, l’eau sert à faire la bouillie bordelaise pour le sulfatage. D’où les nombreux puits, bassins, citernes rencontrés à l’extérieur, voire à l’intérieur des masets. Les puits proches du maset ou accolés à celui-ci ont une voûte en pierre. Ils sont les plus nombreux là où la nappe phréatique est à 5-6 m de profondeur. Là où l’eau est moins présente, on trouve des citernes alimentées par de petits caniveaux en pierre[3].
Aménagement intérieur
Il se résume à des niches murales et assez souvent à une cheminée dans un angle, un râtelier pour le foin de la jument ou de l’âne, parfois un évier (dit « pile »). La cheminée d’angle a son âtre surélevé par quelques rangées de pierres et son manteau formé d’une grosse pierre ou d’une poutre ancrée dans les murs[3].
Masets de l'Ardèche méridionale
Les masets du sud de l’Ardèche, qu’il ne faut pas confondre avec les grangettes agricoles, sont d’anciennes maisonnettes du dimanche. Ils se rencontrent à proximité des bourgs ou des villes : Les Vans, Joyeuse, Largentière, Aubenas, Villeneuve-de-Berg, Lablachère[4].
Morphologie
Les masets sont le plus souvent de plan rectangulaire, parfois de plan carré. Ils ont un toit à deux pentes (en bâtière), ou à quatre pentes (en pavillon), couvert généralement de tuiles plates mécaniques, avec les arêtiers et les rampants protégés par des tuiles creuses[4].
Murs
Les murs sont toujours crépis au mortier de chaux blanc ou rose et décorés par un enduit ou une peinture à base de colorants minéraux, principalement ocre rouge, ocre orangé. Le décor imite la pierre de taille ou l’appareil de briques. Quand il n’y a pas de génoise, la toiture déborde en périphérie pour protéger l’enduit des murs[4].
Entrée et ouvertures
L’entrée est ménagée en pignon. Des fenestrons ou des oculi laissent entrer le jour à l’intérieur mais parfois on trouve de véritables fenêtres avec des volets de couleur[4].
Aménagement
Il peut y avoir dans le pignon-façade un pigeonnier, reconnaissable à ses trous d’envol. Souvent, une citerne, alimentée par les chéneaux, permet de conserver l’eau de pluie. À l’intérieur, il y a en général un ou plusieurs petits placards réservés dans les parois, une cheminée d’angle à souche extérieure, un plancher en bois servant de grenier. À proximité immédiate, on peut trouver une tonnelle de fer soutenant une treille de vigne, un banc de pierre, et très rarement un puits à margelle[4].
Cadre végétal
Les masets sont entourés d’arbres et de végétaux plantés lors de la construction (sapin, tilleul, voire palmier)[4].
PĂ©riode de construction
D’après les millésimes peints, la nature des matériaux et les enseignements de la tradition orale, leur époque de construction remonte à la première décennie du XXe siècle[4].
Occupants
Ces maisonnettes qu’étaient les masets, sont les ancêtres de la résidence secondaire. Leurs propriétaires, commerçants ou employés des villes, d’origine rurale, y venaient le dimanche, y entretenant une vigne ou un jardin et restant ainsi attachés à leurs racines rurales. Aujourd’hui, les masets les plus proches des villes ont été absorbés par l’urbanisation, ainsi à Aubenas. Leur abandon, le manque d’entretien, la pousse de la végétation les conduisent à la ruine[4].
Devenir
Nombre de masets ont été transformés en résidences secondaires, devenant illisibles en tant que masets, mais surtout, depuis une dizaine d’années, nombre d'entre eux ont été entièrement démontés pour approvisionner des bâtiments neufs[1].
Une réplique de maset classique avec sa treille a été construite par le peintre Jean-Marie Barre en 2003-2004 sur l'aire d'Ambrussum en bordure de l'autoroute A9[5].
Bibliographie
- Émile Causse, Physiologie du mazet ou aperçu du mazet au point de vue philosophique, Clavel-Ballivet, Nîmes, 1862, 24 p.
- Ernest Sarran d'Allard, Les mazets nîmois, dans Revue du Midi, t. 13, 1898, No 4, p. 314-334, No 5, p. 382-399, No 6, p. 484-512
- Jules Igolen, Nîmes, la garrigue et les mazets, les sept collines, les anciennes fortifications, Chastanier, Nîmes, 1936, 163 p.
- Monique Bernat, Un maset en pierre sèche dans la garrigue nîmoise, dans Connaissance du pays d'oc, No 41, janvier-, p. 62-66
- Josette Jardin, Les capitelles et masets du quartier de Villeverte III sont sauvés !, in Maisons paysannes de France, 1980, No 2, p. 18-20
- André Cablat, Les cabanes de défricheurs du Larzac héraultais (baracous, caselles, masets, baumas), in L'architecture vernaculaire rurale, t. 4, 1980, p. 85-93
- Michel Rouvière, Les masets [en Ardèche], in Revue de la Société des enfants et amis de Villeneuve-de-Berg, 53e année, n. s., No 49, 1993, p. 31-38
- Nicole Jourdan, Paulette Carrique, Christiane Chabert (aidée de Marie Baron), Mazets en Uzège (Le patrimoine des hommes du terroir), cahier No 1 de Histoire et civilisation de l'Uzège, 2007, 48 p.
- Pascale Parat-Bezard, Le maset : phénomène social nimois au XIXe siècle et jusqu'aux alentours de 1930, in Collectif des Garrigues, Atlas des Garrigues, regards croisés, , p. 306-307
Notes et références
- Compte rendu de Nicole Jourdan, Paulette Carrique, Christiane Chabert (aidée de Marie Baron), Mazets en Uzège (Le patrimoine des hommes du terroir), cahier No 1 de Histoire et civilisation de l'Uzège, 2007, 48 p., sur pierreseche.com.
- Cabanes en pierres sèches et photos privées de la 1re moitié du XXe siècle, pierreseche.com, 24 novembre 2003 : « À une époque de mobilité moins grande qu'aujourd'hui, les petits édifices champêtres – cabanes, cabanons, maisonnettes des champs, vide-bouteilles, grangettes, masets, etc. – constituaient souvent pour leurs propriétaires citadins un but de promenade, voire une retraite dominicale. »
- Nicole Jourdan, Paulette Carrique, Christiane Chabert (aidée de Marie Baron), Mazets en Uzège (Le patrimoine des hommes du terroir), cahier No 1 de Histoire et civilisation de l'Uzège, 2007, 48 p.
- Michel Rouvière, Les masets [en Ardèche], in Revue de la Société des enfants et amis de Villeneuve-de-Berg, 53e année, n. s., No 49, 1993, p. 31-38.
- Jean-Marie Barre, Construction d'une capitelle dans la région de Lunel (Hérault), pierreseche.com, 1er mai 2009 (photos en début et fin d'article).