Isaac Schneersohn
Isaac Schneersohn, né le [1] à Kamianets-Podilskyï et mort le à Paris 16e[2], est un rabbin[3], industriel et archiviste juif russe.
Naissance | |
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DĂ©cĂšs |
(Ă 88 ans) 16e arrondissement de Paris |
Nom de naissance |
Isaac Schneersohn |
Nationalités | |
Activités | |
PĂšre |
Shneur Zalman Schneersohn (d) |
Fratrie |
Fishl SheneÊŒurson (d) |
Distinction |
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ĂmigrĂ© en France aprĂšs la PremiĂšre Guerre mondiale, il fonde Ă Grenoble en 1943 un centre de documentation qui, relocalisĂ© dans le quartier du Marais aprĂšs la LibĂ©ration, devient le Centre de documentation juive contemporaine (CDJC). Schneersohn en demeure le directeur ainsi que le rĂ©dacteur en chef de sa Revue jusqu'Ă sa mort.
Biographie
Jeunes années
Isaac Schneersohn naĂźt en 1879[4] ou en 1881 Ă Kamenetz-Podolsk[5], alors situĂ©e dans lâEmpire russe. Issu dâune illustre lignĂ©e hassidique qui remonte Ă Shneour Zalman de Liadi, le fondateur du hassidisme Habad, il est nommĂ© rabbin Ă l'Ăąge de seize ans et demi[6].
Officiant comme rabbin de la couronne (en) Ă Gorodnia puis Ă Chernigov, il est vite attirĂ© par les idĂ©es de la Haskala, entamant une carriĂšre dans les affaires et dans la politique, siĂ©geant comme membre du conseil municipal et maire adjoint de Riazan dans la rĂ©gion occidentale de la Russie[7]. Membre du parti Kadet (constitutionnel dĂ©mocrate)[8], il sâimplique particuliĂšrement dans l'Ă©ducation de la communautĂ© juive russe, sâattachant Ă les faire franchir les quotas pour lâaccĂšs Ă lâenseignement supĂ©rieur en usant de ses contacts avec le Tsar et d'autres personnalitĂ©s.
Immigration en France
Ă la suite de lâaccession au pouvoir des bolchĂ©viques, Isaac Schneersohn immigre en France en 1920[4] - [7].
Ayant acquis la citoyennetĂ© française durant l'entre-deux-guerres[5], il dĂ©laisse le rabbinat bien quâil continue Ă observer les prĂ©ceptes du judaĂŻsme par Ă©gard pour sa femme. Devenu administrateur dĂ©lĂ©guĂ© de la SociĂ©tĂ© anonyme de Travaux mĂ©talliques (SATM, sise 10 rue Marbeuf Ă Paris)[9] - [10] et menant la vie dâun « grand seigneur hassidique », il tient un salon oĂč se rencontrent de nombreux dirigeants juifs parmi les plus connus, dont Chaim Weizmann et Vladimir Jabotinsky, Isaac Schneersohn adhĂ©rant lui-mĂȘme au sionisme rĂ©visionniste de ce dernier[7].
Il accueille aussi, Ă lâoccasion, ses cousins Menachem Mendel Horensztajn et Menachem Mendel Schneerson, futur dirigeant des hassidim Habad. Celui-ci pourrait dâailleurs avoir Ă©tĂ© influencĂ© dans ses choix acadĂ©miques par trois des fils de son cousin, Boris, Arnold, et Michel, Ă©tudiants Ă l'Ăcole spĂ©ciale des travaux publics, du bĂątiment et de l'industrie.
En 1938 il participe aux cÎtés du sculpteur Jacques Lifshitz et du peintre Marc Chagall à la transformation de « l'Arbeiter Orden » en Union des Sociétés Juives de France.
La Seconde Guerre mondiale
Lorsque la Seconde Guerre mondiale Ă©clate, les fils d'Isaac Schneersohn sont mobilisĂ©s comme officiers de rĂ©serve de l'armĂ©e française. Arnold et Boris, sont faits prisonniers. Isaac Schneersohn se voit dĂ©possĂ©dĂ© de son poste en vertu des lois d'aryanisation. InternĂ© dans un Oflag, Arnold y organise un noyau de rĂ©sistance, ce qui lui vaudra dâĂȘtre transfĂ©rĂ© dans un camp disciplinaire de LĂŒbeck. Quant Ă Boris, libĂ©rĂ© en , il participera aux combats dans les maquis de Dordogne. C'est donc Ă Mussidan, en Dordogne[9] - [11], qu'Isaac Schneersohn s'installe avec sa famille en 1941, aprĂšs avoir quittĂ© Paris pour Bordeaux. Il se rĂ©fugie ensuite Ă Grenoble, dans la zone d'occupation italienne.
Ă Grenoble, il conçoit le projet de crĂ©er un centre de documentation juive[9] en vue dâ« amasser des preuves et des archives, constituer des dossiers aisĂ©ment accessibles, prĂ©parer le travail des historiens ». Une rĂ©union se tient Ă son domicile ; y participent son secrĂ©taire LĂ©on Poliakov et une quarantaine de dĂ©lĂ©guĂ©s d'organisations juives[12] dont le philosophe Jacob Gordin[13] - [14]. Le comitĂ© de direction est composĂ©, outre Isaac Schneersohn lui-mĂȘme, de deux reprĂ©sentants du Consistoire central israĂ©lite de France, deux reprĂ©sentants de la FĂ©dĂ©ration des SociĂ©tĂ©s juives de France, deux reprĂ©sentants de l'Union des SociĂ©tĂ©s Juives de France, un reprĂ©sentant de l'Organisation Reconstruction Travail et un reprĂ©sentant du rabbinat.
Les travaux du comitĂ© sont interrompus par l'invasion allemande de la zone italienne en . Isaac Schneersohn et LĂ©on Poliakov rejoignent Paris lors de l'insurrection d'aoĂ»t 1944, rĂ©ussissant Ă prendre possession des archives du Commissariat gĂ©nĂ©ral aux questions juives, de l'ambassade d'Allemagne Ă Paris, de l'Ă©tat-major et, surtout, du service antijuif de la Gestapo[15]. Le Centre de Documentation Juive Contemporaine est officiellement fondĂ© peu aprĂšs dans le Pletzl, centre de la vie juive avant la guerre ; il publie dĂšs 1945 trois ouvrages et une quinzaine dâautres au cours des six annĂ©es suivantes, permettant aux historiens de la Seconde Guerre mondiale de dĂ©couvrir ce que fut la condition des Juifs de France au cours de la Shoah..
AprĂšs la guerre
En 1946, Isaac Schneersohn est nommé président du CDJC tandis que son fils Arnold en devient le trésorier à titre honorifique. Le 25 mars de cette année, il s'adresse au ministre de l'Information pour que son Bulletin, qui deviendra Le Monde juif, soit autorisé à paraßtre légalement. Il en sera le directeur jusqu'en 1969[9].
Proche du rabbin et historien David Feuerwerker qui participe en maintes occasions aux cĂ©rĂ©monies annuelles du CDJC en prĂ©sence des autoritĂ©s, Isaac Schneersohn se voit remettre la Croix de Chevalier de la LĂ©gion d'honneur des mains de futur prix Nobel de la paix RenĂ© Cassin le [9]. De lâavis dâĂric de Rothschild, sans lâaction dâIsaac Schneersohn,
« Bien des procĂšs auraient Ă©tĂ© perdus, [âŠ] bien des livres nâauraient pas Ă©tĂ© Ă©crits ou lâauraient Ă©tĂ© bien plus tard [âŠ], Ă une Ă©poque extrĂȘmement difficile oĂč le silence, la gĂȘne Ă©taient le lot des dĂ©portĂ©s survivants[16]. »
Lâ« archiviste de l'esprit contre la bureaucratie de la barbarie » meurt Ă Paris le , Ă l'Ăąge de 88 ans[17] - [18].
Publications
- De Drancy Ă Auschwitz, avec Georges Wellers - (1946) Paris : Ăditions du Centre. (OCLC 458932152)
- Activités des organisations juives en France sous l'occupation - (1947) Paris : Ed. du Centre. (OCLC 313311271)
- L'Ă©toile jaune, avec LĂ©on Poliakov, J. Godart - (1949) Paris : Ăditions du Centre de documentation juive contemporaine (Impr. des Ăditions polyglottes). (OCLC 459556534)
- La persĂ©cution des juifs dans les pays de l'Est prĂ©sentĂ©e Ă Nuremberg : recueil de documents, avec Henri Monneray; RenĂ© Cassin et Telford Taylor - (1949) Nuremberg, Germany. Paris : Ăditions du Centre. (OCLC 490644866)
- Les juifs sous l'occupation italienne, avec LĂ©on Poliakov, P. Hosiasson, J. Godart - (1955). CDJC; Paris : EdÌitions du Centre. (OCLC 490535438)
- Dix ans aprĂšs la chute de Hitler (1945-1955), avec RenĂ© Cassin; J M Machover - (1957) Paris : Ăditions du Centre de documentation juive contemporaine (Impr. des Ăditions polyglottes), (OCLC 461240459)
- Le Seder des 32 otages : l'histoire des otages en Russie pendant la premiÚre guerre mondiale et la lutte pour leur libération - (1966) Paris : Centre de Documentation Juive Contemporaine. (OCLC 13909240)
- D'Auschwitz à Israël, vingt ans aprÚs la Libération - (1968) Paris, C.D.J.C.. (OCLC 1949208) (OCLC 313379406)
- (yi) Lebn un kamf fun jidn in tzariĆĄn Rusland, 1905-1917. (La vie et lutte des juifs en Russie tsariste) - (1968). (OCLC 164671895)
Distinctions
Notes et références
- Certaines autres sources indiquent Ă tort une naissance en 1879
- Base LĂ©onore
- Isaac Pougatch, 1984, p. 107-140, lui consacre un chapitre intitulé Isaac Schneersohn, un grand seigneur hassidique.
- Benbassa et DeBevoise 2001, p. 181.
- Afoumado 2006, p. 14
- Wieviorka 1992, p. 414
- Heilman & Friedman (2010), p. 115.
- Wieviorka 1992, p. 415
- Afoumado 2006, p. 15.
- Shoah. Paris se souvient. Propos recueillis par MichĂšle Leloup. Entrevue avec Jacques Fredj. L'Express, 24 janvier 2005.
- Sur son sĂ©jour Ă Mussidan, voir Patrice Rolli, « Isaac Schneersohn ou l'archiviste de l'esprit contre la bureaucratie de la barbarie » : aux origines de la crĂ©ation du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC)", Le PĂ©rigord dans la Seconde Guerre mondiale, Chronique des annĂ©es noires du Mussidanais et de l'Ouest de la Dordogne, Ăditions l'Histoire en Partage, 2012
- Michel-Gasse, 1999, p. 28
- Cf. V. Kuperminc, 2001, pp. 3-7, & Léon Poliakov, témoignage du 28 avril 1997.
- La reconstruction de la bibliothÚque de l'Alliance israélite universelle, 1945-1955. Jean-Claude Kuperminc. Les belles lettres, Archives juives, 2001, no 34, pp. 98-113. [PDF]
- Isaac Schneersohn, fondateur durant la guerre du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC).
- sous « Discours de M. Jacques Chirac, Président de la République, à l'inauguration du Mémorial de la Shoah, le 25 janvier 2005 ».
- http://www.culture.gouv.fr/public/mistral/leonore_fr?ACTION=CHERCHER&FIELD_1=COTE&VALUE_1=19800035/988/14392
- (en) « French Bury Isaac Schneersohn; Founded Memorial to Unknown Jewish Martyr in Paris », sur jta.org, JTA, (consulté le ) : « Isaac Schneersohn, who founded the Memorial to the Unknown Jewish Martyr and a memorial museum of the Nazi Holocaust here, was buried Friday at services attended by Government officials and others. Mr. Schneersohn died last Wednesday at the age of 90. »
Annexes
Bibliographie
- Diane Afoumado, « Soixante ans dans l'histoire d'une Revue », Revue d'histoire de la Shoah Le Monde juif, Paris, MĂ©morial de la Shoah,â (ISSN 1281-1505, lire en ligne) [PDF]
- (en) Esther Benbassa et M. B. DeBevoise, The Jews of France : A History from Antiquity to the Present, Princeton University Press, (ISBN 0-691-09014-9)
- Florent Brayard, Le gĂ©nocide des juifs : entre procĂšs et histoire, 1943-2000, Centre Marc Bloch (Berlin), Ăditions Complexe, 2000. (ISBN 2-87027-857-8). p. 116.
- Schlomo Brodowicz. L'Ăąme d'IsraĂ«l. Les origines, la vie et l'Ćuvre de Menahem M. Schneerson, Rabbi de Loubavitch. PrĂ©face d'Ălie Wiesel. Ăditions du Rocher, 2011. (ISBN 978-2-268-07198-5) (La premiĂšre Ă©dition est de 1998)
- Esther Benbassa, Histoire des Juifs de France, Paris, Seuil, coll. « Point Histoire », , 373 p. (ISBN 978-2-02-029504-8, OCLC 36309256)
- Jean-Yves Boursier, MusĂ©es de guerre et mĂ©moriaux : politiques de la mĂ©moire, Ăditions MSH, 2005. (ISBN 2-7351-1079-6). p. 53.
- (en) Samuel C. Heilman & Menachem M. Friedman. The Rebbe. The Life and Afterlife of Menachem Mendel Schneerson. Princeton University Press: Princeton and Oxford. 2010. (ISBN 978-0-691-13888-6)
- (en) Julian Jackson, France: The Dark Years, 1940-1944, Oxford University Press, 2003. (ISBN 0-19-925457-5). p. 14.
- AndrĂ© Kaspi, Les Juifs pendant l'Occupation, Paris, Ăditions du Seuil, 1991. (ISBN 2-02-013509-4)
- (en) Lisa Moses Leff. The Archive Thief: The Man Who Salvaged French Jewish History in the Wake of the Holocaust. Oxford University Press, 2015. (ISBN 978-0-19-938095-4).
- Michel-Gasse, Dictionnaire-guide de la généalogie, Paris, J.-P. Gisserot, coll. « Collection Bien connaßtre », , 127 p. (ISBN 978-2877474139, OCLC 42022489, lire en ligne)
- Nieszawer et Princ, Histoires des artistes Juifs de l'Ăcole de Paris, 1905-1939, (DenoĂ«l, 2000 - Somogy, 2015) Les Ă©toiles Ă©ditions, 2020, p.362-363.
- Isaac Pougatch. Figures juives de Théodore Herzl à Ida Nudel. Ramsay: Paris, 1984 (cf. Renée Poznanski. La création du centre de documentation juive contemporaine en France (avril 1943). VingtiÚme SiÚcle, Revue d'histoire, 1999, Volume 63, pp. 51-63, voir page 56 note 2.).
- (en) Tzvi M. Rabinowicz. Encyclopedia Of Hassidism. Jason Aronson: Northvale, New Jersey, London, 1996. (ISBN 1-56821-123-6)
- Patrice Rolli, « Isaac Schneersohn ou l'archiviste de l'esprit contre la bureaucratie de la barbarie » : aux origines de la crĂ©ation du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC)" (sur sa prĂ©sence Ă Mussidan).Le PĂ©rigord dans la Seconde Guerre mondiale, Chronique des annĂ©es noires du Mussidanais et de l'Ouest de la Dordogne, Ăditions l'Histoire en Partage, 2012
- (en) Alvin Hirsch Rosenfeld, Thinking about the Holocaust after half a century, Indiana University Press, 1997. (ISBN 0-253-33331-8). p. 281.
- (en) David B. Ruderman & Shmuel Feiner, Schwerpunkt: Early Modern Culture and Haskala, Vandenhoeck & Ruprecht, 2007. (ISBN 3-525-36933-6). p. 448.
- Annette Wieviorka, DĂ©portation et gĂ©nocide : Entre la mĂ©moire et lâoubli, Plon, , 506 p. (ISBN 978-2-259-02461-7, OCLC 406883216)
- Annette Wieviorka, : L'Ăšre du tĂ©moin, Paris, Plon, 1998, rĂ©Ă©ditĂ© comme L'Ăre du tĂ©moin, Hachette, « Pluriel », Paris, 2002. (ISBN 2-01-279046-1)
- (en) David S. Wyman & Charles H. Rosenzveig, The world reacts to the Holocaust, Baltimore & London, The Johns Hopkins University Press, 1996, p. 21.
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative aux militaires :
- Base LĂ©onore
- LĂ©on Poliakov, l'un des premiers historiens de la Shoah. TĂ©moignage recueilli le 28 avril 1997 Ă Massy par la Survivors of the Shoah Visual History Foundation.
- Discours de M. Jacques Chirac, Président de la République, à l'inauguration du Mémorial de la Shoah, le 25 janvier 2005.
- Le MĂ©morial de la Shoah dans le quartier du Marais Ă Paris, no10 du 15 mai 2009. Clionautes. [PDF]
- leperigorddanslasecondeguerre.centerblog.net/45-41-isaac-schneersohn-aux-origines-de-la-creation-du-cdjc
- Notice de l'artiste sur le site de Nadine Nieszawer consacrĂ© Ă l'Ăcole de Paris