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Le Maître de Ballantrae

Le Maître de Ballantrae (The Master of Ballantrae) est un roman d'aventures de l'écrivain écossais Robert Louis Stevenson.

Le Maître de Ballantrae
Image illustrative de l’article Le Maître de Ballantrae
Couverture de la première édition

Auteur Robert Louis Stevenson
Pays Drapeau de l'Écosse Écosse
Genre roman d'aventures,
roman historique
Version originale
Langue anglais
Titre The Master of Ballantrae: A Winter's Tale
Éditeur Cassel and Company
Lieu de parution Londres, Paris, New York, Melbourne
Date de parution
Version française
Traducteur Théo Varlet
Éditeur La Sirène
Lieu de parution Paris
Date de parution 1920

L'auteur commence Ă  l’écrire dans les Adirondacks, durant l’hiver 1887, alors qu’il vient de relire The Phantom Ship de Frederick Marryat[1], Ă©crivain de la mer, des conflits familiaux et du statut social. Le rĂ©cit paraĂ®t tout d'abord dans la revue amĂ©ricaine Scribner's Magazine, sous forme d'un feuilleton en douze Ă©pisodes, de Ă  . La publication de l'Ĺ“uvre en volumes, sous le titre The Master of Ballantrae: A Winter's Tale (Le MaĂ®tre de Ballantrae : un conte d'hiver), a lieu le [2].

Résumé

En Écosse, au XVIIIe siècle, au manoir des Durrisdeer, vivent les deux frères Durie : James, le Maître[3] de Ballantrae, l'aîné de la famille, est un libertin calculateur, ambitieux, amoral, mais charismatique et respecté ; Henry, le cadet, est quant à lui modéré, plus vertueux, mais injustement mal-aimé.

En 1745, le pays est plongé dans une guerre civile opposant les jacobites, partisans du prétendant Jacques François Stuart, à l’armée du roi en place, George II. Par opportunisme, James souhaite soutenir la cause des rebelles, malgré l'avis contraire de son père et de son frère. Ces derniers pensent qu'en tant qu'aîné, il devrait rester au manoir afin de montrer sa fidélité au roi George ; et que c'est plutôt à Henry de s'engager auprès des jacobites. James scelle son destin et celui des Durrisdeer en allant malgré tout combattre aux côtés du prince Charles. Le , la célèbre bataille de Culloden voit l’écrasement de la rébellion jacobite et James est présumé mort. Ayant en fait survécu, le Maître conçoit alors une haine féroce à l'encontre de Henry, auquel il reproche sa disgrâce et la spoliation de ses biens. Dès lors, et tout au long de son existence, James n'aura de cesse de persécuter son frère. Au début, Henry endurera toutes les humiliations. Puis il finira dévoré par cette même haine qui anime son frère. L'ultime confrontation se terminera tragiquement, au cœur de la forêt sauvage des Adirondacks.

Thèmes

Publication

L'Ă©dition originale contenait ce que Stevenson qualifia lui-mĂŞme de « bourde inconcevable Â», d'« exagĂ©ration Ă  faire frĂ©mir Hugo Â». En effet, Ă  l'issue du duel entre les deux frères (chapitre V), Mrs Henry enfonçait jusqu'Ă  la garde l'Ă©pĂ©e de son mari dans le sol gelĂ©. Dans une lettre adressĂ©e Ă  Marcel Schwob, Stevenson demande au traducteur de corriger ce passage afin de le rendre plus plausible[4].

Accueil critique

Après L’Étrange Cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde qui l’a consacrĂ© en 1886, Stevenson publie cinq livres d’un retentissement moindre, donnant Ă  penser que son talent dĂ©cline. Le MaĂ®tre de Ballantrae est saluĂ© comme un brillant retour : on retrouve le suspense et l’exotisme de L’Île au trĂ©sor, la complexitĂ© psychologique de Dr Jekyll et Mr Hyde, et surtout un remarquable art de la construction du rĂ©cit[5]. Peu connu du grand public, ce livre contiendrait, selon les critiques, les scènes les plus puissantes jamais Ă©crites par Stevenson. Le MaĂ®tre de Ballantrae est gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ© comme le chef-d’œuvre de son auteur — exception faite des derniers chapitres, que la critique anglaise a dĂ©noncĂ©s pour faibles et invraisemblables[6]. The Times estime que peu de livres approchent Ă  ce point de la perfection[5]. Henry James partage cet enthousiasme, affirmant dans une lettre Ă  l’auteur que ce « pur joyau Â» lui aurait procurĂ© « l’émoi le plus intense Â» de sa vie littĂ©raire[7]. [Ces rĂ©fĂ©rences datent de l'Ă©poque oĂą le roman est sorti. En rĂ©alitĂ©, Stevenson a Ă©crit d'autres choses par la suite. Au moment de sa mort, son chef-d’œuvre, de son propre aveu, Ă©tait Catriona. Hermiston, s'il avait Ă©tĂ© achevĂ© aurait certainement dĂ©trĂ´nĂ© Catriona. Donc Ballantrae n'est pas son chef-d’œuvre...]

AndrĂ© Gide se plaint d’avoir du mal Ă  en achever la lecture : « Curieux livre, oĂą tout est excellent, mais hĂ©tĂ©rogène, au point qu’il semble la carte d’échantillons de tout ce oĂą peut exceller Stevenson Â»[8]. Il dit relire Le MaĂ®tre de Ballantrae lors de son voyage au Congo.

Certains critiques dénoncent le côté sombre du livre, parfois à la limite du morbide. D’autres, au contraire, sont sensibles à la dimension nouvelle que confère au roman d’aventures l’apport du tragique[5].

Bertolt Brecht souligne l’extraordinaire originalité de la narration. Par exemple, le personnage central (le Maître de Ballantrae) nous est surtout connu par le témoignage d’une personne qui lui est profondément hostile (l’intendant MacKellar, narrateur principal). Autre originalité, on sait qu’un roman d’aventures vit exclusivement de la sympathie que le lecteur éprouve pour l’aventurier. Or, ici, la sympathie est très péniblement acquise[9].

Enfin, le cheminement du narrateur ne laisse pas les critiques indiffĂ©rents. Ă€ la première page de son rĂ©cit, l'intendant MacKellar affirme Ă©crire dans le but de rĂ©habiliter Henry, le plus jeune des frères, la victime. Et, en effet, dans la plus grande partie du livre, il prend rĂ©solument le parti de Henry : on le voit longtemps batailler, homme de raison, contre l’aveuglement passionnel du père et de l’épouse, subjuguĂ©s par le criminel. Puis MacKellar se laisse prendre lui aussi, peu Ă  peu, au charme pervers de l’aĂ®nĂ©. Et les deux Ă©pitaphes qu’il dĂ©die aux deux frères, Ă  la dernière page, ne laissent aucun doute sur la transformation qui s’est opĂ©rĂ©e en lui[10]. Comme le dit Michel Le Bris, parlant de la thĂ©orie littĂ©raire de Stevenson : « Il ne s'agit pas d'interprĂ©ter autrui, mais de manifester l'Ă©vidence de son Ă©trangetĂ©, Ă©trangetĂ© constitutive de votre propre mystère. Car vous Ă©crivez toujours sur l'Ă©tranger qui est en vous... c'est peut-ĂŞtre mĂŞme l'Ă©tranger qui est en vous qui Ă©crit ! Â»[11].

Adaptations

Sur les Ă©crans

  • Le roman a Ă©tĂ© adaptĂ© au cinĂ©ma en 1953 dans le film amĂ©ricano-britannique Le Vagabond des mers (The Master of Ballantrae), rĂ©alisĂ© par William Keighley, avec Errol Flynn dans le rĂ´le-titre.
  • Il a Ă©tĂ© adaptĂ© pour la tĂ©lĂ©vision française (ORTF) par AndrĂ© Josset. RĂ©alisĂ© par Abder Isker, ce tĂ©lĂ©film en deux parties avait pour principaux interprètes Georges Descrières, Paul Guers, Maurice Chevit et Christiane Minazzoli. Sa première diffusion remonte Ă  . On peut se le procurer sur le site de l'Ina.
  • Il a Ă©tĂ© adaptĂ© Ă  nouveau pour la tĂ©lĂ©vision française (TF1) en 1990[12].
  • Il a fait l'objet d'une production anglo-amĂ©ricaine pour la tĂ©lĂ©vision en 1984, dirigĂ©e par Douglas Hilcox, avec Michael York (James), Richard Thomas (Henry) et John Gielguld (Lord Durrisdeer).
  • Antonin Artaud avait projetĂ© en 1929 d'en tirer un film, dont il a rĂ©digĂ© le scĂ©nario[13].

En bandes dessinées

  • Il a Ă©tĂ© adaptĂ© en bande dessinĂ©e par Hippolyte Ă  compter de 2006. Le roman paraĂ®t en deux tomes chez DenoĂ«l Graphic[14].
  • Fabien Nury et Renaud Garreta ont adaptĂ© le roman de Stevenson dans leur bande dessinĂ©e Le MaĂ®tre de Benson Gate, publiĂ©e chez Dargaud, transposant le contexte de l'Ĺ“uvre Ă  l'AmĂ©rique des annĂ©es 1910-1920 et plaçant les deux frères, Calder (James) et Richard (Henry), en lutte pour un empire pĂ©trolier.

Notes et références

  1. Jean Echenoz, « La nuit dans les Adirondacks Â», in Robert Louis Stevenson (trad. de l'anglais), Le MaĂ®tre de Ballantrae, Paris, Gallimard, coll. « folio classique », , 366 p. (ISBN 2-07-040354-8), p. 325
  2. Date de l’édition Cassel and Company, Londres, Paris, New York, Melbourne. L’édition amĂ©ricaine de Charles Scribner’s Sons paraĂ®t le lendemain, 21 septembre. Sumner & Stillman. La date du 20 septembre 1889 est, dans le livre, celle de l’ouverture du paquet contenant le manuscrit de MacKellar, p. 29 de l’édition « folio classique Â».
  3. Le terme « MaĂ®tre Â» (« Master Â» en anglais) est le titre portĂ© par le fils aĂ®nĂ© dans certaines familles Ă©cossaises.
  4. Lettre Ă  Marcel Schwob (Sydney, 19 janvier 1891, in The Letters of Robert Louis Stevenson, Volume 2, Chapter XI).
  5. Alain Jumeau, « Notice Â», in Robert Louis Stevenson, op. cit., p. 342.
  6. Le Nouveau Dictionnaire des Ĺ“uvres, vol. IV, Paris, Bompiani et Robert Laffont, coll. « Bouquins », (ISBN 2-221-90096-0), p. 4329. Jean Echenoz parle d’une « fin splendidement mal foutue [...] pleine de rustines et de chevilles narratives Â». Jean Echenoz, id., p. 331.
  7. CitĂ© par Jean Echenoz, id., p. 330.
  8. André Gide, Journal : 1889-1939, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », , p. 393
  9. Bertolt Brecht, Berliner Börser-Courier, 19 mai 1925.
  10. Alain Jumeau, « Introduction Â», dans Robert Louis Stevenson, op. cit., p. 19 et 20.
  11. Recueilli par Thomas RĂ©gnier, « Stevenson et Le Bris Â», 6 aoĂ»t 2001, sur parutions.com.
  12. (en) « Le Vagabond des Mers (1990) », IMDB
  13. Henri Béhar, Le cinéma des surréalistes, L'Àge d'homme, , p. 42.
  14. Stéphane Beaujean, « Le Maître de Ballantrae, Hippolyte : les deux frères », dBD, no 7,‎ , p. 29.

Liens

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