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Le Jugement dernier (Memling)

Le Jugement dernier est un triptyque de Hans Memling exposĂ© au MusĂ©e National Ă  GdaƄsk (section Art Ancien). Sur le panneau central, le Christ et Saint Michel trient les Ăąmes des morts. Sur le volet de gauche, les Ă©lus montent au ciel, et sur celui de droite, les damnĂ©s chutent en enfer. Au verso du volet de gauche, figure le commanditaire Angelo Tani, et au verso de celui de droite, son Ă©pouse, Catarina di Francesco Tanagli.

Le Jugement dernier
panneau central
Artiste
Date
v. 1467-1471
Civilisation
Type
Technique
huile sur bois
Dimensions (H Ă— L)
223,5 Ă— 306 cm
Mouvement
Localisation
Muzeum Narodowe, GdaƄsk (Pologne)

Support et technique

Le Jugement dernier est une peinture Ă  l’huile sur bois de chĂȘne. Le panneau central mesure 221 Ă— 161 cm (242 Ă— 180,8 cm avec l’encadrement) et les deux volets latĂ©raux 223,5 Ă— 72,5 cm (242 Ă— 90 cm avec l’encadrement)[1]. Il a fait l’objet d’une restauration en 1851.

Le triptyque entier.

Histoire

La commande et la réalisation du tableau

Extérieurs des volets (triptyque fermé).

Le commanditaire du triptyque est le banquier florentin Angelo Tani (1415-1492). Tani était un homme de confiance de la banque des Médicis. Il avait été le directeur de la filiale brugeoise de la banque de 1455 à 1469. Il y travaillait encore en 1471, mais son ancien adjoint, Tommaso Portinari, en était devenu le directeur. Entretemps, il avait été envoyé à Londres pour vérifier les comptes de la succursale anglaise.

Faute de documents, on date, par recoupements, la commande du triptyque de 1467, l’annĂ©e du mariage d'Angelo Tani avec Caterina di Francesco Tanagli, l’annĂ©e aussi oĂč il rĂ©digea son testament. Le tableau Ă©tait sans doute destinĂ© Ă  l’église conventuelle de Fiesole, la Badia Fiesolana, oĂč il possĂ©dait une chapelle (tout comme les quatre autres directeurs de succursales de la banque des MĂ©dicis) dĂ©diĂ©e Ă  saint Michel. Celui-ci est justement prĂ©sent sur deux des volets du triptyque: il trie les Ăąmes des morts sur le volet central, et au verso du volet droite, Catarina di Francesco Tanagli prie devant sa statue.

Le Jugement dernier Ă©tait sans doute achevĂ© dĂšs 1471 : Catarina di Francesco Tanagli donna naissance cette annĂ©e-lĂ  Ă  son premier enfant, et Memling aurait sans doute fait allusion d’une façon ou d’une autre Ă  cette maternitĂ© dans le triptyque, s'il y avait encore travaillĂ©. Il fallut attendre cependant 1473 pour que le triptyque quitte Bruges pour l’Italie.

De Bruges à GdaƄsk

Le Jugement dernier fut embarquĂ© Ă  bord du Matteo, une des deux galĂšres qui effectuaient pour le compte de la Banque MĂ©dicis la liaison Bruges-Pise-Constantinople[2]. Il fallut faire d’abord une escale Ă  Southampton pour rĂ©cupĂ©rer des marchandises. Le Matteo Ă©tait en route vers Pise, lorsque, le , il fut attaquĂ© par le pirate Paul Beneke, armĂ© par la Hanse, en guerre avec l‘Angleterre. Celui-ci remit le Jugement dernier Ă  ses armateurs de GdaƄsk[3], qui confiĂšrent le tableau Ă  la Marienkirche de la ville. Le Matteo battait pavillon neutre (bourguignon), mais ni les protestations de la banque MĂ©dicis, ni mĂȘme une bulle de Sixte IV ne permirent Ă  Angelo Tani de rĂ©cupĂ©rer son bien[4].

Le triptyque resta Ă  GdaƄsk jusqu’en 1807 oĂč il fut confisquĂ© par les troupes napolĂ©oniennes. Il rejoignit alors le musĂ©e NapolĂ©on Ă  Paris, oĂč il est attribuĂ© Ă  Jan van Eyck[5]. En 1815, un bataillon de la garde de PomĂ©ranie s’en empara et l’emmena Ă  Berlin. L'AcadĂ©mie des Arts de Berlin (Berliner Kunstakademie) voulut alors le conserver. Elle offrait en Ă©change une copie de la Madone Sixtine de RaphaĂ«l et trois bourses d’études pour de jeunes artistes de GdaƄsk. L'opĂ©ration Ă©choua et le Jugement dernier Ă©tait de retour Ă  GdaƄsk l’annĂ©e suivante[6].

En , la ville libre de GdaƄsk est annexĂ©e par l'Allemagne, prĂ©lude Ă  la Seconde Guerre mondiale. Six ans plus tard, les troupes soviĂ©tiques Ă©taient aux portes de la ville. Les soldats allemands battirent en retraite jusqu’en Thuringe, emmenant avec eux le triptyque de Memling. Il est rĂ©cupĂ©rĂ© par les soviĂ©tiques, et envoyĂ© au musĂ©e de l'Ermitage, Ă  Leningrad (l’actuelle Saint-PĂ©tersbourg). Il faut attendre 1956 pour qu’il soit restituĂ© Ă  la ville de GdaƄsk.

Description

Le panneau central

Memling a repris en partie, pour le panneau central du triptyque, la composition du Jugement dernier de Van der Weyden.

Le Christ est reprĂ©sentĂ© en majestĂ©, de face, ses pieds reposant sur un globe, transposition chrĂ©tienne de l’imagerie impĂ©riale romaine depuis Constantin[7]. De sa bouche sortent une Ă©pĂ©e et un lys, qui symbolisent la justice et la misĂ©ricorde. Il trĂŽne sur un arc-en-ciel, symbole de rĂ©conciliation entre Dieu et l’humanitĂ©. Il est entourĂ© des douze apĂŽtres, et de Marie et saint Jean-Baptiste, qui intercĂšdent en faveur des humains. Au-dessus d’eux des anges portent les instruments de la passion.

En dessous, saint Michel pĂšse les Ăąmes des morts. Il a revĂȘtu son armure. C’est le chef la milice cĂ©leste, Ă  la tĂȘte de laquelle il a triomphĂ© des anges rebelles. Sur un des plateaux de sa balance, un Ă©lu, sur l’autre un malheureux, qui, dĂ©jĂ , est tirĂ© par les cheveux vers l’Enfer[8]. À ses pieds des morts sortent de leur tombe, encore enveloppĂ©s de leur linceul.

Le volet de gauche

Saint Pierre accueille les Élus. Des anges leur ont donnĂ© des vĂȘtements. « Ils retrouvent la dignitĂ© de leurs attributs qu’ils avaient de leur vivant[1].» La procession monte sur un escalier en cristal vers un portail Ă  l’architecture gothique, inspirĂ© de celui du Jugement dernier de Martin Schongauer. Memling Ă©tait lui-mĂȘme allemand. Avant de partir pour les Flandres, il avait eu l’occasion d’étudier ses Ɠuvres. Un pape dont la tiare dĂ©passe au-dessus des tĂȘtes a dĂ©jĂ  atteint le portail, suivi d’un cardinal et d’un Ă©vĂȘque Ă  qui on rend sa mitre. Les Ă©lus sont accueillis par des Anges musiciens entourĂ©s d’une sorte de halo lumineux.

Le volet de droite

Les corps des damnĂ©s sont prĂ©cipitĂ©s dans le tournoiement des flammes de l’enfer par des dĂ©mons hybrides et zoomorphes tenant « toutes sortes d’armes et d’instruments de torture rougeoyants[1]. »

Verso du volet de droite

Aby Warburg a identifié, le premier, le blason (Loi, bande, ornée de trois tenailles) de Caterina Tanagli agenouillée devant la statue de saint Michel.

Verso du volet de gauche

Angelo Tani prie devant une statue de la Vierge à l’Enfant.

Notes et références

  1. Dirk de Vos, Hans Memling, Ludion, 1994
  2. André Rochon, La Jeunesse de Laurent le Magnifique, Les Belles Lettres, 1963.
  3. Sidinghusen, Valandt et Niverhoff.
  4. Aby Warburg, Essais florentins, Klinksieck, , « L'art flamand et la Renaissance florentine ».
  5. Notice des tableaux exposés dans la galerie Napoléon, (lire en ligne), p. 37-38.
  6. BĂ©nĂ©dicte Savoy, Patrimoine annexĂ© : les biens culturels saisis par la France en Allemagne autour de 1800, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2003.
  7. André Grabar, l'Empereur dans l'Art byzantin, 1936.
  8. Warburg 1990, p. 146 identifie l'homme agenouillé sur le plateau de droite Tommaso Portinari.
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