Grammaire du malais-indonésien
Bien que cet article traite de la grammaire du malais-indonésien, il décrit plutÎt celle de l'indonésien.
En effet, les affixes par exemple ne sont pas toujours utilisĂ©s de la mĂȘme façon. Ainsi, sur la base verbale cari, "chercher", l'indonĂ©sien utilise le circonfixe pen- ... -an pour former pencarian, "action de rechercher", alors que pour donner le mĂȘme sens le malaisien forme carian, avec simplement le suffixe -an, alors qu'en indonĂ©sien, ce suffixe seul a le sens de "rĂ©sultat de l'action", en l'occurrence "chose que l'on a cherchĂ©e".
Phonologie
Consonnes
Le systÚme des consonnes de l'indonésien est résumé dans le tableau ci-dessous :
Bilabiale | Labio-dentale | Dentale / alvéolaire |
Palatale | VĂ©laire | Glottale | ||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Occlusives | Sourde | p | t | k | - [Ê] | ||
Voisée | b | d | g | ||||
AffriquĂ©es | Sourde | c [tÊ] | |||||
VoisĂ©e | j [dÊ] | ||||||
Fricatives | Sourde | f | s | sy [Ê] | kh [x] | h | |
Voisée | v | z | |||||
Nasales | m | n | ny [nj] | ng [Ć] | |||
Latérales | l | ||||||
Roulées | r | ||||||
Semi-voyelles | w | y [j] |
La dentale s /s/ se prononce comme dans le mot tasse et n'est jamais voisée en /z/ : nasi = riz se prononce "nassi".
La dentale r /r/ se prononce roulé (bout de la langue sur le palais).
La palatale c /tÊ/ se prononce quelque part entre "tch" et "ti". De mĂȘme, le /j/ se prononce quelque part entre "dj" et "di".
La vĂ©laire ng /Ć/ est un phonĂšme difficile pour les francophones. Il se prononce comme le "ng" dans l'allemand singen ("chanter").
La glottale aspirée /h/ est toujours prononcée, au début comme à la fin d'un mot. Darah, "sang", se prononce avec un /h/ final marqué, qui le distingue de dara, "jeune fille".
Les consonnes finales, au lieu d'ĂȘtre relĂąchĂ©es comme en français, sont prononcĂ©es en gardant les articulations en place. Par exemple, minum ("boire") se prononce en gardant les lĂšvres fermĂ©es sur le /m/ finale. Le /k/ final se prononce donc en gardant la glotte bloquĂ©e en position fermĂ©e, ce qui le rend inaudible pour une oreille française.
Les consonnes fricatives suivantes sont des emprunts Ă©trangers :
- Sourdes : labio-dentale /f/, palatale sy /Ê/, vĂ©laire kh /x/.
- Voisées : labio-dentale /v/ et dentale /z/.
Le /v/ est d'ailleurs prononcĂ© comme un /f/. Les deux sont mĂȘme parfois prononcĂ©s /p/. Le /z/ est parfois prononcĂ© comme un j /Ê/.
Voyelles
Les voyelles de l'indonésien sont :
- /a/ prononcé comme en français,
- /É/ muet, comme dans l'article français "le".
- /e/ écrit également "e" et prononcé en général comme un "Ú", parfois comme un "é" français,
- /i/
- /o/
- /u/ prononcé "ou".
Diphtongues
Les diphtongues sont :
- /ai/, prononcĂ© en principe "aille", mais plus souvent "eille" et parfois "ĂȘ" sous l'influence javanaise et jakartanaise.
- /au/, prononcĂ© en principe "aou", mais plus souvent "ow" et parfois "ĂŽ" pour la mĂȘme raison.
- /oi/, prononcé "auille", mais rare.
Les diphtongues doivent ĂȘtre distinguĂ©es de la juxtaposition de voyelles appartenant Ă des syllabes diffĂ©rentes, par exemple :
- Menyukai, prononcé "me-nyuka-i" car formé sur suka, "aimer", avec le circonfixe me- -i,
- Daun, "feuille", prononcé "da-un", en se rappelant que les bases lexicales ont en principe deux syllabes (voir la section "Lexique" ci-dessous).
Il faut donc distinguer la diphtongue /ai/ dans gulai (plat de viande en sauce) de la succession de voyelles "ai" dans gulai ("sucrer"), qui se prononce "gula-i" et est formé sur gula ("sucre").
Catégories
Le malais-indonésien possÚde des catégories qui ne correspondent pas toujours à celles du français.
Verbes
Les verbes sont invariables. On distingue :
- Les verbes "statiques", ou "verbes d'Ă©tat", qui correspondent aux adjectifs : baik "ĂȘtre bon", panas "ĂȘtre chaud" etc.
- Les verbes "dynamiques", ou "verbes d'action", qui peuvent ĂȘtre aussi bien transitifs qu'intransitifs.
- Les auxiliaires :
Bien que le terme dâ"adjectifs" soit souvent utilisĂ© pour dĂ©signer les verbes dâĂ©tat, ceux-ci ont un comportement grammatical similaire Ă celui des autres verbes (voir "NĂ©gation"), alors que dans la plupart des langues indo-europĂ©ennes, la catĂ©gorie des adjectifs est proche de celle des noms[1]. Cependant, comparables en cela aux verbes d'Ă©tat malais-indonĂ©siens, quelques verbes français permettent d'exprimer une qualitĂ© d'un sujet sans l'intermĂ©diaire du verbe ĂȘtre : rougeoyer (= "ĂȘtre rouge", mais â "rougir") ; souffrir employĂ© intransitivement (= "ĂȘtre souffrant") ; verdoyer (= "ĂȘtre vert", mais â "verdir").
Noms
Les noms sont Ă©galement invariables. Certains noms peuvent fonctionner comme un verbe : Hujan = "la pluie" ou "il pleut"
Notion de « base »
En indonĂ©sien, une base est un mot dans sa forme la plus simple, susceptible de recevoir des affixes ou d'ĂȘtre redupliquĂ©e (voir la section "Morphologie").
Syntaxe
La phrase simple
La phrase indonésienne simple a la structure suivante :
Le prĂ©dicat peut ĂȘtre :
- Soit un nom (la copule "ĂȘtre" n'existant pas en indonĂ©sien) : Saya mahasiswa di UI : "Je suis Ă©tudiant Ă l'universitĂ© d'IndonĂ©sie",
- Soit un verbe :
- D'action : Saya makan nasi : "Je mange du riz" (l'indonésien est une langue SVO).
- D'Ă©tat : Rumah itu besar : "Cette maison est grande".
La thématisation
Le "thÚme" d'une phrase est ce dont on parle. Dans la phrase simple, il s'agit du sujet, qui se confond en général avec l'agent de l'action.
En malais-indonésien, on peut thématiser un autre élément de la phrase que l'agent : soit le patient de l'action, soit l'action.
Thématisation du patient
On thématise la patient en recourant au passif. Celui-ci a deux formes :
- Par recours au prĂ©fixe verbal di- (voir "Morphologie"), le patient devenant "sujet", c'est-Ă -dire qu'il est placĂ© en tĂȘte de phrase :
Gedung ini akan dibongkar = (immeuble ceci [auxiliaire de mode de l'intention] ĂȘtre dĂ©moli] cet immeuble-ci, on va le dĂ©molir.
- En plaçant le patient en tĂȘte de phrase, suivi de l'auxiliaire (d'aspect ou de mode) Ă©ventuel et du verbe Ă la forme non prĂ©fixĂ©e :
Buku itu sudah saya baca = (livre cela [auxiliaire de l'accompli] je lire) Ce livre-là , je l'ai déjà lu
Traduction de la copule « ĂȘtre »
Le champ d'utilisation de la copule "ĂȘtre" est beaucoup plus rĂ©duit en malais-indonĂ©sien qu'en français du fait que l'Ă©quivalent des adjectifs français sont en indonĂ©sien des verbes d'Ă©tat. Il existe cependant deux verbes qui peuvent avoir le sens d'"ĂȘtre" :
- adalah pour donner une définition ;
- ada pour indiquer une localisation ou traduire le gallicisme "il y a" ;
- ou parfois jadi avec un sens plus proche de "devenir".
Exemples:
- TGV adalah kereta api cepat Prancis, mot Ă mot "le TGV est le train rapide de France",
Traduction plus idiomatique "On appelle TGV le train rapide français" ; - Semua program itu sudah ada di komputer saya, mot à mot "il y a déjà tous ces programmes dans mon ordinateur",
Traduction plus idiomatique "j'ai déjà tous ces programmes dans mon ordinateur" ; - Umur sembilan tahun sudah jadi system engineer (titre de journal), mot à mot "à l'ùge de neuf ans il est déjà (devenu) ingénieur systÚme)
Traduction plus idiomatique "ingénieur systÚme à neuf ans"
NĂ©gation
Le malais-indonésien possÚde deux formes de négation de base :
- tidak (et sa forme abrégée tak et
- bukan.
La diffĂ©rence fondamentale est que tidak constitue une nĂ©gation "absolue", au sens oĂč elle ne propose pas d'alternative, alors que bukan est une nĂ©gation "relative", au sens oĂč elle suggĂšre une autre possibilitĂ© :
- Dia tidak makan babi : "Il ne mange pas de porc" (point final), mais :
- Dia bukan makan, tapi istirahat : "Il ne mange pas, il se repose".
- Dia tidak tolol : "Il n'est pas idiot" (point final), mais :
- Dia bukan tolol, tapi malas : "Il n'est pas idiot, mais paresseux".
On voit que la distinction tidak/bukan est liée à la question du thÚme ou focus. Si le focus est le verbe (d'action comme makan, ou d'état comme tolol), la négation sera bukan.
Par ailleurs, cette distinction explique que les substantifs ne puissent ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ©s de tidak mais seulement de bukan :
- Dia bukan mahasiswa, dia guru yang muda sekali = « Ce n'est pas un étudiant, c'est un professeur qui est trÚs jeune ».
En effet, du point de vue de la langue malaise, si on n'est pas une chose, on en est nécessairement une autre.
Il existe d'autres mots ayant un sens négatif, notamment :
- Belum, qu'on traduit par "pas encore", et qui est en réalité la négation de l'auxiliaire d'aspect de l'accompli sudah, qu'on traduit souvent par "déjà ".
- Kurang, qu'on traduit par "pas assez".
Les négations correspondant aux mots français comme « personne », « rien », « nulle part », s'expriment par la négation (tidak ou bukan selon le cas), suivie de la forme redoublée de l'interrogatif correspondant :
- Dia bukan siapa-siapa = "Il n'est rien" (mot-Ă -mot : "Il n'est personne"), Ă partir de siapa ("qui ?").
- Saya tidak melihat apa-apa = « je n'ai rien vu », à partir de apa ("quoi ?").
- Mereka belum mempunyai apa-apa = "Ils ne possĂšdent encore rien"
- Kami tidak ke mana-mana = "Nous n'allons nulle part".
Il existe un mot pour l'affirmation : ya, qui signifie « oui ».
Toutefois, lorsqu'il s'agit de répondre affirmativement à une question, on reprendra le mot central de la question :
Exemples :
- Dia belajar? = "Il apprend ses leçons?"
- Réponse affirmative : Belajar! = "(Oui, ) il apprend ses leçons!"
- Réponse négative : Tidak = "Non"
- Orang yang bekerja di sawah itu petani? = "Les gens qui travaillent dans cette riziĂšre sont des paysans?"
- RĂ©ponse affirmative : Petani = "(Oui, ce sont) des paysans"
- Réponse négative : Bukan = "Non" (ils sont autre chose)
- Sudah makan ? « avez-vous (déjà ) mangé ? »
- Réponse affirmative Sudah « déjà »
- Réponse négative Belum pas encore
- Mau makan ? « vous voulez manger ? », « vous allez manger ? »
- Réponse affirmative Mau « je veux bien »
- Réponse négative Belum « pas encore » ou Sudah « c'est déjà fait. »
Aspect, mode, temps
Ce qui, dans les langues indo-européennes par exemple, s'exprime par des flexions verbales, s'exprime en malais-indonésien par des auxiliaires.
Aspect
L'indonĂ©sien exprime l'aspect, c'est-Ă -dire l'Ă©tat d'un processus. L'aspect se caractĂ©rise par l'opposition de base accompli/inaccompli. Il est marquĂ© par des auxiliaires qui n'ont pas de sens par eux-mĂȘmes :
Accompli
Sudah indique que le procĂšs a eu lieu :
- Saya sudah baca buku itu = j'ai déjà lu ce livre".
Inaccompli
Belum indique que le procĂšs n'a pas encore eu lieu :
- Dia belum berangkat = il n'est pas encore parti.
Accompli proche
Baru indique que l'action vient d'avoir lieu :
- Ayah baru sampai di rumah = Papa vient d'arriver Ă la maison
Progressif sans perspective finale
Sedang exprime que le procĂšs est en cours :
- Saya sedang makan = je suis en train de manger.
Progressif avec perspective finale
Masih indique que le procĂšs est encore en train d'avoir lieu mais aura une fin :
- Adik saya masih tidur = ma petite sĆur/mon petit frĂšre dort encore.
Semelfactif ou non-itératif
Pernah indique qu'une action ou une situation est arrivée au moins une fois mais ne va pas nécessairement se répéter :
- Mereka pernah ke Paris = Il leur est arrivé d'aller à Paris (mais ne vont pas forcément y retourner).
L'aspect est une caractéristique fondamentale du systÚme verbal indonésien. Ne pas le marquer équivaut à ne pas marquer le temps quand on parle par exemple le français ou une langue indo-européenne en général.
Mode
- Capacité : bisa
- Possibilité, autorisation : boleh
- Obligation : harus
- Intention, volonté : mau
- Contemplatif : Akan indique que le procĂšs va avoir lieu : Kami akan menilai pekerjaanmu = Nous allons Ă©valuer ton travail.
Temps
En principe, le verbe malais-indonésien ne marque pas le temps grammatical, c'est-à -dire qu'il n'indique pas si l'action se déroule dans le présent, le passé ou le futur. Pour le préciser, on utilise des adverbes, par exemple :
- "Nanti", "tout Ă l'heure" au sens de "plus tard", peut ĂȘtre utiliser pour exprimer le futur.
Il existe toutefois deux auxiliaires utilisés pour exprimer le temps :
- Telah exprime une action passée et accomplie.
- Akan exprime une action qui va se dérouler ou se déroulera.
Morphologie
Les langues du sous-groupe malayo-polynésien occidental se caractérisent par deux procédés de dérivation qui, à partir d'une base, permet de produire de nouveaux mots :
- Un systĂšme d'affixes,
- Le redoublement.
En le comparant au systÚme du tagalog des Philippines, on remarquera que le systÚme du malais-indonésien a perdu de nombreuses formes. C'est l'une des raisons pour lesquelles les linguistes considÚrent que le tagalog représente un état de l'austronésien plus ancien que le malais-indonésien. Les Austronésiens ont d'abord migré de Taïwan vers les Philippines il y a 2 000 ans, avant de se répandre dans l'archipel indonésien et vers le Pacifique.
Base
Une base est un mot auquel on peut appliquer des affixes pour former de nouveaux mots. En malais-indonésien, la base est généralement dissyllabique, c'est-à -dire constitué de deux syllabes. Voici des exemples :
Indonésien et malais | Français |
---|---|
air | eau |
api | feu |
besar | grand |
bini | femme |
hari | jour |
kecil | petit |
laki | mari |
langit | ciel |
makan | manger |
minum | boire |
malam | nuit |
tanah | terre |
Il semble que la 2e syllabe de la base constitue la racine du mot. On constate en effet des familles sémantiques de mots, par exemple :
- Angkat : "soulever", tingkat : "Ă©tage", pangkat : "grade", peringkat : "niveau".
- Kuku : "ongle", paku : "clou", kaku : "raide", beku : "figĂ©", buku : "nĆud d'une branche ou d'une tige".
- Darah : "sang", merah : "rouge", marah : "en colĂšre", parah : "grave".
- Sumur : "puits", kumur : "se rincer la bouche", jemur : "faire sécher", jamur : "champignon"
- Lebar : "large", sebar : "répandre", tebar : "s'étendre", kibar : "déployer", bubar : "se disperser".
Sur une base, on peut produire d'autres mots en appliquant une série d'affixes, redoubler la base ou combiner affixation et redoublement.
Les affixes
Appliqués à une base, les affixes consistent en :
- préfixes, qu'on place devant la base,
- Suffixes, qu'on place aprĂšs,
- Circonfixes, combinaisons d'un préfixe et d'un suffixe qui encadrent la base,
- Infixes, qu'on place entre la consonne initiale et le reste du mot.
Préfixe me-
Il se place devant une base qui peut ĂȘtre :
- Soit un verbe :
- D'action (équivalent du verbe transitif français) ou
- D'Ă©tat (Ă©quivalent de l'adjectif),
- Soit un nom.
L'application de ce préfixe s'accompagne d'une nasalisation de la consonne ou de la voyelle initiale de la base, suivant le tableau ci-dessous :
Bilabiale | Labio-dentale | Dentale / alvéolaire |
Palatale | VĂ©laire | Glottale | ||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Occlusives | Sourde | p > m | t > n | k > ng | - [Ê] | ||
Voisée | b > mb | d > nd | g > ngg | ||||
Affriquées | Sourde | c > nc | |||||
Voisée | j >j | ||||||
Fricatives | Sourde | f > mf | s > ny | sy > nsy | kh > ngkh | h > ngh | |
Voisée | v > mv | z > nz | |||||
Nasales | m : inchangé | n : inchangé | ny : inchangé | ng : inchangé | |||
Latérales | l : inchangé | ||||||
Roulées | r : inchangé | ||||||
Semi-voyelles | w : inchangé | y : inchangé |
Exemples :
- /p/ : pukul = frapper > memukul, pinggir = bord > meminggir = aller sur le cÎté
- /b/ : bawa = emporter > membawa, besar = grand > membesar = grandir
- /m/ : makan = manger > memakan, merah = rouge > memerah = rougir
- /f/ : fokus = focus > memfokus = se focaliser sur
- /v/ : vonis = verdict > memvonis = condamner
- /t/ : tunggu= attendre > menunggu, tinggi = haut > meninggi = s'Ă©lever, augmenter
- /d/ : dengar = entendre > mendengar, derita = souffrance > menderita = souffrir
- /n/ : nilai = valeur > menilai ("Ă©valuer").
- /c/ : cari = chercher > mencari
- /j/ : jilat = lécher > menjilat
- /ny/ : nyala = prendre feu, s'allumer >menyala
- /s/ : suruh = donner un ordre Ă > menyuruh
- /k/ : kira = croire, penser, estimer > mengira, kuning = jaune > menguning = jaunir
- /g/ : goda = tenter > menggoda
- /h/ : hirup = inspirer > menghirup, hijau = vert > menghijau = verdir
- Voyelle : ambil = prendre > mengambil.
Préfixe di-
Ce préfixe forme un passif "volontaire", c'est-à -dire que l'agent commet volontairement l'action :
- Anaknya dibawa ke rumah sakit = Il a emmené son enfant à l'hÎpital (littéralement : son enfant a été emmené à l'hÎpital)
Préfixe ter-
Ter- exprime un passif "involontaire", c'est-Ă -dire que l'agent n'a pas commis volontairement l'action, ou alors l'action n'a pas d'agent :
- Kunci terbawa pegawainya = son employé a emporté la clé sans s'en rendre compte (littéralement : la clé a été emportée involontairement par son employé)
- Dia tertabrak mobil = il a été renversé par une voiture (le conducteur ne l'a pas fait exprÚs).
Préfixe ber-
Il se place en principe devant un substantif, sans modification de la base. Il exprime la possession :
- Baris = rang > berbaris = se mettre en rang,
- Pangkat = grade > berpangkat = "ĂȘtre gradĂ©,
- Modal = capital > bermodal = avoir un capital etc.
Une exception est le mot : belajar= étudier, apprendre, formé sur : ajar = enseigner", dans lequel le préfixe a la forme bel-.
Préfixe se-
Appliqué à un verbe d'action, il indique la concomitance :
- Setiba mereka di Paris, mereka menelepon ibu mereka di Jakarta = DÚs qu'ils sont arrivés à Paris, ils ont téléphoné à leur mÚre à Jakarta.
Appliqué à un verbe d'état, il indique un comparatif d'égalité :
- Dia tidak secerdas adiknya = Il n'est pas aussi intelligent que sa petite sĆur.
Suffixe -kan
Ce suffixe donne des verbes dont le sens est, soit de faire quelque chose pour quelqu'un, soit de faire faire quelque chose Ă quelqu'un :
- buka = ouvrir > bukakan = ouvrir Ă l'intention de ou pour quelqu'un
- tidur = dormir > tidurkan = faire dormir, endormir
- terang = clair > terangkan = Ă©clairer, expliquer
On peut dire que -kan est un suffixe télique, c'est-à -dire qu'il indique que l'action a un but.
Suffixe -i
Ce suffixe donne des verbes dont le sens gĂ©nĂ©ral est d'indiquer le lieu oĂč s'effectue l'action :
- terang = clair > terangi = Ă©clairer (un endroit)
- tidur = dormir > tiduri = coucher sur (quelque chose), coucher avec (quelqu'un)
Circonfixes me- -kan et di- -kan
- Sur un verbe transitif : baca = "lire" > membacakan = "lire Ă quelqu'un"
- Sur un verbe intransitif : jalan = "aller, marcher" > menjalankan = "faire marcher, mettre en route"
- Sur un verbe d'Ă©tat : biru = "bleu" > membirukan = "bleuir, rendre bleu"
- Sur un substantif : penjara = "prison" > memenjarakan = "mettre en prison"
Le circonfixe di- -kan est la forme "passive" de me- -kan.
Circonfixes me- -i et di- -i
- Sur un verbe transitif : pukul = "frapper" > memukuli = "frapper à répétition"
- Sur un verbe intransitif : tidur = "dormir" > meniduri = "dormir (sur quelque chose)" ou "coucher (avec quelqu'un)"
- Sur un verbe d'Ă©tat : kuning = "jaune" > menguningi = "mettre du jaune sur quelque chose"
- Sur un substantif : guru = "maßtre" > menggurui = "donner des leçons (à quelqu'un)"
Le circonfixe di- -i est la forme "passive" de me- -i.
Circonfixes memper- -kan et diper- -kan
- Sur un verbe transitif : kenal = "connaßtre" > memperkenalkan = "faire connaßtre, présenter"
- Sur un verbe intransitif :
- Sur un verbe d'Ă©tat :
Circonfixes memper- -i et diper- -i
- Sur un verbe transitif :
- Sur un verbe intransitif :
- Sur un verbe d'état : baru = "nouveau" > memperbarui = "rénover"
Circonfixe ter- -kan
- Sur un verbe transitif :
- Sur un verbe intransitif :
- Sur un verbe d'état : baru > terbarukan = "renouvelable" (néologisme créé pour les énergies)
Circonfixe ber- -kan
- Sur un substantif : dasar = "base" > berdasarkan = "sur la base de"
Préfixe pe-
Ce prĂ©fixe donne l'agent de l'action exprimĂ©e par un verbe d'action (transitif). Il suit les mĂȘmes rĂšgles de nasalisation que le prĂ©fixe verbal me- :
- Pemukul = "celui qui frappe", pembawa = "celui qui emporte", pemakan = "celui qui mange"
- Penunggu = "celui qui attend, gardien"), pendengar = "celui qui Ă©coute, auditeur", penilai = "Ă©valuateur"
- Penyala = "allumeur"
- Penyuruh = "donneur d'ordre"
- Pencinta = "amoureux" (sur cinta, "amour"), penjilat = "lĂšche-cul"
- Penguning = "colorant jaune", penggoda = "tentateur"
- Penghijau = "colorant vert")
- Pengambil = "celui qui prend"
etc.
Préfixe pe- sans nasalisation
Il a un sens différent de l'autre préfixe pe-. Ce préfixe donne non pas un agent, mais quelqu'un qui possÚde une qualité ou pratique une activité :
- Silat (l'art martial malais-indonésien) donne ainsi pesilat, "pratiquant de silat".
- Suruh ("donner un ordre") donne pesuruh, "celui Ă qui on donne des ordres".
Ici encore, une exception est le mot pelajar, "étudiant, élÚve", formé sur ajar, "enseigner", dans lequel le préfixe a la forme pel-.
Le préfixe pe- sans nasalisation correspond donc entre autres au préfixe verbal ber-.
Il présente donc une ambiguïté dans les cas de non-nasalisation de la consonne initiale. Par exemple, pemodal, formé sur modal ("capital"), peut aussi bien signifier "celui qui finance" que "celui qui détient un capital".
Préfixe pi-
Cette forme archaïque n'est plus attestée que dans quelques mots, et on peut donc la considérer comme non productif :
- Alang = enchĂšre > pialang = courtier
- Hutang = dette > piutang créance
Préfixe ke-
Ce préfixe, également archaïque, n'est plus attesté que dans quelques mots, et on peut donc aussi le considérer comme non productif :
- hendak = vouloir > kehendak = volonté.
On trouve aussi ce préfixe dans les formes :
- diketahui = il est su, on le sait, et
- ketahuan = ça s'est su,
obtenues à partir de la base tahu = savoir. On peut supposer qu'il a existé :
- tahu > ketahu
sur lequel se seraient construites les formes ci-dessus, mais ce n'est qu'une hypothĂšse.
Suffixe -an
Ce suffixe exprime différentes choses :
- AprÚs un verbe d'action, il exprime le résultat de l'action, ou ce qui subit l'action :
- makan = manger > makanan = nourriture
- baca = lire > bacaan = lecture (chose lue)
- pukul = frapper > pukulan = coup
- AprÚs un verbe d'état, il peut désigner la qualité de ce verbe, ou quelque chose qui la possÚde :
- besar = grand > besaran = ordre de grandeur
- kuning = jaune > kuningan = cuivre
- AprÚs un substantif, il donne un sens général, figuré ou dérivé :
- pasar = marché (le lieu) > pasaran = marché (le concept économique)
- ratus = cent > ratusan = centaine.
Circonfixe pe- -an
- Sur un verbe transitif : buka = "ouvrir" > pembukaan = "ouverture"
- Sur un verbe intransitif : bangun = "se lever" > pembangunan = "construction"
- Sur un verbe d'état : sempit = "étroit" > penyempitan = "rétrécissement"
- Sur un substantif : darat = "terre, sol" > pendaratan = "atterrissage"
Circonfixe per- -an
- Sur un verbe transitif :
- Sur un verbe intransitif : putar = "tourner" > perputaran = "rotation"
- Sur un verbe d'Ă©tat : luas = "vaste, Ă©tendu" > perluasan = "agrandissement, extension"
- Sur un substantif :
- guru = "maĂźtre" > perguruan = "enseignement, Ă©cole"
- Cas particulier : gunung = "montagne" > pegunungan = "chaĂźne de montagnes"
Circonfixe ke- -an
- Sur un verbe d'état : tinggi = "haut, élevé" > ketinggian = "altitude"
- Sur un substantif :
- guna = "usage" > kegunaan = "utilité"
- pulau = "Ăźle" > kepulauan = "archipel"
Infixes
En malais-indonĂ©sien, les infixes ne sont en principe plus productifs, c'est-Ă -dire qu'on ne les utilise plus comme procĂ©dĂ© de production de mots. Ils n'existent plus qu'Ă l'Ă©tat figĂ© dans plusieurs mots. En outre, un mĂȘme infixe peut ĂȘtre aussi bien verbal que nominal.
Voici quelques exemples :
- Infixe ej:
- golak = remuement, trouble > gejolak = bouleversement, embrasement
- Infixe el:
- tunjuk = "montrer" > telunjuk = index (doigt)
- Infixe em :
- tali = "ficelle" > temali
- turun = "descendre" > temurun.
Certaines de formes sont inusitées seules, mais sont employées en redoublement (voir plus loin).
On citera toutefois une tendance récente de faire revivre l'infixe -in, par exemple :
- kerja = travail > kinerja = productivité, efficacité
Le redoublement
Le redoublement d'un mot n'est pas un procédé particulier aux langues austronésiennes. Il existe dans les autres langues, notamment en Asie de l'Est et du Sud-Est.
C'est toutefois un procédé trÚs productif en austronésien, y compris en malais-indonésien. Sa fonction est de généraliser, ou étendre, ou dériver, ou affaiblir le sens initial du mot :
- Makan = manger > makan-makan = manger un petit peu, par ci par lĂ , de temps Ă autre
- Jalan = aller, marcher > jalan-jalan = aller sans but précis, de ci de là , se promener
- Ibu = mĂšre > ibu-ibu : une dame, une matrone
- Anak = enfant (par opposition Ă "parents") > anak-anak = enfant (par opposition Ă "adulte")
- Laki = mari > laki-laki : homme (par opposition "femme")
- Langit = ciel > langit-langit = palais (de la bouche), plafond
- Luka = blessure > luka-luka = ĂȘtre blessĂ©.
Il existe quelques formes de redoublement de la syllabe initiale uniquement :
- laki = mari > lelaki = laki-laki = homme
- runtuh = en ruine > reruntuhan = ruines, tas de pierres
En contexte, le redoublement peut exprimer le collectif ou la pluralité :
- Selamat malam Bapak-Bapak dan Ibu-Ibu = Bonsoir Mesdames et Messieurs
- Anak-anak belum pulang = Les enfants ne sont pas encore rentrés
- Di New York, gedung tinggi-tinggi = A New York, les immeubles sont tous hauts
Le redoublement peut se combiner avec des affixes :
- Orang itu mengada-ada = cette personne fabule (préfixe me- sur ada = exister)
- Dia memakai bahasa yang berbunga-bunga = il utilise un langage fleuri (préfixe ber-sur bunga = fleur),
Ă comparer Ă :
- Kebun ini tidak berbunga = ce jardin n'a pas de fleurs
- Sebagai hadiah dia dapat kapal-kapalan (suffixe -an sur kapal, "bateau") = Comme cadeau, il a eu un bateau en jouet
- Direktur kami agak kebapak-bapakan (circonfixe ke- -an sur bapak, "pĂšre") = Notre directeur est assez paternel
- Mereka saling hantam-menghantam (préfixe me- sur hantam = frapper, sur la 2e partie) = Ils se sont frappés les uns les autres (réciprocité),
qu'il faut distinguer de :
- Dia terus menghantam-hantam lawannya (prĂ©fixe me- sur hantam, "frapper", mais sur la 1re partie) = "Il a frappĂ© sans arrĂȘt et Ă plusieurs reprises son adversaire" (rĂ©pĂ©tition).
On trouve par ailleurs des formes redoublées avec infixation :
- tali-temali = toutes sortes de ficelles
- turun-temurun = au fur et Ă mesure en descendant.
Un autre procédé est le redoublement avec modification de la base :
- Balik = revenir > bolak-balik = faire l'aller-retour
- Ramah = aimable, chaleureux > ramah-tamah = amabilité, chaleur
- Sayur = légume > sayur-mayur = toutes sortes de légumes
- Sorak = clamer > bersorak-sorai = pousser des clameurs (avec le préfixe ber-).
Enfin, il y a les formes redoublées figées, dont la forme simple n'existe pas. Il s'agit souvent d'animaux, mais pas toujours :
- Cumi-cumi = calamar
- Gorong-gorong = canalisation
- Kunang-kunang = luciole
- Kupu-kupu = papillon
- Kura-kura = tortue
- Laba-laba = araignée
- Ubur-ubur = méduse
- Ubun-ubun = fontanelle
Notes et références
- Le cĂ©lĂšbre grammairien Donat, Ă©crit par exemple dans son Ars Grammatica: « Nomini quot accidunt? Sex. Quae? Qualitas, comparatio, genus, numerus, figura, casus. » (Combien [de causes de variation] arrive-t-il aux noms ? Six. Lesquelles ? La qualitĂ© [propre ou commun], le degrĂ© de comparaison, le genre, le nombre, la formation [simple ou composĂ©e]). On voit que cette prĂ©sentation englobe les adjectifs et les noms dans une mĂȘme catĂ©gorie grammaticale.
Voir aussi
Bibliographie
- Samuel, JérÎme et Wardhany, Saraswati, Manuel d'indonésien Volume 1, L'Indonésie au quotidien, L'AsiathÚque, Paris (2012)