Fort de Bois-l'Abbé
Le fort de Bois-l'Abbé, brièvement appelé fort Poniatowski, est une fortification faisant partie de la place forte d'Épinal, situé au nord-est de la commune Uxegney.
Fort de Bois-l'Abbé | |
Vue sur la totalité des casernements depuis la rampe d'accès aux pièces d'artillerie du fort de Bois-l'Abbé. | |
Description | |
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Type d'ouvrage | fort Ă crĂŞte unique |
Dates de construction | de 1883 Ă 1885 |
Ceinture fortifiée | place fortifiée d'Épinal |
Utilisation | fort de ceinture |
Utilisation actuelle | géré par une association |
Propriété actuelle | |
Garnison | 230 hommes |
Armement de rempart | 6 canons et 2 mortiers |
Armement de flanquement | 4 pièces |
Organe cuirassé | néant |
Modernisation béton spécial | non réalisée |
Protection | Inscrit MH (2002) |
Programme 1900 | |
Dates de restructuration | non réalisée |
Tourelles | - |
Casemate de Bourges | - |
Observatoire | - |
Garnison | - |
Programme complémentaire 1908 | non réalisé |
Coordonnées | 48° 12′ 15,94″ nord, 6° 24′ 01,42″ est |
Il est un exemple de fortification de l'Est de la France de type Séré de Rivières, faisant partie intégrante de la place forte d'Épinal. Il est entretenu par l'association ARFUPE qui restaure aussi le fort d'Uxegney et se visite uniquement le et le dimanche des journées du patrimoine.
Historique
Le décret d'utilité publique date du
Par le décret du , le ministre de la Guerre Georges Boulanger renomme tous les forts, batteries et casernes avec les noms d'anciens chefs militaires[1]. Pour le fort de Bois-l'Abbé, son « nom Boulanger » est en référence au prince Józef Antoni Poniatowski : le nouveau nom devait être gravé au fronton de l'entrée. Dès le , le successeur de Boulanger au ministère, Théophile Ferron, abroge le décret[2]. Le fort reprend officiellement son nom précédent.
Le prince Poniatowski est né à Vienne en 1763 et mort lors de la retraite ayant suivi la bataille de Leipzig, le , en essayant de franchir l'Elster Blanche à cheval. Prince de Pologne et du Saint-Empire romain germanique, il se couvrit de gloire pendant la campagne de Russie et lors de la bataille de Leipzig. Il mourut trois jours après avoir accédé au maréchalat. Il repos à Cracovie avec les rois de Pologne.
Contrairement à son voisin le fort d'Uxegney, ce bâtiment n'a été l'objet d'aucune profonde modernisation après sa construction. Le fort a perdu son importance stratégique à la suite de la crise de l'obus-torpille de 1885[3].
Le fort fait l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le [4].
Description du fort
C'est un fort Séré de Rivières de deuxième génération. Le fort fut construit de 1884 à 1885, en une seule année. Petit fort trapézoïdal au périmètre défendu par deux ailerons, saillant I e III, et une caponnière double saillant II. L'entrée s'ouvre à peu près au premier tiers de la longueur du fossé de gorge. La voie d'accès sur la contrescarpe et en trachée. Les grilles coiffant la contrescarpe au niveau des trois caponnières sont présentes. Sept casemates, dont les logements des officiers, plus les latrines, s'ouvrent sur la gorge à la droite de l'entrée. Le porche de l'entrée est précédé d'un pont à bascule en dessous à mouvement assisté dont le levier de commande se situait dans le corps de garde sur la gauche. Avec des variantes de détail, ce modèle de pont se rencontre essentiellement dans les places d'Albertville et de Nice.
À la gauche du corps de garde en question, quarte autres locaux se succèdent jusqu'à la galerie d'escarpe crénelée menant à l'aileron du saillant I. Le porche se prolonge au-delà du couloir arrière de circulation de tous ces locaux tout en laissant sur la gauche les locaux de l'artillerie, dont le magasin à poudre de 30 tonnes de poudre noire. Ce porche franchi, on débouche dans la cour centrale. Sur la gauche s'aligne les quatre travées sur un seul niveau du casernement de la troupe, qui se prolonge après brisure sur la droite où quarte autres casemates, dont la manutention, se succèdent. Dans la brisure, la gaine d’accès de plain-pied vers la caponnière double est jouxtée de locaux et magasins, locaux parmi lesquels on trouve le puits et les lavabos.
- La caponnière de gorge.
- La caponnière simple du saillant 3.
- La caponnière double.
Fait insolite pour un fort de cette époque, avant la crise de l'obus-torpille s’entend, il est possible de joindre n'importe quel local au départ d'un autre tout en restant à l'abri. Ainsi, depuis les latrines à droite du casernement des officiers, est-il loisible de gagner l'aileron du saillant III sans se risquer à l'air libre. Seule l'unique traverse-abri adossée au front III-IV contrevient à ce constat. Ce n'est pas l’unique singularité, tant s'en faut, de ce fort qui n'est petit que par la taille. Les maçonneries de moellons y sont d'une qualité et d'une variété étonnantes. Les fours à pain, du modèle Lamoureux, sont pleinement opérationnels. Le puits d'eau potable est encore surmonté de sa pompe et son local abrite toujours une citerne métallique. Les caponnières sont les seules connues à montrer des supports de mitrailleuses modèle 1900 ainsi que les volets obturateurs correspondants. Pour accéder au cavalier, les deux cages d"escalier, qui ne sont pas sans rappeler celle du fort de la Grande Haye, sont grandioses et d'une ampleur inattendue dans un si petit fort. À proximité, le couloir exhibe une superbe voûte à plusieurs ressauts. Le sas d"entrée du magasin à poudre est très particulier. Le mur de la porte d'entrée et celui, opposé, du créneau à la lampe, sont béants dans leur partie supérieure. Ces ouverture communiquent avec le grand puits de lumière coiffant ce sas. Au lieu d'avoir, comme le prévoient les instructions de 1874, un escalier partant du sas pour gagner le pied de ce puits de lumière, on a préféré chanfreiner l'épaisseur du mur de la porte d'entrée et pouvoir ce plan oblique d'échelons. Pas d'autre exemple similaire et il a fallu bien du savoir faire aux maçons pour gérer ces arcs et ces droites. L'accès aux vide ventilés de ce magasin s’effectue depuis la chambre aux lampes, via un puits pourvu d'échelons. Le fort a conservé l"essentiel de ses huisseries dont la quasi-totalité de ses portes avec marquages de destination des locaux. Les lanterneaux des puits de lumière ont été restaurés et ont retrouvé leurs vitres. Plusieurs cuves pour canons de DCA garnissent les dessus. Des édicules Goux trônent encore dans la cour. Cette liste de spécificités n'est pas exhaustive. jusqu'en 1995, Bois l'Abbé dépérissait sous un dôme de végétation, oublié de tous. De tous ? Non, car les gens de l'ARFUPE ont réussi à le prendre sous leur aile et, tout comme ils ont ressuscité Uxegney, ils ont accompli ici un authentique miracle avec le même souci du détail duquel transpire un amour passionnel pour ce précieux patrimoine. Les travaux de restauration à Bois l'Abbé, toujours en cour, sont de ceux qu'il convient de citer en exemple. Par ailleurs, l'amateur souhaitant voir un fort éclairé comme à l'époque est invité à se rendre au fort chaque . Nul n'a jamais regretté le déplacement[5].
Pompe à eau : type foulante, bon état appariant, une roue d'un diamètre de 112 cm, avec manivelle. Le réservoir journalier est présent dans le même local
Un fourneau François-vaillant modèle 1903 type A ou B récupéré en au casernement de la cochette à Briançon. Parfaitement restauré. Le marmites ont été refaites ex nihilo par les élèves du lycée Camille claudel à Remiremont. Un second, même modèle même type, non encore restauré, a été récupéré en même temps au même endroit et déposé au fort voisin de bois l'Abbé.
- Type A (hauteur 80 cm, longueur 120 cm, profondeur 108 cm (nombre de marmites 4 de 100, 110 ou 125 litres, nombre de marmites d'eau chaude 2 de 50 litres ;
- type B (hauteur 80 cm, longueur 132 cm, profondeur 102 cm (nombre de marmites 2 de 75 litres, nombre de marmites d'eau chaude 1 de 40 litres
- L'entrée du fort du Bois l'Abbé.
- Le casernement et le fossé.
- Le tunnel de l'entrée du fort.
- La porte blindée du fort.
Le fort a été construit en plein air avec la pierre locale (grès provenant d'une carrière à Les Forges), puis ont été recouverts de terre provenant de l'excavation des fossés et le nivellement du terrain environnant. L'armement se composait de quatre canons de 120 mm et deux de 90 mm positionnés sur des plateformes sur le sommet du fort. Son rôle était de surveiller la route venant de Domèvre-sur-Avière au nord-ouest, et les débouchés possibles de la forêt du Souche au nord et à l'est. Il complétait ainsi l'action du fort d'Uxegney en ayant de meilleures vues sur ces voies d'accès, peu visibles de ce dernier.
- Détail de lit modèle 1876.
- La cuve anti aérienne du saillant III aménagée dans les années 1930.
- L'intérieur de la traverse-abri isolée du fort.
- Les deux fours Ă pain.
- Le magasin Ă poudre de 30 tonnes de poudre noire.
- Le puits et sa pompe.
- Les latrines des officiers.
- Un escalier d'accès au traverse-abri derrière les chambrées.
Notes sur un toponyme ancien
Le hameau du Bois L'Abbé était qualifié d'écart, et même de cense vers 1840 par les historiens lorrains, Charles Charton et Henri Lepage. Or, selon Dom Calmet dans ses notices de Lorraine, il s'agit d'un ancien village du ban d'Uxegney attesté au XIe siècle.
Le toponyme est écrit, avant 1772, « Bois Labbé » et même en 1615 les archives mentionnent en vrac la « cense du capitaine Labbé ». Cette dernière se nomme en 1717 « cense du Bois L'abbé ». Il pourrait s'agir du nom d'un propriétaire unique, ce qu'a cru une partie des historiens, et ce qui pourrait induire du même coup l'existence d'une capitainerie au Bois-L'abbé. Mais il est curieux de constater d'une part l'appellation d'autres fermes du Bois-L'abbé sur des localités voisines, comme Domèvre-sur-Avière, d'autre part la possibilité que le terme « capitaine » puisse être aussi un élément toponymique ancien, signifiant un chef, une tête, un sommet de mont caractéristique.
Le Bois-Labbé ou Bois L'abbé, peu importe la graphie, désignerait trivialement à l'époque moderne approximativement l'ensemble de la zone boisée au versant de la petite montagne ou « bé » en vieille langue vosgienne. Si les sources médiévales de Dom Calmet sont correctes, il semble que le villers (ou petit domaine) du Bois-L'abbé soit très ancien, et n'ait qu'un rapport de proximité avec la cense excentrée ou la ferme très proche du sommet. Le petit toponyme de hauteur gallo-romain pourrait s'expliquer par Bodinabergo, c'est-à -dire le mont servant au bornage, altéré en « bollabè » par influence de la forêt ou du ban forestier qu'elle signale de loin.
Notes et références
- Note no 5285 le du ministre de la Guerre Boulanger aux généraux commandant les régions militaires ; décret présidentiel du pour les nouvelles dénominations des forts, batteries et casernes sur proposition du ministre de la guerre, M. le général Boulanger.
- Lettre no 14980 bis le de M. le ministre de la Guerre, M. le général Ferron, abrogeant le décret présidentiel du 21 janvier.
- « La fortification Séré de Rivières (consulté le 15 juin 2014) »
- Notice no PA88000034, base Mérimée, ministère français de la Culture
- Marco Frijns, Luc Malchair, Jean-Jacques Moulins et Jean Puelinckx, Index de la fortification française 1874 - 1914, Edition Autoédition, , 832 p. (ISBN 978-2-9600829-0-6), p. 35, 404, 757 et 761.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative Ă l'architecture :
- Le fort de Bois l'Abbé sur le site de l'Association pour la Restauration du Fort d'Uxegney et de la Place d'Épinal
- Le fort de Bois l'Abbé