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Massacres de Signes

Les massacres de Signes sont des épisodes de la Résistance en France pendant la Seconde Guerre mondiale, au cours desquels trente-sept résistants français et un officier américain sont fusillés par l'armée allemande, les et à Signes, dans le Var. Le charnier de Signes est découvert en septembre 1944 dans un vallon entre Le Camp et Signes. Il est depuis un lieu de mémoire.

Lieu situé sur la commune de Signes dans le Var où 38 résistants furent fusillés par les troupes allemandes d'occupation les 18 juillet et 12 août 1944.
Le Vallon des fusillés-1
Le Vallon des fusillés-2
Le Vallon des fusillés-3

Déroulement des exécutions

Ces résistants sont principalement de Marseille mais aussi des Basses-Alpes (aujourd'hui Alpes-de-Haute-Provence), pour la plupart membres du comité départemental de libération (capturés le lors du guet-apens d'Oraison) ou du Var, la plupart responsables régionaux. Ils ont été arrêtés, puis emprisonnés et horriblement torturés au 425 rue Paradis, siège de la Sipo-SD (Gestapo) de Marseille, avant d'être amenés dans ce vallon, devenu le Vallon des Martyrs. Après un simulacre de jugement, ils sont fusillés, vingt-neuf le et enfouis sur place, et neuf le . Les corps sont ramenés plus tard à Marseille et inhumés au cimetière Saint-Pierre.

DĂ©couverte du charnier de Signes

TĂ©moignages

L'existence du charnier a pu ĂŞtre connue par plusieurs sources :

  • les rĂ©vĂ©lations que Ernest Quirot (Max Landry dans la RĂ©sistance)[1], le seul rescapĂ© de Signes, confie aux membres du Groupe Franc qui l'avait fait Ă©vader de l'hĂ´pital Salvator le , rĂ©vĂ©lations qu'il confirme dans sa dĂ©claration Ă  la police du de la mĂŞme annĂ©e, Ă  la suite de la commission rogatoire dĂ©livrĂ©e par le juge d’instruction Bouquier du tribunal de Marseille ;
  • le tĂ©moignage du jeune bĂ»cheron de Cuges-les-Pins, Maurice Percivalle, qui se trouve dans les parages du lieu du drame le . Avant d'ĂŞtre chassĂ© par un soldat allemand, il a aperçu les rĂ©sistants, certains grièvement blessĂ©s, creuser en chantant la Marseillaise la fosse destinĂ©e Ă  les enterrer. TerrorisĂ© par ce qu'il a vu, il garde d'abord le silence puis a, avec la LibĂ©ration, le courage de parler et de mener les enquĂŞteurs jusqu'Ă  l'endroit exact du charnier.
  • les deux rapports secrets de la SIPO-SD de Marseille signĂ©s par Ernst Dunker et retrouvĂ©s après la LibĂ©ration : le rapport Catilina[2] du qui mentionne le nom d'un rĂ©sistant exĂ©cutĂ© Ă  Signes et le rapport Antoine[3] du qui en cite 24 autres. On apprend dans ces rapports que les arrestations des 25 rĂ©sistants sont la consĂ©quence de la trahison de Maurice Seignon de Possel-Deydier, alias NoĂ«l dans la RĂ©sistance, devenu l'agent Érick dans la Gestapo[4]. Albert Chabanon aurait Ă©tĂ©, comme Ernest Quirot, victime d'un piège tendu par Edward Desdemaines, alias Hugon[5].

Reconnaissance des corps

Ce sont des prisonniers allemands regroupés au Camp du Coulin (Gémenos) qui sont contraints de déterrer les cadavres sous la surveillance des FFI. Les médecins légistes commis aux fins d'autopsie concluent à un abominable carnage. Deux des victimes ont reçu des balles dans la tête mais, enterrés encore vivants, leur mort est due à l'asphyxie. Trois sont morts par fracture du crâne, consécutive à un enfoncement par un instrument contondant ; un mort par strangulation. Un a reçu une balle dans la nuque. Un a reçu une balle dans le dos. Cinq ont été tués par des balles tirées dans la tête, mais de face ; vingt-cinq dont la mort a été provoquée par éclatement du crâne (Hypothèse : rafale de mitraillette à bout portant tirée sur le côté droit de la tête, qui a provoqué un éclatement du crâne). La reconnaissance des corps fut rendue très difficile à cause de la chaux que les Allemands avaient versée sur les visages des fusillés pour leur enlever toute identité[1] ; quatre d'entre eux n'ont pas été identifiés.

Hommages

Cérémonies

Des obsèques nationales eurent lieu le au cimetière Saint-Pierre de Marseille en présence du commissaire régional Raymond Aubrac, pour les neuf fusillés dont les corps avaient été ramenés à Marseille. Puis les corps furent remis à la disposition des familles qui désiraient les inhumer dans leur caveau familial.

Chaque année, une cérémonie commémorative se déroule le au Charnier de Signes.

NĂ©cropole nationale

Le charnier de Signes est désormais une nécropole nationale dont le chemin est indiqué sur la route départementale 2 par un monolithe revêtu d'une plaque commémorative sur laquelle on peut lire « Aux héros et martyrs de la Résistance, tombés pour la libération dans ce vallon en juillet- ». Sur le lieu du charnier, se trouvent les plaques nominatives en marbre des fusillés, une croix de Lorraine et un autel sur lequel est apposée une plaque indiquant que sous l'autel « un coffre renferme les ossements des fusillés ».

Liste des fusillés de Signes

Fusillés du 18 juillet

  • Marcel AndrĂ©, 44 ans, Sigonce, directeur d’école, membre du ComitĂ© dĂ©partemental de LibĂ©ration (CDL) des Basses Alpes au titre de la CGT
  • AndrĂ© Aune, « Berthier », « Marceau », 45 ans, Marseille, courtier, chef de l’ArmĂ©e secrète (AS) des Bouches-du-RhĂ´ne
  • Georges BarthĂ©lemy, 38 ans, Marseille, responsable AS et mouvement LibĂ©ration
  • Lucien BarthĂ©lemy, 41 ans, frère de Georges, Marseille[Notes 1]
  • Charles Boyer, « CĂ©sar », 60 ans, Marseille, ancien conseiller gĂ©nĂ©ral radical-socialiste d’Aups, docteur en droit, nĂ©gociant, membre du rĂ©seau La France au Combat
  • Albert Chabanon, « Valmy », 29 ans, Marseille, professeur (École normale supĂ©rieure), responsable de l’Organisation Universitaire des Mouvements unis de la RĂ©sistance (MUR)
  • Henri Chanay, « commandant Manuel », « Grand Michel », 31 ans, officier parachutĂ©, chef de la mission interalliĂ©e
  • Roger Chaudon, 36 ans, Oraison, directeur de coopĂ©rative, responsable local des parachutages
  • Georges Cisson, « Dubosc », « Roumi », 34 ans, les Arcs, ingĂ©nieur des Ponts et ChaussĂ©es, chef rĂ©gional LibĂ©ration et NAP en R2[Notes 2], responsable de la publication du journal des Mouvements Unis de RĂ©sistance (MUR) de R2 (Provence Libre)
  • Paul Codaccioni, « Kodak », 56 ans, Marseille, contrĂ´leur principal des PTT, responsable du service des liaisons tĂ©lĂ©phoniques et tĂ©lĂ©graphiques de la rĂ©sistance en R2
  • François Cuzin, « Étienne », 30 ans, Toulon/Digne, professeur agrĂ©gĂ© de philosophie (Ă©cole normale supĂ©rieure), chef du service de renseignements des MUR des Basses-Alpes, membre du CDL
  • Docteur AndrĂ© Daumas, 44 ans, Oraison
  • Jean-Pierre Dubois, « Allain », 49 ans, Marseille, membre des MUR
  • Docteur LĂ©on Dulcy, 33 ans, Bras-d’Asse, membre du Special Operations Executive (SOE) britannique des Basses-Alpes
  • Guy Fabre, « Berger », 20 ans, Marseille, Ă©tudiant Ă  l'Ă©cole de navigation, un des animateurs de la presse clandestine du M.L.N et responsable militaire des jeunes Ă©tudiants du M.L.N., adjoint de Valmy
  • Maurice Favier, « Élan », 27 ans, membre du CDL des Basses-Alpes
  • Émile Latil, Sisteron, membre du CDL des Basses-Alpes
  • Jean Lestrade, « Chac », 20 ans, Marseille, Ă©tudiant, agent de liaison de l’Organisation Universitaire[Notes 3]
  • Maurice Levy, 32 ans, NĂ®mes, membre des services de renseignements amĂ©ricains
  • RenĂ© Mariani, « Gaillard », 23 ans, Marseille, Ă©tudiant, responsable adjoint de l’Organisation Universitaire
  • Louis Martin-Bret, « Michel », 46 ans, Manosque, ancien conseiller gĂ©nĂ©ral socialiste, directeur des silos et coopĂ©ratives du dĂ©partement, chef des MUR des Basses-Alpes, prĂ©sident du CDL
  • Jules Moulet, « Bernard », 45 ans, entrepreneur, chef NAP des Bouches-du-RhĂ´ne
  • Jean Piquemal, « Jacqueine », 40 ans, Draguignan/Digne, infirmier, chef adjoint des MUR, membre du CDL des Basses Alpes
  • Terce Rossi, 29 ans, Oraison
  • Robert Rossi, « Levallois », 31 ans, capitaine de l’armĂ©e de l’air, chef rĂ©gional des Forces Françaises de l’IntĂ©rieur (FFI) pour toute la rĂ©gion R2, compagnon de la LibĂ©ration[6]
  • Robert Salom, agent de liaison Francs-Tireurs et Partisans (FTP) des Basses-Alpes
  • trois inconnus[Notes 4].

Fusillés du 12 août 1944

  • Paul Kohler, 44 ans, Marseille, chef mĂ©canicien SNCF
  • Pierre Jean Lafforgue, « Philippe », 26 ans, Marseille, officier des services spĂ©ciaux de renseignements français
  • Jean Libert, « Jourdan », 22 ans, Marseille
  • Muthular d'Erecalde, major « Lucas », 34 ans, officier amĂ©ricain parachutĂ©, membre de la mission interalliĂ©e
  • LĂ©on Pacaud, « Adrien », opĂ©rateur radio parachutĂ©
  • François Pelletier, lieutenant « Ruben », 24 ans, officier parachutĂ©, responsable des liaisons par vedettes Ă  Saint-Tropez
  • Georges Saint-Martin, « Bourrely », 20 ans, Marseille, secrĂ©taire du chef rĂ©gional FFI
  • AndrĂ© Wolf, 44 ans, Lançon, notaire
  • un inconnu

Notes et références

Notes

  1. Louis, frère de Georges et Lucien, avait été abattu par la Gestapo au moment de son arrestation.
  2. La Région 2 de la Résistance comprenait 7 départements : Marseille, le chef-lieu de la région, considéré comme un département à part entière vu son importance, les Bouches-du-Rhône, le Var, les Alpes-Maritimes, le Vaucluse, les Basses-Alpes et les Hautes-Alpes.
  3. Il s'agit bien de Jean Louis Georges Lestrade "Chac", né le 21 mars 1924 à Marseille (voir Robert Mencherini, Midi rouge, ombres et lumières, 3, Résistance et Occupation (1940-1944), Éditions Syllepse, Paris, avril 2011, p. 506, et Adrien Blès, Dictionnaire historique des rues de Marseille, Éditions Jeanne Laffitte, Marseille, 2001, p.267) et non pas de Adolphe-François Lestrade "Vial", né le 20 novembre 1906 à Givors (Rhône), responsable régional de l'Action Ouvrière et responsable départemental des Corps francs de la Libération, toujours en vie à la Libération (voir Baudouin 1962, p. 85).
  4. L'un des inconnus devrait être le capitaine Michel Lancesseur, « Victor », 24 ans, né le 15 janvier 1920, Saint-Cyr (1939-1941, amitié franco-britannique), capitaine de l'infanterie coloniale, membre de la mission interalliée et adjoint du commandant Henri Chanay, arrêté avec ce dernier le 15 juillet 1944 à Marseille. Voir l'article « Signes, haut lieu de la Résistance provençale », sur Var 39-45.

Références

  1. Baudouin 1962, p. 126-131.
  2. Baudouin 1977, p. 520-536.
  3. Baudouin 1977, p. 564-581.
  4. Officier formé aux techniques du sabotage à Blida (Algérie), Maurice Seignon est parachuté en avril 1944 pour être instructeur dans les maquis en vue du débarquement en Provence. Par besoin d'argent, et peut-être aussi parce qu'il considérait que ses compétences n'avaient pas été reconnues, il propose à Ernst Dunker, alias Delage, le chef de la SIPO-SD de Marseille, de lui donner contre trois millions de francs tous les renseignements nécessaires permettant de démanteler les maquis et les réseaux de résistants provençaux. Après l'avoir utilisé et ne lui avoir donné qu'une petite partie de la somme demandée, Dunker-Delage fait exécuter son agent Érick le 7 août 1944 près des (Baumettes).
  5. Baudouin 1962, p. 109.
  6. DĂ©cret du 28 mai 1945

Voir aussi

Bibliographie

  • Madeleine Baudouin, Histoire des Groupes Francs (M.U.R.) des Bouches-du-RhĂ´ne (de septembre 1943 Ă  la LibĂ©ration), Paris, PUF, coll. « Esprit de la RĂ©sistance », .
  • Madeleine Baudouin (3 tomes), TĂ©moins de la RĂ©sistance en R2 : intĂ©rĂŞt du tĂ©moignage en histoire contemporaine (thèse de doctorat d'État), UniversitĂ© de Provence, .
  • Henri Noguères (en collaboration avec Marcel Degliame-FouchĂ©), Histoire de la RĂ©sistance en France, t. 3 : octobre 1943-mai 1944, Robert Laffont, , p. 326-328.
  • Jean-Claude Pouzet, La RĂ©sistance MosaĂŻque, Éditions Jeanne Lafitte, . (ISBN 9782862762111)
  • Nicolas Balique et Vladimir Biaggi, Ernst Dunker, Ă©d.VendĂ©miaire, 2016.

Articles connexes

Liens externes

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