Greti Caprez-Roffler
Greti Caprez-Roffler est une théologienne et pasteure suisse, née le à Sankt Antönien et morte le à Coire.
Nom de naissance | Greti Roffler |
---|---|
Naissance |
Sankt Antönien |
Décès |
Coire |
Nationalité | suisse |
Profession | |
Formation |
Elle est la première femme nommée pasteure, en 1931, d'une paroisse protestante en Europe.
Biographie
Origines, enfance et famille
Greti Caprez-Roffler naît Greti Roffler le à Sankt Antönien, dans le canton des Grisons. Elle est originaire de Furna, dans le même canton. Son père, Jonas Roffler, est pasteur[1] ; sa mère est née Elsbeth Luk[2]. Elle est l'aînée d'une fratrie de quatre enfants[3] - [4]. Elle grandit à Igis[5].
Elle épouse en [6] un ingénieur grison de l'École polytechnique fédérale de Zurich du nom de Gian Caprez[1] - [2], avec qui elle aura six enfants[6].
Études
Après le gymnase à Coire, elle étudie la philologie classique à partir de 1925 puis, encouragée par son père[7], la théologie à l'Université de Zurich[1] à partir de 1926. Elle est la première Grisonne à étudier la théologie[8].
En 1930, en pleine révision pour ses examens finaux, elle séjourne à São Paulo, au Brésil, où son mari est employé comme ingénieur[9]. Elle intervient à cette période dans la presse grisonne, en juin, pour demander l'ouverture pleine et entière du pastorat aux femmes[10]. Elle revient seule en en Suisse, chez ses parents, enceinte de cinq mois de son premier enfant, et c'est enceinte qu'elle se présente avec succès à Zurich le devant ses professeurs de théologie pour ses examens[9] - [11] - [12]. Son mari ne revient en Europe qu'en mars de l'année suivante et travaille d'abord à Pontresina, dans le bureau d'ingénieurs de ses parents[13], et Zurich[6].
Pasteure Ă Furna
Dans les années 1930, le pastorat n'est ouvert aux femmes dans aucun canton : les quelques femmes qui ont achevé des études de théologie travaillent comme pasteures auxiliaires[14] et de vifs débats ont lieu dans les journaux sur la question[15]. Dans le canton des Grisons, le synode refuse le par 22 voix contre 39 la création de la fonction de pasteure auxiliaire[16] et le peuple[n 1] refuse le à une large majorité[n 2] en votation d'ouvrir le pastorat au moins aux femmes non mariées[19].
Furna, un village grison isolé de paysans de montagne sans électricité, où Greti Caprez-Roffler passait enfant toutes ses vacances chez ses grands-parents[n 3], n'arrivait pas à trouver de successeur à son pasteur démissionnaire. Sur proposition de sa mère qui avait envoyé une lettre à la commune en août 1931, Greti Caprez-Roffler en est nommée pasteure à l'âge de 25 ans à l'unanimité des 18 membres du conseil paroissial le [2] - [14] - [15] - [20]. Elle devient ainsi la première femme responsable d'une paroisse protestante en Europe[15].
Greti Caprez-Roffler, qui avait refusé un poste de pasteure auxiliaire à Berne et échoué à convaincre un de ses camarades d'études de prendre le poste à Furna[21], emménage dans le presbytère du village avec son nouveau-né et une gouvernante, mais sans son mari : celui-ci a trouvé un emploi à Zurich[2] - [22] et ne peut leur rendre visite que tous les 15 jours[20].
Opposé à cette nomination[1], le synode du canton des Grisons la déclare illégale[13] et coupe les vivres à la commune de Furna : celle-ci paie un an de salaire en avance à sa pasteure[n 4] avant que la fortune ecclésiale ne lui soit confisquée, mais elle n'est ensuite plus en mesure de la rémunérer[2] - [13]. Greti Caprez-Roffler exerce bénévolement son ministère à Furna jusqu'en , puis rejoint son mari à Zurich, qui y entreprend des études de théologie[2] - [24].
Pasteure auxiliaire, aumônière
Elle exerce dans le canton de Zurich comme pasteure auxiliaire mais espère pouvoir exercer à terme pleinement un ministère avec son mari[25]. En 1941, alors que la famille compte désormais cinq enfants, ils sont engagés par le synode du canton des Grisons comme aumôniers pour les établissements hospitaliers, psychiatriques et pénitentiaires, lui pour les hommes, elle pour les femmes[1] - [26]. Ils emménagent alors à Coire[6]. À la naissance de leur sixième enfant en 1945, Greti Caprez-Roffler décide de se consacrer entièrement à son foyer[6] - [27]. Au printemps 1947, la famille déménage à Kilchberg, près de Zurich, où Gian Caprez a obtenu un poste de pasteur[6] - [28]. Ils y restent pendant 19 ans[29]. C'est de Kilchberg et avec Gian Caprez en chaire qu'est diffusé le le premier culte protestant à la télévision suisse[6].
Consécration, ministère commun et retraite
Greti Caprez-Roffler est finalement consacrée pasteure le au Grossmünster de Zurich, en compagnie de onze autres théologiennes qui avaient achevé par le passé des études de théologie à l'Université de Zurich[1] - [6] - [30]. Après que le peuple grison accepte en votation en 1965 l'ouverture pleine et entière du pastorat aux femmes[31] - [n 5], elle déménage en à Rheinwald, dans le canton des Grisons, pour exercer le ministère en commun avec son mari jusqu'en 1970 dans cinq communes : lui à Splügen, Sufers et Medels im Rheinwald ; elle, à Nufenen et Hinterrhein[1] - [6] - [31] - [33]. Ils emménagent à leur retraite à Furna, à nouveau sans pasteur, où ils exercent pendant deux ans[34].
En 1987, atteints dans leur santé, ils doivent quitter Furna et entrer dans un établissement médico-social à Coire[6].
Valeurs
Femme indépendante[20], Greti Caprez-Roffler défendait des valeurs conservatrices tout en luttant pour les droits des femmes[7] - [n 6].
Si elle encourage les filles à faire des études, tient des conférences sur la sexualité féminine, introduit les pantalons de ski pour les femmes à Furna[20] - [n 7] et affirme une égalité totale entre hommes et femmes[n 8], y compris au foyer où ils devraient davantage s'occuper des enfants[13], elle conseille en 1957 aux femmes de choisir entre le mariage et l'exercice d'une profession[7].
Notes et références
Notes
- Le vote est ouvert aux femmes depuis 1918 pour les affaires ecclésiales[17].
- 6 449 oui contre 11 185 non (47 % de participation)[18]. La commune de Furna, elle, dit oui par 112 voix contre 6[19].
- Son grand-père a été président de la commune[13].
- 2 500 francs suisses, contre 3 400 pour son prédécesseur et 4 300 pour son successeur[13] - [23].
- Par 11 293 voix contre 1 339[18]. Le droit de vote des femmes n'est en revanche accepté au niveau cantonal qu'en 1972 après un refus en 1968 ; au niveau communal, il est imposé aux dernières treize communes grisonnes qui ne l'avaient encore introduit en 1983[32].
- Elle attache systématiquement un ruban noir à sa casserole lorsque le droit de vote des femmes est rejeté quelque part en Suisse[13].
- Révoltée par le fait que les filles venaient à l'école en jupons et bas de laine détrempés, elle suit un cours et convainc un groupe de femmes de leur coudre des pantalons de ski[13] - [35].
- Elle nomme son mari Ehekamerad dans son journal intime, soit camarade de mariage[20] - [36].
Références
- Kurt Wanner (trad. André Naon), « Greti Caprez-Roffler » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
- (de) pd, « Tochter der illegalen Pfarrerin lebt heute in Pfyn », sur Thurgauer Zeitung, (consulté le )
- Caprez, Ă partir de 2:16.
- (de) « Pfarrer J. Roffler », Pro Senectute,‎ , p. 110 à 115 (lire en ligne)
- Caprez, Ă partir de 2:12.
- (de) Margreth Härdi-Caprez, « Totentafel », Bündner Jahrbuch : Zeitschrift für Kunst, Kultur und Geschichte Graubündens,‎ , p. 158-162 (lire en ligne)
- (de) « Kilchberg verwehrte der ersten Pfarrerin der Schweiz die Kanzel », Thalwiler Anzeiger,‎ , p. 11
- Hofmann, Jecklin, Redolfi, p. 161.
- Caprez, Ă partir de 00:44.
- (de) F. Pieth (éd.), « Chronik für den Monat Juni 1930 », Bündnerisches Monatsblatt, Zeitschrift für bündnerische Geschichte, Landes- und Volkskunde,‎ , p. 222 (lire en ligne)
- Aerne, p. 418.
- Hofmann, Jecklin, Redolfi, p. 163.
- (de) Balz Spörri, « Die Pfarrerin, die es nicht hätte geben dürfen », Schweizer Familie,‎ , p. 26
- Caprez, Ă partir de 2:43.
- (de) Christina Caprez, « Gesellschaft & Religion - Die erste Pfarrerin Europas wirkte in einem Dorf im Prättigau », sur Schweizer Radio und Fernsehen, (consulté le )
- Aerne, p. 415.
- Hofmann, Jecklin, Redolfi, p. 168.
- Hofmann, Jecklin, Redolfi, p. 165.
- Aerne, p. 431.
- (de) Michael Meier, «Dann darf ich aber nicht mehr tanzen», sur Tages-Anzeiger, (consulté le ), p. 42
- Aerne, p. 419.
- Caprez, Ă partir de 6:09.
- Aerne, p. 435 et 440.
- Aerne, p. 435.
- Caprez, Ă partir de 13:44.
- Caprez, Ă partir de 14:17.
- Caprez, Ă partir de 18:03.
- Caprez, Ă partir de 18:50.
- Caprez, Ă partir de 22:23.
- Caprez, Ă partir de 23:03.
- (de) Christina Caprez, « Die Pfarrerin als Vorbotin einer neuen Zeit? : Greti Caprez-Roffler im Rheinwald 1966-1970 », Revue suisse d'histoire religieuse et culturelle,‎ , p. 195 à 213 (lire en ligne)
- (de) Stabsstelle für Chancengleichheit von Frau und Mann, « Graubünden feiert sein Frauenstimmrecht », sur site officiel du canton des Grisons, (consulté le )
- Caprez, Ă partir de 23:28.
- Caprez, Ă partir de 23:50.
- Caprez, Ă partir de 10:18.
- Caprez 2, Ă partir de 52:54.
Bibliographie
: documents utilisés comme source pour la rédaction de cet article
- (de) Christina Caprez (petite-fille de Greti Caprez-Roffler, historienne et journaliste), Die illegale Pfarrerin : das Leben von Greti Caprez-Roffler 1906-1994, Zurich, Limmat Verlag, , 385 p. (ISBN 9783857918872)
- (de) Die illegale Pfarrerin [Production de télévision], Christina Caprez, dans 'Cuntrast (Radiotelevisiun Svizra Rumantscha) et Sternstunde Religion (Schweizer Radio und Fernsehen) (, 25 minutes) marsvision. Consulté le .
- (de) Greti Caprez-Roffler, die erste Pfarrerin [Diffusion radio], Christina Caprez, dans Radio SRF 2 Kultur (, 59 minutes) Consulté le .
- (de) Peter Aerne, « "In 100 Jahren wird man es nicht verstehen, dass unsere Zeit so zurückhaltend war." : Greti Caprez-Roffler als Pfarrerin in Furna 1931–1934 und der Weg zum Frauenpfarramt in der reformierten Bündner Kirche », Bündner Monatsblatt,‎ , p. 411 à 447 (lire en ligne)
- (de) Silvia Hofmann, Ursula Jeckin, Silke Redolfi (éd.) (préf. Eveline Widmer-Schlumpf), frauenRecht : Beiträge zur Frauen- und Geschlechtergeschichte Graubündens im 19. und 20. Jahrhundert, vol. 1, Zurich, Neue Zürcher Zeitung, , 320 p. (ISBN 3-03823-051-0), « Das Frauenstimmrecht in der protestantischen Kirche », p. 157 à 174
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :