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Marie Vieux-Chauvet

Marie Vieux-Chauvet, née le à Port-au-Prince (Haïti) et morte le à New York (États-Unis), est une femme de lettres, dramaturge et romancière haïtienne. Son roman, Amour, Colère et Folie, est une forte dénonciation du régime Duvalier, qui tente d'en bloquer la diffusion, et des tontons Macoute. Elle est toutefois contrainte de s'exiler en 1968 pour échapper au pouvoir haïtien, et meurt quelques années après son installation à New York.

Marie Vieux-Chauvet
portrait dessiné de Marie Vieux Chauvet
Biographie
Naissance
Décès
(à 56 ans)
New York
Pseudonyme
Colibri
Nationalité
Activités
Œuvres principales
La Danse sur le volcan (d), Amour, Colère et Folie

Biographie

Marie Vieux-Chauvet naît (sous le nom de Vieux) à Port-au-Prince en 1916, au sein d'un milieu privilégié de la bourgeoisie mulâtre haïtienne[1] - [2] - [3]. Elle est la fille de Constant Vieux, homme politique, sénateur[2] - [3] et ambassadeur. Sa mère, Delia Nones, vient d'une famille juive antillaise de Saint-Thomas, dans les Îles Vierges[3].

Marie Vieux-Chauvet s'insurge contre les abus de tous genres dont sont victimes les femmes, les malheureux, les déshérités et tous les faibles. Dans son premier livre, La Légende des fleurs, une pièce de théâtre[1] (publié sous le pseudonyme de Colibri), Marie Vieux-Chauvet explore à travers un conte allégorique le rêve de fraternité et de solidarité qui motive son écriture. Elle publie plusieurs romans, autour de la question de l'égalité et de la justice, et rejette le parcours traditionnel des femmes dans la bonne société haïtienne de l'époque[1].

Son roman La Danse sur le volcan relate la situation des femmes haïtiennes à travers une jeune métisse, un récit fictionnel dans un contexte historique : les années ayant précédées la révolution haïtienne au XVIIIe siècle[4]. Cette histoire est douce et cruelle, sucrée et amère comme les saveurs des Caraïbes, elle fait sourire et grincer des dents. Tout y est dit sur les ambitions et les désenchantements humains[5].

François Duvalier arrive au pouvoir à Haïti en 1957. En 1959, elle se rapproche d'un groupe de poètes et de romanciers haïtiens, composé notamment de Réginald Crosley, Denis Villard, Anthony Phelps, René Philoctète, Roland Morisseau et Serge Legagneur (une photographie montre ces auteurs entourant Marie Vieux-Chauvet). Elle leur propose de se réunir chez elle, dans le quartier Bourdon, à Port-au-Prince. Ce groupe s'était nommé initialement Haïti Littéraire, mais elle suggère de le renommer en : Les Araignées du soir[6] - [7]. « Ils espéraient tisser une toile protectrice autour d’eux-mêmes et se garder ainsi à l’écart des prédateurs » explique la romancière américaine d'origine haïtienne Edwidge Danticat[8].

En 1960, toujours sous ce régime dictatorial de François Duvalier, Marie Vieux-Chauvet publie trois courts romans regroupé dans un recueil : Amour, Colère et Folie. Le premier de ces récits, Amour se passe dans la période d'incertitudes, après le départ des américains en 1935, mais l'allusion au régime de Duvalier et des tontons Macoutes, appelés « Les hommes en noir » est une évidence pour les lecteurs et le pouvoir haïtiens[1] - [2]. Dans ce premier récit, les responsables locaux terrorisés terrorisent à leur tour. Colère narre l'histoire d'une famille bourgeoise confrontée à la corruption et la peur. Folie raconte la destruction d'un peuple. Les jeunes sont traqués et assassinés[9]. Elle envoie le manuscrit à Simone de Beauvoir qui soutient sa publication aux Éditions Gallimard en 1968. Peu de temps après la publication de cet ouvrage, elle se voit contrainte d'en faire bloquer la diffusion sous les menaces du régime Duvalier qui pèsent sur elle, sur sa famille et sur ses proches[10]. À la suite de ces menaces et du mécontentement du pouvoir à son égard, Marie Vieux-Chauvet s'exile à New York. Les stocks de l'édition de 1968 auraient été détruits par son mari[9]. Le roman est réédité en 2005[11] - [10], puis en poche en 2015[2].

En 1971, elle écrit un dernier roman, Les Rapaces. Marie Vieux-Chauvet meurt à New York le .

Amour, colère et folie est classé œuvre représentative de la Caraïbe par l'UNESCO[9].

Distinctions

  • 1954 : prix de l'Alliance Française, pour Fille d'Haïti.
  • 1960 : prix France-Antilles, pour Fonds des Nègres.
  • 1986 : prix Deschamps (à titre posthume), pour Amour, colère et folie.
  • 2016 : Invitée d'honneur (à titre posthume) de Livres en folie.

Œuvres

Romans

  • Fille d’Haïti, Paris, Fasquelle, 1954 - rééd. Zellige, 2014, (ISBN 978-2-914773-63-8) ; rééd. Paris, Zulma, 2023.
  • La Danse sur le volcan, Paris, Plon, 1957; Paris / Léchelle, Maisonneuve & Larose / Rééditions Emina Soleil, 2004.
  • Fonds des Nègres, Port-au-Prince, Henri Deschamps, 1960.
  • Amour, colère et folie, Paris, Gallimard, 1968; Paris / Léchelle, Maisonneuve & Larose / rééd. Emina Soleil, 2005 / rééd. Éditions Zulma, coll. Z/a, 2015, postface de Dany Laferrière, (ISBN 978-2-84304-738-1)
  • Les Rapaces, Port-au-Prince, Deschamps, 1986.

Théâtre

  • La Légende des fleurs. Port-au-Prince: Henri Deschamps, 1947; Port-au-Prince: Rééditions Marie Vieux, 2009.
  • Samba. Mise en scène vers 1948 à Port-au-Prince. Inédit.
  • Amour, colère et folie, adaptation de José Pliya. Paris: Avant-Scène Théâtre, 2008.

Notes et références

  1. Stéphane Martelly, « Chauvet, Marie (née Vieux) [Port-au-Prince 1916 - New York 1973] », dans Béatrice Didier, Antoinette Fouque et Mireille Calle-Gruber (dir.), Dictionnaire universel des créatrices, Éditions Des femmes, , p. 861
  2. Virginia Bart, « Une bombe à la face de Papa Doc », Le Monde, (lire en ligne)
  3. Natalie Levisalles, « La révoltée d'Haïti », Libération, (lire en ligne)
  4. Katia Gottin, « La Danse sur le volcan de Marie Vieux-Chauvet », Nouvelles études francophones, vol. 34, no 2, , p. 26-40 (lire en ligne)
  5. Analyse critique de La danse sur le volcan
  6. Anthony Phelps, « Marie Chauvet », sur Le Devoir
  7. Anny Dominique Curtius, Suzanne Césaire, archéologie littéraire et artistique d'une mémoire empêchée, (lire en ligne), « De l'invisibilité et du refoulement à la quête du matrimoine de Suzanne Césaire »
  8. (en) Laurent Dubois, Haiti: The Aftershocks of History, Henry Holt and Company, (lire en ligne), p. 312
  9. Association pour la connaissance des littératures antillaises, 150 romans antillais, Association pour la connaissance des littératures antillaises, , 399 p. (ISBN 2-9516556-0-6 et 978-2-9516556-0-7, OCLC 48094249, lire en ligne), p. 159-160
  10. Christophe Wargny, « Haïti au temps du duvaliérisme. Paranoïa couleur sang », Le Monde diplomatique, , p. 34 (lire en ligne)
  11. « Marie Vieux-Chauvet | L’avant-scène théâtre », sur www.avantscenetheatre.com (consulté le )

Annexes

Bibliographie

  • Christiane P. Makward, Madeleine Cottenet-Hage, et al., « Marie Chauvet », in Dictionnaire littéraire des femmes de langue française : de Marie de France à Marie NDiaye, Éd. Karthala, Paris, 1996, p. 126-128 (ISBN 2-86537-676-1)
  • Marie Alice Bélisaire, Féminines Traversées, C3 Editions, Port-au-Prince, 2013.
  • Carolyn Shread, Mirline Pierre, Dieulermesson Petit Frère (éd.), Marie Vieux-Chauvet. Legs et Littérature no8 (numéro spécial), 2016, 226 p. (ISBN 978-99970-86-20-4).
  • Alessandra Benedicty, Kaiama L. Glover (éd.), Revisiting Marie Vieux-Chauvet: Paradoxes of the Postcolonial Feminine. Special volume of Yale French Studies 128, 2016, 168 p. (ISBN 978-03002-14-19-2).
  • Dieulermesson Petit Frère, Fritzgérald Muscadin (illustrateur), Je découvre... Marie Vieux-Chauvet, Legs Édition, Port-au-Prince, 2016, 48 p. (ISBN 978-99970-86-13-6).

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