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Ecclesia de Eucharistia

Ecclesia de Eucharistia (L'Église [vit] de l'Eucharistie) est la quatorzième et dernière encyclique publiée par Jean-Paul II, le 17 avril 2003, sur l'Eucharistie et son rapport à l'Église.

Ecclesia de Eucharistia
Blason du pape Jean-Paul II
Encyclique du pape Jean-Paul II
Date 17 avril 2003
Sujet Encyclique traitant des éléments essentiels de la foi catholique sur l'Eucharistie.
Chronologie

Elle a été publiée le jour du jeudi saint qui est la fête de l'institution de l'Eucharistie et du sacerdoce. L'encyclique a pris la place d'une lettre que le pape envoie traditionnellement à chaque prêtre à l'occasion de cette solennité. Elle s'inscrit également dans la volonté du pape de laisser un « héritage » du Jubilé de l'an 2000, et vient ainsi compléter les lettres apostoliques Novo millennio ineunte et Rosarium Virginis Mariae[1].

Thèmes traités

L'encyclique rappelle avec force les éléments essentiels de la foi catholique concernant l'eucharistie : la réactualisation du sacrifice rédempteur du Christ, la présence réelle de celui-ci dans le sacrement, le rôle du prêtre, ministre de l'eucharistie et l'impact de l'eucharistie sur la vie chrétienne[2].

Le sacrifice rédempteur

Dans le premier chapitre de son encyclique, intitulĂ© le mystère de la Foi, le pape rĂ©capitule les points essentiels de la doctrine catholique concernant l'eucharistie. Citant Ă  plusieurs reprises le concile Vatican II, ses prĂ©dĂ©cesseurs Pie XII et Paul VI, et Ă©galement le concile de Trente, il insiste sur l'importance de la notion de sacrifice. Il lui paraĂ®t en effet essentiel de combattre un appauvrissement du sens de ce sacrement : « Parfois se fait jour une comprĂ©hension très rĂ©ductrice du Mystère eucharistique. PrivĂ© de sa valeur sacrificielle, il est vĂ©cu comme s'il n'allait pas au-delĂ  du sens et de la valeur d'une rencontre conviviale et fraternelle. Â» (EE, 10). Pourtant ce sacrifice est le signe d'« un amour qui va « jusqu'au bout » (cf. Jn 13, 1), un amour qui ne connaĂ®t pas de mesure Â» (EE, 11).

Le pape indique qu'il faut comprendre le sacrifice du Vendredi saint sur la Croix et l'institution de l'eucharistie le Jeudi Saint dans une mĂŞme dynamique : « Ce sacrifice est tellement dĂ©cisif pour le salut du genre humain que JĂ©sus Christ ne l'a accompli et n'est retournĂ© vers le Père qu'après nous avoir laissĂ© le moyen d'y participer comme si nous y avions Ă©tĂ© prĂ©sents. Â» (EE, 11). C'est dans ce cadre que la messe prend tout son sens, et c'est l'occasion pour le pape d'en rappeler la dĂ©finition donnĂ©e par le catĂ©chisme de l'Église catholique : « La Messe est Ă  la fois et insĂ©parablement le mĂ©morial sacrificiel dans lequel se perpĂ©tue le sacrifice de la Croix, et le banquet sacrĂ© de la communion au Corps et au Sang du Seigneur ». Par ailleurs, la messe ne multiplie pas le sacrifice du Christ : c'est son unique sacrifice sur la Croix qui est actualisĂ©, rendu prĂ©sent dans le sacrement de l'Eucharistie[3] - [4].

La présence réelle

Sur ce point le pape Jean-Paul II se place explicitement dans la continuité de l'encyclique Mysterium Fidei de Paul VI en rappelant que dans le sacrement de l'eucharistie, le Christ, Homme-Dieu, se rend présent tout entier, de façon substantielle. La définition de la transsubstantiation par le concile de Trente est également rappelée. Jean-Paul II y ajoute une insistance particulière sur le lien avec la Résurrection : c'est bien le Christ vivant et ressuscité qui est présent dans le sacrement.

Le pape loue les efforts des théologiens pour aider à la compréhension du mystère eucharistique, mais en rappelant que cela doit se faire en accord avec la foi catholique.

Le rĂ´le du prĂŞtre

Jean-Paul II rappelle la distinction des rôles respectifs du prêtre et des fidèles telle qu'énoncée par le concile Vatican II : si ces derniers « en vertu de leur sacerdoce royal, concourent à l'offrande de l'Eucharistie », seul le prêtre ordonné « célèbre le Sacrifice eucharistique en la personne du Christ et l'offre à Dieu au nom de tout le peuple ». Il appuie cette distinction sur la notion d'« apostolicité », rappelant que lors de l'institution de l'Eucharistie seuls les apôtres sont présents.

Le ministère ordonnĂ© est donc un Ă©lĂ©ment fondamental de la cĂ©lĂ©bration eucharistique et c'est nĂ©cessairement un don qu'« elle reçoit Ă  travers la succession Ă©piscopale qui remonte jusqu’aux apĂ´tres Â» (EE 29). Pour l'Ă©vĂŞque d'Angers, Jean-Louis Bruguès, ce rappel s'adresse Ă  quelques pays voisins de la France « dans lesquels est nĂ©e et se dĂ©veloppe l'idĂ©e selon laquelle toute communautĂ© chrĂ©tienne serait Ă  mĂŞme de se donner les ministres dont elle a besoin.  Â».

L'eucharistie et la vie de l'Église

Patrick PrĂ©tot, de l'Institut catholique de Paris, considère que le point central de l'encyclique est « la rĂ©ception, par le magistère, de la redĂ©couverte contemporaine de la dimension ecclĂ©siale de l’Eucharistie Â». Cette redĂ©couverte, synthĂ©tisĂ©e par l’adage : « l’Eucharistie fait l’Église », est Ă  mettre au crĂ©dit de Henri de Lubac et de ses MĂ©ditations sur l’Église de 1953[5].

De ce fait, dans la cĂ©lĂ©bration de l'eucharistie c'est l'Église entière qui est engagĂ©e : « le Sacrifice eucharistique, tout en Ă©tant toujours cĂ©lĂ©brĂ© dans une communautĂ© particulière, n'est jamais une cĂ©lĂ©bration de cette seule communautĂ© Â» : celle-ci reçoit en effet « l'intĂ©gralitĂ© du don du salut Â» (EE 39). C'est pourquoi les signes visibles de communion sont si importants : la mention de l'adhĂ©sion Ă  une foi commune, l'union avec l'Ă©vĂŞque et le pape, ainsi que la nĂ©cessitĂ© d'ĂŞtre baptisĂ© avant de pouvoir communier. Il faut en outre prĂŞter attention aux signes invisibles de communion, qui suppose la vie de la grâce, et notamment la nĂ©cessitĂ© de confesser les pĂ©chĂ©s graves avant d'accĂ©der Ă  l'Eucharistie (EE 36).

Aspects concrets

L'intégrité de la liturgie

Le pape s'Ă©lève contre les abus liturgiques qui nuisent au caractère sacrĂ© et Ă  la dimension universelle de l'eucharistie : « La liturgie n'est jamais la propriĂ©tĂ© privĂ©e de quelqu'un, ni du cĂ©lĂ©brant, ni de la communautĂ© dans laquelle les Mystères sont cĂ©lĂ©brĂ©s. Â» (EE 52).

L'année qui suit la parution de l'encyclique est publiée l'instruction Redemptionis Sacramentum "sur certaines choses à observer et à éviter concernant la très sainte Eucharistie " qui vient rappeler les normes à respecter et l'exigence de formation en matière de liturgie[6].

L'œcuménisme

Patrick PrĂ©tot souligne l'importance accordĂ©e Ă  la question de l'Ĺ“cumĂ©nisme, qui lui semble inĂ©dite dans les textes du magistère sur l'eucharistie. Au nom d'un dialogue cherchant l'unitĂ© dans le respect de la vĂ©ritĂ©, et pour ne pas entretenir d'« ambiguĂŻtĂ© sur la nature de l'Eucharistie Â», le pape refuse l'intercommunion avec les Ă©glises issues de la RĂ©forme[5]. Reprenant une formule de son encyclique Ut Unum Sint, Jean-Paul II affirme que, d'ores et dĂ©jĂ , « Nous aussi, nous avons le dĂ©sir ardent de cĂ©lĂ©brer ensemble l'unique Eucharistie du Seigneur, et ce dĂ©sir devient dĂ©jĂ  une louange commune et une mĂŞme imploration. Â» (EE 44).

Cette dĂ©marche est approuvĂ©e par l'Association Française des Foyers Mixtes Interconfessionnels ChrĂ©tiens : « Nous connaissons et nous respectons la discipline de l’Église catholique sur l’« inter-communion » qui considère que la pleine communion, dont le partage eucharistique est le symbole le plus fort, doit ĂŞtre l’aboutissement et non le dĂ©but d’une dĂ©marche commune vers l’UnitĂ©. Tant que subsistent des motifs sĂ©rieux de division entre Églises, l’absence d’un tel partage, ou de concĂ©lĂ©bration, en tire la consĂ©quence douloureuse mais logique. Â». Ce groupe regrette cependant qu'on ne puisse trouver plus de moyens de recours Ă  l'hospitalitĂ© eucharistique[7].

L'adoration eucharistique

L'encyclique comporte un appel insistant Ă  la contemplation, pour prolonger les fruits de la messe. Le pape souhaite encourager l'exposition et l'adoration du Saint-Sacrement : « comment ne pas ressentir le besoin renouvelĂ© de demeurer longuement, en conversation spirituelle, en adoration silencieuse, en attitude d'amour, devant le Christ prĂ©sent dans le Saint-Sacrement ? Â» (EE 25).

Pour vivre ce culte eucharistique, le pape invite les fidèles Ă  se mettre Ă  l'Ă©cole de la Vierge Marie. Ă€ cette dernière, il donne le titre de "femme eucharistique", en dressant un parallèle entre le moment de l'Incarnation avec le "fiat" de Marie, et celui de la consĂ©cration eucharistique, avec l'"Amen" des fidèles. Pour le pape, Marie, devenant elle-mĂŞme "tabernacle" a « anticipĂ© la foi eucharistique de l'Église Â». C'est dans cette perspective que Jean-Paul II a placĂ© l'institution de l'eucharistie parmi les mystères du Rosaire (dans la lettre Rosarium Virginis Mariae).

Notes et références

  1. Ecclesia de Eucharistia, section 6
  2. Ce sont les thèmes proposés dans le guide de lecture proposé par l'évêque d'Angers, Mgr Jean-Louis Bruguès.
  3. Ecclesia de Eucharistia, section 12.
  4. Philippe-Marie Airaud, L'unique efficace sacrifice de l'Agneau sans tache, Kephas
  5. Présentation du document publié par le Pape Jean-Paul II, à l’occasion du jeudi saint 2003 sur Theologicum, revue de l'Institut catholique de Paris.
  6. Texte de l'instruction sur le site du Vatican et sa présentation par Mgr Robert Le Gall
  7. Message des Foyers Mixtes dans le cadre de la préparation du synode des évêques consacré à l’eucharistie, par l'Association Française des Foyers Mixtes Interconfessionnels Chrétiens.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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