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Matra R511

Le missile Matra R511 est un missile air-air à guidage électromagnétique semi-actif conçu par Matra dans les années 1950/1960. Il s'agit du premier missile air-air français opérationnel. Le missile est très vite dépassé en termes de guidage par le Matra R530.

Matra R511
Matra R511
Un R511 conservé par l'Association Ailes Anciennes Toulouse.
Présentation
Type de missile Missile air-air
Constructeur  Matra
DĂ©ploiement 1961-1973
Caractéristiques
Image illustrative de l’article Matra R511
Moteurs Moteur-fusée à propergol solide à 2 étage Hotchkiss-Brandt
Masse au lancement 172 kg[1]
Longueur 3,1 m[1]
Diamètre 263 mm[1]
Envergure 1,0 m[1]
Vitesse Mach 1,8[1]
Portée 7,6 km[1]
Altitude de croisière 18 000 m[1]
Charge utile 25 kg (8kg d'explosif) [1]
Guidage Électromagnétique semi-actif
Plateforme de lancement Vautour IIN
Aquilon
Meteor NF.11
Mirage IIIC

Conception et développement

Un Matra R511.

En 1946, l'armée française passe commande d'études pour des « engins spéciaux » – nom donné à l'époque aux missiles – auprès des différentes entreprises publiques et privés de fabrication d'armement. Ainsi, pour les entreprises publiques, le Service technique de l'aéronautique (STAé) confie à l'Arsenal de l'aéronautique l'étude des missiles air-air, air-sol, antichar et d'engins-cibles tandis que la SNCAC-SNCASE se voit confier la responsabilité des missiles sol-sol et sol-air. Côté entreprises privées, Matra doit étudier les missiles air-air, air-sol et sol-air, et Études et constructions aéronautique (ECA), les engins-cibles[2].

Le but de ces études est alors de doter la France de moyens de lutte contre les bombardiers soviétiques. Pour ce faire, deux types de missiles sont développés : les missiles sol-air pour l'interception à longue et moyenne portée et les missiles air-air pour l'attaque à courte portée. Matra et Arsenal de l'aéronautique choisissent alors deux voies de développement différentes. Arsenal de l'aéronautique, se basant sur les technologies issues des recherches allemandes de la Seconde Guerre mondiale, privilégie le téléguidage[3] du missile depuis le poste de pilotage du chasseur. Cette méthode a pour avantage d'être rapidement opérationnelle mais présente le défaut de compliquer la tâche du pilote et d'être moins réactive, son avenir à terme est donc limité. De son côté, Matra opte pour la solution des autodirecteurs, libérant ainsi le pilote de cette tâche. Cette solution, bien que prometteuse, implique de développer des techniques encore inconnues et donc forcement plus longue à mettre en service[3].

Les missiles Ă©tant un domaine nouveau pour Matra, celle-ci se lance en 1949[3] dans la conception de deux prototypes pour dĂ©finir la forme aĂ©rodynamique la plus adaptĂ©e[4]. Ceux-ci sont baptisĂ©s R051 et R052 selon la nomenclature Ă©tablie par Roger Robert, le directeur technique de Matra : « R0 » indiquant un missile expĂ©rimental[5]. Les deux missiles ont un diamètre de 280 mm et une masse de 180 kg[4]. Le R051 est Ă©quipĂ© d'une aile delta et d'un plan canard Ă  l'avant[3], tandis que le R052 reçoit un empennage cruciforme[6]. Les deux prototypes subissent d'abord des essais en soufflerie puis des essais en vol[4]. Ces essais conduisent Matra Ă  adopter la solution du R051 car considĂ©rĂ© comme Ă©tant dotĂ© de la meilleure configuration aĂ©rodynamique pour le passage du rĂ©gime transsonique et pour sa facilitĂ© d'intĂ©gration sous avion[6]. Le premier tir d'un missile inerte a lieu en 1951[4] - [3]. Ces essais en vol permettent Ă  Matra d'amĂ©liorer sa connaissance des lois aĂ©rodynamiques et des technologies de pilotage, ils permettent aussi de choisir le motoriste : Hotchkiss-Brandt qui dĂ©veloppe le moteur-fusĂ©e Ă  propergol solide Ă  deux Ă©tages[4]. Ce moteur est constituĂ© d'un accĂ©lĂ©rateur produisant 1 588 kg de poussĂ©e pendant 3 secondes et puis un second Ă©tage propulse le missile pendant 13,5 secondes en dĂ©livrant une poussĂ©e de 181 kg[1].

En , le premier tir d'un R051 dotĂ© d'un autodirecteur optique Drivomatic H01 produit par Thomson a lieu Ă  Colomb-BĂ©char, il s'agit du premier tir d'un missile français autoguidĂ©[7]. Le tir est considĂ©rĂ© comme un succès le missile rĂ©ussissant Ă  suivre sa cible – le soleil levant[6] – pendant environ 30 secondes[7]. En 1953, après 4 ans d'Ă©tude et de mise au point, il est considĂ©rĂ© comme opĂ©rationnel, et est redĂ©signĂ© R510[8] – toujours selon la nomenclature Matra, « R5 » indique un missile air-air[N 1], le « 1 » la première gĂ©nĂ©ration, et le « 0 » la variante[5]. Les essais continuent et dĂ©but 1956 l'armĂ©e de l'air passe commande de 100 R510 de sĂ©rie pour tester les compĂ©tences industrielles de Matra[7]. Cette production de sĂ©rie est un vrai dĂ©fi pour l'entreprise, celle-ci n'ayant aucune expĂ©rience de la production de missiles en sĂ©rie ; les missiles assemblĂ©s jusqu'alors Ă©taient des prototypes mis au point jusqu'au dernier moment, il faut maintenant passer Ă  une production de sĂ©rie qui ne permet plus ces changements de dernière minute. Les missiles sont alors assemblĂ©s dans l'usine rue d'Aguesseau Ă  Boulogne-Billancourt[7].

Le R510 avec son aile delta et son plan canard et a un pilotage de type « twist and steer » ; il utilise ses gouvernes « canard » pour le contrĂ´le en tangage et la dĂ©rive ventrale pour la stabilisation en lacet et l'orientation en roulis[6]. Le missile est guidĂ© sur une courbe de poursuite dans le secteur arrière de l'objectif. Une fusĂ©e de proximitĂ© fonctionnant par radar, fabriquĂ©e par Thomson, met Ă  feu de la charge Ă  fragmentation de 25 kg dès que le missile est assez proche de sa cible[7].

Matra dĂ©veloppe ensuite un autre missile Ă  guidage par radar semi-actif basĂ© sur le R510/R051 mais d'un diamètre lĂ©gèrement infĂ©rieur (263 mm) et plus lĂ©ger. En effet le principal dĂ©faut du R510 est de ne pouvoir ĂŞtre utilisĂ© que de jour et par temps clair pour que l'autodirecteur optique puisse identifier sa cible[3]. Au printemps 1956, une maquette aĂ©rodynamique du R511 est tirĂ©e puis Ă  la fin de l'annĂ©e a lieu le premier tir d'un R511 dotĂ© de son autodirecteur Ă©lectromagnĂ©tique semi-actif Thomson-Houston. Les essais sont effectuĂ©s par le CEV Ă  partir de Meteor NF.11[9] et le missile abat sa première cible CT.20 en 1959. Ce nouveau capteur permet l'utilisation du missile par tous temps et de nuit[7]. Parallèlement, Matra Ă©tudie une version Ă  guidage infrarouge du R511 dont l'Ă©tude lui a Ă©tĂ© commandĂ©e par le STAĂ©. Le capteur est fabriquĂ© par la sociĂ©tĂ© Turck (absorbĂ© en 1957 par la SociĂ©tĂ© anonyme de tĂ©lĂ©communication devenue Sagem). L'autodirecteur infrarouge est d'abord montĂ© sur le R051 de 1956 Ă  1957 puis sur le R511[9]. Les essais de ce système de guidage permettent de dĂ©terminer qu'il ne peut ĂŞtre utilisĂ© que de nuit[6] - [1] et seulement par temps clair, les recherches sont donc arrĂŞtĂ©es en 1958 au profit de la version Ă  guidage radar plus polyvalente[9].

Le R511 EM correspondant mieux aux besoins de l'armée française, il est commandé en 1958 à 900 exemplaires pour équiper les Vautour IIN, les Mirage IIIC et les Aquilon[10], il devait aussi équiper le chasseur SE.212 Durandal mais son développement fut stoppé. Les missiles sont fabriqués à l'usine de Salbris de 1961 à 1966[10]. Ce missile n'est qu'une solution provisoire car l'arrivée du Mirage IIIC en 1957 avec son radar Cyrano plus performant que le CSF DRAC-32A du Vautour IIN ne permet pas d'utiliser les pleines capacités du radar et ses performances sont insuffisantes vis-à-vis des productions étrangères[11]. Il reste opérationnel jusqu'en 1964 dans l'armée de l’air et jusqu'en 1973 dans l'aéronavale avant d'être remplacé par le R530 lui aussi conçu par Matra[9].

Notes et références

Notes
  1. R1 pour un avion, R4 pour un missile sol-air, R5 pour un missile air-air, R6 pour un missile air-sol
Références

Bibliographie

  • Patrick GuĂ©rin et GĂ©rard Maoui, Le Ciel en hĂ©ritage : Un siècle d'industrie aĂ©ronautique et spatiale française, Paris, le cherche midi, coll. « Ciels du monde », , 287 p. (ISBN 2-86274-877-3)
  • Claude Carlier, Matra la volontĂ© d'entreprendre, Paris, Éditions du ChĂŞne, , 302 p. (ISBN 2-84277-484-1)
  • Guillaume Belan et Patrick Mercillon, 1945-2005 : La Saga des missiles europĂ©ens, Paris, Editions TTU, (lire en ligne)
  • (en) « Missiles and spaceflight : Engins Matra », Flight, vol. 78, no 2684,‎ , p. 243 (lire en ligne [PDF], consultĂ© le )
  • (en) « Missiles 1960 : Air-to-Air Missiles », Flight, vol. 78, no 2695 « Special issue : Missiles »,‎ , p. 731-732 (lire en ligne [PDF])
  • Les missiles tactiques de 1945 Ă  2000, Association AVAS (lire en ligne)

Voir aussi

Liens internes

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