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Fantômas démasqué

Fantômas démasqué est un documentaire français réalisé par Dimitri Kourtchine[n 1], sorti en 2021[1] - [2]. Ce documentaire, qui revient sur l'histoire du personnage de Fantômas créé par Pierre Souvestre et Marcel Allain[3], est bien accueilli par la presse[4].

Fantômas démasqué
Description de cette image, également commentée ci-après
Couverture du premier volume de la série Fantômas coécrite par Pierre Souvestre et Marcel Allain, éditions Arthème Fayard, 1911.
Titre original Fantômas démasqué
Réalisation Dimitri Kourtchine
Pays de production Drapeau de la France France
Genre Documentaire
Durée 53 minutes
Sortie 2021

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Résumé

En 1967, le 3e épisode de la trilogie filmique d’André Hunebelle, Fantômas, apparaît de nouveau sur les écrans français avec en vedette le trio d’acteurs : Jean Marais, Mylène Demongeot et Louis de Funès. C’est un gros succès de cinéma foncièrement populaire avec plus de 4 millions de spectateurs français depuis le 1er épisode. Pourtant dans cette euphorie, alors que Fantômas triomphe à l’étranger, jusqu'en URSS, où 60 millions de Soviétiques vont le plébisciter[n 2], l'un de ses deux auteurs, l’octogénaire Marcel Allain[n 3], s'indigne que son personnage qu'il a conçu comme une terrifiante incarnation du mal soit devenu prétexte à rire, et gagne le procès[n 4] qu'il intente à la Gaumont, dommages et intérêts à l'appui, mais juste avant de mourir en 1969.

Le documentaire de Kourtchine cherche à répondre à trois questions : Qui est Fantômas ? Que cachent les innombrables masques de Fantômas ? Et jusqu’où peut-on aller dans l’appropriation d’un personnage fictif ?

Pour Allain, le créateur du personnage, c’est un criminel qui ne recule devant aucune atrocité. C’est l’homme à la cagoule que l’on ne peut pas identifier. Il est l’incarnation de la peur, de l’audace et de l’impunité dans le crime.

Pour Mylène Demengeot, actrice de la trilogie d’Hunebelle, c’est la personnification du mal. Le méchant qui veut dominer le monde.

Pour Matthieu Letourneux, professeur de littérature, c’est un criminel monstrueux qui commet des crimes spectaculaires aux motivations mystérieuses. C’est un méchant qui exprime que dans la société il y a toujours des pulsions violentes qui éclatent.

Pour Loïc Artiaga, historien, c’est personne mais potentiellement c’est tout le monde. Ce n’est pas le diable.

Pour Jean-Marc Lalanne, critique de cinéma, il est le mal, la cruauté, le désir de destruction. Mais on ne peut pas répondre à la question : Qui est Fantômas.

Affiche de la première adaptation cinématographique de Fantômas par Louis Feuillade, films Gaumont, 1913.
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Entre 1913 et 1914, Louis Feuillade réalise une série de cinq films muets sur l’empereur du crime qui accroit le succès de la diffusion sur papier. En quittant les studios de cinéma pour capter directement sur le vif, dans les rues de Paris, le combat inégal du policier Juve et du journaliste Fandor contre l'insaisissable et cruel meurtrier, Feuillade révolutionne la jeune industrie du cinéma en introduisant la fiction dans le réel, faisant frémir, après les lecteurs, les cinéphiles de la Belle Époque.

Dans les années 1910 et 1920, les intellectuels vont s’intéresser aussi à ce personnage de meurtrier masqué pour en faire un mythe de « l’homme moderne », avec les poètes Cendrars, Desnos, Cocteau, Neruda, les surréalistes par pure provocation comme André Breton et Raymond Queneau, jusqu’à Max Jacob et Guillaume Apollinaire créateurs de la Société des amis de Fantômas, en 1912 et Magritte qui l’introduit dans ses tableaux.

Logotype du premier épisode (1964).
Logotype du deuxième épisode (1965).
Logotype du troisième épisode (1967).

Puis, il faudra attendre 1964 pour assister au retour du maître de l’effroi, en grande pompe, avec la trilogie d’Hunebelle, (réalisateur de comédies grand public, de films de cape et d'épée et des aventures d’OSS 117), essentiellement sous la forme d’un cinéma de distraction à grands spectacles. C’est donc une adaptation très libre par rapport à l’original avec un scénario très différent du roman. Cette fois, c’est un Fantômas qui colle à son époque, la France des années 1960, en plein boom des sixties et du Général de Gaulle. Du cinéma à grands spectacles, à la James Bond, avec des effets spéciaux très nouveaux. Succès immédiat prolongé depuis avec des rediffusions régulières à la télévision qui ont marqué plusieurs générations de spectateurs.

La trilogie n’aura pas de suite car entre les deux principaux acteurs, Marais et de Funès, la complicité ne passait plus. Mylène Demengeot raconte que durant les tournages, de Funès était bon spontanément dès la première prise tandis que Marais avait besoin de plusieurs essais pour s’échauffer et être convaincant. Cela énervé tellement de Funès que ce dernier faisait exprès d’éclater de rire au moment où Marais devenait bon : « De Funès, c’est le seul acteur pendant toute ma carrière que je n’ai pas aimé même si je le trouvais formidable comme acteur mais comme homme je ne l’aimais pas du tout. C’était un emmerdeur né ! »[n 5]

Le documentaire révèle la contradiction d’Allain qui resta trop attaché à son Fantômas d’origine en se faisant le défenseur acharné jusqu’à la fin de sa vie. Comment pouvait-il prétendre en être le propriétaire alors que Fantômas était devenu le symbole du saccage de la propriété privée, le personnage de la transformation, de la métamorphose qui dès lors échappait à son créateur ? Allain n’aurait pas dû inventer Fantômas s’il avait voulu qu’il lui reste fidèle.

Le journaliste russe, Andreï Shary, raconte avoir était soufflé par la puissance du film en voyant Fantômas pour la première fois en 1973, à l’âge de huit ans. Car en URSS, en pleine guerre froide, le succès de la trilogie était à son comble jusqu’au moment où le héros masqué devint le révélateur du mécontentement de la jeunesse éprise de liberté. Les conséquences furent désastreuses pour le régime qui finit par interrompre la diffusion des films.

Pour finir ce voyage alerte et malicieux sur les pas du premier méchant de la modernité, le documentaire fait le tour du mythe Fantômas et de son importance cruciale dans la culture populaire d’hier et d’aujourd’hui. Allain et Souvestre ayant écrits les aventures de Fantômas à partir des faits divers lus dans la presse quotidienne, de nos jours ce personnage pourrait être impliqué dans tous les coups bas des affaires politiques mais aussi dans les épidémies comme le Covid.

Fantômas demeure à présent la matrice de bien des avatars de fiction (Batman, le morphing de Terminator, les masques de Tom Cruise dans Mission : impossible) et le refoulé de nos peurs les plus contemporaines, à commencer par le terrorisme depuis Ben Laden, car les grandes figures du mal moderne s’imposent comme héritières de Fantômas.

Fiche technique

  • Titre original : Fantômas démasqué
  • Réalisation : Dimitri Kourtchine
  • Narration : Sarah-Jane Sauvegrain
  • Lectures : Féodor Atkine
  • Chef opérateur : Blaise Harrison
  • Son : Damien Perrollaz et Nicolas Bourdon
  • Montage : Antoine Kerninon
  • Étalonnage : Vincent Amor
  • Mixage son : Gregory Gaby
  • Animations et graphismes : Jérôme Letué
  • Documentalistes : Catherine Jivora et Marie-Hélène Agnès
  • Conseillers éditoriaux : Loïc Artiaga et Matthieu Letourneux
  • Image Russie : Nikolaos Elefteriadis
  • Production exécutive Mexique : Diana Garay, Jonatan Morales et Porfirio Tadeo
  • Musique originale : Jean-Christophe Cheneval
  • Musicien : Simon Fache
  • Production Temps Noir : Martin Laurent
  • Directeur de production : Kevin Michel
  • Assistants de production : Arthur Bon, Hugo Aalzer et Félix Marié
  • Administration de production : Arte GEIE et Temps Noir – TV5 Monde - CNC
  • Pays d’origine : Drapeau de la France France
  • Langue originale : français
  • Format : vidéo — couleur et noir et blanc— son monophonique
  • Genre : Documentaire
  • Durée : 53 minutes
  • Date de sortie : Drapeau de la France France 2021
  • Date de diffusion : sur Arte

Participation

Extraits filmiques

Notes et références

Notes

  1. Dimitri Kourtchine est né à Moscou mais vit en France depuis une trentaine d'années et réalise depuis une dizaine d'années des programmes courts et des documentaires.
  2. 60 millions de spectateurs en URSS à tel point que vu ce succès, un Fantômas à Moscou fut un temps envisagé. Cf Alain Poiré, 200 films au soleil, Paris, Ramsay, 1988, p. 255 (ISBN 2-8595-6729-1)
  3. Entre 1911 et 1913, un phénomène révolutionne le monde de l'édition française : les aventures de Fantômas écrites par deux jeunes gens venus du journalisme, Marcel Allain (1885-1969) et Pierre Souvestre (1874-1914). Au rythme d'un nouvel épisode par mois, vendues au prix modique de 65 centimes l'unité, les trente-deux feuilletons populaires à faire peur s'arrachent à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires. Après la mort de son coauteur, Allain écrit seul de 1926 à 1963 onze autres romans.
  4. Marcel Allain, le seul des auteurs de Fantômas encore en vie (Pierre Souvestre est mort en 1914), est très mécontent du résultat des trois adaptations tournées par Hunebelle. Il poursuit en justice la société Gaumont pour les torts moraux et commerciaux qu’auraient causés ces « films grotesques » à son œuvre littéraire. Le tribunal de grande instance de Paris conclut en sa faveur en : « Attendu que Fantômas […] est essentiellement un être qui "fait peur" ; […] que le caractère bouffon des films litigieux révèle la dénaturation complète de l’œuvre », le tribunal rend caduque le contrat entre Marcel Allain et Gaumont, ordonne l’évaluation de son préjudice et la réévaluation de ses gains à 3 % des recettes des films ». Trop tard, Allain meurt en 3. Cf Loïc Artiaga, Le Bleu et le noir. Fantômas, le temps des guerres chromatiques (1962-1969), Belphégor. Littérature populaire et culture médiatique, nos 11-1, (ISSN 1499-7185, DOI 10.4000/belphegor.79)
  5. Alors que la critique salua la performance de Marais dans le double rôle de Fantômas et de Fandor, c'est de Funès qui lui ravira la vedette, auprès du public, par son interprétation paranoïaque du commissaire Juve. Durant le tournage, le courant ne passa pas entre les deux acteurs. Pour Marais le talent comique de de Funès est « fondé sur la mauvaise humeur ». Ils ne font pas le même métier d'acteur : le premier sert les rôles qu'il interprète, le second se sert des rôles pour lui-même, dit Carole Weisweiller. Cf Carole Weisweiller et Patrick Renaudot, Jean Marais, le bien-aimé, Éditions de La Maule, 2013, page 201

Références

  1. « Fantômas démasqué - Regarder le documentaire complet », sur ARTE (consulté le )
  2. « Fantômas démasqué - Documentaire (2022) - SensCritique », sur www.senscritique.com (consulté le )
  3. « Fantômas démasqué (Documentaire société) : la critique Télérama », sur Télérama, (consulté le )
  4. « Fantômas tombe le masque sur Arte », sur LEFIGARO, (consulté le )

Liens externes

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