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FantĂ´me d'Heilbronn

L'affaire dite du « Fantôme de Heilbronn » est une série de crimes et délits liés entre eux par des analyses ADN suggérant à chaque fois l'implication de la même femme. Ces crimes se sont déroulés principalement en Allemagne et en Autriche, le premier meurtre connu date de 1993 et les derniers de 2008. En fait, l'ADN en question provenait d'une contamination des bâtonnets de prélèvement à l'usine de fabrication et pas de l'implication d'une seule et même personne dans ces crimes.

Plaque commémorative près du site où une jeune policière a été tuée.

DĂ©roulement

Le nom vient de la ville de Heilbronn dans le Bade-Wurtemberg où une jeune policière avait été tuée d'une balle en pleine tête, meurtre de sang froid et apparemment gratuit qui avait ému l'Allemagne[1]. Lors de l’enquête, une empreinte recélant un ADN avait été prélevée dans la BMW des policiers[2]. Cet ADN sera retrouvé lors de plusieurs affaires criminelles non élucidées dans différents endroits d'Allemagne, d'Autriche et un braquage en France (à Arbois dans le Jura), permettant aux enquêteurs d’attribuer l’ensemble de ces affaires à une mystérieuse tueuse en série.

L'enquĂŞte mobilise plus de 100 policiers en Allemagne et en Autriche, avec plus de 1 400 pistes diffĂ©rentes suivies et plus de 2 400 vĂ©rifications d'ADN pratiquĂ©es[3]. Elle est qualifiĂ©e par certains mĂ©dias, avant les rĂ©vĂ©lations de mars 2009 du journal Bild, de «  plus grande Ă©nigme criminelle de l'Histoire  »[3]. Les policiers s'y rĂ©fèrent sous le sigle UWP (en allemand : Unbekannte weibliche Person, c’est-Ă -dire « Personne de sexe fĂ©minin inconnue Â»)[1].

En mars 2009, l'attribution de ces meurtres à une seule et même personne se révèle finalement être une erreur due à une contamination du matériel de prélèvement. En effet, le journal allemand Bild révèle que l'ADN prélevé sur les scènes de crime, et supposé être celui d’une tueuse en série, était en réalité celui d'une employée de l'entreprise qui fabriquait les cotons-tiges servant à prélever les échantillons d'ADN[4]. L’information, reprise par les médias allemands, est confirmée par le parquet de Heilbronn qui explique que le lot contaminé d'écouvillons a été vendu dans tous les pays européens, ces derniers, par souci d'économie, ayant utilisé ce lot périmé[1]. De plus, l'institut de médecine légale de Hombourg (Sarre) réalise des tests démontrant que des bâtonnets, pas encore utilisés par les services de police, portent le même ADN[1] - [5].

Chronologie

  • 26 mai 1993 : dĂ©couverte du cadavre d'une femme de 62 ans Ă©tranglĂ©e Ă  son domicile avec un fil en mĂ©tal dans la ville d'Idar-Oberstein (RhĂ©nanie-Palatinat). On relève plusieurs traces d'ADN, notamment sur une tasse Ă  cafĂ©. L'analyse de la trace gĂ©nĂ©tique par la police scientifique Ă©tablit que l'ADN appartient Ă  une femme.
  • De 1994 Ă  2000 : pas de meurtre connu durant cette longue pĂ©riode. La tueuse ne fait apparemment pas parler d'elle (du moins pas de crime connu ou de trace d'ADN trouvĂ©e). Les policiers pensent qu'elle a peut-ĂŞtre dĂ©cidĂ© de se mettre dĂ©finitivement au vert, ou bien qu'elle a dĂ» faire face Ă  une ou plusieurs maternitĂ©s, qu'elle est peut-ĂŞtre en prison ou tout simplement morte.
  • 26 mars 2001 : Ă  Fribourg-en-Brisgau (Bade-Wurtemberg), Ă  500 kilomètres du premier crime connu, on dĂ©couvre le cadavre d'un biffin de 61 ans se disant «  brocanteur », Ă  son domicile. On l'a Ă©tranglĂ© et on lui a dĂ©foncĂ© le crâne pour l'achever avec une sauvagerie et une barbarie peu communes. On retrouve le mĂŞme ADN Ă  plusieurs endroits de la pièce oĂą le meurtre a Ă©tĂ© commis .
  • 11 octobre 2001 : un enfant se blesse dans une zone boisĂ©e dans la rĂ©gion de Gerolstein avec une seringue abandonnĂ©e contenant des rĂ©sidus d'hĂ©roĂŻne. La police retrouve le mĂŞme ADN et imagine avoir affaire Ă  une toxicomane prĂŞte Ă  commettre des crimes crapuleux pour se procurer ses doses de drogue.
  • septembre 2004 : Ă  Arbois, dans le Jura, elle pourrait alors avoir participĂ© Ă  l'agression d'un commerçant ambulant et sa femme, sĂ©questrĂ©s Ă  leur domicile et dĂ©pouillĂ©s de 3 000 euros en liquide, de bijoux et d'un lingot d'or. Les gendarmes interpellent quatre suspects mais dĂ©couvrent au domicile du couple victime une arme factice, un pistolet Beretta Ă  billes sur lequel ils relèvent une trace d'ADN, celle de l'inconnue[6].
  • Jusqu'en avril 2007 : on retrouve Ă©pisodiquement la trace de l'ADN du fantĂ´me sur trente lieux diffĂ©rents en Allemagne en Autriche lors de cambriolages de domiciles, de bureaux, d'Ă©tablissements hĂ´teliers, de supermarchĂ©s, de caravanes, de cabanes de jardins-ouvriers, de braquages ou de vols de voitures. On relève Ă©galement la trace gĂ©nĂ©tique de la tueuse sur l'une des douilles de balles tirĂ©es lors d'un règlement de comptes entre gens du voyage de la mĂŞme famille qui ont blessĂ© gravement une personne. Cependant, pour les enquĂŞteurs, rien dans cette affaire ne semble avĂ©rĂ©, car la tueuse semble capable de brouiller les pistes.
  • : sur un parking dans la ville d'Heilbronn (Bade-Wurtemberg), deux policiers en tenue qui dĂ©jeunent dans leur voiture reçoivent chacun une balle dans le crâne tirĂ©e sans sommation. La policière dĂ©cède sur le coup. Son collègue sort du coma trois semaines plus tard, mais ne garde aucun souvenir de l'attaque. C'est Ă  partir de cette date que la criminelle est dĂ©signĂ©e unanimement sous le nom de « FantĂ´me d'Heilbronn Â», parce qu'on retrouve encore son ADN. Le crime a en fait Ă©tĂ© commis par des membres du groupe nĂ©onazi Nationalsozialistischer Untergrund (Uwe Mundlos, Uwe Boehnhardt qui se sont suicidĂ©s depuis et Beate Zschäpe)[7].
  • En fĂ©vrier 2008 : dans une rivière proche d'Heppenheim (Hesse), les hommes-grenouilles de la police criminelle repĂŞchent les corps de trois hommes de nationalitĂ© gĂ©orgienne tuĂ©s, pour deux d'entre eux, d'une balle dans le crâne, le troisième ayant Ă©tĂ© Ă©touffĂ© ou Ă©tranglĂ©. Pour certains policiers, c'est la signature du fantĂ´me. L'ADN de la « femme sans visage » avait Ă©tĂ© identifiĂ© quelques jours auparavant dans la voiture qui avait transportĂ© les trois GĂ©orgiens, ce qui avait incitĂ© les policiers Ă  chercher ces cadavres lestĂ©s au fond de l'eau.
  • Avril 2008 : de nouvelles traces d'ADN sont trouvĂ©es lors d'un cambriolage nocturne, ainsi qu'au bord de la piscine d'une maison qu'on a tentĂ© de cambrioler le mois suivant.
  • : dans la Sarre, une sexagĂ©naire est sauvagement agressĂ©e pour se faire voler quelques centaines d'euros dans son portefeuille. C'est la 33e trace d'ADN appartenant Ă  la femme sans visage que l'on retrouve sur place.
  • : dans le bois de Heilbronn-Weinberg, le cadavre d'une infirmière de 43 ans est retrouvĂ© baignant dans une grande flaque d'eau de pluie, Ă  quelques mètres seulement de sa voiture, qui a Ă©tĂ© garĂ©e et fermĂ©e soigneusement Ă  clef. Ă€ l'intĂ©rieur du vĂ©hicule, on relève les traces ADN du fantĂ´me de Heilbronn. Cela provoque la peur dans la ville, la tueuse semblant de retour dans la rĂ©gion.
  • 20 dĂ©cembre 2008 : un gang de cambrioleurs de nationalitĂ© française d'origine albanaise est arrĂŞtĂ© Ă  Metz en Lorraine. On relève dans leurs vĂ©hicules volĂ©s les traces gĂ©nĂ©tiques de la tueuse sans visage. Les deux chefs des malfaiteurs supposĂ©s connaĂ®tre l'identitĂ© du « fantĂ´me » sont amenĂ©s devant la police de SarrebrĂĽck pour y ĂŞtre entendus et interrogĂ©s, mais sans rĂ©sultats et ils sont relâchĂ©s quelques jours plus tard.
  • Janvier 2009 : Une rĂ©compense est promise aux tĂ©moins ou complices qui permettront l'arrestation du « FantĂ´me de Heilbronn ». Elle a Ă©tĂ© portĂ©e Ă  300 000 euros[8] - [9].
  • Mars 2009 : RĂ©vĂ©lation de l'utilisation d'Ă©couvillons Ă  la fois pĂ©rimĂ©s et contaminĂ©s.

Divers

L'épisode 9 de la saison 7 de la série Elementary narre une histoire très proche de celle du Fantôme d'Heilbronn. Il est également question d'un criminel surnommé « le fantôme » mais les enquêteurs découvrent que ce criminel n'existe pas, un technicien du laboratoire fabriquant des tests ADN ayant par mégarde contaminé un lot de tests.

Bibliographie

Notes et références

  1. « Allemagne : pas de tueuse « fantôme », mais une erreur monstre… », L'Express, 30 mars 2009.
  2. Article de L’Express du 27 mai 2008.
  3. TF1. Magazine 7 Ă  8 du 11 mai 2008.
  4. « Police track DNA of a cotton bud maker for two years », bild.com.
  5. (de) « "Phantom-Mörderin" ist ein Phantom », Der Spiegel,‎ (lire en ligne).
  6. Blandine Milcent, « Qui est la tueuse fantôme ? », sur L'Express, .
  7. « Allemagne : un trio néonazi derrière l'affaire du « tueur aux döner » », sur Le Parisien, .
  8. (en) « Germany hunts phantom killer », BBC News, 11 avril 2008.
  9. (de) « Neue Spur der rätselhaften Polizisten-Mörderin », Bild, 3 juin 2008.
  10. « L’énigme de la tueuse sans visage », sur www.franceinter.fr (consulté le ).
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