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Espace séquentiel

En mathématiques, un espace séquentiel est un espace topologique dont la topologie est définie par l'ensemble de ses suites convergentes. C'est le cas en particulier pour tout espace à base dénombrable.

DĂ©finitions

Soit X un espace topologique.

  • Un sous-ensemble U de X est dit « sĂ©quentiellement ouvert » si toute suite (xn) de X qui converge vers un point de U « appartient Ă  U Ă  partir d'un certain rang Â»[1].
  • Un sous-ensemble F de X est dit « sĂ©quentiellement fermĂ© » si la convergence d'une suite (xn) de F vers x implique que x appartient Ă  F.

Le complémentaire d'un sous-ensemble séquentiellement fermé est séquentiellement ouvert et vice-versa. Tout ouvert (resp. fermé) de X est séquentiellement ouvert (resp. fermé) mais les réciproques sont fausses en général, ce qui motive la définition suivante.

L'espace X est dit séquentiel s'il satisfaisait l'une des conditions équivalentes suivantes :

  • tout sous-ensemble sĂ©quentiellement ouvert de X est ouvert ;
  • tout sous-ensemble sĂ©quentiellement fermĂ© de X est fermĂ©.

Historique

Dans un article fondateur[2] sur les algĂšbres qui portent son nom, von Neumann soulignait que, dans l'espace ℓ2(ℕ*) muni de la topologie faible, 0 est adhĂ©rent Ă  l'ensemble des em + men mais n'appartient pas Ă  sa fermeture sĂ©quentielle (car ses suites convergentes sont bornĂ©es en norme donc m est constant Ă  partir d'un certain rang)[3].

Les espaces « qui peuvent ĂȘtre dĂ©finis complĂštement ne connaissant que leurs suites convergentes Â» ont fait dans les annĂ©es 1960 l'objet de nombreuses Ă©tudes, que S. P. Franklin a synthĂ©tisĂ©es et gĂ©nĂ©ralisĂ©es[4] - [5].

Les espaces sĂ©quentiels rĂ©pondent un peu Ă  cette spĂ©cification informelle et les espaces de FrĂ©chet-Urysohn un peu mieux, Ă  condition de ne pas la surinterprĂ©ter : par exemple sur l'espace ℓ1, la topologie forte est strictement plus fine que la faible mais les suites convergentes sont les mĂȘmes.

DĂ©finitions Ă©quivalentes

Soit X un espace topologique.

Les sous-ensembles séquentiellement ouverts forment une nouvelle topologie sur X ; l'espace est séquentiel si et seulement si sa « topologie séquentielle » (plus fine a priori) coïncide avec sa topologie originelle[6].

Moins trivialement, les propriétés suivantes sont équivalentes[6] :

  • X est sĂ©quentiel ;
  • X est le quotient d'un espace Ă  bases dĂ©nombrables de voisinages ;
  • X est le quotient d'un espace mĂ©trique ;
  • pour tout espace topologique Y et toute application f : X → Y, f est continue si (et seulement si) elle est sĂ©quentiellement continue en tout point x de X, c'est-Ă -dire que pour toute suite de points (xn) convergeant vers x, la suite (f(xn)) converge vers f(x).

Exemples

Propriétés

Pour un espace T1 séquentiel, la compacité séquentielle équivaut à la compacité dénombrable.

Tout espace sĂ©quentiel est dĂ©nombrablement engendrĂ©, ou d'Ă©troitesse dĂ©nombrable[7] (en anglais : countably tight) – c'est-Ă -dire que tout point adhĂ©rent Ă  une partie est adhĂ©rent Ă  une sous-partie au plus dĂ©nombrable – mais la rĂ©ciproque est fausse : il existe mĂȘme des espaces sĂ©parĂ©s dĂ©nombrables non sĂ©quentiels[8] - [9] et sous l'hypothĂšse ♱ (en), il existe mĂȘme des compacts dĂ©nombrablement Ă©troits mais non sĂ©quentiels[10]. Cependant, sous l'hypothĂšse du forcing propre (en), il n'en existe pas[11].

Adhérence séquentielle

En anglais «sequential closure»; on verra ci-dessous que traduire littéralement par «fermeture séquentielle» serait maladroit.

Soit un sous-ensemble d'un espace , l'adhérence séquentielle est l'ensemble :

c'est-à-dire l'ensemble de tous les points pour lesquels il existe une suite d'éléments de qui converge vers . (C'est un sous-ensemble de l'adhérence ordinaire .)

Une partie est donc séquentiellement fermée si et seulement si elle est égale à son adhérence séquentielle.

L'application

est appelée opérateur de fermeture séquentielle.

Elle partage des propriétés avec l'adhérence ordinaire, notamment :

  • l'ensemble vide est sĂ©quentiellement fermĂ© :
  • toute partie est incluse dans sa fermeture sĂ©quentielle :
  • la fermeture sĂ©quentielle commute avec l'union :

Cependant, contrairement Ă  l'adhĂ©rence ordinaire et mĂȘme si X est sĂ©quentiel, l'opĂ©rateur de fermeture sĂ©quentielle n'est gĂ©nĂ©ralement pas un opĂ©rateur de clĂŽture mais seulement de prĂ©clĂŽture car il n'est pas idempotent, c'est-Ă -dire qu'il peut exister une partie A de X telle que :

Autrement dit :  l'adhĂ©rence sĂ©quentielle  d'une partie A de X n'est pas toujours sĂ©quentiellement fermĂ©e.

La plus petite partie sĂ©quentiellement fermĂ©e de X contenant A (l'adhĂ©rence de A pour la « topologie sĂ©quentielle Â» dĂ©finie ci-dessus) s'obtient en itĂ©rant cette construction par rĂ©currence transfinie[12] :

On appelle ordre séquentiel de la partie A le plus petit ordinal α pour lequel A(α) est séquentiellement fermé et ordre séquentiel de l'espace X la borne supérieure des ordres séquentiels de ses parties. Ces ordres sont au plus égaux au premier ordinal non dénombrable.

Si X est séquentiel on a donc :

Espace de Fréchet-Urysohn

Les espaces de FrĂ©chet-Urysohn[13] – d'aprĂšs Maurice FrĂ©chet et Pavel Urysohn – sont ceux pour lesquels l'adhĂ©rence sĂ©quentielle coĂŻncide avec l'adhĂ©rence ordinaire, c'est-Ă -dire :

Autrement dit : ce sont les espaces séquentiels dont l'ordre séquentiel est égal à 1.

Un espace est de Fréchet-Urysohn si et seulement si chacun de ses sous-espaces est séquentiel.

Également, un espace X est de FrĂ©chet-Urysohn si et seulement si, pour tout espace topologique Y, toute application f : X → Y et tout point x de X, f est continue au point x si (et seulement si) elle est sĂ©quentiellement continue en ce point[14], c'est-Ă -dire si f(un) tend vers f(x) pour toute suite (un) qui tend vers x.

Exemples.

  • Tout espace Ă  bases dĂ©nombrables de voisinages est de FrĂ©chet-Urysohn.
  • Un exemple d'espace de FrĂ©chet-Urysohn qui n'est pas Ă  bases dĂ©nombrables de voisinages est le bouquet de cercles ℝ/â„€.
  • Le prototype d'espace sĂ©quentiel qui n'est pas de FrĂ©chet-Urysohn est l'espace d'Arens[15]. Plus prĂ©cisĂ©ment : un espace sĂ©quentiel est de FrĂ©chet-Urysohn si et seulement s'il ne contient pas de copie de cet espace[8] et on peut l'utiliser pour construire, pour tout ordinal α ≀ ω1, un espace sĂ©quentiel dont l'ordre sĂ©quentiel est Ă©gal Ă  α[16].

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Sequential space » (voir la liste des auteurs).
  1. C'est-Ă -dire qu'il existe N tel que xn est dans U pour tout n ≄ N.
  2. (de) J. von Neumann, « Zur Algebra der Funktionaloperationen und Theorie der normalen Operatoren », Math. Ann., vol. 102, no 1,‎ , p. 370-427 (lire en ligne), p. 380
  3. (en) Paul R. Halmos, A Hilbert Space Problem Book, Springer, coll. « GTM » (no 19), , 2e Ă©d., 369 p. (ISBN 978-0-387-90685-0, lire en ligne), p. 185 donne, comme Ă©tape de solution de son problĂšme 28 (montrer que la topologie faible de ℓ2 n'est pas mĂ©trisable), un exemple plus simple qu'il attribue Ă  Allen Lowell Shields (en) : l'ensemble des √n en, pour n > 0.
  4. (en) S. P. Franklin, « Spaces in Which Sequences Suffice », Fund. Math., vol. 57,‎ , p. 107-115 (lire en ligne)
  5. (en) S. P. Franklin, « Spaces in Which Sequences Suffice II », Fund. Math., vol. 61,‎ , p. 51-56 (lire en ligne)
  6. (en) « Sequential spaces, II », sur Dan Ma's Topology Blog (tous les espaces y sont supposés séparés).
  7. (en) D. H. Fremlin, Measure Theory, vol. 4, Torres Fremlin, , 945 p. (ISBN 978-0-9538129-4-3, lire en ligne), chap. 4A2 (« Appendix, § General topology »), p. 331
  8. (en) « A note about the Arens’ space », sur Dan Ma's Topology Blog
  9. (en) « The difference between a sequential space and a space with countable tightness », sur MathOverflow
  10. (en) V. V. Fedorcuk, « Fully closed mappings and the consistency of some theorems of general topology with the axioms of set theory », Math. USSR, vol. 28,‎ , p. 1-26
  11. (en) Zoltan Balogh (en), « On compact Hausdorff spaces of countable tightness », Proc. Amer. Math. Soc., vol. 105, no 3,‎ (lire en ligne)
  12. (en) Alan Dow, « Sequential Order », dans M. Pearl Elliott, Open Problems in Topology, vol. II, Elsevier, (ISBN 9780080475295, lire en ligne), p. 125-127
  13. Selon (en) Woo Chorl Hong, « Some necessary and sufficient conditions for a FrĂ©chet-Urysohn space to be sequentially compact », Commun. Korean Math. Soc., vol. 24, no 1,‎ , p. 145-152 (lire en ligne), ces espaces sont appelĂ©s
    • FrĂ©chet-Urysohn par (en) A. V. Arkhangelskii et L. S. Pontryagin, General Topology I, New York, Springer, , 202 p. (ISBN 978-3-540-18178-1)
    • FrĂ©chet par Franklin 1967
    • closure sequential par (en) A. Wilansky, Topology for Analysis, Ginn and Company, .
  14. (en) Martin Sleziak, « Characterization of Fréchet-Urysohn spaces using sequential continuity at a point », sur MathOverflow
  15. (en) A. V. Arkhangelskii et V. I. Ponomarev, Fundamentals of General Topology : Problems and Exercises, Springer, , 416 p. (ISBN 978-1-4020-0308-0, lire en ligne), p. 59-60, exercice 113, iii
  16. (en) A. V. Arhangel'skiĭ et S. P. Franklin, « Ordinal invariants for topological spaces », Michigan Math. J., vol. 15, no 4,‎ , p. 506 (lire en ligne)
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