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Johann Naldi

Johann Naldi est un expert indépendant, chercheur en tableaux anciens et du XIXe siècle, membre de la Chambre syndicale de l’estampe, du dessin et du tableau (CSEDT) et du Syndicat national de la librairie ancienne et moderne (SLAM). Il s'est illustré dans la redécouverte d'œuvres disparues de grands maîtres[1]. En 2017, il découvre dans une collection particulière un ensemble d'œuvres inédites du mouvement des Arts incohérents, parmi lesquelles le Combat de nègres pendant la nuit, tableau de Paul Bilhaud réputé comme étant le premier monochrome de l'histoire de l'art[2]. Ces œuvres ont été classées Trésor national par le ministère de la Culture en 2021 à la demande du musée d'Orsay[3].

Johann Naldi
Biographie
Activité

Parcours

Autodidacte de formation, Johann Naldi commence son activité en 2003 après avoir fait la connaissance du peintre belge Pierre Saint-Sorny[4], né en 1914 et retraité dans le Sud de la France. En 2005, il transfère son activité à Paris et rencontre le réalisateur et collectionneur d'art Francis Warin (1930-2015), lui-même petit-neveu du grand collectionneur Alphonse Kann dont la collection fut une des quatre plus importantes à être pillées en France par les nazis[5]. C'est à son contact que Johann Naldi travaille sur son premier dossier d'importance, un tableau inédit de Théodore Géricault (1791-1824) représentant La Main gauche de l'artiste, exposé au musée de la Vie romantique en 2015[6].

DĂ©couvertes

Femme nue couchée au bord de l'eau ou La Grande Baigneuse, achetée en 2013. L'attribution de cette toile de 1869 à Gustave Courbet fait débat.

Spécialisé dans l'art du XIXe siècle, Johann Naldi a découvert entre autres plusieurs œuvres inédites de Théodore Géricault, Eugène Delacroix, Paul Delaroche, Gustave Courbet[7] et John Constable. Dans son ouvrage Les anartistes, le philosophe et essayiste Michel Onfray - qui lui dédie son livre - qualifie Johann Naldi d'« authentique découvreur de trésors[8]. » Certaines de ses attributions ont cependant fait l'objet de controverses chez certains critiques[9]. Lors du bicentenaire de la mort de Gustave Courbet, l'une de ses découvertes, un grand nu féminin, a été intégré à une exposition au musée Gustave Courbet à Ornans[10] où il était présenté à côté du célèbre tableau La Source, faisant partie des collections du musée d'Orsay[11]. En 2017-2018, il fait une découverte importante en remettant au jour un ensemble d'œuvres du mouvement des Arts incohérents, classé trésor national en 2021, pour laquelle il publie avec le professeur Phillip Dennis Cate un ouvrage de référence [12]. Johann Naldi se félicite du soutien obtenu de Laurence des Cars à cette occasion[13]. Les œuvres ayant fait l'objet de ce classement ont été brièvement exposées à l'Olympia en avril 2022, cent-trente ans après que les Incohérents y ont organisé leur ultime manifestation[14].

Débat et polémique

La dĂ©couverte revendiquĂ©e par Johann Naldi - celle des Ĺ“uvres attribuĂ©es au mouvement des Arts incohĂ©rents - a Ă©tĂ© discutĂ©e par certains historiens de l'art, universitaires ou conservateurs, tels Jean-Hubert Martin, Denys Riout ou Corinne Taunay. Le 15 avril 2022, le quotidien LibĂ©ration publie une enquĂŞte dĂ©taillĂ©e qui fait Ă©tat de ces doutes[15], Ă©mis sans conclusion dĂ©finitive[16], rappelant dans le mĂŞme temps l'implication de Denys Riout et ses positions initiales en faveur de l'authenticitĂ© des Ĺ“uvres - consultables dans la revue Switch on paper[17]. L'enquĂŞte en question laisse Ă©galement apparaĂ®tre que Corinne Taunay a tentĂ© en vain de faire commerce des Ĺ“uvres redĂ©couvertes par le biais de la maison de ventes de Pierre BergĂ© & associĂ©s[18], proposant ainsi aux propriĂ©taires des Ĺ“uvres un scĂ©nario financier "gagnant-gagnant"[19]. A la suite de cet article, relayĂ© par une chronique sur les ondes de France Info [20] d'autres mĂ©dias, y compris Ă  l'Ă©tranger, se font l'Ă©cho de ces questionnements[9]. Alors que Johann Naldi fait du classement comme trĂ©sor national une marque de reconnaissance , un conservateur du musĂ©e d'Orsay a pris soin de prĂ©ciser qu' un classement comme trĂ©sor national n'est en rien un certificat d'authenticitĂ©, mais une simple mesure de protection temporaire empĂŞchant l'exportation des Ĺ“uvres d'art pendant trente mois, le temps de leur expertise[21]. La question de l'absence de provenance traçable des Ĺ“uvres est Ă©galement questionnĂ©e, certains commentateurs considĂ©rant que le traçage rĂ©trospectif des Ĺ“uvres est une composante essentielle de leur authentification. Pour sa part, Johann Naldi conteste cette affirmation, avançant « qu’il n’a jamais existĂ©  le moindre horizon d’attente sur le marchĂ© de l’art concernant les productions des Arts incohĂ©rents » et que « la mĂŞme logique prĂ©vaut Ă©videmment concernant l’absence de traçabilitĂ© en matière de provenance, ces Ĺ“uvres rĂ©putĂ©es sans grand intĂ©rĂŞt et « sans doute perdues Ă  jamais » (Cf. Denys Riout), longtemps ramenĂ©es Ă  leur seule part carnavalesque, blagueuse et globalement niĂ©e dans leur avant-gardisme ayant tout simplement et très logiquement concouru Ă  la perte d’information les concernant »[19]. Ă€ l'appui de cette thèse le Professeur Phillip Dennis Cate, Ă©minent spĂ©cialiste des Arts incohĂ©rents et soutien des positions de Johann Naldi, assure que "si la question de la provenance peut se poser pour des toiles de maĂ®tres, elle n’a pas de sens pour des Ĺ“uvres considĂ©rĂ©es comme mineures Ă  l’époque"[18]. Sur cette question Bruno Chenique, docteur en histoire de l'art, affirme que "des tableaux qui rĂ©apparaissent, c'est le quotidien du marchĂ© de l'art"[18]. Johann Naldi maintient que sa dĂ©couverte - qui prĂ©sente d'importantes implications financières , puisqu'il en demande 10 millions d'euros pour la vente - est authentique, s'appuyant sur une publication Ă©tablie sous sa direction publiĂ©e aux Ă©ditions Lienart[12] dans laquelle il dĂ©veloppe un appareil argumentaire substantiel. A ce jour, aucune preuve de l'inauthenticitĂ© des Ĺ“uvres redĂ©couvertes ne semble avoir Ă©tĂ© administrĂ©e par le biais d'une publication rigoureuse Ă  caractère scientifique. Dans un article paru en octobre 2022 dans la revue Critique, le Professeur Daniel Grojnowski, autre Ă©minent spĂ©cialiste des Arts incohĂ©rents, note que Johann Naldi a fourni par ses travaux de recherche Ă  l'essayiste Michel Onfray un dossier documentaire de qualitĂ©[22]. Principal thurifĂ©raire de la « dĂ©couverte historique » de Johann Naldi, qui lui permettrait d'Ă©tayer son entreprise de « dĂ©boulonnage » des principales figures de l'avant-garde artistique du XXe siècle, Michel Onfray, une semaine après la publication de l'enquĂŞte de LibĂ©ration, considère comme « nĂ©gationnistes » les chercheurs qui « sèment le doute » en dĂ©pit de l'absence d'un faisceau de preuve[23]. C'est la deuxième fois que Michel Onfray prend position pour une Ĺ“uvre d'art au cours de sa carrière de philosophe-essayiste. En 2019, il avait attribuĂ© un portrait de Machiavel Ă  LĂ©onard de Vinci. Une partie de la communautĂ© scientifique a rĂ©futĂ© cette attribution[24]. Dans son ouvrage consacrĂ© aux Arts incohĂ©rents, Johann Naldi explore l'hypothèse d'une connaissance du Combat de nègres pendant la nuit par le peintre suprĂ©matiste russe Kasimir Malevitch, le monochrome de Paul Bilhaud ayant pu constituer l'une des sources probables du CarrĂ© noir sur fond blanc[12]. L'historien Andrew Spira, diplĂ´mĂ© du Courtauld Institute et ancien conservateur au Victoria and Albert Museum de Londres, a Ă©galement soutenu cette hypothèse en reproduisant dans un essai le tableau de Paul Bilhaud redĂ©couvert[25]. Un article paru dans Russian Beyond le fait Ă©galement Ă©cho de cette dĂ©couverte, reproduisant le monochrome au cĂ´tĂ© du CarrĂ© noir de Malevitch[26]. Le , le professeur Astrid Mania de l'universitĂ© de Hambourg a dĂ©veloppĂ© une rĂ©flexion quant Ă  l'importance de cette dĂ©couverte[27].

Bibliographie

  • Johann Naldi (sous la direction de), Arts incohĂ©rents - DĂ©couvertes et nouvelles perspectives, Paris, Lienart Ă©ditions, 2022.
  • Michel Onfray, Les anartistes : Le trĂ©sor retrouvĂ© des "Arts incohĂ©rents", Albin Michel, 2022.
  • Johann Naldi, avec la collaboration de Rodolphe Trouilleux, Hors cadre, Ă©ditions Herscher / Humensis, 2023.
  • Johann Naldi, Catalogue raisonnĂ© des Ĺ“uvres inĂ©dites et retrouvĂ©es des Arts incohĂ©rents (Ă  paraĂ®tre aux Ă©ditions Lienart)[28].

Notes et références

  1. Isabelle Lortholary, « Les Arts incohérents, la malle au trésor », Point de vue,‎ , p. 46-49 (lire en ligne)
  2. Philippe Dagen, « 17 œuvres des Arts incohérents : un trésor redécouvert dans une malle », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  3. « Longtemps disparues, des œuvres des "Arts incohérents" retrouvées et classées trésor national », Le Figaro,‎ (lire en ligne)
  4. « "Pierre Saint-Sorny", 4 décembre 2005 - 15 janvier 2006, musée d'Art et d'Histoire de Provence, Grasse Exposition temporaire "La Provence de Pierre Saint-Sorny", 2002, musée d'Art et d'Histoire de Provence, Grasse »
  5. I. Le Masne de Chermont et D. Schulmann, Le pillage de l'art en France pendant l'occupation, Mission d'étude sur la spoliation des Juifs de France, Paris, La Documentation française, , p. 21-22
  6. Visages de l'effroi, violence et fantastique de David à Delacroix, Paris, musée de la Vie romantique, Lienart, 2 novembre 2015 - 28 février 2016 (ISBN 978-2-35906-147-5), p. 125
  7. Niklaus Manuel Güdel, Gustave Courbet - Une enquête sur le paysage, les presses du réel, (ISBN 978-2-37896-111-4), p. 151
  8. Michel Onfray, Les anartistes, Paris, Albin Michel, (ISBN 9782226472496), p. 9-13
  9. Boris Senff, « Incohérences partout, Incohérents nulle part », La Tribune de Genève,‎ (lire en ligne)
  10. Sous la direction de Diana Blome et Niklaus Manuel Güdel, Courbet / Hodler, Une rencontre, musée Gustave-Courbet, Ornans, Editions Notari, 31 octobre 2019 - 6 janvier 2020 (ISBN 978-2-940617-35-7), p. 180-181
  11. Guillaume Lasserre, « Bonjour Monsieur Hodler », sur Le Club de Mediapart,
  12. Johann Naldi (sous la direction de), Arts incohérents - Découvertes et nouvelles perspectives, Paris, Editions Lienart, , 232 p. (ISBN 978-2-35906-366-0)
  13. voir Vincent Noce dans la Gazette Drouot du 16 juin 2023, page 12
  14. « À l'Olympia, des anartistes et des arts incohérents ! », sur CULTURETOPS,
  15. Cf. Emmanuel Fansten, Guillaume Gendron, Suspicions autour de deux chefs-d'œuvre. Révélations sur la malle qui a fait trembler le monde de l'art
  16. « L'authenticité du premier monochrome, peint au XIXe siècle, est remise en question. », sur Franceinfo & AFP,
  17. Arnaud Labelle-Rojoux, « Redécouverte des Arts incohérents. Quand la légende devient réalité. Conversation avec Denys Riout. », sur Switch on paper,
  18. Emmanuel Fansten, Guillaume Gendron, « Suspicions autour de deux chefs-d'œuvre. Révélations sur la malle qui fait trembler le monde de l'art. », Libération,‎ (lire en ligne)
  19. Johann Naldi, « Girouettes, doutes irrationnels et problèmes de méthode. »,
  20. France Info Culture, chronique du 16 avril 2022, lire en ligne
  21. Cf. dans l'enquête de Libération, la précision apportée par Emmanuel Coquery, conservateur général du patrimoine.
  22. Daniel Grojnowski, « De l'Art et du Cochon », Critique,‎ n°905, octobre 2022, p. 876-878
  23. [vidéo] Au micro d'André Bercoff sur Sud-Radio le 22 avril 2022 Interview de Michel Onfray par André Bercoff, Sud-Radio, 22 avril 2022
  24. Cf. Stéphane Toussaint, La barbe de Machiavel. Le « n’importe quoi » médiatique comme un des beaux-arts, La Tribune de l'art, 18 octobre 2019
  25. Andrew Spira, « Precedents of the Unprecedented, Black Squares Before Malevich. », sur The Public Domain Review,
  26. Gueorgui Manaïev, « Sept faits surprenants au sujet du légendaire Carré noir de Malevitch », sur Russian Beyond,
  27. Prof.Dr. Astrid Mania, « Les Incohérents », sur HFBK, Hambourg,
  28. « Arts incohérents », sur Gazette Drouot,
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