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Droit d'auteur en France

En France, le droit d'auteur est l’ensemble des prérogatives exclusives dont dispose un créateur sur son œuvre de l’esprit.

Histoire du droit d'auteur en France

Au Moyen Âge, la propriété intellectuelle n'existait pas et rien n'interdisait d'effectuer une copie d'une œuvre[1].

Dès la fin du XVe siècle, le pouvoir royal a accordé par lettres patentes un monopole sur l'exploitation des œuvres, appelé privilège. Le plus souvent, l'auteur cédait son œuvre à un exploitant (troupe de théâtre, académie, université, manufacture), qui sollicitait le privilège pour son propre compte. L'auteur ne bénéficiait donc pas des recettes dégagées par l'exploitation de son œuvre. Certains auteurs de grande renommée ont toutefois pu obtenir un privilège, à l’exemple de Ronsard pour ses Odes[2].

Afin d’obtenir la protection du privilège, l'œuvre était soumise à une institution de censure divisée en sections correspondant aux différents domaines littéraires : droit, poésie, traductions, théologie, etc. Un censeur royal prenait connaissance de l'œuvre et rendait un rapport devant une commission qui donnait ensuite un avis sur le degré de protection et la durée. Cet avis portait sur l'originalité de l'œuvre, sa qualité, l'importance des dépenses que l'auteur ou l'éditeur avait engagées et l'intérêt que l'œuvre présentait pour le public. Dans les faits, les contrefaçons venant de Hollande et de Suisse étaient très nombreuses et la police peu efficace pour protéger les droits des auteurs et des libraires. Le contentieux portant sur les contrefaçons n'a jamais été étudié.

Lors de la Révolution française, tous les privilèges sont abolis, à commencer par ceux des métiers et des académies. Cependant, les droits des auteurs sont reconnus par sept lois révolutionnaires adoptées entre 1791-1793, qui resteront en vigueur jusqu’en 1957. La loi des 13[3] et 19 janvier 1791 accorde aux auteurs dramatiques un monopole d'exploitation sur la représentation de leurs œuvres. Les droits d'auteur sont octroyés pour la durée de la vie de l'auteur, et perdurent cinq ans après sa mort au profit de ses ayants droit. La loi des 19[4] et 24 juillet 1793 étend ce monopole à tous les auteurs, et allonge la durée de protection à dix ans après la mort de l'auteur. La loi du 14 juillet 1866 porte cette durée à cinquante ans post mortem. Durant cette période, le droit moral est créé par la jurisprudence afin de préserver le lien existant entre l'auteur et son œuvre.

Les bases du droit d'auteur contemporain sont Ă©tablies par trois lois :

  • La loi du reconnaĂ®t aux auteurs des droits patrimoniaux et le droit moral crĂ©Ă© par les tribunaux[5]. Elle codifie les droits accordĂ©s par la jurisprudence.
  • La loi du accorde des droits voisins aux artistes-interprètes, aux producteurs et aux entreprises de communication. Elle prĂ©voit la protection des programmes d'ordinateur par le droit d'auteur[6].

LĂ©gislation sur le droit d'auteur

La France est partie contractante de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques (1886), de la Convention universelle sur le droit d'auteur (1952) portée auprès de l'Unesco par Marc Saporta, et des Accords sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (1995).

En tant qu'État-Membre de l'Union europĂ©enne, la France a transposĂ© dans son droit interne diverses directives europĂ©ennes, notamment la directive 93/98/CEE harmonisant la durĂ©e du droit d'auteur Ă  70 ans après la mort de l'auteur, et la directive 2001/29/CE qui crĂ©e notamment le rĂ©gime juridique des « mesures techniques de protection ». La transposition de cette dernière directive, dĂ©coulant de traitĂ©s de l'OMPI adoptĂ©s sous la pression des industries amĂ©ricaines du divertissement, par la loi DADVSI de 2006, a suscitĂ© la controverse et une bataille parlementaire inhabituelle sur un sujet aussi technique. Ă€ cette occasion, le Conseil constitutionnel a donnĂ© au droit d'auteur et aux droits voisins une valeur constitutionnelle, en le rattachant au droit de propriĂ©tĂ© Ă©voquĂ©s dans les articles 2 et 17 de la DĂ©claration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 :

« Considérant que les finalités et les conditions d'exercice du droit de propriété ont subi depuis 1789 une évolution caractérisée par une extension de son champ d'application à des domaines nouveaux ; que, parmi ces derniers, figurent les droits de propriété intellectuelle et notamment le droit d'auteur et les droits voisins[8]. »

Champ d'application

Superpositions de graffiti sans autorisation sur un mur privé à Barcelone. Dans les faits, la question du droit d'auteur peut s'avérer très complexe.

Le droit moral consiste pour l'auteur au droit au « respect de son nom, de sa qualité, de son œuvre » (Art. L. 121-1 CPI[9]).

Le Code de la propriété intellectuelle (CPI) définit le droit d'auteur, qui recouvre « toutes les œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination » (article L.112-1[10] du code de la propriété intellectuelle). « L'œuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l'auteur » (article L.111-2[11] du CPI). Le droit d'auteur peut par exemple s'appliquer à des pièces de carrosserie automobile. La protection des graffitis par le droit d'auteur s'applique lorsqu'ils ont été réalisés dans la légalité. Leurs auteurs en sont privés lorsque leur œuvre a été réalisée dans l'illégalité[12] et cela bien qu'elle ait le statut d'œuvre d'art éphémère[13].

Titulaires du droit d’auteur

La qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée. (L113-1[14] CPI)

Le code de la propriété intellectuelle distingue, en trois catégories d’œuvres, les œuvres faisant appel à une pluralité d’auteurs : (L113-2[15] CPI)

  • Les Ĺ“uvres de collaboration : «à la crĂ©ation de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques».
  • Les Ĺ“uvres composites : «l’œuvre nouvelle Ă  laquelle est incorporĂ©e une Ĺ“uvre prĂ©existante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière».
  • Les Ĺ“uvres collectives : l’œuvre collective est celle qui est «crĂ©Ă©e sur l’initiative d’une personne physique ou morale, qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom, et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer Ă  chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble rĂ©alisé».

Droit moral

Le droit moral regroupe :

  • Le droit de divulgation ;
  • Le droit de paternitĂ© ;
  • Le droit au respect de l'intĂ©gritĂ© de l'Ĺ“uvre. L'application de ce droit est cependant nuancĂ©e dans la jurisprudence rĂ©cente.
  • Le droit de retrait et de repentir, qui consiste au retrait par l'auteur de son Ĺ“uvre dĂ©jĂ  divulguĂ©e de la sphère du marchĂ© en contrepartie d'une compensation financière Ă  hauteur du prĂ©judice subi par l'ayant droit, ou par le propriĂ©taire du support (cas d'une peinture ou d'une sculpture notamment).

Droits patrimoniaux

On distingue principalement :

  • Le droit de reproduction ;
  • Le droit de reprĂ©sentation.

On peut Ă©galement trouver d'autres droits patrimoniaux annexes, tels que le droit de traduction, le droit d'adaptation et le droit de destination.

Il existe deux types de rémunération :

  • une rĂ©munĂ©ration directe des auteurs qui consiste Ă  obtenir des revenus directs, en gĂ©nĂ©ral par le paiement des consommateurs (livres, CD…) ou par celui d'intermĂ©diaires (achats de droits de tĂ©lĂ©vision par les diffuseurs, part du chiffre d'affaires du diffuseur…) ;
  • une rĂ©munĂ©ration indirecte qui consiste Ă  s'assurer d'une remontĂ©e de revenus par divers mĂ©canismes, par exemple Ă  l'occasion de modification de reproductibilitĂ© (rĂ©munĂ©ration pour copie privĂ©e), pour des utilisations qui ne permettent pas un contrĂ´le unitaire des exploitations (barème des discothèques) ou pour des biens non-rivaux par nature (tĂ©lĂ©vision et radio par la redevance ou la licence lĂ©gale) ou encore par la rĂ©munĂ©ration au titre du prĂŞt en bibliothèque. Cette rĂ©munĂ©ration se traduit en gĂ©nĂ©ral par une absence de paiement direct par les consommateurs des Ĺ“uvres ou des programmes.

Les exceptions au droit d’auteur

Les exceptions à l'exercice du droit d'auteur sont fixées par l'article L.122-5 du code de la propriété intellectuelle[16] :

Les principales utilisations que l’auteur ne peut interdire une fois l’œuvre divulguée sont :

  • Les reprĂ©sentations privĂ©es et gratuites effectuĂ©es exclusivement dans un cercle de famille ;
  • L'exception de copie privĂ©e, qui permet sous certaines conditions d'effectuer des copies ou reproductions strictement rĂ©servĂ©es Ă  l'usage privĂ© du copiste et non destinĂ©es Ă  une utilisation collective.

Sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l'auteur et la source :

  • Les analyses et courtes citations justifiĂ©es par le caractère critique, polĂ©mique, pĂ©dagogique, scientifique ou d'information de l'Ĺ“uvre Ă  laquelle elles sont incorporĂ©es ;
  • Les revues de presse ;
  • La diffusion, mĂŞme intĂ©grale, par la voie de presse ou de tĂ©lĂ©diffusion, Ă  titre d'information d'actualitĂ©, des discours destinĂ©s au public prononcĂ©s dans les assemblĂ©es politiques, administratives, judiciaires ou acadĂ©miques, ainsi que dans les rĂ©unions publiques d'ordre politique et les cĂ©rĂ©monies officielles ;
  • Les reproductions, intĂ©grales ou partielles d'Ĺ“uvres d'art graphiques ou plastiques destinĂ©es Ă  figurer dans le catalogue d'une vente judiciaire effectuĂ©e en France pour les exemplaires mis Ă  la disposition du public avant la vente dans le seul but de dĂ©crire les Ĺ“uvres d'art mises en vente ;
  • L'exception pĂ©dagogique, qui permet la reprĂ©sentation ou la reproduction d'extraits d'Ĺ“uvres, Ă  des fins exclusives d'illustration dans le cadre de l'enseignement et de la recherche, Ă  l'exclusion de toute activitĂ© ludique ou rĂ©crĂ©ative. Le public auquel cette reprĂ©sentation ou cette reproduction est destinĂ©e doit ĂŞtre composĂ© majoritairement d'Ă©lèves, d'Ă©tudiants, d'enseignants ou de chercheurs directement concernĂ©s, et l'utilisation de cette reprĂ©sentation ou cette reproduction ne doit pas donner lieu Ă  aucune exploitation commerciale. Enfin cette utilisation doit ĂŞtre compensĂ©e par une rĂ©munĂ©ration nĂ©gociĂ©e sur une base forfaitaire sans prĂ©judice de la cession du droit de reproduction par reprographie. Cette exception au droit d'auteur ne s'applique pas aux Ĺ“uvres conçues Ă  des fins pĂ©dagogiques, aux Ă©ditions numĂ©riques de l'Ă©crit ou aux partitions de musique ;
  • La parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ;
  • Sous certaines conditions, la reproduction et la reprĂ©sentation par des personnes morales et par les Ă©tablissements ouverts au public, tels que bibliothèques, archives, centres de documentation et espaces culturels multimĂ©dia, en vue d'une consultation strictement personnelle de l'Ĺ“uvre par des personnes handicapĂ©es ;
  • La reproduction d'une Ĺ“uvre, effectuĂ©e Ă  des fins de conservation ou destinĂ©e Ă  prĂ©server les conditions de sa consultation sur place par des bibliothèques accessibles au public, par des musĂ©es ou par des services d'archives, sous rĂ©serve que ceux-ci ne recherchent aucun avantage Ă©conomique ou commercial ;
  • La reproduction ou la reprĂ©sentation, intĂ©grale ou partielle, d'une Ĺ“uvre d'art graphique, plastique ou architecturale, par voie de presse Ă©crite, audiovisuelle ou en ligne, dans un but exclusif d'information immĂ©diate et en relation directe avec cette dernière, sous rĂ©serve d'indiquer clairement le nom de l'auteur.

Les exceptions ne peuvent porter atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre ni causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur.

La mention « DR » ou « droits réservés », utilisée lors de la publication d’une œuvre orpheline, n’équivaut pas à une autorisation de l’auteur, et son utilisation constitue une violation du droit de paternité.

Il faut également souligner la privation des droits d'auteur d'œuvres qui ont été réalisées dans l'illégalité, comme des graffiti réalisés en France sans l'autorisation du propriétaire du support.

Durée

Évolution comparée de la durée du droit d'auteur et de l'espérance de vie

La durée des droits patrimoniaux couvre la vie de l'auteur. À la mort de l'auteur, ces droits persistent au bénéfice de ses ayants droit pendant l'année civile en cours et les soixante-dix années qui suivent[17] (avant la loi du 27 mars 1997, c'était seulement cinquante ans).

À ce régime général, se superpose celui des prorogations applicables aux auteurs morts pour la France (trente ans) et le cas échéant aux œuvres publiées avant guerre (pouvant atteindre quatorze ans et deux cent soixante-douze jours[18]), mais comptés à partir d'une durée initiale de cinquante ans.

(70 ans Ă  partir de la date de publication de l'Ĺ“uvre pour les publications collectives)

Durée des droits d'auteur : exemple théorique pour une œuvre créée en 2018

Par ailleurs :

  • Dans le cas d'une Ĺ“uvre de collaboration, c'est la date de la mort du dernier collaborateur qui sert de rĂ©fĂ©rence[19]. Dans le cas d'une Ĺ“uvre audiovisuelle, Ĺ“uvre de collaboration, c'est la mĂŞme chose mais les collaborateurs sont prĂ©cisĂ©ment nommĂ©s : scĂ©nariste, auteur des paroles, auteur des compositions musicales, rĂ©alisateur principal[19] ;
  • Dans le cas d'une Ĺ“uvre sous pseudonyme, anonyme ou collective, le droit d'auteur dure 70 ans après la publication, sauf si l'auteur de l'Ĺ“uvre anonyme ou pseudonyme se fait connaĂ®tre[20] ;
  • dans le cas des Ĺ“uvres posthumes, c'est toujours le dĂ©lai normal de soixante-dix ans après la mort de l'auteur, Ă©ventuellement prorogĂ©, qui les couvrent. Si elles ne sont divulguĂ©es qu'après ce laps de temps de soixante-dix ans, le temps de protection tombe Ă  vingt-cinq ans Ă  compter du 1er janvier de l'annĂ©e de publication[21] (art.L123-1 et suiv. du Code de la PropriĂ©tĂ© intellectuelle).

Compléments

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Laurent Pfister, « Mort et transfiguration du droit d’auteur ? : Éclairages historiques sur les mutations du droit d'auteur à l'heure du numérique », Bulletin des bibliothèques de France,‎ (lire en ligne)
  2. Pierre-Yves Gautier, Propriété littéraire et artistique, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Droit Fondamental », , 6e éd., 983 p. (ISBN 978-2-13-056321-1, présentation en ligne)
  3. « Compte rendu des travaux du congrès de la propriété littéraire et artistique/Loi du 13 janvier 1791 », (extrait publié sur la Wikisource en français)
  4. « Compte rendu des travaux du congrès de la propriété littéraire et artistique/Loi du 19 juillet 1791 », (extrait publié sur la Wikisource en français)
  5. Loi no 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique
  6. Loi no 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée
  7. Loi no 92-597 du 1 juillet 1992 relative au code de la propriété intellectuelle
  8. Conseil Constitutionnel, DĂ©cision no 2006-540 DC du 27 juillet 2006, cons. 14 et 15
  9. article L.121-1 du code de la propriété intellectuelle.
  10. article L.112-1 du Code de la propriété intellectuelle
  11. article L.111-2 du code de la propriété intellectuelle
  12. Cour de Cassation - Le 28 septembre 1999
  13. Cour d'appel de Paris, 27 septembre 2006
  14. article L.113-1 du code de la propriété intellectuelle
  15. article L.113-2 du code de la propriété intellectuelle
  16. « Article L122-5 du Code de la propriété intellectuelle », sur legifrance.gouv.fr, (consulté le )
  17. article L. 123-1 du CPI
  18. art. 123.8 et 123.9 du CPI
  19. article
  20. article
  21. article
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