Fort l'Écluse
Le Fort l'Écluse ou Fort de l'Écluse et plus anciennement Fort de la Cluse est un ouvrage militaire fortifié, des XVIe et XVIIe siècles profondément modifié vers 1830, construit à flanc de montagne pour contrôler le défilé de l'Écluse passage du Rhône en sortie ouest du bassin genevois en France. Il s'agit d'un site classé qui offre les vestiges de plusieurs siècles d'architectures militaires, tours, tourelles de guet, meurtrières, échauguettes, casemates, chambres à munitions. Il est construit en réemployant les vestiges de l'ancien château fort des sires de Gex fondé entre 1225 et 1277, connu sous le nom de château de la Cluse de Gex.
Type | |
---|---|
Usage | |
Visiteurs par an |
11 680 () |
Site web |
Coordonnées |
46° 07′ 15″ N, 5° 53′ 34″ E |
---|
Localisation
Le fort est situé dans le département français de l'Ain sur la commune de Léaz, à 5 kilomètres au nord-nord-est du bourg par la route départementale 84 vers Collonges, au lieu-dit « Longeray », une des entrées du parc naturel régional du Haut-Jura.
Historique
Antiquité
Le défilé de l'Écluse est depuis l'époque romaine un passage naturel stratégique entre le Jura et les Alpes. Dès , Jules César fait bâtir une tour en bois ; la « tour de César » et une enceinte, ce qui n'empêchera pas les Helvètes de la prendre.
Moyen Ă‚ge
Au XIIe siècle[1], le village de la Cluse, ainsi que le défilé qui en dépendait et que commande aujourd'hui le Fort-l'Écluse, appartenaient aux moines de Saint-Claude qui en reçoivent en 1184[1] confirmation de l'empereur Frédéric Barberousse et y bâtissent la même année une chapelle.
Au mois de [1] les moines inféodent le village à Amédée II, seigneur de Gex, contre le fief de Divonne. Ce dernier y fait bâtir une petite construction militaire, bientôt transformée en maison forte, puis en château, pour assurer le passage et prélever un droit de passage sur les personnes et les marchandises empruntant cette importante route entre le bassin Lémanique et Bellegarde[2]. Léonette, dame de Gex, reconnait tenir, en 1278[1], du fief de Béatrix, dame de Faucigny, son château de la Cluse, que Guillaume de Joinville, fils de Léonette, vend, le [1], au comte Amédée V de Savoie, moyennant 2 100 livres de viennois.
Position stratégique de premier ordre, il fut l'enjeu de nombreux conflits militaires.
En 1305[1], Jean Ier de Châlon, seigneur d'Arlay, partisan du dauphin de Viennois, s'en empare de vive force ; puis il est pris et repris en 1311 et 1318. En 1325[1], Édouard de Savoie ne pouvant s'en rendre maître, après neuf jours de siège, l'achète de la trahison du commandant de la place, qui sera pendu pour sa félonie. Le château devient savoyard et est érigé en chef-lieu de châtellenie.
De cette époque il subsiste notamment la tour semi-circulaire dite « Tour de César » du XIIIe siècle et divers bâtiments du XVe siècle[3].
Époque moderne
Vers la fin du XVe siècle, d'importants travaux de restauration et de consolidation sont entrepris. En 1536[1], les troupes bernoises s'en emparent et ne le restituent aux Savoyards qu'en 1564 avec le traité de Lausanne. En 1589[1], l'armée des confédérés protestants de Berne l'attaque en vain, mais le force à capituler, le [1]. Le suivant[1], Amédée de Savoie, frère du duc Charles-Emmanuel, le reprend aux Bernois. En 1600, durant la guerre franco-savoyarde, il ne peut résister aux troupes du maréchal de Biron, et le traité de Lyon de 1601 l'assure à la France.
Il va alors subir une complète transformation et ne rien rester de l'ancien système de défense. Durant tous les XVIIe et XVIIIe siècles les ingénieurs du Roi vont doter le site d'une enceinte et d'une tour ronde (1638), de fossés et d'un renforcement de la muraille (1677), d'embrasures d'artillerie, d'une casemate, d'une passerelle (1690-1700), d'une place d'arme, d'une plate-forme d'artillerie, d'une nouvelle enceinte. Il est encore modifié en 1720[1], sous Louis XV, par le directeur des fortifications Biancolelli avec la création d'une route passant à l'intérieur du fort (1721-1723). Cet ensemble constitue l'actuel fort inférieur.
Au début du XVIIIe siècle, plusieurs compagnies françaises de soldats invalides et une compagnie irlandaise étaient détachées en garnison dans ce fort[4].
Époque contemporaine
Le [1], Fort-l'Écluse se rend à un chef de détachement de l'armée autrichienne, commandée par le comte Bubna, sans avoir riposté un seul coup de canon au seul obus qui l'avait atteint. Le suivant[1], le général français Bardet, aidé de 200 paysans, force la garnison autrichienne à se rendre à discrétion. Enfin, le [1], les Autrichiens s'en emparent de nouveau, mais après des pertes considérables, que leur fit subir le commandant Villetard de la Guérie, qui ne leur abandonna que des ruines embrasées.
De 1820 à 1828[1], des travaux considérables d'aménagement et de renfort y furent exécutés, sous la direction du commandant du génie Soyer. Le fort d'en haut, qui en fait une place inexpugnable, a été construit d'après les projets du général Haxo afin de protéger le fort inférieur d'une possible attaque par la montagne. La première pierre est posée le [1] et les travaux ne prendront fin qu'en 1841. Plusieurs casemates d'artillerie et de batteries-terrasses y sont aménagées. De nouveaux bâtiments de logements y sont aussi construits. Ce fort est relié à celui d'en bas par une longue galerie souterraine, composée de 1 165 ou 1 188 degrés.
Avec le rattachement de la Savoie à la France en 1860, Fort l'Écluse perd tout intérêt stratégique. Durant la Première Guerre mondiale, le fort est réoccupé par des garnisons, afin de contrôler la route. En 1936, un tunnel routier est construit dans la montagne sous le fort : il permet aux véhicules d'éviter la traversée du fort et de gagner du temps sur le trajet. Entre 1936 et 1939, des ouvrages militaires de type Maginot sont rajoutés pour contrôler à nouveau le passage.
Durant la Seconde Guerre mondiale, le fort est l'objet de combats entre des troupes françaises et allemandes pendant la bataille des Alpes en 1940. Les soldats français dans le fort tiennent la position à partir du , et elle ne sera abandonnée que le , huit jours après l'armistice du 22 juin 1940. Pendant la guerre, le fort est occupé par l'armée allemande. Ce sont les soldats allemands de la garnison qui brûleront le village de Chevrier en 1944[5]. Après le conflit Fort l'Écluse est occupé par l'armée française jusqu'à sa désaffectation survenue en 1956.
- L'histoire récente
Laissé à l'abandon, le fort est victime d'actes de vandalisme, avant d'être mis en vente dans les années 1970. Une association, l'Association pour la Protection et la Mise en Valeur du Fort l'Écluse, est créée en 1978 avec pour objectif de réaliser des chantiers de nettoyage, de petits travaux et des animations (son et lumière, spectacles, visites guidées, expositions artistiques, etc.).
En 1981, le syndicat intercommunal des dix-neuf communes du pays de Gex achète le site pour 50 000 francs. En 1993, la décision est prise de mettre le fort en lumière ; un projet plus ancien d'y créer le « musée des Pays de l'Ain » sur le thème de la frontière n'aboutira pas, malgré la création d'expositions sur ce sujet. En 1995, une nouvelle association est créée dans le but de gérer les animations. En 1997, la propriété du fort passe à la communauté de communes du Pays de Gex chargée de la réhabilitation et de la mise en valeur du site. Elle succède en 2008 à l'association « Fort l'Écluse Animation » dans la gestion du site et des animations.
Tourisme
Le fort se trouve dans une zone classée de 1 844 hectares. Il est possible de visiter le fort inférieur, avec ou sans guide, les week-ends d'avril à juin, tous les jours pendant la saison estivale (de mi-juin à mi-septembre), ainsi que les week-ends de septembre. Des visites (exclusivement guidées) sont possibles également hors de ces périodes et sur réservation. Pendant la saison estivale, le fort inférieur accueille des expositions et offre au public de nombreuses animations comme du théâtre et des concerts. Il est également possible de gravir les 830 marches de la galerie creusée dans la roche pour atteindre les terrasses situées sous le fort supérieur. Le fort supérieur accueille, depuis 2017, un parcours aventure. L'accès à la partie haute n'est possible que par ce biais.
- Vue du défilé de l'Écluse et du pied de la montagne du Vuache (gauche) depuis le fort supérieur.
- Entrée principale du fort inférieur.
- La tour du fort.
- Fortifications Est du fort inférieur.
- Vue vers l'ouest sur le lieu-dit de Longeray depuis le fort supérieur.
- Vue vers l'est depuis le fort supérieur.
- Vue aérienne.
Notes et références
- Topographie historique du département de l'Ain 1873, p. 155.
- Site officiel du Fort l'Écluse.
- Charles-Laurent Salch, Dictionnaire des châteaux et des fortifications du Moyen Âge en France, Strasbourg, Éditions Publitotal, , 28e éd. (1re éd. 1979), 1304 p. (ISBN 2-86535-070-3, OCLC 1078727877), p. 669.
- « Pensionnaires reçus à l'Hôtel des Invalides (1673-1796) », Base de données Hôtel des Invalides (consulté le ).
- Robert Amoudruz, Brûlement de villages au pays du Vuache, Saint-Julien-en-Genevois, La Salévienne, , 314 p., p. 23 et 30.
Voir aussi
Bibliographie
- Marie-Claude Guigue, Topographie historique du département de l'Ain, Bourg, Gromier Ainé, , 518 p. (BNF 30556006, lire en ligne).
- Yves Macaire, Fort l'Écluse : des légions de César aux Mongols de Vlassov, Bourg-en-Bresse, Musnier-Gilbert éd, , 132 p. (ISBN 978-2-910-26760-5)
- Bruno, Agnès - Qui sont ses frontaliers - Fort l'Écluse Léaz-Ain - Éditeur les Musées des Pays de l'Ain - 2007.
- Revue Militaria Magazine - numéro 261 - .
Articles connexes
Liens externes
- Site officiel
- Ressource relative Ă l'architecture :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- « Tourisme dans le Pays de Gex »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?)