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Horacio Prieto

Horacio Martínez Prieto, né le à Bilbao et mort le à Paris, est un ouvrier du bùtiment, militant anarcho-syndicaliste d'origine basque, théoricien du mouvement libertaire espagnol et par deux fois secrétaire général de la Confédération nationale du travail (CNT) en 1934 et 1936[1].

Horacio MartĂ­nez Prieto
Image illustrative de l’article Horacio Prieto

Naissance
Bilbao
DĂ©cĂšs (Ă  82 ans)
Paris
Origine espagnol
Allégeance
Type de militance activisme
essayiste
Cause défendue Confédération nationale du travail
Fédération anarchiste ibérique
libertaire
anarcho-syndicalisme

Décrit comme défendant dans sa jeunesse un « anarchisme pur », il évolue vers un syndicalisme libertaire plus pragmatique, partisan d'un possibilisme libertaire assumant l'intervention dans le champ politique, y compris par une participation au pouvoir gouvernemental.

Pendant la Seconde République espagnole, aprÚs le soulÚvement nationaliste des 17 et 18 juillet 1936 en Espagne, il est avec Joan Peiró[2] l'un des principaux dirigeants de la Confédération nationale du travail, artisan majeur de la participation des anarcho-syndicalistes au gouvernement du Front populaire (1936-1937)[3] - [4].

En 1946, il appelle à la constitution d'un « Parti libertaire ».

Biographie

Une jeunesse rebelle

Il nait dans le quartier ouvrier d’Ollerías à Bilbao. Son pùre est cordonnier et sa mùre vendeuse de poisson.

En 1919, il constitue Ă  16 ans, son propre groupe anarchiste, les Sin Patria[5].

De 1921 à 1924, il est déporté à pied à Séville et fait plusieurs séjours en prison avant d'émigrer en France.

Il participe Ă  l’incursion rĂ©volutionnaire manquĂ©e de Bera. Il parvient Ă  regagner la frontiĂšre.

À Paris, il s’oppose à l'activisme insurrectionaliste de Juan García Oliver.

AprĂšs une nouvelle incarcĂ©ration en Espagne en 1929 et 1930, il retourne en France jusqu’en .

Dirigeant syndicaliste

S'affirmant comme un « anarchiste pur », il n'adhÚre que tardivement à la CNT, en 1931, lors de la proclamation de la Seconde République espagnole.

Sa premiĂšre brochure, Anarco-sindicalismo. CĂłmo afianzaremos la revoluciĂłn (Anarcho-syndicalisme : comment affermir la rĂ©volution) publiĂ©e en 1932, est vivement critiquĂ©e par la FĂ©dĂ©ration anarchiste ibĂ©rique (FAI), notamment les Ă©volutions qu'il prĂ©conise en matiĂšre de justice (tribunaux populaires), d’économie (fĂ©dĂ©rations syndicales d’industrie) et de dĂ©fense (armĂ©e rĂ©volutionnaire)[6].

En désaccord avec la stratégie insurrectionnelle de la FAI, il ne se rapproche pas des dissidents qui ont signé le Manifeste des Trente, dont il partage pourtant certaines analyses.

En 1932, avec trois dĂ©lĂ©guĂ©s, il se rend en URSS. À son retour, il publie un pamphlet critique sur le systĂšme soviĂ©tique, Facetas de la URSS (1933).

AprĂšs avoir Ă©tĂ© Ă  la tĂȘte du ComitĂ© rĂ©volutionnaire de la rĂ©gion Nord en 1933, il est nommĂ© vice-secrĂ©taire du ComitĂ© national de la ConfĂ©dĂ©ration nationale du travail, puis secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral en 1934. Il met en Ɠuvre des orientations pragmatiques avant d’ĂȘtre arrĂȘtĂ© et emprisonnĂ©[6].

Il dĂ©missionne de ses fonctions de secrĂ©taire de la ConfĂ©dĂ©ration Ă  l’issue du CongrĂšs de Ă  Saragosse : « Le refus des congressistes de prendre au sĂ©rieux l’urgence de se prĂ©parer Ă  la lutte armĂ©e et l’utopique rĂ©solution sur le ‘Concept confĂ©dĂ©ral du communisme libertaire’ l’amenĂšrent Ă  dĂ©missionner » remarque son fils et biographe CĂ©sar M. Lorenzo[7].

PersuadĂ© qu'il faut prendre en compte le pays rĂ©el, il se tourne vers ce qu'il appellera le « possibilisme libertaire ». Une doctrine qui paraĂźt scandaleuse Ă  de nombreux militants. Prieto est traitĂ© de « rĂ©visionniste », de rĂ©formiste. Lui se pose plutĂŽt en libertaire rĂ©aliste face Ă  des anarchistes « religieux »[5].

La révolution espagnole

AprÚs le soulÚvement nationaliste des 17 et 18 juillet 1936 en Espagne, il est le premier à prÎner la participation des libertaires au gouvernement. Pendant la révolution sociale espagnole de 1936, en septembre, il redevient secrétaire général de la CNT.

Commissaire Ă  la SantĂ© en Biscaye, il rĂ©dige une Charte du combattant, un rĂšglement militaire qui sert de base aux bataillons CNT de l’armĂ©e sous les ordres du gouvernement basque autonome.

AprĂšs sa rĂ©Ă©lection Ă  la tĂȘte de la CNT, il est partisan de la militarisation des milices confĂ©dĂ©rales et l’entrĂ©e des anarcho-syndicalistes au gouvernement de Madrid, mais l'opposition au sein de la CNT sur ces sujets l'oblige Ă  dĂ©missionner en .

À partir de l’automne 1937, il siĂšge Ă  nouveau au comitĂ© national de la CNT et nĂ©gocie l'unitĂ© syndicale avec l’Union gĂ©nĂ©rale des travailleurs (proche des socialistes).

Du 6 au Ă  Paris, il participe comme dĂ©lĂ©guĂ© de la CNT au congrĂšs extraordinaire de l’Association internationale des travailleurs[8] et en devient le secrĂ©taire en remplacement de Pierre Besnard[9].

Avec le ministre de la DĂ©fense Indalecio Prieto, il contribue Ă  rĂ©organiser l’économie et siĂšge au comitĂ© national du Front populaire antifasciste. Il est nommĂ© sous-secrĂ©taire Ă  la SantĂ©.

En 1938, il propose que la FĂ©dĂ©ration anarchiste ibĂ©rique devienne un Parti socialiste libertaire et participe Ă  la vie dĂ©mocratique et aux Ă©lections. Au plenum national d' de la CNT, il exprime sa conviction que « l'action vraiment dĂ©cisive ne peut s'exercer qu'Ă  partir des organes du pouvoir », les erreurs de l'anarchisme espagnol Ă©tant dues Ă  « l'esprit de naĂŻvetĂ© du Mouvement et Ă  son manque de plans concrets ». Et il prĂ©cise : « Je ne suis ni Bakounine ni Malatesta, je ne suis qu'Horace. [...] Le jour oĂč je pense que je ne suis plus anarchiste, je m'en irai. »[10]

Exil

AprÚs la défaite de la République et la retirada, il se réfugie en France avec sa mÚre et sa compagne.

AprĂšs l’Occupation, il participe aux activitĂ©s du Mouvement Libertaire Espagnol en exil dont il critique l'immobilisme : « coincĂ© entre le syndicat-secte d’un anarcho-syndicalisme fossilisĂ©, monolithique, en contradiction avec lui-mĂȘme, et le syndicat-parti d’un syndicalisme autosuffisant et opportuniste, idĂ©ologiquement rachitique ». Il publie El anarquismo español en la lucha polĂ­tica en 1946 et Marxismo y socialismo libertario en 1947, oĂč il dĂ©fend le besoin d’un parti libertaire et d’un État rĂ©gulateur[6].

Il dĂ©fend la tactique d’alliance antifasciste et accepte le ministĂšre des Travaux publics dans le gouvernement rĂ©publicain en exil (cabinet JosĂ© Giral)[11].

Le , il signe un manifeste appelant à la constitution d'un « Parti libertaire ».

Il prend ses distances avec l'activisme au dĂ©but des annĂ©es 1950, il travaille comme peintre en bĂątiment puis enseigne l’espagnol Ă  partir de 1957 jusqu’à sa retraite en 1972.

AprÚs la réunification de la CNT, il publie Posibilismo libertario en 1966.

Il meurt Ă  82 ans, le .

Commentaires

Sur l'imminence d'un coup d'État militaire en 1936

  • « [...] les Ă©lĂ©ments de droite sont prĂȘts Ă  provoquer un putsch militaire. [...] Le Maroc semble ĂȘtre le foyer principal et l'Ă©picentre de la conjuration. [...] Si les conjurĂ©s ouvrent le feu, il faut prendre une attitude d'opposition contre ces mesures extrĂȘmes, sans tolĂ©rer que la bourgeoisie libĂ©rale et ses alliĂ©s marxistes manifestent le dĂ©sir d'arrĂȘter le cours des Ă©vĂ©nements, en supposant que la rĂ©bellion fasciste soit vaincue dans l'Ɠuf. [...] Ou le fascisme ou la rĂ©volution sociale. » - , avant la tenue des Ă©lections qui voient la victoire du Front populaire[10].

Sur la participation gouvernementale

  • Selon Burnett Bolloten dans son ouvrage de rĂ©fĂ©rence La RĂ©volution espagnole : la gauche et la lutte pour le pouvoir : « Lorsqu'ils arrivĂšrent Ă  Madrid pour assumer leurs fonctions [en ] les ministres anarchistes demandĂšrent Ă  Horacio Prieto de leur dire « dans quel sens ils devaient agir ». Prieto rĂ©pondit qu'« ils avaient suffisamment d'expĂ©rience militante pour savoir ce qu'il convenait de faire dans l'intĂ©rĂȘt de la CNT ». Puis il ajouta : « Un libertaire, fut-il secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral, n'avait pas Ă  donner de consignes Ă  d'autres libertaires, Ă  les soumettre Ă  une quelconque discipline particuliĂšre ». Ils devaient agir selon leur bonne conscience, car la CNT n'Ă©tait pas le Parti communiste. »[12].

Sur les collectivisations pendant la révolution espagnole

  • « La bonne foi des collectivistes espagnols fut si proverbiale que nous pouvons la qualifier de foi de naĂŻfs, tant au commencement qu'Ă  la fin de la guerre. [...] [aprĂšs la suppression de l'argent] la majoritĂ© des Ăźlots collectifs ne pouvaient Ă©tablir le troc des produits puisqu'il y avait les mĂȘmes dans les environs ; la hĂąte les obligeait Ă  vendre aux villes, qui payaient avec l'argent et qui faisaient payer les marchandises vendues aux paysans ; et comme ceux-ci ne voulaient pas d'argent et ne pouvaient payer autrement ce qu'ils achetaient, ils perdaient toujours dans les transactions; et si une collectivitĂ© industrielle, ou un syndicat ou un Ă©tablissement de commerce entrait en rapport avec eux, il le faisait en spĂ©culant au dĂ©triment des camarades sur la production et les besoins paysans, comme aurait pu le faire un ex-maquignon ou un grossiste du commerce agricole. [...] Quelques semaines de rĂ©alisme rĂ©volutionnaire suffirent Ă  rĂ©habiliter l'argent si maudit. »[10]

Textes

  • (es) Anarcosindicalismo. CĂłmo hacemos la RevoluciĂłn, 1933.
  • (es) Facetas de la URSS, Santander, 1933.
  • (es) Los Problemas de la RevoluciĂłn Española, 1933.
  • (es) Anarquismo Relativo. CrĂ­tica de los Hechos y sugestiĂłn Revisionistas, MĂ©xico, 1948.
  • (es) El Anarquismo Español en la Lucha PolĂ­tica, 1946.
  • (es) Marxismo y Socialismo Libertario, 1947.
  • (es) Posibilismo libertario, Ivry-sur-Seine, 1966, (OCLC 492300171)[13].

Bibliographie

Notices

Articles connexes

Notes et références

  1. Freddy Gomez, CĂ©sar M. Lorenzo - Le mouvement anarchiste en Espagne, Le Monde libertaire, 14-20 septembre 2006, lire en ligne
  2. José Jornet, Républicains espagnols en Midi-Pyrénées : exil, histoire et mémoire, Presses Universitaires du Mirail, 2005, page 51.
  3. François Godicheau, La Guerre d'Espagne : République et révolution en Catalogne (1936-1939), Odile Jacob, 2004, page 132.
  4. (en) Antony Beevor, The Battle for Spain : The Spanish Civil War 1936-1939, Hachette UK, 23 août 2012, page 169.
  5. Édouard Waintrop, Martinez Lorenzo, l'historien critique, LibĂ©ration, 7 aoĂ»t 2001, lire en ligne.
  6. Joël Delhom, César M. Lorenzo : Horacio Prieto. Mon pÚre, Cahiers de civilisation espagnole contemporaine, 12|2014, lire en ligne.
  7. CĂ©sar M. Lorenzo, Horacio Prieto. Mon pĂšre, Les Ă©ditions libertaires, 2012, page 86.
  8. Dictionnaire des guérilleros et résistants antifranquistes : David Antona Rodríguez.
  9. Dictionnaire des anarchistes, 2014, Pierre Besnard.
  10. Israël Renof, Possibilisme libertaire, Noir et Rouge, n°41, mai 1968, pp. 16-23, lire en ligne.
  11. (es) Auñamendi Eusko Entziklopedia : Horacio Prieto.
  12. Burnett Bolloten, Elisabeth Scheidel-Buchet, La Révolution espagnole : la gauche et la lutte pour le pouvoir, Ruedo Ibérico, 1977, page 217.
  13. Burnett Bolloten, Elisabeth Scheidel-Buchet, La Révolution espagnole : la gauche et la lutte pour le pouvoir, Ruedo Ibérico, 1977, page 535.
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