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Jules Cottet

Jules Gaspard Cottet né à Bonneville (Haute-Savoie) le et mort le à Paris (7e arrondissement) est un médecin français. Spécialiste des reins et de médecine thermale, il est reconnu pour avoir créé la cure de diurèse.

Jules Cottet
Description de cette image, également commentée ci-après
Buste du Dr Jules Cottet par le sculpteur H. Prey.
Nom de naissance Jules Gaspard Cottet
Naissance
Bonneville (Haute-Savoie) (France)
Décès
Paris (France)
Nationalité Drapeau de la France France
Résidence Villa Gabrielle, 26 avenue des Sources, Évian-les-Bains

Milieu familial

Jules Cottet est le fils de Jacques Joseph Henri Cottet, juge au tribunal de première instance de Bonneville, et de Léonie Daruty[1]. Sa famille, d’origine auvergnate, se fixe à Évian pour permettre au père de surveiller des terrains et des vignes dont il était propriétaire. Le grand-père, d'ailleurs, y avait été notaire. Deux sœurs vivent au foyer familial dont une épousa à Évian Alfred Ernst, critique musical spécialiste de Richard Wagner[2]. Jules a aussi un frère aîné, Charles Cottet (1863-1925), peintre de grand talent, membre de « La Bande noire », groupe de cinq peintres, disciples de Gustave Courbet et de la tradition classique.

Formation et carrière scientifique

Jules Cottet passe son baccalauréat à Thonon-les-Bains au collège des Marianistes. Il s’oriente rapidement vers la médecine et se retrouve en 1896 externe à l’hôpital Beaujon à Paris. Tout d’abord intéressé par la bactériologie, il travaille à l'hôpital et à l'Institut Pasteur.

« Il forme avec Hallé et Zuber, Rist et Guillemot, sous l'égide de Veillon, ce bourru bienfaisant, des études sur la bactérie urinaire de Clado-Albarran, qu'Achard et Jules Renault identifieront plus tard au colibacille : et surtout sur les anaérobies urinaires qui compliquent, disait-il, toujours les infections de la vessie ou de la prostate et font des gangrènes et des escarres désespérantes et fétides.»[3].

Interne à l’hôpital Necker sous la direction de Félix Guyon, le père de l’urologie française, il consacre sa thèse aux recherches bactériologiques sur les suppurations péri-uréthrales et obtient son titre de docteur en médecine en 1899.

Fort de ses connaissances en urologie, il s'installe dès 1899 à Évian-les-Bains (Haute-Savoie) où il acquiert rapidement une grande renommée. Il deviendra président de la Société médicale d’Évian, vice-président de la Société d'hydrologie et de climatologie de Paris et, à compter du , membre correspondant de l’Académie de médecine[4].

« Jules Cottet travailla beaucoup ; il adorait la mĂ©decine et la pratique mĂ©dicale. Outre une clientèle immense, absorbante, Ă©reintante comme celle des grands mĂ©decins d'eaux, Ă  laquelle sa philosophie et son calme, son exactitude scrupuleuse aussi, lui permettaient de rĂ©sister, outre ses charges familiales, son goĂ»t de l'intimitĂ© et du foyer, son amour de la lecture et du coin de feu, il se consacra avec passion au rein et Ă  l'Ă©limination rĂ©nale. Il Ă©tait ordonnĂ©, mĂ©thodique, mĂ©ticuleux. Il profitait de tous les enseignements de la clinique. Un jour, il constata sur une de ses malades assez nerveuse et intoxiquĂ©e et qui ne buvait pas, l'effet bienfaisant d'une cure d'eau d’Évian ; il tira de son observation une sĂ©rie de conclusions pratiques et techniques. Il pense ensuite que cette eau, que connaissait dĂ©jĂ  le marquis de Lessert[5] et dont le Dr Tissot avait Ă©prouvĂ© les bienfaits dès 1789, pouvait lui servir de mĂ©dicament et son Ă©limination de test d'exploration rĂ©nale. C'est un fait privilĂ©giĂ©, comme disait Widal, bien observĂ© et qu'il ne nĂ©gligea pas, dont sortit la cure de diurèse : […] Il opposa l'activitĂ© sĂ©crĂ©toire du rein normal Ă  sa passivitĂ© mĂŞme fonctionnelle, il insista sur le transit prĂ©rĂ©nal de l'eau qui conditionne la diurèse, sur le pouvoir concentrateur qui la parfait ; sur le rapport urĂ©e sanguine sur urĂ©e urinaire qui n'a Ă©tĂ© que perfectionnĂ© et raffinĂ©, codifiĂ© par Ambard ; sur les troubles osmotiques du sel et de l'eau. »[3]

De 1894 à sa mort, en 1959, le docteur Cottet publiera une douzaine de publications qui confirmeront sa notoriété.

Médaille en hommage au docteur Jules Cottet. Bronze, gravure de Raoul René Alphonse Bénard (1881-1961), 1949. Collection Mike Coleman.

Mariage et distinctions

Vers 1900, Jules Cottet fait la connaissance de Jane-Elisabeth Dupuy, fille d’un notaire Ă©vianais. Le mercredi , Le Figaro annonce :

« Le mariage du docteur Cottet, frère du peintre bien connu, avec Mlle Jane-Elisabeth Dupuy, nièce de Mme Hériot, a été célébré hier, en l'église Notre-Dame des Victoires, au milieu d’une nombreuse et élégante assistance. Les témoins du marié étaient : le docteur Guyon et le docteur Gilbert, professeurs à la Faculté de médecine; ceux de la mariée, M. F. Larmande, professeur à la Faculté de droit, son oncle et M. Finaly. La quête a été faite par M. Paul Loubet, fils du Président de la République, le docteur Gisèle, MM. Auguste et Olympe Hériot, qui accompagnaient Mlles Geneviève Guillaumet, Germaine Letellier, Angèle Finaly, Virginie Hériot, quatre charmantes demoiselles d'honneur[6]. »

Jules Cottet aura deux enfants : Jean (1905-2003) qui deviendra lui aussi mĂ©decin et Gabrielle (1904-2003) qui Ă©pousera le docteur Jacques Decourt (1898-1989).

Reconnu pour sa haute conscience professionnelle et ses contributions scientifiques, Jules Cottet sera nommé chevalier de la Légion d’Honneur le puis officier le .

Un médecin épris de littérature

Dans son Ă©loge funèbre prononcĂ© Ă  l’AcadĂ©mie de mĂ©decine le , le professeur Maurice Loeper tĂ©moignait de l’amour de Jules Cottet pour la lecture et la littĂ©rature. Quelque soixante ans plus tĂ´t, un autre tĂ©moin, autrement cĂ©lèbre, devait dĂ©jĂ  en faire Ă©tat. En effet, en , lors de son deuxième sĂ©jour Ă©vianais, le jeune Marcel Proust Ă©crit Ă  sa mère :

« Le docteur Cottet a passé longtemps avec moi hier. Tu peux dire à Robert[7] qu'au point de vue littéraire moderne il est d'une culture prodigieuse pour un médecin et qu'il sait par cœur Maison du Berger[8] etc. etc. »[9]

Le futur auteur d’À la Recherche du temps perdu avait fait sa connaissance quelques jours auparavant. Une grande estime, sinon une rĂ©elle amitiĂ©, liera les deux hommes, comme en tĂ©moigne, plusieurs annĂ©es plus tard, cette dĂ©dicace d’un exemplaire de Du cĂ´tĂ© de chez Swann : «  au docteur Cottet. Souvenir lointain d’un ami dont l’absence n’a pas diminuĂ© mais mĂ»ri l’attachement. Son affectionnĂ© Marcel Proust »[10].

Certains critiques ont pensĂ© que Proust s’était inspirĂ© de Jules Cottet pour composer, dans la Recherche, le personnage du docteur Cottard mais, comme le fait justement remarquer George D. Painter, Cottet « ne ressemblait que par son nom au docteur Cottard, car il Ă©tait charmant et cultivĂ©. » [11] . Marcel Proust fut Ă©galement inspirĂ© par un autre nom liĂ© au docteur Ă©vianais : la famille Cottet possĂ©dait une maison de campagne Ă  FĂ©ternes, petite ville de la rĂ©gion. L’auteur de la Recherche, sĂ©duit par ce nom, le reprendra (en omettant toutefois le « s » final) pour baptiser la maison de campagne de la marquise douairière de Cambremer. Le modèle de cette rĂ©sidence fictive fut en rĂ©alitĂ© « la villa Bassaraba, propriĂ©tĂ© de la princesse de Brancovan Ă  Amphion, au bord du lac LĂ©man » [12].

La princesse de Brancovan était la mère de la poétesse Anna de Noailles. On peut supposer que le docteur Cottet fréquenta aussi cette dernière car l’abbé Mugnier note, dans son Journal en date du , l’avoir rencontré à Paris, rue Scheffer, précisément chez la comtesse de Noailles.

La Villa Gabrielle (Évian) vers 1910 avec, en arrière-plan, l'hôtel Splendide et l'hôtel Royal.
La Villa « La Belle Époque » (ex-villa Gabrielle), 26 av. des Sources à Évian en 2015.

La villa Gabrielle, lieu de mémoire de la Belle Époque évianaise

Au moment de l’obtention de son grade de docteur, entre 1898 et 1899, Jules Cottet s’était fait construire en pleine ville d’Évian « une maison confortable et classique, aux murs solides et il l'aimait. Il en aimait le décor un peu sévère et l'atmosphère paisible, il aimait son jardin, ses vieux arbres. »[3]

NommĂ©e par la suite « villa Gabrielle », sans doute après la naissance de sa fille, cette belle maison de style nĂ©o-renaissance est aujourd’hui encore visible Ă  Évian, au 26 avenue des Sources, non loin de l’ancienne Buvette Cachat. Elle porte dĂ©sormais le nom de « villa La Belle Époque », nom donnĂ© par une famille Ă©vianaise l’ayant acquis peu après la mort du docteur Cottet, au dĂ©but des annĂ©es soixante.

Cette maison a été fréquentée plusieurs fois par Marcel Proust, comme l'atteste sa correspondance de l’été 1899[13]. Elle possède en son rez-de-chaussée de splendides portes de bois sculpté et une montée d’escalier très ouvragée, typique des belles demeures de cette période.

Rachetée au milieu des années 1990, la villa est aujourd’hui la propriété du Conseil départemental de Haute-Savoie. Elle abrite les bureaux d’un Pôle médico-social (PMS). Son splendide jardin et ses vieux arbres ont disparu pour faire place à un parking. Espérons que les citoyens évianais sauront valoriser à l’avenir ce lieu unique de l’histoire et de la culture humaniste de leur ville.

Ĺ’uvres et publications

  • Pathologie et traitement de la luxation congĂ©nitale de la hanche par le Dr Ad. Lorenz ; Traduit par Jules Cottet ; PrĂ©cĂ©dĂ© d'une prĂ©face du Dr Brun. Paris : CarrĂ© et Naud , 1897.
  • Travail de la clinique des voies urinaires de Necker et du laboratoire de M. le professeur Grancher. Recherches bactĂ©riologiques sur les suppurations pĂ©ri-urĂ©thrales, par le Dr Jules Cottet, Paris : G. CarrĂ© et C. Naud , 1899. In-8° , 120 p.
  • Le Syndrome entĂ©ro-rĂ©nal aux stations hydrominĂ©rales françaises, par les docteurs Aine, Cottet, Goiffon, Mazeran et Schneider. Rapport prĂ©sentĂ© Ă  la sĂ©ance extraordinaire de la SociĂ©tĂ© d'hydrologie et de climatologie mĂ©dicale de Paris, le . Paris, L'Expansion scientifique française, impr.-Ă©dition, 23, rue du Cherche-Midi , 1928. (.) In-8, 74 p.
  • L'Emploi du sous-nitrate de bismuth dans le traitement des troubles nerveux et circulatoires paradigestifs (extra-systoles, douleurs prĂ©cordiales, migraines), en collaboration avec Raoul Bensaude. Extrait de La Presse mĂ©dicale. n°37, du . Paris, impr. A. Maretheux et L. Pactat ; Masson et Cie, Ă©diteurs, 120, boulevard Saint-Germain , 1931. In-16, 24 p.
  • ApprĂ©ciation de l'activitĂ© fonctionnelle rĂ©nale d'après la valeur du rapport du taux de l'urĂ©e sanguine Ă  l'urĂ©e urinaire des vingt-quatre heures (rapport urĂ©ique hĂ©mato-urinaire). Extrait de La Presse mĂ©dicale, . Paris, Masson , (1933). In-8°, 24 p.
  • Les Troubles de l'Ă©limination urinaire de l'eau (Ă©tude physio-pathologique et clinique). Coulommiers-Paris, impr. Brodard et Taupin ; Paris, Masson et Cie, 120, boulevard Saint-Germain , 1933. (.) In-8, 212 p. avec fig. et 48 p. d'annexes.
  • Contribution Ă  l'Ă©tude clinique du rapport urĂ©ique hĂ©mato-urinaire. Extrait de La Presse mĂ©dicale, . Paris, Masson , (1934). In-8°, 19 p.
  • Une nouvelle technique de dosage des sels biliaires dans le sang, ses rĂ©sultats cliniques, Paris, Édition Librairie Le François, 1935.
  • Les MĂ©thodes d'exploration rĂ©nale fondĂ©es sur la diurèse aqueuse. En collaboration avec Joseph Castaigne. Rapport prĂ©sentĂ© au Congrès de la Diurèse, Vittel, 27, 28, . Saint-Dizier, impr. de Brulliard , 1939. In-8°, 88 p.
  • ConsidĂ©rations physio-pathologiques et cliniques sur les azotĂ©mies extra-rĂ©nales par insuffisance de la diurèse aqueuse. Extrait de La Presse mĂ©dicale, 9-. Paris, Masson , (1941). In-8°, 19 p.
  • L'Exploration fonctionnelle des reins dans la pratique mĂ©dicale. Paris, l'Expansion scientifique française. Moulins, impr. de CrĂ©pin-Leblond, 1951 (1re Ă©d. 1948). In-16 (180 x 140), 207 p., graphiques.
  • Évian et sa cure de diurèse. PrĂ©face de LĂ©on Binet. Évian : impr. Munier , 1959. In-16 (20 cm), 88 p.

Bibliographie

  • Françoise Breuillaud-Sottas, Évian, aux sources d’une rĂ©ussite (1790-1914). Le Vieil-Annecy Ă©ditions, Annecy, 2008.
  • Claude Yvette Gerbaulet, Évian-les-Bains ...un patrimoine. ClĂ©opas Ă©ditions, Évian, 2013.
  • Jean-Michel Henny, Marcel Proust Ă  Évian. Étape d’une vocation. Neuchâtel, Chaman Ă©dition, 2015, 120 p.
  • Maurice Loeper, « Jules Cottet » in Bulletin de l’AcadĂ©mie nationale de mĂ©decine. Paris, , p. 80-85.
  • Arthur Mugnier, Marcel Billot (Ă©d.) et Jean d'Hendecourt (notes) (prĂ©f. Ghislain de Diesbach), Journal de l'abbĂ© Mugnier : 1879-1939, Paris, Mercure de France, coll. « Le Temps retrouvĂ© »,? 1985, 640 p.
  • George Painter, Marcel Proust 1871-1922. Tallandier / coll. « Texto », Paris, 2008.
  • Marcel Proust, Correspondance. Tome II, 1896-1901. Texte Ă©tabli, prĂ©sentĂ© et annotĂ© par Philip Kolb. Librairie Plon, Paris, 1976.
  • Jean-Yves TadiĂ©. Marcel Proust. Biographie. Éd. Gallimard / coll. « Folio », Paris. 1999.

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Archives nationales, Base Léonore, Dossier 19800035/0300/40293, p. 15 (consulté le 21 août 2015).
  2. Voir http://catalogue.bnf.fr/servlet/RechercheEquation?TexteCollection=HGARSTUVWXYZ1DIECBMJNQLOKP&TexteTypeDoc=DESNFPIBTMCJOV&Equation=IDP%3Dcb44217977b&host=catalogue. (consulté le 21 août 2015).
  3. Maurice Loeper, « Jules Cottet » in Bulletin de l’Académie nationale de médecine. Paris, février 1960, p. 80-85.
  4. Voir : http://bibliotheque.academie-medecine.fr/membres/membre/?mbreid=837. (consultĂ© le 21 aoĂ»t 2015).
  5. En réalité, comte de Lezer ou Laizer. Voir Françoise Breuillaud-Sottas, Évian, aux sources d’une réussite (1790-1914).
  6. Le Figaro du mercredi 1er avril 1903, p. 2:3
  7. Proust fait allusion à son frère, Robert Proust, lui aussi médecin.
  8. Un poème d’Alfred de Vigny que Proust affectionnait particulièrement.
  9. Marcel Proust, Correspondance, t. II, p. 327.
  10. Librairie Camille Sourget, Paris, Catalogue de livre rare n°6, p. 149.
  11. George D. Painter, Marcel Proust 1871-1922. Tallandier / coll. « Texto », Paris, 2008, p. 302.
  12. « Dictionnaire des lieux de la Recherche» in À la Recherche du temps perdu. 3 volumes, édités par André Alain Morello, Michelle Berman, Jo Yoshida, Thierry Laget. Préfaces de Bernard Raffalli. Index établis par Pierrette Crouzet-Daurat, Dominique Frémy, Françoise Gacon et Julie Paolini. Robert Laffont / coll. Bouquins, Paris, 1987, tome I, p. 205.
  13. Voir Marcel Proust, Correspondance, t. II, p. 327 et ss.
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