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Famille Japy

La famille Japy est une dynastie industrielle française originaire de Beaucourt dans le Territoire de Belfort. Elle possédait la deuxième entreprise française, en termes de capitaux, durant le Second Empire. Ses membres influents ont marqué le paysage industriel français par l'apport de nombreuses innovations, notamment dans le domaine de l'horlogerie, des machines à écrire et des pompes, mais aussi dans l'organisation du travail et la vie sociale ouvrière au XIXe siècle.

Japy
Demeures Châteaux Japy
Charges SĂ©nateur

Prémices

La famille Japy est originaire de Beaucourt, petite localité située à l'est de la Principauté de Montbéliard, à l'extrême limite de celle-ci et de la seigneurie de Delle qui dépend des comtes de Ferrette (Alsace). D'ailleurs, la cohabitation entre sujets luthériens du comte de Wurtemberg et sujets catholiques dépendants du roi de France aboutit vers 1773 à une division politique et religieuse. Jacques Japy, père de Frédéric et protestant, est un des personnages centraux de ce conflit. Les Japy constituent une souche familiale solidement implantée à Beaucourt et les environs même si la cité du Grammont[Note 1] reste la localité mère de la famille. En effet, quelques-uns de ces membres sont régulièrement mentionnés comme homme d'armes de Beaucourt en tant qu'arquebusiers, hallebardiers, picques, arbalétriers de la seigneurie de Blamont. De 1543 à 1676, le nom des Japy est répertorié 16 fois sur les listes des familles de la région. Certains sont des ascendants directs de Frédéric Japy.

Ces Japy de Beaucourt sont issus de la terre et possèdent quelques biens. Les premières précisions quant à leur patrimoine proviennent d'un inventaire des biens volés à Jehan Japy pendant le raid des Guises de 1587 à 1588. Entre autres, se trouvent sur la liste : « Foing et fourage, En meubles, Quatre chevaux, Trois vaches et un veau, Deux chèvres, Neuf pors, Argent monnayé, Froment, Avoine, Orge. »[Note 2]. Cet état de pertes fournit suffisamment d'informations pour cerner la situation matérielle et sociale de Jehan Japy. Bien qu'aucune indication ne soit donnée sur l'outillage de l'exploitation, le cheptel animalier est assez important pour classer ce paysan dans la catégorie rurale la plus socialement aisée à cette époque : les laboureurs. Nourrir et entretenir quatre bêtes chevalines, donc deux trains d'attelage toute l'année, suppose des revenus qui situent l'exploitation à un niveau de rentabilité élevé.

En 1670, le dénombrement général des personnes, sujets, meix, maisons, et héritages des seigneuries de Blamont et Clémont, permet de situer le patrimoine de la famille Japy ainsi que sa situation sociale. Ce sont bien des laboureurs propriétaires d'une maison, d'une grange, d'étables, qui possèdent « chariot et charrue en bon estat ». Leur patrimoine foncier est constitué de deux jardins, de vergers, de prés, des champs, et d'une vigne. En 1708, le contrat de mariage de Jacques Japy et de Suzanne-Catherine Muguet confirme la maintenance du patrimoine de cette famille. Les Japy font donc partie de cette minorité paysanne qui domine économiquement la société rurale, dépassant le stade de l'auto-subsistance pour se tourner vers des situations d'échanges afin d'en tirer les bénéfices. D'ailleurs ceux-ci semblent bien réels, puisque Jacques Japy devient maréchal ferrant du village. Le fait de s'extraire du travail de la glèbe dénote un certain esprit d'initiative.

Son fils Jacques le jeune[Note 3], lui succède et développe la petite affaire dans le domaine de serrurier-mécanicien. Cette famille, de par ses biens, jouit donc à Beaucourt d'une situation sociale non négligeable. Jacques Japy fait partie de ce qu'on appelle « des anciens de la communauté » qui ne s'accorde qu'aux notables et aux plus considérés des habitants de l'endroit, c'est donc bien une reconnaissance sociale et spirituelle pour ce dernier. D'ailleurs le père de Frédéric Japy se voit confier la charge d'officier seigneurial du village en 1760. Cette nomination n'est pas paradoxale au regard du rôle joué par Japy à Beaucourt, en dépit d'une conjoncture particulière. En effet, l'ancien maire Georges Monnin, catholique[Note 4], délaisse sa charge et fuit brusquement Beaucourt. Aussitôt, Jacques Japy dans une requête adressée au prince de Montbéliard, demande à remplir cette charge. Cette requête est accompagnée d'un certificat du ministre de Vandoncourt et de Beaucourt. Le , Jacques Japy est institué dans ses nouvelles fonctions. Le rescrit pris par le duc de Wurtemberg est une reconnaissance de la compétence administrative de son sujet qui a su faire preuve à cette occasion d'un opportuniste révélateur. En 1773, Jacques Japy prouve toute la confiance que lui avaient accordées les autorités de Montbéliard. En effet, le roi de France nomme à nouveau un maire catholique et l'intendant d'Alsace somme Jacques Japy de lui remettre tous les papiers de la communauté[Note 5] mais celui-ci ne cède pas. Cette attitude démontre toute la ténacité du maire protestant et son habileté à contrecarrer les desseins de l'intendant. Par manque de sources, l'épilogue de cette affaire n'est pas connu. Au cours de cette dernière, Jacques Japy a démontré toutes ces capacités à défendre ses intérêts, toutes ses qualités d'homme politique pour préserver son idéal. Désormais sa fonction sociale lui permet de contrôler la vie du village et peut-être d'en marquer le rythme. Le notable est devenu maire, cette charge lui donnant tout le poids nécessaire pour affirmer la mainmise Japy sur le terroir beaucourtois.

Une dynastie industrielle

L'usine Japy Ă  Beaucourt.

Tout est parti d’un petit atelier fondĂ© en 1777 par FrĂ©dĂ©ric Japy, oĂą celui-ci renouvelle et mĂ©canise le procĂ©dĂ© traditionnel de l'Ă©tablissage pratiquĂ© dans le Jura par la profession horlogère. Du mouvement de montres, Japy est passĂ© aux pendules et s’est diversifiĂ© dans l’outillage, moteurs, pièces de bicyclette, luminaires, meubles de jardin, pompes[1], moulins Ă  cafĂ©, machines Ă  Ă©crire, etc. Les annĂ©es 1880 ont marquĂ© l’âge d’or de Japy. Près de 5 000 ouvriers travaillent dans les usines Japy de la rĂ©gion. La famille s’est fait construire treize châteaux sur Beaucourt et Dasle, quatre ont disparu.

En 1904, la sociĂ©tĂ© Japy de Beaucourt est la principale actionnaire de la sociĂ©tĂ© de recherche de houille entre MontbĂ©liard et Villersexel qui lance des prospections minières au sud du bassin houiller stĂ©phanien sous-vosgien. Après le creusement d'un sondage positif Ă  Lomont, une concession de 2 336 ha est accordĂ©e Ă  cette sociĂ©tĂ© pour l'exploitation d'un gisement de houille se prolongeant au sud du puits Arthur-de-Buyer, exploitĂ© par les houillères de Ronchamp. Mais il n'y eut aucune extraction de charbon[2] - [3].

Publicité pour les groupes de soudure à l'arc Japy, 1936

En 1921, une partie du capital échappe à la famille par l’émission d’obligations dans le public. De 1930 à 1935, une crise grave sévit dans toute la France, le chômage s’étend, les affaires deviennent difficiles, la fabrication et la vente sont en régression. Le conseil d’administration décide la réorganisation complète de tous les services, l’usine de Badevel est abandonnée en 1933, la fabrication d’horlogerie est centralisée à Beaucourt.

La société Japy réussit le lancement de machines à écrire en Europe au début du XXe siècle, mais perd sa prédominance sur l’innovation industrielle. L’entreprise Japy, bien que largement diversifiée, est progressivement démantelée avec la cession de différentes branches de la marque.

Des conflits d’intérêts et de personnes entre la famille Japy et les associés aboutissent à l’éclatement de l’entreprise en quatre sociétés autonomes.

En 1979, la dernière société Japy est mise en liquidation. Le musée Frédéric-Japy ouvert en 1986[4], installé dans les anciens ateliers d’horlogerie, fait revivre toute une époque industrielle, il retrace l’épopée de la dynastie Japy. Les collections tentent de rendre compte de l’industrialisation du secteur horloger et des stratégies de développement et de diversification d’une entreprise qui, de simple manufacture en 1777, deviendra la deuxième plus importante concentration industrielle française sous le Second Empire.

Les traces visibles de l'empire Japy

La ville de Beaucourt, berceau de la famille Japy, reste marquée par son passé industriel et comporte de nombreux bâtiments construits par et pour la famille Japy.

Le film Populaire de 2012, comédie qui a pour sujet principal les concours de vitesse dactylographique, mentionne l'empire Japy.

Liens de filiation entre les personnalités notoires

  • FrĂ©dĂ©ric Japy (1749-1812), protestant, fondateur de l'usine d'horlogerie et de la firme Japy. Il Ă©pouse Marguerite Amstutz.
    • FrĂ©dĂ©ric Guillaume Japy (1774-1854), fabricant, maire. Il Ă©pouse Anne Catherine Monnin.
      • IngĂ©nu Japy (1801-1856), fabricant, membre du conseil gĂ©nĂ©ral du dĂ©partement du Doubs, maire de Badevel. Il Ă©pouse Barbe Louise Scheurer.
        • Jenny Japy (1826-1904) Ă©pouse son cousin Octave Japy (voir plus bas).
      • Auguste Julien Japy (1802-1854), manufacturier, Ă©pouse Emilie Japy (voir plus bas).
        • Édouard Japy (1832-1888), agronome, industriel, protestant. Il Ă©pouse Émilie Rau.
        • Julien Philippe Japy (1842-1918) Ă©pouse sa cousine Suzanne Emma Pauline Jeanne Peugeot (voir plus bas).
          • Marcel Pierre Armand Japy (1869-1958) Ă©pouse Juliette Blanche Bornèque.
            • Constant Roger Japy (1899-1980) Ă©pouse Anne Marie Tueferd.
              • Yves Japy (1929-2008) Ă©pouse Annick Campin.
            • Jean Robert Japy (1901-1989) Ă©pouse Gilberte Marchegay (1908-1995), femme de lettres et traductrice.
    • Louis FrĂ©dĂ©ric Japy (1777-1852), machiniste horloger, puis manufacturier et propriĂ©taire, s'installe Ă  Beaucourt en 1777, il y construit le premier bâtiment industriel de type phalanstère. Il Ă©pouse Marie Marguerite Catherine Perlet.
      • Louis Japy (1804-1886), fabricant, nĂ©gociant Ă  Beaucourt. Il Ă©pouse Louise JosĂ©phine Sandherr.
      • Emilie Japy (1811-1846) Ă©pouse son cousin Auguste Julien Japy (voir plus haut).
    • Jean Pierre Japy (1785-1863), nĂ©gociant, manufacturier. Il Ă©pouse ClĂ©mence FrĂ©dĂ©rique Caroline Cuvier (1786-1866).
      • Louis Octave Japy (1814-1879), industriel, associĂ© de la Maison Japy frères et Cie. Il Ă©pouse sa cousine Jenny Japy (voir plus haut).
        • Julien Louis Albert Japy (1844-1898), manufacturier, chevalier LO. Il Ă©pouse Alice CĂ©line Birckel.
          • Fernand Arthur Edouard Japy (1872-1914 mort pour la France) Ă©pouse AndrĂ© Louise Sahier.
        • Gaston Japy (1854-1936), chef d'entreprise, homme politique, sĂ©nateur du Doubs. Il Ă©pouse en 1880 Lucie Gabrielle de la famille Peugeot.
      • Virginie Caroline Japy (1819-1890) Ă©pouse Armand Constant (1809-1877) de la famille Peugeot.
        • Suzanne Emma Pauline Jeanne Peugeot (1844-1899) Ă©pouse son cousin Julien Philippe Japy (voir plus haut).
    • FrĂ©dĂ©ric Japy (1796-1836), fabricant d'horlogerie Ă  Badevel (25). Il Ă©pouse JosĂ©phine Paliard.

Articles connexes

Notes et références

Notes

  1. Surnom de la ville de Beaucourt
  2. Texte de 1587-1588 écrit en ancien français.
  3. DĂ©nombrement des sujets protestants de Beaucourt
  4. À Beaucourt, il y a deux maires : un protestant pour le Prince de Montbéliard, un catholique pour le roi
  5. Il y a contestation française des droits du prince, seigneur de Blamont, à Beaucourt. C'est un épisode de plus dans la lutte menée par la France contre la principauté de Montbéliard

Références

Nota : les sources des informations relatives aux personnalités sont référencées dans les articles détaillés.

  1. Pompes Japy
  2. « Le bassin houiller », sur http://www.abamm.org/.
  3. Carilian-Goeury et Vor Dalmont, Annales des mines, partie administrative, ou Recueil de lois, décrets, arrètés et autres actes concernant les mines et usines, (lire en ligne), p. 162-164.
  4. Ville de Beaucourt, « Musée Japy » (consulté le )
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