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Guerre sociale (Rome)

La guerre sociale, ou guerre marsique ou encore guerre italique[1], oppose la République romaine et les alliés italiens entre 90 et 88 av. J.-C. Elle éclate à la suite de l'assassinat du tribun de la plèbe Livius Drusus en octobre 91 av. J.-C., alors qu'il tentait de faire obtenir la citoyenneté romaine aux Italiens alliés de Rome[2].

Guerre sociale (Rome)
Description de cette image, également commentée ci-après
Le Sabinium. La confĂ©dĂ©ration des Marses, forte de 100 000 hommes et dirigĂ©e par PompĂ©dius Silo, provenait de la zone au sud-est de cette carte, situĂ©e sous le lac Fucinus ; elle coalisait d'autres peuples.
Informations générales
Date 91 Ă  88 av. J.-C.
Lieu Italie
Issue Victoire militaire romaine
Changements territoriaux Aucun

Unification romaine de l'Italie

À la suite de cette guerre, l'Italie romaine est unifiée administrativement sous un régime juridique, et tous les hommes libres obtiennent la citoyenneté romaine.

Origines

La guerre sociale tire son nom du latin socii qui signifie alliés : elle opposa Rome à ses alliés italiques, qui réclamèrent le droit à la citoyenneté romaine[2]. En effet, alors que l'Italie est sous l'autorité romaine depuis la fin de la première guerre punique (242 av. J.-C.), soit par un habile jeu d'alliances, soit par conquête, seuls les Romains ont le droit de citoyenneté complète[2].

Cette différenciation induit un traitement inégal lors des procès, lors du paiement des impôts, interdit l'accès aux adjudications de terres publiques (ager publicus), etc. Or, les alliés fournissent autant, si ce n'est plus, de troupes à Rome que les citoyens eux-mêmes ne peuvent en fournir[2]. De ce fait, ils participent activement aux conquêtes de Rome, qui domine presque sans partage le bassin méditerranéen au début du Ier siècle av. J.-C. De plus, les soldats alliés sont généralement plus exposés lors des opérations militaires et ont droit à une part de butin moins importante que les légionnaires romains[2].

D'un simple lien de suzeraineté, les alliés étaient tombés dans l’assujettissement le plus strict. Rome, après sa conquête de la péninsule italique, restreignit fortement les possibilités d'intégrations à la cité. Ainsi, et alors qu'autrefois les anciennes villes latines avaient eu le droit de libre intercourse (procédé par lequel les habitants de ces villes, en émigrant dans Rome y étaient admis à l'état de citoyens passifs), Rome au moyen d'un plébiscite ainsi que d'un sénatus-consulte (respectivement en 126 av. J.-C. et 122 av. J.-C.) s'en prend directement au droit d'immigration, au terme duquel tous les non-citoyens résidant à Rome sont expulsés[2]. À la suite de ces mesures, la révolte et le sac de Frégelles avaient eu lieu en 125 av. J.-C., établissant le caractère nouveau de la domination romaine, vœu silencieux pour l'obtention de l'égalité civique de la part des partisans italiques[2].

DĂ©roulement

Le Marse Quintus Pompaedius Silo, porte-parole de la péninsule dans les négociations avec Livius Drusus (95 av. J.-C.) et le Samnite Caius Papius Mutilus dirigent le mouvement. Les diverses cités italiques, pour prévenir toute défection, se livrent des otages. À Asculum, dans le Picénum, le préteur Servilius, qui avait brutalisé les habitants et cherché à les intimider par des menaces, est mis à mort avec tous les Romains présents dans la ville[2]. Le mouvement se développe dans les Apennins central et méridional, où les revendications politiques se doublent d’une haine nationale héréditaire contre les Romains. Les Marses, les Péligniens, les Vestins, les Marrucins et les Picentins au nord ; les Lucaniens, les Apuliens, les Frentans, les Hirpins, la colonie de Venusia et les Samnites au sud[2]. Tout le Centre et le Sud de l’Italie jusqu’au Métaure à l’est, à la baie de Naples vers l’ouest, se trouvent en insurrection. Les cités grecques au sud et au nord, Étrusques, Ombriens et Gaulois restent provisoirement dans l’expectative, de même que certains membres des peuples coalisés[2].

Les Italiques tentent une dernière dĂ©marche Ă  Rome. Le SĂ©nat leur rĂ©pond par un ultimatum formel et les somme de faire leur soumission immĂ©diate. Les Italiques rĂ©pondent par la sĂ©cession et proclament leur indĂ©pendance. Ils se constituent en une confĂ©dĂ©ration italique et se dotent d'un corps de magistrature calquĂ© sur celui de la citĂ© romaine : un SĂ©nat de 500 membres, une assemblĂ©e du peuple, deux consuls, Quintus Pompædius Silo et Caius Papius Mutilus, douze prĂ©teurs. La capitale est placĂ©e Ă  Corfinium dans les Abruzzes[2], qui reçoit le nom d’Italica. Une monnaie fĂ©dĂ©rale est frappĂ©e Ă  la lĂ©gende Italia[2]. Les Italiens lèvent une forte armĂ©e de 100 000 hommes sous le commandement des consuls et des prĂ©teurs fĂ©dĂ©raux[2]. Une armĂ©e territoriale, formĂ©e des milices locales et commandĂ©e par des chefs indigènes pourvoit Ă  la dĂ©fense du pays.

Le SĂ©nat romain organise rapidement sa dĂ©fense. Il possède l’avantage d’une situation centrale, de cadres expĂ©rimentĂ©s, de la maĂ®trise des mers et de ressources en hommes et en argent provenant des provinces. Une armĂ©e romaine de 100 000 hommes, recrutĂ©e parmi les citoyens, les alliĂ©s restĂ©s fidèles et les provinciaux, est mise sur pied et placĂ©e sous le commandement de deux consuls et de dix lĂ©gats (dont Marius et Sylla)[2]. Les Italiques prennent l’offensive. Deux armĂ©es venues du sud et du nord marchent sur Rome par les vallĂ©es du Tibre et du Vulturne. Les deux armĂ©es consulaires romaines se postent au dĂ©bouchĂ© des montagnes pour les empĂŞcher d’arriver dans la plaine. Elles y parviennent au nord, mais au sud le Vulturne est forcĂ© et la Campanie mĂ©ridionale envahie. Ă€ la fin de la première annĂ©e de guerre, l’avantage est aux Italiques. Les opĂ©rations prennent vite un caractère atroce (chefs romains et garnisons massacrĂ©s, femmes scalpĂ©es) et les allures d’une guerre d’extermination[2]. Les Étrusques et les Ombriens commencent Ă  s’agiter.

Alarmé, le Sénat se décide à concéder le droit de cité à certains peuples italiques. Il commence par la lex Julia et le destine aux alliés de Rome restés fidèles[2]. L’insurrection cesse de s’étendre[2].

En 89 av. J.-C., la lex Plautia Papiria des deux tribuns M. Plautius Silvanus et C. Papirius Carbo généralise les concessions antérieures et accorde en principe le droit de cité à tous les Italiques au sud du Pô sans exception, sous les seules conditions d’avoir leur domicile légal en Italie et de venir, dans les deux mois, se faire inscrire à Rome par le préteur[2]. La nécessaire présence à Rome et le court délai sont deux moyens parfaitement combinés pour disloquer les armées des insurgés. Un grand nombre d’alliés viennent se faire inscrire, mais les peuples des Abruzzes restent récalcitrants.

Le Sénat reprend l’offensive. Deux grandes armées sont mises sur pied, l’une au nord dans la vallée du Tibre, l’autre au sud, commandée par Sylla. Les insurgés opposent une résistance désespérée. L’armée du nord envahit le pays des Marses, et après un long siège prend Asculum, puis la capitale fédérale, Corfinium[2]. Les Marses, les Vestins, les Péligniens capitulent. Sylla reconquiert la Campanie, remonte la vallée du Vulturne et prend Bovianum où avait été transférée la capitale de la Confédération. À la fin de l’année, hormis quelques débris de l’armée samnite, l’insurrection est matée[2].

En 88 av. J.-C., Mamercus Aemilius Lepidus bat les Samnites lors d'une courte campagne : Nole est prise et Pompædius Silo est tué[2]. Les restes des armées samnite et lucanienne se réfugient dans les forêts impénétrables du Bruttium.

Conséquences

Finalement, les alliĂ©s de Rome obtiennent satisfaction, et l'Italie est unifiĂ©e sous un seul rĂ©gime juridique[2]. Rome a Ă©galement vaincu tous ses alliĂ©s successivement, en s'appuyant sur ceux qui n'Ă©taient pas encore rĂ©voltĂ©s, puis en s'appuyant sur les premiers rĂ©voltĂ©s revenus sous son autoritĂ© pour vaincre les seconds[2]. Par ailleurs, au recensement de 70, la population civique de Rome passe Ă  900 000 citoyens, plus du double que 50 ans auparavant[2].

Sur la scène politique romaine, Sylla a acquis un prestige considérable par ses victoires et par son habileté dans le commandement de ses soldats. À l'inverse, Marius a vu diminuer son prestige : originaire du Latium et certainement plus compréhensif vis-à-vis des révoltés, il a plus cherché la réconciliation entre ses troupes et celles des révoltés que l'affrontement brutal. Sylla est désormais l'homme providentiel à Rome. À la guerre qui s'achève en -88 succède la même année la première guerre civile entre Marius et Sylla.

Notes et références

  1. Yann Le Bohec, Histoire des guerres Romaines : Milieu du VIIIe siècle avant J.-C. – 410 après J.-C., Tallandier, , 608 p. (ISBN 979-10-210-2302-4, lire en ligne), Pt243
  2. Catherine Virlouvet (dir.) et Stéphane Bourdin, Rome, naissance d'un empire : De Romulus à Pompée 753-70 av. J.-C, Paris, Éditions Belin, coll. « Mondes anciens », , 796 p. (ISBN 978-2-7011-6495-3), chap. 9 (« Trente années qui changèrent Rome »), p. 453-473

Bibliographie

Voir aussi

Liens internes

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