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Intervalle de fluctuation

En mathématiques, un intervalle de fluctuation, aussi appelé intervalle de pari, permet de détecter un écart important par rapport à la valeur théorique pour une grandeur établie sur un échantillon. C'est un intervalle dans lequel la grandeur observée est censée se trouver avec une forte probabilité (souvent de l'ordre de 95 %).

Le fait d'obtenir une valeur en dehors de cet intervalle s'interprète alors en mettant en cause la représentativité de l'échantillon ou la valeur théorique. À l'inverse, le fait que la moyenne soit comprise dans l'intervalle n'est pas une garantie de la validité de l'échantillon ou du modèle.

Lorsque la grandeur observée est une proportion d'individus satisfaisant certains critères dans l'échantillon, l'intervalle de fluctuation est déterminé par la loi binomiale. Si la taille de l'échantillon n est suffisamment importante[1] et la proportion p vérifie np ≥ 5 et n(1–p) ≥ 5, alors cette loi est approchée par la loi normale en vertu du théorème central limite. Il en découle une formulation explicite de l'intervalle de fluctuation au seuil de 95 %, pour un échantillon de taille n censé satisfaire les propriétés avec une proportion p :

Si la taille de l'échantillon n ≥ 25 et la probabilité p varie entre 0,2 et 0,8, cet intervalle est parfois approché par un intervalle à la formulation plus simple :

Étude d'une proportion

Prendre une décision

L'intervalle de fluctuation est un outil important en statistiques qui permet de prendre des décisions avec un risque d'erreur contrôlé (souvent à 95 %). Il est important de comprendre que la construction d'un intervalle de fluctuation n'a de sens que lorsque la proportion p est connue, comme dans un lancer de pièce (p=0,5). Si cette proportion est inconnue, on fait appel à un intervalle de confiance et non de fluctuation.

Pile ou face

Simulation du lancer d'une pièce à pile ou face avec les premières valeurs[2] de random(2) de Free Pascal.
Nombre de lancers 20100100010000
Nombre de 1 12554964990
Proportion 60 %55 %49,6 %49,9 %

Une pièce de monnaie est dite équilibrée si elle tombe sur pile ou face avec la même probabilité de 0,5 (soit 50%). Cela signifie, en vertu de la loi des grands nombres, que sur un grand nombre de lancers, le côté pile apparaîtra à peu près aussi souvent que le côté face. Il est d'ailleurs possible de simuler un grand nombre de lancers à l'aide d'un générateur de nombres pseudo-aléatoire pour obtenir des fréquences d'apparition de plus en plus précises.

Cependant, si la proportion se rapproche de 0,5 avec le nombre de lancers, elle est très rarement égale à 0,5. La probabilité d'obtenir autant de fois chaque côté décroît même avec le nombre (pair) de lancers[3]. Par exemple, sur dix lancers, il y a moins d'une chance sur 4 d'obtenir exactement 5 fois chaque côté.

Loi de probabilité du nombre de sorties d'un côté d'une pièce équilibrée sur 10 lancers.
012345678910
Probabilité exacte 110241010244510241201024210102425210242101024120102445102410102411024
Valeur approchée 0,1 %0,9 %4,4 %11,7 %20,5 %24,6 %20,5 %11,7 %4,4 %0,9 %0,1 %

Les numérateurs des fractions affichées sont les coefficients binomiaux de rang 10.

Ce tableau montre que tous les nombres de sortie sont possibles, mais qu'il y a environ 98 % de chances d'obtenir au moins deux fois pile et deux fois face sur dix lancers.

Un intervalle de fluctuation peut donc être défini dans ce cas par [2 ; 8] pour le nombre de sorties de chaque côté, ce qui revient à donner un intervalle de fluctuation de 0,2 à 0,8 pour la fréquence d'apparition de chaque côté. Une pièce tombant au moins 9 fois du même côté (et donc moins d'une fois de l'autre) au cours de dix lancers sera donc suspecte, même si ce résultat n'est pas complètement impossible avec une pièce équilibrée.

Cas général

La même méthode peut être utilisée pour tester une probabilité différente de 0,5. En répétant une même expérience aléatoire ayant une certaine probabilité p de réussite, la variable aléatoire S associée au nombre de réussites suit une loi binomiale dont les paramètres sont le nombre d'expériences n et la probabilité p :

L'intervalle de fluctuation se calcule en éliminant les valeurs extrêmes de S qui représentent moins de 2,5 % de chaque côté. Cela revient à définir les entiers a le plus grand possible et b le plus petit possible tels que

Il est possible que l'une ou l'autre de ces valeurs corresponde à une valeur extrême (c'est-à-dire 0 ou n), notamment si le paramètre p est proche de 0 ou de 1.

L'intervalle de fluctuation pour la fréquence de réussite s'écrit alors :

Approximation à l'aide de la loi normale

Le théorème central limite stipule que la différence entre la fréquence observée et la fréquence théorique, multipliée par la racine carrée de la taille de l'échantillon, converge en loi vers une loi normale centrée de même variance que la loi de Bernoulli sous-jacente, donc d'écart type

.

Autrement dit, la fonction de répartition suivante

converge vers la fonction de répartition de la loi normale centrée réduite.

Or les quantiles de cette loi peuvent être calculés par approximation numérique. L'antécédent de 0,975 par la fonction de répartition vaut environ 1,96, d'où l'approximation suivante :

Par conséquent, la double inégalité suivante est vraie avec une probabilité de 0,95 environ :

Ces inégalités définissent donc une approximation de l'intervalle de fluctuation au seuil de 95 %.

Remarque. À la suite des diverses approximations du raisonnement, le résultat d'un seuil de 95 % n'est pas toujours assuré. On arrive à un résultat inférieur à 95 % pour certaines valeurs de p et n, par exemple

si n=141 et p=0,422 , alors ;
si n=222 et p=0,241 , alors ;
si n=1530 et p=0,1 , alors ;
si n ≥ 1636 et p=9n , alors .

Pour changer le seuil, il suffit de modifier le coefficient 1,96 par un autre quantile de la fonction de répartition de la loi normale centrée réduite.

Quantiles de la fonction de répartition de la loi normale centrée réduite.
Seuil de l'intervalle de fluctuation 90 %95 %98 %99 %99,5 %99,9 %
Valeur de la fonction de répartition 0,950,9750,990,9950,99750,9995
Valeur approchée du coefficient 1,641,962,332,582,813,29

Formule simplifiée

En majorant le coefficient 1,96 par 2 et en majorant le produit p(1–p) par son maximum (14), la formule précédente peut être simplifiée pour l'intervalle de fluctuation à 95 % par

La première majoration est une bonne approximation, tandis que la seconde majoration augmente de 25 % la longueur de l'intervalle lorsque la fréquence théorique p vaut 0,2 ou 0,8. Cette simplification est donc en général acceptée seulement si la fréquence théorique se situe entre ces deux valeurs.

L'inclusion de l'intervalle de fluctuation de la fréquence dans l'intervalle [0 ; 1] est alors automatique dès que la taille de l'échantillon est supérieure ou égale à 25. Lorsque n ≥ 25 et 0,2 ≤ p ≤ 0,8, la probabilité fluctue au-dessus de 93%, en se concentrant surtout entre 0.95 et 0.99 .

Quelle que soit la probabilité p entre 0 et 1, l'intervalle de fluctuation est au seuil de 91 % pour tout n ≥ 1, au seuil de 92 % pour tout n ≥ 7, de 93 % pour tout n ≥ 30, de 94 % pour tout n ≥ 57, de 95 % pour tout n ≥ 553.

Variance

Dans le cas d'un échantillon de n variables indépendantes d'une même loi normale centrée réduite, la variance observée au sein de l'échantillon, multipliée par n−1, suit une loi du χ² de paramètre n−1. L'intervalle de fluctuation peut alors être défini à l'aide des quantiles de la fonction de répartition correspondante.

Ce calcul permet de tester l'adéquation d'un échantillon à une loi normale.

Notes et références

  1. Il n'y a pas de seuil officiel pour la validité de cette approximation, mais les programmes de mathématiques de classe de seconde en France requièrent un effectif minimal de 30 pour la formule de l'intervalle de fluctuation.
  2. Le générateur random décrit toujours la même suite pseudo-aléatoire lors du lancement d'un programme, sauf en cas d'appel à l'instruction randomize.
  3. Cette probabilité est équivalente à 1n π lorsque le nombre 2n de lancers tend vers l'infini (voir le site de Chronomath pour un calcul explicite à l'aide de la loi binomiale et de la formule de Stirling). Pour un nombre impair de lancers, il est impossible d'obtenir autant de fois pile que face.
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