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MĂ©thode osmonde

La méthode osmonde, parfois appelée procédé osmond[note 1] ou osmund, est un procédé historique d'affinage en une étape de la fonte brute en acier naturel. Elle permet de traiter la fonte des premiers hauts fourneaux européens, qui apparaissent en Suède au XIIe siècle, notamment à Lapphyttan[3]. Par métonymie, les osmonds désignent les boules de fer produites selon cette méthode, d'un poids calibré et commercialisées dans toute l'Europe, du XIIIe siècle jusqu'à 1620, quand leur exportation est interdite par le roi de Suède.

photo d'une boule de fer et de deux ringards
Bloc de fer osmond exposé au château d'Altena, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Derrière, on peut distinguer deux ringards avec du fer en leur extrémité.

ÉlĂ©ments linguistiques 

L'origine du mot est obscure, et il n'est pas certain qu'il ait désigné systématiquement un acier naturel, c'est-à-dire issu de l'affinage d'une fonte produite au haut fourneau. Cependant, le métal est caractérisé par une ductilité remarquable, ce qui implique une propreté métallurgique et un bas niveau en carbone peu compatibles avec une obtention au bas fourneau[4]. Lorsque le terme osmond qualifie objectivement la production avec un bas fourneau suédois, il s'agit d'une appellation exceptionnelle[5]. Des bas fourneaux osmond ont été ainsi présentés par des auteurs américains comme des stückofen spécialisés dans la réduction de fer des marais, mais ceux-ci précisent qu'ils n'ont « trouvé aucune mention d'aucun four portant ce nom et ayant été édifié et appelé par ce nom »[6].

Le fer osmond Ă©tait exportĂ© dans toute l'Europe au poids rĂ©glementĂ© de 300 Ă  350 g[7] ou, selon d'autres sources, 1/24 de lispund (sv), soit 280 g[4]. Ces boules de fer ont Ă©tĂ© commercialisĂ©es sous le nom d'« osmonds Â».

Histoire

Les osmonds apparaissent dans les premiers rapports douaniers anglais, par exemple en 1325[8]. Des unités de poids qui se réfèrent aux osmonds sont évoquées dans un accord commercial à Novgorod en 1203, ce qui impliquerait la production de fer osmond dès cette date[9].

À la fin du Moyen Âge, les osmonds sont forgés en barres à Danzig et à Lübeck par des martinets, et le fer exporté sous cette forme en Europe. Mais dans les années 1620, le roi de Suède Gustave II Adolphe interdit l'exportation de fer osmond sous la forme de boules, la transformation en barre représentant alors l’essentiel de la valeur ajoutée du produit. La commercialisation d'osmonds disparaît alors[10].

Tenace et ductile, le fer osmond est particulièrement adaptĂ© au trĂ©filage. Il a Ă©tĂ© Ă©galement connu comme le « fer de Dantzig Â», d'oĂą il Ă©tait revendu dans toute l'Europe sous la forme de boules de fer, les « osmonds Â». Il est alors importĂ© en Grande-Bretagne par des marchands anglais qui y disposent d'un comptoir dès le XIVe siècle[11], ainsi que par la Hanse[12].

Le procédé de fer osmond est attesté dans le Pays de Galles à partir de 1567[13]. La méthode a été aussi utilisée dans le comté de La Marck, en Westphalie, et en Suisse[14]. En 1784, une description faite par l'ingénieur allemand Eversmann souligne la similarité de la méthode employée dans le Pays de Galles avec celle utilisée en Westphalie[13].

Procédé

schéma du four
Four d'affinage de la méthode osmonde

Le fer osmond est produit à partir de fer des marais. Sa qualité, qui consiste en une bonne ténacité accompagnée d'une excellente ductilité, est indissociable de la qualité du minerai employé[12].

Vers 1840, le fer osmond est encore rĂ©putĂ© un des meilleurs fers produits par les suĂ©dois. Le procĂ©dĂ© s'avère bien adaptĂ© Ă  l'affinage de la fonte truitĂ©e. Le foyer d'affinage est une fosse rectangulaire de dimensions moyennes (0,5 m de large et 0,35 m de profondeur[13]) lorsque la fonte est grise, il est plus large et moins profond que lorsqu'elle est blanche. Après avoir Ă©tĂ© brasquĂ©, le foyer est rempli de charbon de bois et mis Ă  feu. La combustion est attisĂ©e par une tuyère inclinĂ©e vers le bas. Lorsque le foyer est suffisamment chaud, la gueuse de fonte, d'environ m de long, est amenĂ©e sur des rouleaux, perpendiculairement Ă  la tuyère, et commence Ă  fondre goutte Ă  goutte. Le mĂ©tal ruisselle ainsi jusqu'au fond du creuset en passant Ă  travers les charbons incandescents. Les scories se sĂ©parent du mĂ©tal et surnagent sur celui-ci, le protĂ©geant de l'action du jet d'air. Mais le milieu reste suffisamment oxydant pour que la fonte s'y affine, au repos sous la couche de scories suroxydĂ©es[1] - [13].

L'affinage se manifeste par une production de scories et de gaz, issus de l'oxydation des Ă©lĂ©ments contenus dans la fonte. Au fur et Ă  mesure que la fonte s'affine, sa fusibilitĂ© diminue jusqu'Ă  devenir une masse pâteuse de fer qui se rassemble au fond du creuset. L'ouvrier constitue alors une loupe d'environ 10 kg en rassemblant le mĂ©tal autour d'un ringard. Il coupe alors le vent, fait couler les scories et extrait la loupe qu'il va cingler[1]. La collecte du mĂ©tal Ă  l'aide d'un ringard est la particularitĂ© du procĂ©dĂ© osmond[13].

La réussite de l'opération tient à la maîtrise de la température car le fer doit être suffisamment pâteux pour être rassemblé en loupe. L'estimation du degré d'affinage est également délicat. Il se fait par l'observation des scories : si celles-ci sont dures et gris-brun, l'affinage n'est pas achevé, si elles sont liquides, verdâtres ou rougeâtres, le fer est suroxydé et il faut y ajouter de la fonte. La flamme renseigne également sur l'avancement : une teinte rouge à jaune signale un affinage inachevé, jaune clair un affinage efficace, blanc brillant avec des étincelles, une suroxydation qu'on récupère en ajoutant des scories[1].

Notes et références

Notes

  1. Les procĂ©dĂ©s relatifs Ă  la fabrication d'acier naturel sont, en français, dĂ©signĂ©s sous le nom de « mĂ©thode Â» plutĂ´t que de « procĂ©dĂ© Â». C'est ainsi que Guy Adolphe Arrault traduit Wilhelm August Lampadius (de), mĂŞme si le mot « osmonde Â» est rarement employĂ© au fĂ©minin[1]. Un terme semblable, la « mĂ©thode osmunde Â» est utilisĂ© par Culmann, lorsqu'il traduit Karsten[2].

Références

  1. Wilhelm August Lampadius (trad. Guy Adolphe Arrault), Manuel de métallurgie générale, t. 2, Paris, Imprimerie de Ducessois, (lire en ligne), p. 208-211
  2. Carl Johann Bernhard Karsten (trad. F. J. Culmann), Manuel de la métallurgie du fer, t. 3, Metz, , 2e éd. (lire en ligne), p. 124
  3. (en) N. Björkenstam, « The Blast Furnace in Europe during the Medieval Times: part of a new system for producing wrought iron », dans Gert Magnusson, The importance of Ironmaking: Technical Innovation and Social Change : papers presented at the Norberg conference 1995, vol. 1, Stockholm, Gert Magnusson, Jernkontoret, , p. 143–53
  4. (sv) « Osmund et Osmundsmide », dans Nationalencyklopedin,
  5. Lampadius 1840, p. 256
  6. (en) William F. Durfee, « American Industries since Columbus », Popular Science Monthly, vol. 38,‎ , p. 165 (lire en ligne)
  7. (en) Alan Williams, The Sword and the Crucible : A History of the Metallurgy of European Swords up to the 16th Century, Leiden/Boston, Brill, , 292 p. (ISBN 978-90-04-22783-5, ISSN 1385-7827, lire en ligne), p. 189-190
  8. (en) N. S. B. Gras (préf. A. H. Ingen-Housz), The early English Customs System, Harvard University Press, (lire en ligne), p. 379
  9. Björkenstam 1995, p. 150
  10. (en) Sven Erik Åström, « From Cloth to Iron: the Anglo-Baltic trade in the late seventeenth century Part 1 : The growth, structure, and organisation of the trade », dans Societas Scientarum Fennica: Commentationes humanarum litterarum, Helsinki, Societas Scientarum Fennica,
  11. Schubert 1957, p. 111
  12. Schubert 1957, p. 121
  13. (en) H. R. Schubert (préf. A. H. Ingen-Housz), History of the British iron and steel industry : from c. 450 to 1775, Londres, Routledge & Kegan Paul, (lire en ligne), p. 299-301
  14. (en) M. Kempa et Ü. Yalçin, « Medieval Iron Smelting in southern Germany: early evidence of pig iron », dans Gert Magnusson, The importance of Ironmaking: Technical Innovation and Social Change : papers presented at the Norberg conference 1995, vol. 1, Stockholm, Gert Magnusson, Jernkontoret, , p. 163-166

Voir aussi

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