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Empire rozvi

L'empire rozvi, ou rozwi (1684–1866), est institué sur le haut-plateau du Zimbabwe par Changamire Dombo. Le terme rozvi renvoie au passé guerrier de la nation. L'empire disparaît à la fin du xixe siècle lorsqu'il est conquis par les Ndébélé.

Empire rozvi
Empire rozwi

1684–1866

Description de l'image Empire-rozvi.png.
Informations générales
Statut Monarchie absolue
Capitale Danangombe (en) (Dhlo-Dhlo)
Langue(s) Shona
Religion Religion traditionnelle (croyance en Mwari)
DĂ©mographie
Population (1700[1]) 1 000 000
Superficie
Superficie (1700) 624 000 km2
Histoire et événements
1684 ConquĂŞte du royaume de Butua
1866 Les Ndébélés conquièrent l'empire rozvi
Changamire
c. 1684 – c. 1695 Changamire Dombo (premier)
1831–1866 Changamire Tohwechipi (dernier)

Entités précédentes :

Entités suivantes :

  • Mthwakazi (en) ou royaume matabĂ©lĂ©

Terminologies

Les Rozvi sont une population karanga (Shona du sud) de l'Empire du Monomotapa, prĂ©sente dès le xve siècle sur le plateau zimbabwĂ©en[2]. Ils commencent Ă  acquĂ©rir une identitĂ© distincte au xviie siècle autour de Changamire Dombo, fondateur de l'empire rozvi entre et . L'appellation rozvi dĂ©riverait du terme en langue shona signifiant « destructeurs », allusion Ă  leur rĂ©putation de redoutables guerriers[Stapleton 1] - [Randles 1] - vol. 5714_5-0">[hga5 1].

Histoire

Ă€ la fin du xviie siècle, dans ce qui correspond au Zimbabwe actuel, l'empire du Monomotapa est en dĂ©clin, et les Portugais sont prĂ©sents dans la zone au sud du Zambèze. Un dirigeant local, Changamire Dombo, dĂ©veloppe une force militaire qui devient, dans les annĂ©es 1670, prĂ©dominante au nord-est du plateau du Zimbabwevol. 5714_5-1">[hga5 1]. Dans le courant des annĂ©es 1680, Dombo conduit son armĂ©e vers le sud-ouest. Il expulse les Portugais qu'il affronte Ă  la bataille de Maungwe en juin 1684 et atteint le royaume de Butua (ou Butwa), qu'il dĂ©fait, occupant sa capitale, Danangombe (Dhlo-Dhlo en shona)[Stapleton 1]. Entre 1684 et 1692, Dombo consolide ses positions autour de l'ex-royaume de Butua[Stapleton 2]. Après sa mort, Changamire devient le nom du souverain rozvi[note 1].

En 1693, sous Changamire II, le fils de Dombo[3], les Rozvi partent Ă  la conquĂŞte du nord-est du plateau zimbabwĂ©en[4]. AlliĂ©s au Monomotapa, ils chassent les Portugais de la zone en attaquant leurs implantations (les prazos). En 1695, ces mĂŞmes Portugais sont chassĂ©s de la zone qui correspond au royaume de Manyika. L'empire continue cependant Ă  commercer avec eux, quoiqu'il les confine Ă  la vallĂ©e du Zambèze[Stapleton 3] - vol. 5714-715_11-0">[hga5 2]. Les dirigeants rozvi crĂ©ent ainsi un empire qui s'Ă©tend jusqu'Ă  Buhera (en), Bocha, Duma et sur les hautes terres du sud-est ; il couvre le haut-plateau de l'actuel Zimbabwe et s'Ă©tend jusqu'Ă  l'ouest de l'actuel Botswana et au nord de l'actuelle Afrique du Sud[5]. Sa capitale est d'abord installĂ©e Ă  Danangombe, mais il semble qu'ultĂ©rieurement les empereurs rozvi aient parfois vĂ©cu Ă  Khami et Ă  Natetalevol. 5714-715_11-1">[hga5 2].

Dans le courant du xviiie siècle, le Monomotapa n'est plus qu'un État shona parmi d'autres et l'empire rozvi est l'entité politique qui domine le plateau zimbabwéen[Stapleton 4].

Au début du xixe siècle, vers 1820, l'empire est attaqué depuis le sud par des Ngwato et des Tsonga. En 1830, les groupes Sotho et Nguni déclenchent des conflits dans l'empire[Stapleton 5], lequel est finalement « disloqué » (sic) par ces événements, liés aux troubles du Mfecane. En 1840, Mzilikazi, chef des Ndébélé, fuyant les Zoulous, domine l'endroit et y installe le royaume matabélé, avec Bulawayo comme capitale[6] - [7]. Le Changamire Tohwechipi, réfugié dans les montagnes du Mavangwe, résiste jusqu'en 1866, date à laquelle il se soumet à l'envahisseur, signant la fin de l'empire rozvi et de la dynastie des Changamire[8] - [9].

Économie

L'agriculture, Ă  l'instar de l'immense majoritĂ© de la production africaine de l'Ă©poque, est de type « familial avec coopĂ©ration villageoise » dans un contexte d'agriculture itinĂ©rante. L'empire cultive classiquement le mil et le sorgho puis le maĂŻs, introduit dans le courant du xviiie siècle, comme bases de l'alimentation, ainsi que divers fruits et lĂ©gumes (figues, ananas, goyaves, papayes, oranges, citrons, melons, riz, ignames, concombres, patates douces…), dont certains sont destinĂ©s au commerce, notamment avec les Portugais, Ă  Sofalavol. 5720_19-0">[hga5 3].

L'Ă©levage des bovins, chèvres et moutons est important, notamment sur le plateau, Ă  l'abri de la mouche tsĂ©-tsĂ© ; les Ă©leveurs pratiquent la transhumance avec des troupeaux de grande taille et le nombre de tĂŞtes de bĂ©tail possĂ©dĂ©es indiquent le statut social du propriĂ©taire. Les animaux vivants figurent dans les tributs offerts au Changamire. Il se pratique aussi un Ă©levage de type basse-cour, autour des habitations, concernant les poules, les cochonsvol. 5727_20-0">[hga5 4]…

La chasse au gros gibier est pratiquĂ©e par les hommes, notamment dans le bas-veld (altitude infĂ©rieure Ă  600 m.) oĂą il abondevol. 5721_21-0">[hga5 5].

L'empire est aussi producteur de sel qui est une composante non nĂ©gligeable des Ă©changes commerciauxvol. 5728_22-0">[hga5 6].

Il est aussi, Ă  la suite du Monomotapa, un producteur d'or, ce qui explique l'intĂ©rĂŞt que les Portugais portent Ă  la zone. Le mĂ©tal prĂ©cieux est produit par extraction minière mais aussi par orpaillage dans les rivières, dans ce cas de manière souvent saisonnière, les cours d'eau n'Ă©tant pas tous permanents. L'emplacement des mines est gardĂ© secret et les souverains Rozvi, comme leurs prĂ©dĂ©cesseurs du Monomotapa, ont l'exclusivitĂ© sur le produit. Mais, au xviie siècle, la production est en dĂ©clin ; les mineurs ont creusĂ© jusqu'Ă  la nappe phrĂ©atique et il ne leur est pas possible d'aller plus basvol. 5729-731_23-0">[hga5 7].

L'empire pratique un intense commerce interne et rĂ©gional, notamment de sel, outre les produits agricoles, mais aussi Ă  longue distance (ivoire et or particulièrement) avec l'Europe et la Chine. On a retrouvĂ© Ă  Khami des porcelaines espagnoles des xve et xviie siècles, des grès rhĂ©nans et des porcelaines Ming[10]. Les acteurs du commerce furent d'abord les Swahilis puis les Portugais qui les supplantent au xvie siècle, les bazars swahilis Ă©tant ainsi remplacĂ©s par de nombreuses feiras (foires) qui se tiennent en divers endroits du paysvol. 5733-737_25-0">[hga5 8] - [11].

Culture

Ruines de la ville de Khami.

Le noyau de l'empire, dans le sud-ouest de l'actuel Zimbabwe, est caractérisé par des villes avec des bâtiments en pierre, certains hérités du royaume de Butua. En effet, les rozvi, qui occupent Dhlo-Dhlo, et fondent, sans doute, Khami, ont une culture Shona apparentée à celle qui construisit le Grand Zimbabwe[Randles 2] - [Stokes, Brown 1] - [12]. Il est possible que des pierres de construction aient fait partie des tributs offerts au Changamire[Stokes, Brown 1]. On a retrouvé à Khami des objets d'ivoire, des armes de bronze et de fer, des poteries, des perles de verre et d'or[12].

Les poteries rozvi sont polychromes à bandes et à panneaux distinctifs, elles définissent un faciès culturel qui succède, au xve siècle, avant l'émergence de l'Empire, à la culture de Leopard's Kopje (en)[Randles 2] - [13].

La dĂ©itĂ© majeure des Rozvi (et des Shona) est Mwari, divinitĂ© oraculaire, qui se manifeste sur Terre par des Ă©vĂ©nements naturels tels que foudre, tremblement de Terrevol. 5717_31-0">[hga5 9]… La royautĂ© rozvi est considĂ©rĂ©e comme d'essence divine, instaurĂ©e et guidĂ©e par Mwari. Le Chaminuka, un esprit, est son intermĂ©diaire avec les vivants[Stokes, Brown 2]. Le culte de Mwari est un vĂ©hicule important de la politique et les personnalitĂ©s religieuses sont des conseillers du monarque. Il semble cependant que, en ce qui concerne l'empire rozvi, les liens entre la religion et le monarque sont plus distendus que dans la culture des Shona du nord et de l'est[14].

Organisation sociale et politique

Les empereurs rozvi perçoivent un tribut selon un système pyramidal qui part du village et dont le sommet est le palais impĂ©rial. L'armĂ©e surveille la collecte et envoie des brigades de percepteurs dans les provinces et les villages ; la perception du tribut est donc une fonction spĂ©cialisĂ©e de l'administration[note 2] - vol. 5717_31-1">[hga5 9].

L'empire entretient une armĂ©e bien Ă©quipĂ©e et disciplinĂ©e, dont l'organisation est similaire Ă  celle qu'adopteront Chaka et les zoulous : organisation en rĂ©giments et mise en place d'une formation de combat typiquement en arc de cercle. Les hommes sont bien entraĂ®nĂ©s, notamment au tir Ă  l'arc. L'armĂ©e rozvi bĂ©nĂ©ficie d'une rĂ©putation d'invincibilitĂ©, largement exagĂ©rĂ©e, grâce Ă  ses victoires contre les Portugais ; ces derniers n'avaient, en fait, guère opposĂ© de rĂ©sistance, n'ayant prĂ©sentĂ© que de faibles forces face Ă  celles des Rozvivol. 5718_35-0">[hga5 10].

Notes et références

Notes

  1. « Il est intéressant de noter que, tant qu'il exerce ses fonctions, le chef porte un nom héréditaire, différent de son titre de chef. Il s'agit généralement du nom d'un ancêtre célèbre, le fondateur de la dynastie par exemple, et il est porté par un très grand nombre de ses successeurs en exercice, jusqu'au moment où il doit céder la place à celui d'un descendant encore plus célèbre. » (en) G.P. Lestrade, « Some notes on the political organisation of the Venda speaking tribes », Africa, vol. III, no 3,‎ , p. 306-322 (p. 320) (DOI 10.2307/1155101) cité par Randles 2017, p. 37.
  2. Dans le Monomotapa, les tributs sont envoyés directement au palais, portés par des délégations.

Références

  • (en) Timothy J. Stapleton, A Military History of Africa, vol. 1 : The Precolonial Period: From Ancient Egypt to the Zulu Kingdom (Earliest Time to ca. 1870), ABC-CLIO,
  1. Stapleton 2013, p. 255.
  2. Stapleton 2013, p. 256.
  3. Stapleton 2013, p. 256-257.
  4. Stapleton 2013, p. 257.
  5. Stapleton 2013, p. 258.

  1. vol. 5714-5" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 714.
  2. vol. 5714-715-11" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 714-715.
  3. vol. 5720-19" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 720.
  4. vol. 5727-20" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 727.
  5. vol. 5721-21" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 721.
  6. vol. 5728-22" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 728.
  7. vol. 5729-731-23" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 729-731.
  8. vol. 5733-737-25" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 733-737.
  9. vol. 5717-31" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 717.
  10. vol. 5718-35" class="mw-reference-text">Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Afrique, vol. 5, p. 718.

  • William G. Randles, L'empire du Monomotapa du XVe au XIXe siècle, Walter de Gruyter, (1re Ă©d. 1975)
  1. Randles 2017, p. 61.
  2. Randles 2017, p. 37.

  • (en) Eric Stokes et Richard Brown, The Zambesian Past: Studies in Central African History, Manchester University Press,

  • Autres rĂ©fĂ©rences
  1. (en) James Cornell, Lost Lands and Forgotten People, Sterling Publishing Company, (ISBN 978-0806939261), p. 24
  2. W.G.L. Randles, « Matériaux pour une histoire du Sud-Est africain jusqu'au XVIIIe siècle », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, vol. 18, no 5,‎ , p. 956-980 (DOI 10.3406/ahess.1963.421073)
  3. (en) « Changamire Dynasty », Encyclopædia Britannica
  4. W.G.L. Randles, « La fondation de l'empire du Monomotapa », Cahiers d'études africaines, vol. 14, no 54,‎ , p. 211-236 (p. 235) (DOI 10.3406/cea.1974.2642)
  5. (en) « Rozvi », Encyclopædia Britannica (consulté le )
  6. « Mzilikazi (1790 env.-1868) roi des Ndebele », Encyclopædia Universalis en ligne (consulté le )
  7. Jean-Claude Penrad, « Shona ou Mashona », Encyclopædia Universalis en ligne (consulté le )
  8. (en) Innocent Pikirayi et Joseph O. Vogel, The Zimbabwe Culture: Origins and Decline of Southern Zambezian States, Rowman & Littlefield - Altamira Press,
  9. (en) D. N. Beach, « The Rozvi in Search of Their Past », History in Africa, vol. 10,‎ , p. 13–34 (p. 18) (lire en ligne)
  10. « Ruines de Khami », sur le site de la liste du patrimoine mondial, UNESCO
  11. (en) S. I. Mudenge, « The Role of Foreign Trade in the Rozvi Empire: A Reappraisal », The Journal of African History, vol. 15, no 3,‎ , p. 373–391 (p. 386) (lire en ligne)
  12. Catherine Coquery-Vidrovitch, Histoire des villes d'Afrique Noire : des origines Ă  la colonisation, Albin Michel,
  13. (en) Basil Davidson, The Cambridge History of Africa, vol. 3 : c. 1050 - c. 1600, Cambridge University Press, (lire en ligne), p. 570
  14. (en) J. D. Fage, Richard Gray et Roland Oliver, The Cambridge History of Africa, vol. 4 : c. 1600 - c. 1790, Cambridge University Press, (lire en ligne), p. 403
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