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Dorsale de Nazca

La dorsale de Nazca est une chaĂźne de montagnes sous-marine de l'ocĂ©an Pacifique qui s'Ă©tend du sud-ouest au nord-est sur la plaque de Nazca au large des cĂŽtes sud du PĂ©rou. Cette dorsale est en cours de subduction sous la plaque sud-amĂ©ricaine Ă  la frontiĂšre convergente connue sous le nom de fosse du PĂ©rou-Chili Ă  une vitesse de 7,7 cm/an. La dorsale de Nazca a commencĂ© sa subduction oblique Ă  11°S de latitude il y a approximativement 11,2 Ma ; elle est aujourd'hui situĂ©e Ă  15°S. La dorsale est composĂ©e d'une croĂ»te ocĂ©anique anormalement Ă©paisse, en moyenne 18 Â± 3 km. La croĂ»te est flottante, entraĂźnant une subduction Ă  angle faible sous le PĂ©rou. Cette subduction a Ă©tĂ© associĂ©e au soulĂšvement du bassin de Pisco (en) et de l'arche de Fitzcarrald sur le continent sud-amĂ©ricain, ainsi qu'a l'arrĂȘt de l'activitĂ© de la ceinture volcanique andine au niveau du PĂ©rou il y a approximativement 4 Ma.

Dorsale de Nazca
Image illustrative de l’article Dorsale de Nazca
GĂ©ographie
Altitude −4 000 m[1]
Longueur 1 100 km
Largeur 200 km
Administration
Pays Pérou, Océan Pacifique
GĂ©ologie
Âge Entre 31±1 et 23±1 Ma[2]
Roches Basalte, sédiments calcaires

Description de la chaĂźne sous-marine

La dorsale de Nazca est large d'environ 200 km, longue d'environ 1 100 km et atteint une altitude de 1 500 m au-dessus des fonds marins[1]. L'angle d'Ă©lĂ©vation est de 1 Ă  2 degrĂ©s[1]. La dorsale est situĂ©e Ă  une profondeur de 4 000 m sous le niveau de la mer, au-dessus du seuil de compensation des carbonates[1]. Elle se compose de roches volcaniques[3] - [4] et est recouverte de 300 Ă  400 m de sĂ©diments calcaires[1]. La dorsale a une Ă©paisseur de 18 Â± 3 km, sur la base de l'analyse d'onde de Rayleigh[5], mais pourrait atteindre un maximum de 35 km[6]. Elle est anormalement Ă©paisse pour une croĂ»te ocĂ©anique[5] ; pour comparaison, les rĂ©gions adjacentes Ă  la dorsale sur la plaque de Nazca ont une Ă©paisseur comprise entre 6 et km, ce qui est en accord avec la moyenne mondiale de km d'Ă©paisseur[6].

La dorsale de Nazca rejoint, prĂšs des Ăźles Malheureuses, la dorsale de Sala y Gomez (es), qui va d'ouest en est et qui traverse la dorsale est-Pacifique.

Formation

Sur base de l'Ăąge des basaltes, la portion actuellement exposĂ©e de la dorsale de Nazca date de 31 ± 1 Ma au niveau de la fosse PĂ©rou-Chili jusqu'Ă  23 ± 1 Ma au niveau de l'intersection avec la dorsale de Sala y Gomez (es)[2]. La composition des basaltes a Ă©galement permis de montrer que les dorsales de Nazca et de Sala y Gomez ont Ă©tĂ© formĂ©es par la mĂȘme source magmatique, la formation de cette derniĂšre dĂ©butant aprĂšs le changement de direction de la plaque de Nazca[2]. La formation de la plaque de Nazca dĂ©bute le long de la dorsale Pacifique-Farallon (en)/Nazca[1] et a Ă©tĂ© attribuĂ©e Ă  un volcanisme de point chaud. Le lieu exact de ce point chaud est l'objet de dĂ©bats, certains scientifiques le situant Ă  proximitĂ© de l'Ăźle de PĂąques[7] et d'autres prĂšs de l'Ăźle Sala y GĂłmez[2]. La dorsale est principalement composĂ©e de basalte de dorsale qui ayant Ă©tĂ© formĂ© alors que la plaque Ă©tait dĂ©jĂ  Ăąge de 5 Ă  13 Ma[2]. L'Ă©tude des ratios isotopiques et la composition en terres rares ont permis d'estimer que la source magmatique Ă  son origine se trouve Ă  environ 95 km de profondeur Ă  7 % de fusion partielle[2]. La dorsale de Nazca prĂ©sente une formation jumelle sur la plaque pacifique, le plateau des Tuamotu[7] - [8]. Les anomalies magnĂ©tiques ont montrĂ© que la dorsale Pacific-Farallon/Nazca avait une diffusion symĂ©trique, permettant de considĂ©rer le plateau des Tuamotu comme un tĂ©moin de la gĂ©omĂ©trie de la dorsale de Nazca avant sa subduction[8].

Subduction sous la plaque sud-américaine

Carte de la plaque de Nazca.

La plaque de Nazca a commencĂ© sa subduction au niveau de la fosse du PĂ©rou-Chili il y a approximativement 11,2 Ma Ă  11°S de latitude[8]. À cause de son orientation oblique par rapport Ă  la zone de collision entre la plaque de Nazca et la plaque sud-amĂ©ricaine, la dorsale a migrĂ© vers le sud en suivant la marge active jusqu'Ă  sa situation actuelle Ă  15°S[8]. Sur base de la relation miroir avec le plateau des Tuamotu, on estime que 900 km de la dorsale de Nazca ont dĂ©jĂ  subductĂ©. La vitesse de migration a diminuĂ© au cours du temps : 7,5 cm/an jusqu'il y a 10,8 Ma, puis 6,1 cm/an entre 10,8 Ma et 4,9 Ma. Aujourd'hui, la migration est de 4,3 cm/an[8]. La vitesse de subduction est elle de 7,7 cm/an[9] - [10].

La migration vers le sud du point de subduction s'est accompagné d'une subsidence au niveau des zones cÎtiÚres du Pérou[9]. Cette subsidence est considérée comme un facteur déterminant de la direction des riviÚres péruviennes de la région[9]. Les plaines d'Ica et de Pisco, qui correspondent à d'anciennes terrasses marines, ont été surélevées par rapport au niveau de la mer du fait de la subduction sous-jacente de la dorsale.

Interaction Ă  la marge continentale

La dorsale est flottante, entraĂźnant une subduction Ă  angle faible de la plaque de Nazca sous le PĂ©rou[11]. La flottabilitĂ© est liĂ©e Ă  l'Ăąge de la croĂ»te, et Ă©levĂ©e pour les croĂ»tes ocĂ©aniques ĂągĂ©es de 30-40 Ma[12]. La plaque de Nazca est datĂ©e Ă  45 Ma Ă  sa subduction dans la fosse PĂ©rou-Chili[12]. L'importante Ă©paisseur de la dorsale flottante peut ĂȘtre responsable de la subduction Ă  angle faible de la plaque plus ĂągĂ©e : des modĂšles ont montrĂ© que ce type de subduction ne s'observe qu'avec des dorsales sous-marines[12] et reprĂ©sente environ 10 % des frontiĂšres convergentes[11]. L'estimation la plus rĂ©cente de l'angle de subduction de la plaque de Nazca est 20° Ă  une profondeur de 24 km environ 110 km Ă  l'intĂ©rieur des terres. À une profondeur de 80 km et environ 220 km Ă  l'intĂ©rieur des terres, la plaque passe Ă  une orientation horizontale[13] et continue son trajet horizontalement pendant 700 km[14] avant de reprendre sa subduction dans l'asthĂ©nosphĂšre.

Carte montrant l'absence d'activité volcanique proche des dorsales en subduction.

Des sĂ©ismes de haute magnitude ont lieu Ă  proximitĂ© de la zone de subduction de la dorsale de Nazca[15], dont un M 8,1 en 1942 (en), un M 8,0 en 1970, un M 7,7 en 1996 (en), un M 8,4 en 2001[1] - [13] - [16] et un M 8.0 en 2007[13] - [15]. Les premiĂšres mentions d'activitĂ© sismique dans cette zone de subduction remontent Ă  1586[16]. Toutes ces ruptures sont localisĂ©es soit sur la cĂŽte du PĂ©rou, soit dans la fosse PĂ©rou-Chili, entre 9°S et 18°S, coĂŻncidant avec la subduction de la dorsale de Nazca[13] - [16], et incluent aussi bien des sĂ©ismes intraplaques qu'interplaque (en)[16]. Aucun sĂ©isme majeur n'a Ă©tĂ© localisĂ© entre les latitudes 14°S et 15.5°S, oĂč le maximum de l'Ă©lĂ©vation bathymĂ©trique de la dorsale subducte. Les sĂ©ismes interplaques ne se produisent pas en connexion directe avec la dorsale de Nazca[16].

La subduction de la dorsale n'a que peu d'effet gĂ©omorphique sur la fosse PĂ©rou-Chili, hormis une rĂ©duction de la profondeur de 6 500 Ă  5 000 m[1]. Il n'y a pas de prisme d'accrĂ©tion se formant dans la fosse, et les sĂ©diments qui y sont retrouvĂ©s proviennent de source continentale. Les sediments calcaires recouvrant la dorsale de Nazca sont quant Ă  eux complĂštement subductĂ©[1]. On observe par ailleurs une Ă©rosion tectonique (en)[17] - [1] : l'Ă©rosion de la croĂ»te du bassin prĂ©-arc (en) a entraĂźnĂ© la perte de 110 km de la plaque sud-amĂ©ricaine depuis 11 Ma[13]. Le bassin prĂ©-arc de Pisco (en) se trouvant au-dessus de la dorsale en subduction s'est soulevĂ© depuis la fin du PliocĂšne ou le PlĂ©istocĂšne[18].

Influence sur la tectonique de l'Amazone

Carte du bassin versant de l'Amazone.

La subduction Ă  angle faible de la dorsale de Nazca a Ă©tĂ© associĂ©e Ă  l'arrĂȘt de l'activitĂ© de la ceinture volcanique andine au niveau du PĂ©rou il y a approximativement 4 Ma[14]. Elle a aussi Ă©tĂ© liĂ©e Ă  la formation, il y a Ă©galement 4 Ma, de l'arche de Fitzcarrald, une particularitĂ© topographique en forme de dĂŽme de 400 000 km2 et 400-600 m d'altitude qui dĂ©finit le bassin versant de l'Amazone[14].

Le soulÚvement de l'arche de Fitzcarrald croise la chaßne montagneuse des Andes dans une zone caractérisée par une transition d'une topographie à fort gradient à un faible gradient (le bassin amazonien)[10]. Cette élévation topographique coupe le bassin versant de l'Amazone en trois sous-bassins : celui de l'Ucayali au nord-ouest, celui de l'Acre au nord-est, et celui du Madre de Dios au sud-est[19]. Il a été proposé que le soulÚvement de l'arche de Fitzcarrald ait entraßné d'importantes modifications des processus de sédimentations, d'érosion et hydrologiques, concomitant avec une diversification divergente des poissons d'eau douce des sous-bassins amazoniens il y a 4 Ma[20]. Le soulÚvement peut ainsi avoir été le catalyseur de cette diversification, isolant efficacement des populations de poissons les unes des autres[19].

Notes et références

  1. (en) Andrea Hampel, Nina Kukowski, Joerg Bialas, Christian Huebscher et Raffaela Heinbockel, « Ridge subduction at an erosive margin: The collision zone of the Nazca Ridge in southern Peru », Journal of Geophysical Research: Solid Earth, vol. 109, no B2,‎ (DOI 10.1029/2003jb002593)
  2. (en) Jyotiranjan S. Ray, John J. Mahoney, Robert A. Duncan, Jyotisankar Ray, Paul Wessel et David F. Naar, « Chronology and Geochemistry of Lavas from the Nazca Ridge and Easter Seamount Chain: an ∌30 Myr Hotspot Record », Journal of Petrology, vol. 53, no 7,‎ , p. 1417–1448 (DOI 10.1093/petrology/egs021)
  3. (en) The migration history of the Nazca Ridge along the Peruvian active margin: a re-evaluation
  4. (es) Marcos Renzo Bustamante Valencia. La magnitud de sismos locales y regionales ocurridos en PerĂș a partir de la onda LG y la duraciĂłn de su registro. Arequipa , 2003, pp 153
  5. (en) T.M. Woods et E.A. Okal, « The structure of the Nazca Ridge and the Sala y Gomez seamount chain from dispersion of Rayleigh waves », Geophysical Journal International, vol. 117,‎ , p. 205–222 (DOI 10.1111/j.1365-246X.1994.tb03313.x)
  6. (en) AndrĂ©s Tassara, Hans-JĂŒrgen Götze, Sabine Schmidt et Ron Hackney, « Three-dimensional density model of the Nazca plate and the Andean continental margin », Journal of Geophysical Research, vol. 111, no B9,‎ (DOI 10.1029/2005jb003976)
  7. (en) R.H. Pilger et D.W. Handschumacher, « The fixed hotspot hypothesis and origin of the Easter-Salas y Gomez-Nazca trace », Geological Society of America Bulletin, vol. 92,‎ , p. 437–446 (lire en ligne)
  8. (en) Andrea Hampel, « The migration history of the Nazca Ridge along the Peruvian active margin: a re-evaluation », Earth and Planetary Science Letters, vol. 203,‎ , p. 665–679 (DOI 10.1016/S0012-821X(02)00859-2)
  9. (en) https://www.cosis.net/abstracts/EGU05/04873/EGU05-J-04873.pdf
  10. (en) V. Regard, R. Lagnous, N. Espurt, J. Darrozes, P. Baby, M. Roddaz, Y. Calderon et W. Hermoza, « Geomorphic evidence for recent uplift of the Fitzcarrald Arch (Peru): A response to the Nazca Ridge subduction », Geomorphology, vol. 107, nos 3-4,‎ , p. 107–117 (DOI 10.1016/j.geomorph.2008.12.003, lire en ligne)
  11. (en) M.A. Gutscher, W. Spakman, H. Bijwaard et E.R. Engdalh, « Geodynamics of flat subduction: Seismicity and tomographic constraints from the Andean margin », Tectonics, vol. 19,‎ , p. 814–833 (DOI 10.1029/1999TC001152)
  12. (en) Jeroen van Hunen, Arie P. van den Berg et Nico J. Vlaar, « The impact of the South-American plate motion and the Nazca Ridge subduction on the flat subduction below South Peru », Geophysical Research Letters, vol. 29, no 14,‎ , p. 35–1 - 35-4 (DOI 10.1029/2001gl014004)
  13. (en) YoungHee Kim et Robert W. Clayton, « Seismic properties of the Nazca oceanic crust in the southern Peruvian subduction system », Earth and Planetary Science Letters, vol. 429,‎ , p. 110–121 (DOI 10.1016/j.epsl.2015.07.055)
  14. (en) N. Espurt, P. Baby, S. Brusset, M. Roddaz, W. Hermoza, V. Regard, P.-O. Antoine, R. Salas-Gismondi et R. Bolaños, « How does the Nazca Ridge subduction influence the modern Amazonian foreland basin? », Geology, vol. 35, no 6,‎ (DOI 10.1130/g23237a.1)
  15. (en) Oner Sufri, Keith D. Koper et Thorne Lay, « Along-dip seismic radiation segmentation during the 2007 Mw8.0 Pisco, Peru earthquake », Geophysical Research Letters, vol. 39, no 8,‎ (DOI 10.1029/2012gl051316)
  16. (en) Susan L. Beck et Larry J. Ruff, « Great earthquakes and subduction along the Peru trench », Physics of the Earth and Planetary Interiors, vol. 57, nos 3-4,‎ , p. 199–224 (DOI 10.1016/0031-9201(89)90112-x)
  17. (en) Peter D. Clift, Ingo Pecher, Nina Kukowski et Andrea Hampel, « Tectonic erosion of the Peruvian forearc, Lima Basin, by subduction and Nazca Ridge collision », Tectonics, vol. 22, no 3,‎ (DOI 10.1029/2002tc001386)
  18. (en) Robert B. Dunbar, Richard C. Marty et Paul A. Baker, « Cenozoic marine sedimentation in the Sechura and Pisco basins, Peru », Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology, vol. 77, nos 3-4,‎ , p. 235-261 (DOI 10.1016/0031-0182(90)90179-B)
  19. (en) C. Hoorn et F. P. Wesselingh, Amazonia--landscape and species evolution : a look into the past, Chichester, UK, Wiley-Blackwell, , 447 p. (ISBN 978-1-4051-8113-6, lire en ligne)
  20. (en) Nicolas Hubert, Fabrice Duponchelle, Jesus Nuñez, Carmen Garcia-Davila, Didier Paugy et Jean-François Renno, « Phylogeography of the piranha genera Serrasalmus and Pygocentrus: implications for the diversification of the Neotropical ichthyofauna », Molecular Ecology, vol. 16, no 10,‎ , p. 2115–2136 (DOI 10.1111/j.1365-294x.2007.03267.x)

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