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Fuzz (effet audio)

La fuzz (de l'anglais fuzz, « duvet ») est la premiĂšre des pĂ©dales d'effet de saturation ayant Ă©tĂ© utilisĂ©e par les guitaristes et les bassistes Ă©lectriques. La plupart des modĂšles ont Ă©tĂ© conçus Ă  la fin des annĂ©es 1960 aux États-Unis et au Royaume-Uni, tels que la Tone Bender, la Fuzz Face ou la Big Muff. Cet effet est utilisĂ© par de nombreux guitaristes, comme Keith Richards, Jimi Hendrix, Jeff Beck, Pete Townshend ou David Gilmour.

Fichiers audio
Son d'une Fuzz Face (clone) dans un ampli Fender (simulation logicielle)
Exemple d'un jeu dynamique Ă  la guitare Ă©lectrique avec un clone de Fuzz Face (variation du potentiomĂštre de volume sur la guitare)
Son d'une Little Big Muff d'Electro-Harmonix avec une Stratocaster
Une Fuzz Face (gauche) et une Big Muff (droite).

Étymologie

En anglais, fuzz signifie « duvet » et ce mot a été choisi pour décrire le son produit : assez feutré mais avec du sustain et des aigus (en opposition à un son clair de guitare). Le terme est créé par Grady Martin qui sort en 1961 le morceau The Fuzz avec de la guitare distordue[1].

Utilisation

Cette pĂ©dale d'effet principalement utilisĂ©e dans le milieu du rock et ses diverses variantes a pour but de produire une saturation du signal sonore - gĂ©nĂ©ralement en provenance des micros d'une guitare ou d'une basse - afin de donner Ă  celui-ci une saturation avec une coloration singuliĂšre. Historiquement, la fuzz a Ă©tĂ© utilisĂ©e dans le rock psychĂ©dĂ©lique, devenant mĂȘme l'un de ses traits sonores principaux[2]. Le son des fuzz, dĂ©crit comme « abrasif et chaotique », fait Ă©cho Ă  l'expĂ©rience psychĂ©dĂ©lique et Ă©voque « la colĂšre et l'agressivitĂ© »[2]. Les fuzz produisent des notes avec un trĂšs long sustain et permettent de jouer avec le larsen.

Principe

Intérieur d'une pédale de Fuzz Face : circuit (transistors, résistances, condensateurs), pile pour l'alimentation, jacks (entrée et sortie) et potentiomÚtres (gain, volume)

Le terme fuzz dĂ©signe Ă  la fois une pĂ©dale d'effet et un type de saturation particulier. La saturation du son est due Ă  un fort Ă©crĂȘtage du signal Ă©lectrique d'entrĂ©e de l'instrument. Plus l'Ă©crĂȘtage est important, plus le son est distordu.

Fuzz au germanium

Dans le cas des premiĂšres pĂ©dales de fuzz, cet Ă©crĂȘtage est rĂ©alisĂ© par des transistors au germanium (types courants Ă  la fin des annĂ©es 1950), qui ne sont pas utilisĂ©s sur d'autres pĂ©dales de distorsion dites classiques et plus rĂ©centes. Les transistor au germanium sont sensibles Ă  l'humiditĂ© et Ă  la chaleur, ce qui est un inconvĂ©nient sur scĂšne. Les transistors doivent en outre ĂȘtre appairĂ©s pour sonner correctement[3] : une faible variation dans la valeur des composants entraĂźne de grandes diffĂ©rences sonores entre chaque pĂ©dale[4].

Fuzz au silicium

Pour résoudre les problÚmes liés aux transistors au germanium, les fabricants ont construit des fuzz au silicium. Cela permet d'avoir des pédales produites en masse qui sonnent identiques, sans devoir appairer les composants. Ces fuzz ont en général une sonorité plus claire, parfois jugée agressive[4].

Circuit d'une Fuzz Face au germanium (deux transistors NKT275)

Son

Le montage simple, particulier et la distorsion asymĂ©trique en font un effet puissant et polyvalent. Sur certains modĂšles (Fuzz Face par exemple), on peut faire varier la saturation avec le bouton de volume de la guitare, en allant du crunch Ă  la saturation trĂšs granuleuse. Certaines pĂ©dales donnent une saturation crĂ©meuse, tandis que d'autres produisent un vĂ©ritable mur du son[3]. Certaines fuzz sont mĂȘme capables d'auto-oscillation.

  • Un clavinet avec une fuzz.
  • DĂ©monstration d'une fuzz de Death By Audio avec de nombreux contrĂŽles (bias, tonalitĂ©, possibilitĂ© d'oscillation...) Ă  la guitare Ă©lectrique.

Histoire

Précurseurs

Dans les annĂ©es 1940 et 1950, la distorsion est considĂ©rĂ©e comme un dĂ©faut dans les amplificateurs de guitare Ă©lectrique. Cependant, certains guitaristes commencent Ă  volontairement produire cet effet, d'abord en poussant au maximum le volume, puis en endommageant volontairement les lampes ou le haut-parleur. Le son fuzz est au dĂ©part « fabriquĂ© maison ». On l'entend pour la premiĂšre fois en 1957 sur The train kept a rollin de Johnny Burnette, au dĂ©part Ă  cause d'un dĂ©faut de l'amplificateur, mais le groupe apprĂ©cia le rĂ©sultat et dĂ©cida de jouer le morceau ainsi. Mais c'est Link Wray qui le popularisera et le dĂ©veloppera largement dĂšs 1958, inventant en mĂȘme temps le « gros son » Ă  travers des morceaux comme Rumble, Aces of spades[1]. Le groupe garage The Sonics utilisera la mĂȘme mĂ©thode que Link Wray.. En 1961, Grady Martin sort un morceau avec de la guitare distordue, qu'il intitule The Fuzz, d'oĂč provient le nom donnĂ© Ă  cet effet[1].

Maestro Fuzz Tone

La Maestro Fuzz Tone (1962) est la premiÚre pédale de fuzz et la toute premiÚre pédale d'effet de l'histoire.

La fuzz a Ă©tĂ© le premier effet Ă  ĂȘtre intĂ©grĂ© dans une pĂ©dale, avec la Maestro Fuzz Tone crĂ©Ă©e par Gibson en 1962 aux États-Unis[5]. L'ingĂ©nieur de Grady Martin, Glenn Snoddy, cherche Ă  reproduire l'effet obtenu sur The Fuzz Ă  la suite d'une dĂ©faillance de la table de mixage. Snoddy, aidĂ© par l'ingĂ©nieur Revis Hobbs, crĂ©e un circuit Ă  base de transistors au germanium[1]. Lors de sa sortie, la pĂ©dale est vendue comme un appareil permettant d'imiter le son des cuivres (trompette, tuba...) et des instruments Ă  vent (saxophone)[6]. Elle devient trĂšs populaire lorsque Keith Richards des Rolling Stones l'utilise sur le riff de la chanson (I can't get no) Satisfaction en 1965[7].

Tonebender

Photo de trois modĂšles de fuzz Tone Bender par Vox.
Trois modĂšles de fuzz Tone Bender par Vox.

En 1965, au Royaume-Uni, Ă  une Ă©poque oĂč le matĂ©riel amĂ©ricain Ă©tait difficile d'accĂšs, le musicien Vic Flick veut modifier sa Fuzztone. L'Ă©lectronicien Gary Hurst transforme le circuit en augmentant la tension Ă  9V et en ajoutant des composants. Cette nouvelle pĂ©dale, la Tone Bender, est alors commercialisĂ©e sous la marque Sola Sound et dĂ©clinĂ©e en plusieurs versions (la Tone Bender Professionnal MK2 est considĂ©rĂ©e comme la plus aboutie). Vendue ensuite par Vox, elle est utilisĂ©e entre autres par les Beatles[1] et Jeff Beck dans les Yardbirds[8].

Fuzzrite

En 1966, les ingénieurs de Mosrite (entreprise américaine) créent une pédale de fuzz pour Leo LeBlanc. C'est la Fuzzrite, qui utilise à l'origine des transistors au germanium. Ces derniers étant sensibles à la chaleur, l'entreprise décide de passer à des transistors au silicium[1]. Cette pédale a été utilisée sur le morceau In a gadda da vida de Iron Butterfly, considéré comme précurseur du heavy metal[9].

Fuzz Face

Photo de la pédale Arbiter Fuzz Face, construite vers 1967
Arbiter Fuzz Face (env. 1967)

La pĂ©dale de fuzz la plus cĂ©lĂšbre est sans doute la Fuzz Face. Elle est inventĂ©e par Ivor Arbiter au Royaume-Uni en 1966, inspirĂ©e de la Maestro Fuzz Tone et de la Sola Sound Tonebender. « La Fuzz Face a deux arguments de poids face Ă  ses concurrents : son prix et son look »[1]. Elle se fait rapidement fait un nom et change la façon d'utiliser les guitares Ă©lectriques. Jimi Hendrix a popularisĂ© cette pĂ©dale[10] et nombreux sont les artistes qui l'ont utilisĂ©, notamment David Gilmour, George Harrison[1], Eric Johnson, Joe Bonamassa[11], ainsi que de nombreux autres groupes de rock garage, psychĂ©dĂ©lique et blues rock. La Fuzz Face connaĂźt plusieurs versions, au germanium et au silicium. À partir de 1969, elle est vendue par la marque Dallas Arbiter, jusqu'en 1975. Jim Dunlop la commercialise Ă  nouveau Ă  partir de 1993[12].

Univox Super Fuzz

En 1967, l'ingĂ©nieur japonais Fumio Mieda crĂ©e la psychedelic machine[13], un appareil embarquant un phaser et une fuzz[14]. Les deux effets sont ensuite vendus sĂ©parĂ©ment : l'Univibe et la fuzz Shin-ei Companion FY-2. Cette fuzz est ensuite vendue par Univox sous le nom de Superfuzz en 1968[15]. La Super Fuzz incorpore une octave supĂ©rieure et une octave infĂ©rieure. « Lors de sa sortie en 1968, la Super Fuzz incarne l’aboutissement des annĂ©es d’expĂ©rimentations qui virent la fuzz prendre de l’ampleur »[1]. Cette pĂ©dale est utilisĂ©e notamment par Pete Townshend[1]. La Super Fuzz a inspirĂ© plusieurs pĂ©dales, comme la Fender Blender.

Big Muff

Deux versions de la Big Muff d'Electro-Harmonix (à gauche : réédition américaine ; à droite : version russe Sovtek).

En 1969, Mike Matthews, fondateur d'Electro-Harmonix, crée avec Bob Myer la Big Muff, une pédale au design original, offrant beaucoup de distortion et de sustain. Le circuit de la Big Muff utilise quatre transistors au silicium et des filtres de tonalité. Contrairement à ses prédécesseures, la Big Muff produit un son massif tout en gardant la clarté et la précision des notes. De trÚs nombreuses itérations de la Big Muff sont produites (Big Muff Pi, Big Muff Sovtek, Big Muff Triangle, Ram's Head...). Elle est utilisée notamment par David Gilmour[1]. L'effet fuzz fait désormais partie des standards en termes d'effets pour guitare et basse.

Effets dérivés de la fuzz

Plusieurs effets dérivés de la fuzz ont été créés, en particulier l'octavia, une fuzz produisant une octave supérieure (inventée par Roger Mayer en 1967 pour Jimi Hendrix[1]). Des fuzz produisant une octave inférieure existent également. Plusieurs marques dans les années 1970 ont également créé des fuzz wah (pédale combinant fuzz et wah-wah).

Désuétude et renaissance

À partir des annĂ©es 1970, les fuzz tombent progressivement en dĂ©suĂ©tude alors que se dĂ©veloppent les pĂ©dales d'overdrive et de distorsion, qui offrent un son plus dĂ©fini et maĂźtrisĂ©. D'autre part, les amplificateurs commencent Ă  avoir des master volume permettant pousser les lampes afin d'avoir une saturation Ă©levĂ©e sans pour autant jouer trop fort. « Les nouveaux genre qui Ă©mergent, comme le Hard Rock, prĂ©fĂšrent la saturation des amplis Ă  celle, particuliĂšre, des fuzz »[16].

Dans les années 1990, la fuzz devient populaire dans le stoner qui apprécie ses sonorités puissantes, grasses et lourdes[16]. Elle revient également sur le devant de la scÚne dans les années 2000 avec des groupes recréant le son des années 1960 (The Black Keys, The White Stripes, Tame Impala, etc.)[2]. Elle connaßt une renaissance et de nombreux constructeurs (en particulier les artisans « boutique ») améliorent et stabilisent les circuits existants et certains créent de nouveaux modÚles avec différentes fonctionnalités[16].

  • La Boss Hyperfuzz FZ-2 (1993-1997, clone de Super Fuzz) a acquis une certaine notoriĂ©tĂ© dans le stoner rock.
    La Boss Hyperfuzz FZ-2 (1993-1997, clone de Super Fuzz) a acquis une certaine notoriété dans le stoner rock[17].
  • Une fuzz moderne (annĂ©es 2000) : la Fuzz Factory de Zvex.
    Une fuzz moderne (années 2000) : la Fuzz Factory de Zvex.
  • Blackout Effectors Musket fuzz (2008), inspirĂ©e de la Big Muff.
    Blackout Effectors Musket fuzz (2008), inspirée de la Big Muff[18].
  • Dwarcraft Devices Shiva Fuzz.
    Dwarcraft Devices Shiva Fuzz[19].

Références

  1. « Dossier sur l’histoire des pĂ©dales de fuzz mythiques », sur Audiofanzine, (consultĂ© le )
  2. (en) Nicholas Russo, « Psycherelic Rock . Ersatz Nostalgia for the Sixties and the Evocative Power of Sound in the Retro Rock Music of Tame Impala », Volume !. La revue des musiques populaires, no 11 : 1,‎ , p. 162–173 (ISSN 1634-5495, DOI 10.4000/volume.4344, lire en ligne, consultĂ© le )
  3. (en) Dave Hunter, The Rough Guide to Guitar, Rough Guides UK, , 320 p. (ISBN 978-1-4053-8873-3, lire en ligne)
  4. « Best Fuzz Pedal - Learn about Germanium vs Silicon. », sur screaminfx.com (consulté le )
  5. (en-GB) Museum of Making Music, « The Birth and Golden Age of Stompboxes », sur Museum of Making Music (consulté le )
  6. (en) JHS Pedals, « The First Pedal Demo Ever Made », sur Youtube, (consulté le )
  7. (en-US) Bill Friskics-Warren, « Glenn Snoddy, 96, Accidental Inventor of the Fuzz Tone, Dies », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consultĂ© le )
  8. (en) Jay Hodgson, Understanding Records : A Field Guide To Recording Practice, Bloomsbury Publishing USA, , 272 p. (ISBN 978-1-4411-6566-4, lire en ligne)
  9. (en) Hal Leonard Corp, 25 Top Hard Rock Songs : Tab. Tone. Technique. (Songbook) : Tab+, Hal Leonard Corporation, , 248 p. (ISBN 978-1-4803-4090-9, lire en ligne)
  10. (en) Harry Shapiro, Michael Heatley et Roger Mayer, Jimi Hendrix Gear, Voyageur Press (ISBN 978-1-61060-421-5, lire en ligne), p. 73
  11. (en) Charles Saufley December 21 et 2010, « Dunlop JBF3 Joe Bonamassa Signature Fuzz Face Pedal Review », sur www.premierguitar.com (consulté le )
  12. (en) Guitar World, Guitar World Presents 200 Stompbox Reviews, Hal Leonard Corporation, (ISBN 978-1-4803-9847-4, lire en ligne), p. 25
  13. (en) « The Continuing Story of the Leslie Rotating Speaker Cabinet », sur reverb.com, (consulté le )
  14. (ja) « 【English Subă€‘ă€ć‰ç·šïŒPart.1】開ç™șè€…ăƒ»äž‰æžæ–‡ć€«ăŒèȘžă‚‹Uni-Vibeă€ăƒ‡ă‚žăƒžăƒŒăƒˆ DEEPER’S VIEW ă€œç”Œéš“ăšè€ƒćŻŸă€œ Vol.10】 », interview de Fumio Mieda sur l'histoire de l'UniVibe, sur Youtube.com,‎ (consultĂ© le ), p. 2'30, 8'30, 13'20, 17'15
  15. « Coda Effects: Univox Super Fuzz : le monstre des 70s ! (partie 1/2) », sur Coda Effects (consulté le )
  16. « Coda Effects: Les différents types de Fuzz », sur Coda Effects (consulté le )
  17. « Coda Effects: Boss FZ2: la Hyper Fuzz ! », sur Coda Effects (consulté le )
  18. « Perf and PCB Effects Layouts: Blackout Effectors Musket Fuzz », sur Perf and PCB Effects Layouts, (consulté le )
  19. « Perf and PCB Effects Layouts: Dwarfcraft Shiva », sur Perf and PCB Effects Layouts, (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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