Accueil🇫🇷Chercher

Little Tulip

Little Tulip est une bande dessinée scénarisée par Jerome Charyn et dessinée par François Boucq. La trame narrative intègre deux époques : d'une part le présent de Paul, tatoueur à Manhattan et qui plonge dans une enquête criminelle ; d'autre part, sa jeunesse dans un goulag de la Kolyma. Comportant 80 pages, l'album est édité en France pour la première fois en 2014 par Le Lombard, dans la collection Signé.

Little Tulip
One shot
Scénario Jerome Charyn
Dessin François Boucq
Couleurs Alexandre Boucq
Lettrage Michel Brun
Genre(s) thriller[1], policier, fantastique, roman historique[1]

Thèmes Goulag, tatouage, enquête criminelle
Personnages principaux Pavlo / Paul (Little Tulip)
Azami
Lieu de l’action Kolyma / New York
Époque de l’action 1947-1970

Éditeur Le Lombard
Collection Signé
Première publication novembre 2014
ISBN 978-2-8036-3417-0
Nb. de pages 80
Albums de la série
prépublié dans Libération

Synopsis

L'histoire se construit selon deux chronologies, entre le présent et les flashbacks[2].

  • New York en 1970[1] : le prĂ©sent de Paul, tatoueur[2]. En raison de son talent en dessin, la police lui confie rĂ©gulièrement la mission de faire le portrait-robot des dĂ©linquants d'après le rĂ©cit des plaignants[2]. Son passĂ© de dĂ©tenu lui revient en mĂ©moire lors d'une enquĂŞte sur une sĂ©rie de meurtres commis par un inconnu surnommĂ© « Bad Santa » : des femmes sont violĂ©es puis Ă©gorgĂ©es dans des ruelles par un assassin inconnu qui signe ses crimes en laissant près de la victime un bonnet de père NoĂ«l[3] - [4].
  • La Kolyma en 1947-1957 : l'enfance de Paul, ou Pavlo. Ses parents amĂ©ricains quittent Manhattan pour s'installer Ă  Moscou, oĂą ils sont arrĂŞtĂ©s en 1947 pour espionnage, puis dĂ©portĂ©s[1]. Pavlo, âgĂ© de sept ans Ă  son arrivĂ©e[5], grandit au goulag, oĂą il survit grâce Ă  son talent de dessinateur et intègre une bande mafieuse[2] ; il reçoit le surnom de Little Tulip, correspondant au tatouage qu'il porte[6].

Dans le passé de Paul, son père lui enseigne l'art du dessin et lui transmet sa passion. En 1947, la famille de Pavlo est déportée. Après un voyage dans des conditions épouvantables, Pavlo, alors âgé 7 ans, est envoyé à l'orphelinat du goulag. Pavlo obtient la protection de Kiril-la-Baleine[7], chef d'un gang de criminels de droit commun. Sur décision de Kiril, Pavlo est intégré au clan et confié à Andreï, maître tatoueur[3]. Pavlo perfectionne son art dans l'espoir de revoir sa mère : pour survivre, elle est devenue la concubine d'un chef de clan appelé « Le Comte »[6] - [3]. Néanmoins, elle meurt égorgée[8]. Par la suite, Pavlo se bat au couteau pour des affrontements entre bandes rivales : il y apprend « à se battre et à tuer, à devenir "une bête féroce" »[9], ce qui fait de lui « un combattant redoutable »[10].

Après la mort de Staline (mars 1953), Pavlo, libéré, émigre aux États-Unis[10].

Personnages

Le récit met en scène la hiérarchie du goulag et notamment la rivalité entre pakhany (sing. pakhan), prisonniers de droit commun qui sont devenus chefs d'un clan de détenus[11].

  • Paul / Pavlo, surnommĂ© au goulag Little Tulip. Avec la permission de son protecteur, il fait un tatouage pour un chef de bande appelĂ© « Le Comte ».
  • Yoko : serveuse, amante de Pavlo Ă  New York en 1970
  • Azami : fille de Yoko, passionnĂ©e de dessin et de tatouage. Elle demande Ă  ĂŞtre instruite par Paul, reflĂ©tant en partie l'enfant qu'il n'a pas pu ĂŞtre[12].
  • Le père de Pavlo : dessinateur, enseignant de dessin, assistant d'Einsenstein[1]. Il meurt rapidement au goulag[3].
  • La mère de Pavlo : infirmière. Pour survivre au goulag, elle devient la concubine d'un pakhan appelĂ© « Le Comte »[3].
  • Kiril-la-Baleine : ancien soldat russe travaillant pour la section de renseignement de l'ArmĂ©e rouge, il a reçu une instruction soignĂ©e en philosophie et littĂ©rature. Contrairement aux autres pakhany, Kiril applique un code d'honneur[12]. Pavlo devient son protĂ©gĂ©.
  • Mashenka (Masha): gardienne-chef de l'orphelinat du goulag, qui assouvit ses pulsions pĂ©dophiles sur Pavlo[13].
  • AndreĂŻ : maĂ®tre tatoueur du clan de Kiril-la-Baleine et professeur de Pavlo.
  • Mishka : enfant prisonnier au goulag avec Pavlo, il lui sauve la vie.
  • Nadya : jeune prostituĂ©e pour les officiers du goulag, elle est le premier amour de Pavlo.

Publication

Little Tulip est publié en anglais, sous le même titre, par la maison d'édition Dover Graphic Novels, à l'instar des albums précédents La Femme du magicien (The Magician's Wife) et Bouche du diable (Billy Budd, KGB).

  • Jerome Charyn (scĂ©nario), François Boucq (dessin) et Alexandre Boucq (couleur) (trad. Jeanne Guyon), Little Tulip, Le Lombard, coll. « SignĂ© », (ISBN 978-2-8036-3417-0).
  • Jerome Charyn (scĂ©nario), François Boucq (dessin) et Alexandre Boucq (couleur), Little Tulip, Dover publication, (ISBN 978-0486808727).

L'œuvre est prépubliée dans Libération[10].

Genèse de l'œuvre

Jerome Charyn, romancier new-yorkais né en 1937, a collaboré avec François Boucq, auteur de bande dessinée, sur La Femme du magicien (The Magician's Wife), publié en 1986, et Bouche du diable (Billy Budd, KGB), paru en 1990[14]. Boucq souhaite créer une bande dessinée montrant l'art du dessin[15]. L'écrivain propose à Boucq une œuvre sur un enlumineur au temps de Charlemagne, mais le dessinateur s'inquiète du manque de documentation disponible[15]. Il aiguille l'écrivain sur le goulag après avoir lu le livre de souvenirs de Dantsig Baldaev, Gardien de camp, (éd. des Syrtes, 2013)[2], qui pendant des décennies a copié les tatouages des détenus[1] : dans ces conditions extrêmes, « le dessin est à la fois un moyen d'expression et un moyen de survie »[15]. Dans les camps russes, les prisonniers utilisaient les tatouages afin de montrer leur rang hiérarchique mais aussi comme protection[2] - [15]. Charyn constate, avec surprise et frustration, que Boucq a largement remanié la narration d'origine[2].

Analyse

François Boucq décrit la narration comme « une sorte de conte de fées cruel », qui montre « comment le dessin peut sauver un homme »[16]. Les traits de Pavlo s'inspirent de Viggo Mortensen et Ed Harris[12] - [17].

Dans Le Monde, le chroniqueur estime que l'ouvrage « tient à la fois du thriller et du document historique », dont le message principal serait : « le dessin exerce une forme de résistance artistique face à l'enfer »[1]. La représentation des tatouages, dessin dans le dessin, produit « un effet de mise en abyme dérangeant et gracieux à la fois »[1]. L'ouvrage est empreint de « noirceur, cruauté, férocité »[5] et comporte une dimension initiatique[9] - [17]. La narration comporte nombre de scènes violentes[11] : outre les meurtres, les auteurs mettent en scène les viols collectifs[18], les mutilations[10], la pédophilie[19]...

Le dessinateur a délibérément créé une cohérence graphique avec des personnages présents dans La Femme du Magicien, comme la femme enquêteur de police ; Azami ressemble à la petite fille de ce premier opus[20]. Paul ressemble à Youri, le héros de Bouche du diable[13].

Si les chroniqueurs se montrent unanimes sur la qualité du dessin, les ressorts du scénario sont plus partagés[4] - [19].

Postérité

En septembre 2020 paraît New York Cannibals, des mêmes auteurs et qui s'inscrit dans la continuité de Little Tulip : Paul et Azami y enquêtent sur des trafics humains en 1990, toujours à New York[21].

Références

  1. Frédéric Potet, « Le trait dans la peau », Le Monde des livres,‎ (lire en ligne).
  2. Stéphane Jarno, « Little Tulip, de Boucq et Charyn : Que reste-t-il de leurs amours ? », Télérama,‎ (lire en ligne).
  3. Henri Filippini, « L'enfer du goulag », dBD, no 88,‎ , p. 69.
  4. Mick Léonard, « Little Tulip », sur Planète BD, .
  5. Alexandra Chaignon, « Festival d’Angoulême : nos coups de cœur », L'Humanité,‎ (lire en ligne).
  6. Jean-Marc Lernould, « Little Tulip : l'enfer du goulag à jamais dans la peau », Sud Ouest,‎ .
  7. Monique Younès et Julie Michard, « Little Tulip, l'art du tatouage dans une bande-dessinée », sur Radio RTL, .
  8. Alexandra Ducamp, « Little Tulip, grand Boucq », La Provence,‎ .
  9. Christophe Levent, « BD du mois : Little Tulip : dans la peau... », Aujourd'hui en France,‎ (lire en ligne).
  10. Didier Pasamonik, « Pour ses 20 ans, la collection "Signé" s’offre le duo Jérôme Charyn et François Boucq », sur Actua BD, .
  11. Denis Marc, « New York – Goulag – New York pour un jeune surdoué du dessin », sur RTBF, .
  12. François Boucq (interviewé) et Eric Loret, « Un héros doit avoir toutes ses dents ! », Libération,‎ .
  13. Truc 2014.
  14. Mathieu Lindon, « Little Tulip : Des vrais, des tatoués », Libération,‎ (lire en ligne).
  15. Denis Sénié, « Little Tulip, de François Boucq: les pouvoirs chamaniques du dessin », La Voix du Nord,‎ (lire en ligne).
  16. François Boucq (interviewé) et Christophe Levent, « Dessiner, c'est traduire la vie », Aujourd'hui en France,‎ .
  17. Boucq et Jarno 2014.
  18. Ratier 2014.
  19. Roure 2014.
  20. Boucq, « Interview de Boucq : Comment le dessin peut aider quelqu’un à vivre, à survivre... », sur Le Lombard.
  21. « Boucq et Charyn : "New York Cannibals", la suite très réussie de "Little Tulip" », sur France Inter,

Annexes

Bibliographie

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.