Double Eagle de 1933
Le double eagle de 1933 est une pièce de vingt dollars en or des États-Unis frappée au millésime 1933.
Double eagle | ||
Pays | États-Unis | |
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Valeur | 20$ dollars | |
Masse | 33,431 g | |
Diamètre | 34,1 mm | |
Épaisseur | 2,0 mm | |
Tranche | E Pluribus Unum | |
Composition | 90 % or, 10 % cuivre | |
Année d'émission | 1933 | |
Numéro catalogue | jamais mis en circulation | |
Avers | ||
Gravure | Lady Liberty tenant une torche et un rameau d'olivier - Liberty - 1907 | |
Graveur | Augustus Saint-Gaudens | |
Année de la gravure | 1907 - MCMVII | |
Revers | ||
Gravure | Pygargue à tête blanche - United States of America - Twenty Dollars - in God We Trust | |
Les double eagle étaient frappés depuis 1907 ; en 1933, il y en eut 445 500 exemplaires. Ce fut la dernière année d'édition de ces pièces. La particularité du double eagle de 1933 est qu'il ne fut jamais mis en circulation. L'ensemble du lot fut fondu à l'exception de deux spécimens confiés à la Smithsonian Institution. Il est apparu par la suite que certains exemplaires avaient échappé à la destruction de manière frauduleuse. En 2005, dix de ces pièces ont été retrouvées et saisies par les services secrets américains.
Un exemplaire de cette pièce a atteint — chez Sotheby's — le montant le plus élevé à cette époque, en 2002, lors d'une vente aux enchères de pièce de monnaie, soit 7,59 millions de dollars[1].
La production des Double Eagles de 1933
Dans l'optique d'enrayer les effets du krach boursier des années 1930, le président des États-Unis, Franklin D. Roosevelt adopte une mesure visant à ce que les banques de la Réserve fédérale récupèrent les pièces de monnaie et les lingots en or détenus par des particuliers (Décret présidentiel 6102). Ces mesures avaient pour but de lutter contre la thésaurisation et la fuite devant la monnaie papier.
Certaines catégories de pièces ne furent toutefois pas visées :
- l'or nécessaire à l'industrie ou au commerce ;
- les pièces dont le montant est inférieur à 100 dollars ou qui présentent un intérêt pour les collectionneurs ;
- les stocks d'or marqués ou détenus, en confiance, pour des gouvernements étrangers ;
- les pièces et les lingots ayant reçu une licence dans le cadre de l'import-export.
Dès 1933 et à la suite du Gold Reserve Act de 1934, il devint hors-la-loi de détenir des pièces américaines en or, à l'exception des pièces de collection. Cette « loi sur la réserve d'or » eut un impact direct sur l'existence des Double Eagle de 1933. En effet, les pièces avaient été frappées après cet édit, sans que la monnaie en fut avertie, elles étaient donc illégales. Il fut décidé de procéder à la refonte de l'ensemble du lot qui n'avait jamais quitté la réserve fédérale de Philadelphie. Cette refonte n'intervint toutefois que fin 1934. Deux exemplaires furent confiés par la Monnaie des États-Unis au Musée national d'histoire américaine : on peut les voir dans le « Hall des monnaies et médailles » au troisième étage.
Ces deux exemplaires auraient dû être les deux seuls existants. À l'insu de la Monnaie, un certain nombre d'exemplaires se sont néanmoins retrouvés sur le marché à la suite, manifestement, d'un vol. Peut-être le caissier de la Monnaie, Georges McCann, était-il impliqué ainsi que le bijoutier de Philadelphie, Israël Switt, qui écoula plusieurs exemplaires.
Louis E. Eliasberg a possédé à un moment donné une pièce de 20 dollars en or de 1933. En apprenant que le gouvernement pensait que les pièces n'avaient pas été émises légalement par la Monnaie et qu'il les rappelait, il a volontairement rendu sa pièce au gouvernement en 1952, sans compensation[2].
Les pièces circulèrent parmi les collectionneurs pendant plusieurs années avant que le F.B.I. fut informé de leur existence. Durant l'enquête de 1944, menée par l'agent fédéral Harry Strang, sept pièces furent ainsi récupérées et détruites. Une pièce échappa à la vigilance des enquêteurs et reçut, à la suite d'une erreur administrative, un visa d'exportation. Elle fut acquise par le Roi Farouk d'Égypte qui la détint jusqu'en 1952. Les investigations terminées, les soupçons se portèrent bien sur les deux suspects mais en raison de la prescription, ils ne purent être poursuivis.
Le Double Eagle du roi Farouk
Le Roi Farouk Ier d'Égypte était un infatigable collectionneur. Il collectionnait les timbres, les lames de rasoir, les œufs de Fabergé, les anciennes bouteilles d'aspirine, les presse-papiers et, bien sûr, les pièces de monnaie. Il en possédait plus de 8 500.
En 1944, le roi Farouk se porta donc acquéreur d'un Double Eagle de 1933 ; mieux, il obtint un visa d'exportation dûment délivré par les autorités américaines. Le vol n'ayant été découvert que quelques jours plus tôt, ni les démarches du trésor américain, ni les manœuvres diplomatiques ne permirent de récupérer la pièce. La Seconde Guerre mondiale estompa la véhémence du gouvernement pour récupérer son bien. En 1952, à la suite d'un coup d'État, les biens du Roi Farouk sont mis aux enchères, menées par Sotheby's. Le Golden Eagle refait alors surface. Le gouvernement des États-Unis demanda que la pièce lui fût restituée. Il obtint un accord mais la pièce disparut à nouveau. Il faudra attendre plus de quarante années avant d'en entendre à nouveau parler.
En février 1996, Stephen Fenton, un négociant numismate de premier plan sur la place londonienne, est arrêté au Waldorf-Astoria Hotel à New York tandis qu'il tente de revendre le Golden Eagle ayant appartenu au roi Farouk[3].
Stephen Fenton avait été contacté quelque temps auparavant par un bijoutier égyptien qui souhaitait lui montrer un double eagle de 1933. Flairant la bonne affaire, il lui achète 220 000 dollars et contacte un homologue numismate aux États-Unis. Ce dernier lui explique d'emblée qu'il a déjà un acquéreur pour cette pièce dont il s'empresse de contacter l'intermédiaire. Celui-ci décide de se servir de cette opportunité pour se venger d'un contentieux qui l'avait opposé au numismate américain. Il prévient les agents fédéraux. La transaction eut bien lieu, mais l'acquéreur et son expert étaient des agents du FBI.
Stephen Fenton est arrêté. Sa défense reposa sur le fait qu'il ignorait, de bonne foi, qu'il était illégal de vendre un Double Eagle de 1933 puisque cette pièce disposait d'un visa d'exportation en bonne et due forme. Le jugement se tint en 2001. Stephen Fenton obtint gain de cause mais le jugement précisait que l'État américain devrait redevenir propriétaire de la pièce. Le Gouvernement américain transigea et proposa de mettre la pièce aux enchères, moitié pour le trésor américain, moitié pour Stephen Fenton[4]. Le trésor américain émit les documents légalisant a posteriori la pièce rendant ainsi la vente possible.
Le , le Golden Eagle de 1933 du roi Farouk fut vendu aux enchères chez Sotheby's. L'acquéreur, anonyme, céda la pièce pour être exposée au public. Il avait payé 6,6 millions et, avec les frais additionnels, comprenant la valeur faciale de la pièce, il en fut pour 7 590 020 dollars. Les enchères avaient duré moins de neuf minutes…
La découverte de dix nouvelles pièces
En , le Trésor américain annonça[5] la découverte de dix nouveaux exemplaires de la pièce de 1933 en possession d'un membre de la famille du bijoutier de Philadelphie, Israël Switt (décédé en 1990)[6]. Ils furent authentifiés par l'Hôtel des monnaies américain. La famille tenta de récupérer les pièces. Le , le juge Legrome D. Davis rendait un avis introductif au procès[7]. Le procès eut lieu en , il dura dix jours et aboutit à l'unanimité aux conclusions suivantes : Israël Switt ayant illégalement acquis les pièces, elles restent de manière inaliénable propriété du Gouvernement des États-Unis[8] - [9].
Depuis 2005, les dix pièces sont entreposées pour une durée indéterminée à Fort Knox en attente d'une décision quant à leur devenir[10].
Tournée européenne de 2012
La pièce fut présentée au public en mars 2012 dans les capitales européennes Londres, Dublin, Bruxelles, Prague, Varsovie, Oslo et Helsinki.
À Bruxelles, elle fut présentée à la Bibliothèque royale de Belgique le vendredi et le samedi dans la chapelle de Nassau.
Bibliographie
- Alison Frankel, Double Eagle: the epic story of the world's most valuable coin New York: Norton, 2006 (ISBN 0-393-05949-9)
- David Tripp, Illegal tender: gold, greed, and the mystery of the lost 1933 Double Eagle New York: Free Press, 2004 (ISBN 0-7432-4574-1)
- COINage Magazine, January 2006, Barry Berke and the 1933 Double 'Legal' pp. 46–48
- Linda Fairstein, The Kills: Fictional story based on the King Farouk owned 'Double Eagle' coin Little Brown, 2004 (ISBN 978-0-7515-4284-4)
Documentaire
- Hunt for Double Eagle, version française : À la recherche de la pièce perdue, produit par Laura Jones (Fulcrum TV), réalisé par Tilman Remme, 53 min, 2010.
Liens externes
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « 1933 double eagle » (voir la liste des auteurs).
- Cette vente record est détrônée en mai 2005 avec la mise en vente d'un dollar flowing hair (la première pièce américaine) qui atteint la somme de 7,85 millions de dollars.
- (en-US) « Louis E. Eliasberg Sr. - Southgate Coins - Famous Coin Collectiors - Buy & Sell Rare Coins in Reno », sur Buy & Sell Gold & Silver | Rare Coins | Carson City Coins | Reno Coin Shop | Northern Nevada Dealer (consulté le )
- Laren Donovan, Buried Treasure, Trusts and Estates, 2006
- Leon Worden, 1933 Double 'Legal' Barry Berke: The Saints' Biggest Advocate, COINage magazine, 2006
- (en) « United States Mint Recovers 10 Famed Double Eagles », United States Mint, (consulté le )
- La Libre Belgique, Bataille judiciaire pour 10 pièces d'or rarissimes, 10 janvier 2011.
- Avis du juge Legrome D. Davis
- (en) Peter Loftus, « Family Loses Coins Worth Millions in Dispute With U.S. », Wall Street Journal, (lire en ligne, consulté le )
- France Info, Xavier Renauld, USA : l'affaire des dix Double Eagle d'or devant la justice, 10 juillet 2011
- (en) Steve Roach, « 1933 double eagle trial: At long last, a conclusion », Coin World, (consulté le )
- La Joconde échappe au 11 septembre et bat tous les records, article paru dans la Libre.be le 1er août 2002.