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Maud Maloney Watt

Maud Watt (née Maud Maloney le en Gaspésie et décédée le à Ottawa) est une exploratrice canadienne et la première femme garde-chasse du Québec[1]. Elle est une pionnière de la protection des milieux naturels au Québec, sa cause première étant la protection des populations de castors[2]. On lui attribue le surnom « l’ange de la baie d’Hudson »[3].

Maud Maloney Watt
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  92 ans)
Ottawa
Nom de naissance
Maud Maloney
Nationalité
Activités
Autres informations
Distinction
Vue de la sépulture.

Biographie

Jeunesse et mariage

Née en Gaspésie en 1894, elle est la dixième d'une famille de quatorze enfants[1]. En 1915, elle épouse l'Écossais James S.C. Watt (parfois surnommé Jim ou Jimmy), commis et traiteur pour la Compagnie de la Baie d’Hudson[1]. Elle a deux enfants de ce mariage, Jacqueline et Hugo, et adopte quatre enfants autochtones, Sydney, Gertie, Janie et Alice[4] - [5].

Fort Chimo

Maud et James Watt sont placés à Fort Chimo (aujourd’hui Kuujjuaq)[6] en 1915. L’endroit est à l’époque très isolé ayant pour seul contact avec le reste du monde la visite annuelle du navire d'approvisionnement Naskopie[2]. Les conditions de vie difficiles soudent la communauté, et Maud Watt est reconnue comme une personne accueillante qui ouvre les portes de sa maison à qui en a besoin, faisant de chez elle un point de rencontre pour les Cris, Innus et Inuit[2].

Traversée

Ă€ l’étĂ© 1917, le Naskopie ne fait pas d’apparition Ă  Fort Chimo.  Le chef de district avait prĂ©cĂ©demment averti les Watt que la guerre avait une incidence sur les voyages du bateau. Sans communication, il Ă©tait impossible de savoir quand un autre bateau serait de passage. Voyant leurs provisions diminuer, les Watt s’organisent pour trouver un autre moyen d'approvisionnement via la route terrestre.

Ils entament, le , un périple vers le fleuve Saint-Laurent qui dura 55 jours[2] - [7]. Le territoire n’est alors pas cartographié et très peu connu des Blancs. Ils quittent Fort Chimo avec un traîneau tiré par des chiens, chargé d’un canot et de matériel. Ils mettent le cap sur Fort McKenzie[6]. Arrivés sur place, ils rencontrent des familles autochtones qui se dirigent également vers le sud. Ces familles seront leurs guides pour le reste du voyage.

Le groupe suit la rivière Swampy Bay pour arriver au lac Petitsikapau situé au Labrador le 9 mai 1918. Ils se réfugient au Fort Nascopi[8], site abandonné de la Compagnie de la Baie d’Hudson. En plus du risque d’engelures, la faim devient une constante préoccupation avec la baisse des réserves de nourriture. Le groupe continue sa route sur la rivière Aswanipi pour atteindre la rivière Moisie, mais l’arrivée du printemps fragilise la glace. Ils sont obligés de longer la rive pendant un moment. Une fois la glace fondue, ils abandonnent les traîneaux et continuent en canot sur la rivière Moisie pour atteindre Sept-Îles.

Maud Watt est la première femme blanche à effectuer ce trajet[1] - [9].

Fort Rupert

En 1920, James est affectĂ© comme postier au Fort Rupert (aujourd’hui Waskaganish)[6] pour la Compagnie de la Baie d'Hudson[2]. Le couple ne retournera donc pas Ă  Fort-Chimo. Leur arrivĂ©e coĂŻncide avec la hausse de la popularitĂ© des fourrures dans les annĂ©es 1920[2] - [10]. La traite des fourrures s'intensifie au dĂ©triment des populations de castors de la rĂ©gion. En 1920, 2 000 peaux de castor sont enregistrĂ©es au poste.

Ă€ l’hiver 1928-1929, après une dĂ©cennie de trappe intense, seulement 4 peaux de castor sont apportĂ©es au poste[2]. La traite des fourrures Ă©tant en place depuis plusieurs annĂ©es, les Cris sont rendus dĂ©pendants de ce système pour obtenir des denrĂ©es et du matĂ©riel. En plus d’être coupĂ©s de ces revenus, les Cris ne peuvent plus subvenir Ă  leur besoin alimentaire via la chasse du castor[2] - [11] - [12]. Voyant les Cris gravement affectĂ©s par la faim, James donne du crĂ©dit faisant perdre de l’argent Ă  la Compagnie de la Baie d'Hudson et risque de perdre son emploi. Les Watt nourrissent les Cris avec de leurs propres rĂ©serves[2] - [12]. MalgrĂ© tout, plusieurs personnes meurent[2]. En 1930, deux huttes de castor sont dĂ©couvertes. Afin de les protĂ©ger, James Watt offre de les acheter avec son argent[11]. Il reçoit le support des Cris dans sa dĂ©marche, mais ceux-ci pointent le fait que, par le passĂ©, des trappeurs venus de l’extĂ©rieur trappaient sans respecter les règles locales[2]. Les Watt font une requĂŞte au gouvernement du QuĂ©bec pour contrĂ´ler la population de castors dans la rĂ©gion. Ils veulent crĂ©er une zone de protection contrĂ´lĂ©e.

À l’hiver 1930, il est décidé que Maud Watt se rendra à Québec pour négocier une entente étant la seule du couple à parler français. Elle quitte Fort Rupert avec ses deux enfants de 3 et 6 ans pour se rendre à Moose Factory en traîneau à chiens[2]. Le groupe se rend jusqu’au campement ferroviaire de la Temiskaming and Northern Ontario Railway et de là prend le train vers Québec[11]. Maud convainc le sous-ministre de la colonisation Louis-Arthur Richard de la pertinence de son projet et ce dernier persuade le premier ministre du Québec Louis-Alexandre Taschereau de lui accorder le contrôle du castor dans la région[11] - [2].

Maud retourne Ă  Fort Rupert avec en main un acte de concession crĂ©ant une rĂ©serve de plus de 18 600 km2 entre les rivières Rupert et Eastmain allant de la Baie jusqu’au lac Nemiscau[2] - [11]. Afin d’éviter des reprĂ©sailles de la Compagnie de la Baie d'Hudson qui voyait cette protection comme une atteinte Ă  leur monopole, la zone de prĂ©servation est enregistrĂ©e sous le nom de Maud et non sous celui de James, employĂ© de la compagnie[2]. Elle devient la gardienne de la rĂ©serve, elle est donc la première femme garde-chasse du QuĂ©bec[1]. Après quelques annĂ©es, les Watt cèdent une partie de la gestion de la zone Ă  la Compagnie de la Baie d'Hudson voyant qu’ils ne pouvaient pas assumer toutes les responsabilitĂ©s financières[11] - [2]. La trappe du castor cesse complètement dans la rĂ©gion pendant quelques annĂ©es pour permettre la rĂ©gĂ©nĂ©rescence de l'espèce. Les communautĂ©s Cris de la rĂ©gion sont affectĂ©es par ces mesures, mais les effets bĂ©nĂ©fiques sur les populations de castors sont observables[11]. La trappe reprend en 1940 oĂą le nombre de bĂŞtes capturĂ©es est limitĂ© Ă  450. En 1944, on retrouve plus de 13 000 castors dans la rĂ©gion[2] - [11].

James Watt meurt subitement d’une grippe à Fort Rupert en 1944. À la suite de la mort de son mari, Maud Watt devient boulangère, le pain étant un aliment lui ayant manqué dans le Nord. Elle fait construire un centre communautaire à Fort Rupert et continue de travailler à rendre accessibles l'instruction et les soins de santé dans le Grand Nord[1].

Fin de vie

Maud Watt déménage à Winnipeg en 1977 pour être auprès de sa fille Jacqueline, qui décède d’un cancer peu de temps après. Maud Watt demeure à Winnipeg auprès de ses trois petits-enfants et de son gendre[1]. Elle meurt à Ottawa le , à l’âge de 93 ans. Elle est inhumée à Waskaganish.

Reconnaissances

Elle est la première femme admise au Beaver Club en 1961[4].

Elle devient Officière de l’Ordre du Canada le 31 mars 1971[1] - [13] - [14].

HĂ©ritage

Le succès de la zone protĂ©gĂ©e de Fort Rupert encourage les autoritĂ©s Ă  rĂ©pĂ©ter le mĂŞme modèle sur d'autres territoires au QuĂ©bec, sur les Territoires du Nord-Ouest et en Ontario. En 1944, la Compagnie de la Baie d'Hudson gère des zones de protection qui couvrent plus de 111 300 km2[11]. Au QuĂ©bec, dès 1951, onze aires de conservation du castor totalisent plus de 485 500 km2[11].

D'autres communautés cris demandent des mesures similaires sur leur territoire et des réserves sont créées : La Nottaway en 1938 et La Old Factory en 1941. Des chasseurs cris deviennent garde-chasses. Ils suivent l'évolution des populations de leur territoire et font des rapports sur la trappe effectuée[12].

Dans la culture

Le , une émission de la série De remarquables oubliés, diffusée à la radio de Radio-Canada, est consacrée à Maud Watt[1].

Un chapitre est consacré à sa vie dans le livre Elles ont fait l’Amérique de Marie-Christine Lévesque et Serge Bouchard paru en 2011[15].

Notes et références

  1. « Radio-Canada.ca - Zone Radio - De remarquables oubliés », sur ici.radio-canada.ca (consulté le )
  2. « Angels of Hudson Bay - Ottertooth », sur www.ottertooth.com (consulté le )
  3. (en) William Ashley Anderson, Angel of Hudson Bay : the true story of Maud Watt, New York, , 217 p. (OCLC 1192741, LCCN 61006007)
  4. « Première femme admise dans le Beaver Club », Le Soleil,‎ , p. 7 (lire en ligne)
  5. Nicole Mongeau, « Maud Watt, à juste titre "l'Ange de l'Arctique" », La Presse,‎ (lire en ligne)
  6. (en) Author's Name, « Québec | HBC Fur Trade Post Map | Hudson's Bay Company Archives | Archives of Manitoba », sur www.gov.mb.ca (consulté le )
  7. (en-US) FRED BODSWORTH, « How Jimmy Watt saved his Crees | Maclean's | OCTOBER 27 1956 », sur Maclean's | The Complete Archive (consulté le )
  8. (en) Author's Name, « Newfoundland and Labrador | HBC Fur Trade Post Map | Hudson's Bay Company Archives | Archives of Manitoba », sur www.gov.mb.ca (consulté le )
  9. Raymond Gagné, « La canalisation de la rivière Duberger bientôt terminée au jardin zoologique », Le Soleil,‎ , cahier A (lire en ligne)
  10. « 1920s Coats, Furs, Jackets and Capes History », sur vintagedancer.com (consulté le )
  11. « HBC Heritage — James et Maud Watt », sur www.patrimoinehbc.ca (consulté le )
  12. (en-US) « Beaver reserves », sur Cree Nation of Waskaganish (consulté le )
  13. « Maud H. Watt, O.C. », sur Order du Canada, (consulté le )
  14. Office of the Secretary to the Governor General, « Mme. Maud H. Watt », sur La gouverneure générale du Canada (consulté le )
  15. Marie-Christine Lévesque et Serge Bouchard, Elles ont fait l'Amérique, Montréal, Lux éditeur, , 448 p. (ISBN 978-2-895-96097-3)

Voir aussi

Bibliographie

(en) William Ashley Anderson, Angel of Hudson Bay : the true story of Maud Watt, New York, , 217 p. (OCLC 1192741, LCCN 61006007)

Écrits personnels

  • (en) Maud Watt, « Rupert's march of time », The Beaver, vol. 269, no 1,‎ , p. 22-26 (lire en ligne)

Articles connexes

Liens externes

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