Accueil🇫🇷Chercher

HĂ´tel des Roches Noires

L'hôtel des Roches Noires est un ancien hôtel de luxe de style Second Empire de 1866, construit sur les plages de la Manche de la station balnéaire de Trouville-sur-Mer, dans le Calvados en Normandie. Surnommé à ses débuts « le roi de la côte normande »[1], le bâtiment est inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques le , et le hall d'entrée est classé au titre des monuments historiques le [2]. Il est réputé pour avoir été lieu de villégiature de Marcel Proust et de Marguerite Duras.

HĂ´tel des Roches Noires
L'HĂ´tel en 2010.
Présentation
Type
Destination actuelle
appartements privés
Style
Architecte
Matériau
Briques rouge et ocre
Construction
Patrimonialité
Classé MH (hall d'entrée en )
Inscrit MH (façade, toit et terrasse en )
Localisation
Pays
RĂ©gion
Division administrative
Commune
Adresse
Coordonnées
49° 22′ 20″ N, 0° 05′ 02″ E
Localisation sur la carte du Calvados
voir sur la carte du Calvados
Localisation sur la carte de Normandie
voir sur la carte de Normandie
Localisation sur la carte de France
voir sur la carte de France

Historique

Cet hôtel est le second grand hôtel de luxe édifié sur cette partie de la côte normande. Construit par l'architecte Alphonse-Nicolas Crépinet avec, à l'origine, 75 chambres, puis 300 chambres en 1913, et éclairées à l'électricité depuis 1904, il est inauguré le .

  • Plage devant l’hĂ´tel.
    Plage devant l’hôtel.
  • L'hĂ´tel cĂ´tĂ© rue.
    L'hôtel côté rue.
  • Plaque rendant hommage Ă  Marguerite Duras.
    Plaque rendant hommage Ă  Marguerite Duras.

Considéré à l'époque comme le plus pittoresque, le plus original des grands palaces et un des plus modernes et confortables, il devient un des hauts lieux de villégiature à la mode de la haute société occidentale du Second Empire, de la Belle Époque et des années folles. Grands bourgeois et aristocrates français côtoient alors sur la côte normande milliardaires américains, aristocrates russes, industriels allemands ou financiers anglais…

L'hôtel est mis en vente aux enchères le [3].

Il est en partie rénové en 1924 et transformé par l'architecte Robert Mallet-Stevens qui en fait une vitrine de l'art déco français. L'architecte repense entièrement le grand hall d'entrée qui devient un espace aux proportions souveraines, aux lignes sobres avec de larges baies ouvrant sur la mer et soulignées en contre-jour par le graphisme net des huisseries. Le grand hall des Roches Noires est le seul de tous les intérieurs créés par l'architecte de l'entre-deux-guerres qui soit resté intact et n'ait pas été dénaturé ou postérieurement reconstitué. Les murs et piliers ont ainsi conservé leur enduit d'origine, très épais et rugueux, appliqué à grands coups de taloche et qui accroche de façon si singulière la lumière réverbérée depuis la plage. Le bar américain conçu par l'architecte au niveau du rez-de-jardin donnant directement sur la terrasse a disparu après 1945.

Durant la Seconde Guerre mondiale, il est réquisitionné en 1939 par les forces armées françaises comme hôpital complémentaire, puis il est occupé par l'armée allemande.

L'hôtel cesse son activité en 1949 et est mis en vente sous forme d'appartements privés.

Artistes et résidents

  • Claude Monet (1840-1926) reprĂ©sente l'hĂ´tel en peinture en 1870, intitulant cette peinture HĂ´tel des Roches Noires. Ă€ la veille de la guerre franco-prussienne, le peintre passe l'Ă©tĂ© 1870 Ă  Trouville et rĂ©alise ce tableau impressionniste de l'hĂ´tel qui vient de sortir de terre[4].
Le choix du sujet est directement influencé par Eugène Boudin[4] - [5] et ses fameuses représentations balnéaires de la grande bourgeoisie du Second Empire dont l'hôtel des Roches Noires constitue l'épicentre des mondanités. Monet sait aussi que c'est dans cette société qu'il pourrait éventuellement trouver quelque acheteur de ses œuvres. Le peintre ne peut toutefois séjourner dans un des palaces les plus chers d'Europe. Ainsi, chaque soir, après la séance de travail sur le motif, il remballe son matériel et quitte la terrasse face à la plage pour regagner l'hôtel de Tivoli, plus excentré, où il loge modestement avec sa famille[6]. L'œuvre de Monet, devenue une propriété de l'Etat français à la suite d'une donation en 1947, fait partie de la collection permanente du musée d'Orsay depuis l'ouverture de ce musée en 1986[5].
  • Marcel Proust (1871-1922) le frĂ©quente rĂ©gulièrement de 1880 Ă  1915. Durant les Ă©tĂ©s 1893 et 1894, Madame Proust et son fils Marcel occupent l’appartement 110 du premier Ă©tage.
  • Charles Gir (1883-1941) est l'auteur des trois frises artistiques d'ornement du hall de l'hĂ´tel[7].
  • L'actrice Emmanuelle Riva possĂ©da pendant trente ans un appartement au dernier Ă©tage des Roches Noires. En recevant en 2012 le prix Marguerite-Duras, la comĂ©dienne dĂ©clare : « La dernière fois que j'ai vue Marguerite Duras c'Ă©tait Ă  l'hĂ´tel des Roches Noires. Pour moi, elle Ă©tait comme une boule de feu avec des douceurs de cendre. »
  • Françoise Cadol s'inspire du hall de l'hĂ´tel, oĂą le temps s'est figĂ©, pour sa comĂ©die musicale L'HĂ´tel des Roches Noires de 2012, jouĂ©e au festival d'Avignon en juillet 2013.
  • Gustave Flaubert (1821-1880) est âgĂ© de 15 ans lorsqu'il tombe Ă©perdument amoureux sans retour, sur cette plage durant l'Ă©tĂ© 1836, d'Élisa SchlĂ©singer, alors âgĂ©e de 26 ans, qui deviendra l'amour imaginaire fantasmĂ© et l'Ă©gĂ©rie sentimentale platonique de toute sa vie. Il dĂ©crit cette passion dans ses romans MĂ©moires d'un fou et L'Éducation sentimentale…
  • Marguerite Duras (1914-1996), après avoir dĂ©couvert et ĂŞtre tombĂ©e amoureuse passionnĂ©e Ă  l'âge de 18 ans de Trouville-sur-Mer, lors d'un sĂ©jour de 1932 avec un cousin, acquiert en 1963 l'appartement no 105 (sĂ©jour, minuscule cuisine et deux chambres) de l'ancien palace. Elle y passe tous ses Ă©tĂ©s de 1963 Ă  1994, jusqu'Ă  sa mort en 1996.
Devenue personnalité locale très accessible et appréciée, elle fait de longues promenades sur la plage de l'hôtel et dîne presque tous les soirs à sa table réservée no 309 de la brasserie Le Central, où elle prend des notes sur sa nappe et aime manger des huîtres (lieux et table encore visités à ce jour par les touristes et admirateurs).
Elle trouve lĂ  une source d'inspiration inĂ©puisable pour rĂ©diger son Ĺ“uvre littĂ©raire et cite rĂ©gulièrement « Regarder la mer, c'est regarder le tout », « Je ne connais personne qui dès la première visite ne rĂŞve d'y revenir », et « J'aimerais qu'on m'appelle Marguerite Duras de Trouville Â»[8]… Elle fait rĂ©fĂ©rence Ă  ces lieux dans ses Ĺ“uvres Le Ravissement de Lol V. Stein de 1964, L'Amant de 1984, Emily L. de 1987 et Écrire de 1993.
Elle y pose également le décor de trois de ses films : La Femme du Gange de 1974, India Song de 1975 et Le Camion de 1977. La cinéaste tourne en 1981 dans le grand hall des Roches Noires l'intégralité de l'action du film Agatha et les Lectures illimitées, histoire d'une sœur (Bulle Ogier) et d'un frère (Yann Andréa) qui se retrouvent, des années plus tard, dans un hôtel intemporel au bord de la mer.
Entre 1980 et 1994, la photographe Hélène Bamberger vient régulièrement y réaliser la série de photos Marguerite Duras de Trouville.
Depuis 2001, l'association Marguerite-Duras remet tous les ans le prix Marguerite-Duras Ă  Trouville-sur-Mer.

Notes et références

  1. Gabriel Désert, La Vie quotidienne sur les plages normandes du Second Empire aux années folles, Paris, Hachette, 1983.
  2. Notice no PA14000023, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  3. Le Journal de Rouen, , p. 6.
  4. Laurence Madeline, « Un monde nouveau. Hôtel des Roches Noires », dans 100 chefs-d'œuvre impressionnistes, Editions Scala, , p. 30-31
  5. « Hôtel des Roches Noires. Trouville. Claude Monet (1840 - 1926) », sur Musée d'Orsay
  6. Dominique Lobstein,, Monet, Gisserot, (lire en ligne), p. 37
  7. Reportage, Poste-France, 11 mai 2014.
  8. Roland Godefroy, « Appelez-moi Marguerite Duras de Trouville », Ouest-France, 3 août 1992.

Voir aussi

Bibliographie

  • 1974 : « Tourisme et villĂ©giature sur la cĂ´te normande », thèse d’État, par Daniel Clary, Caen
  • 1983 : La Vie quotidienne sur les plages normandes du Second Empire aux annĂ©es folles, par Gabriel DĂ©sert, Hachette
  • 1994 : Monet en Normandie, peinture et sites balnĂ©aires, 1867-1886, par Robert Louis Herbert, Flammarion, Paris
  • 2000 : « Les Roches noires : Trouville-sur-Mer », Les Cahiers du temps, 127 p., par Emmanuelle Gallo

Articles connexes

Lien externe

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.