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Dickeya dadantii

Dickeya dadantii ou Erwinia chrysanthemi (ancienne dénomination), est l'une des espÚces de bactéries phytopathogÚnes provoquant la maladie de la pourriture molle (soft rot en anglais).

Dickeya dadantii
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
La pourriture molle sur un oignon infecté par Dickeya dadantii.

EspĂšce

Dickeya dadantii
Samson et al. 2005[1]

Description

Dickeya dadantii, phytopathogĂšne Ă  large spectre d’hĂŽte, est une bactĂ©rie Ă  Gram nĂ©gatif, en forme de bacille, anaĂ©robie facultative et mobile. Cette bactĂ©rie provoque la maladie de la pourriture molle. On la rencontre frĂ©quemment dans les sols ou Ă  la surface des plantes. Selon l’OEPP, Dickeya dadantii est prĂ©sente dans de nombreuses rĂ©gions du monde : Europe, Afrique, Australie, AmĂ©rique. Dans plusieurs pays, elle est classĂ©e comme phytopathogĂšnes de quarantaine.

Historique

Initialement, Dickeya dadantii fut classĂ©e dans le genre Erwinia. Erwin F. Smith, phytobactĂ©riologiste, a fondĂ© en 1920 ce genre oĂč devait ĂȘtre rĂ©uni toutes les bactĂ©ries phytopathogĂšnes Ă  Gram nĂ©gatif, en forme de bacille[2]. Dye propose de sĂ©parer le genre Erwinia en 4 groupes : les bactĂ©ries provoquant une nĂ©crose, les pectinolytiques, les Erwiniae Ă  pigment jaune et les Erwiniae atypiques. Plus rĂ©cemment, l’étude de sĂ©quences d’ADNr 16S de diffĂ©rents membres du genre a permis de rĂ©partir les Erwiniae en 4 genres[3] - [4] :

  • le genre Erwinia contenant les nĂ©crotiques comme Ewinia amylovora.
  • le genre Pectobacterium contenant les pectinolytiques comme Erwinia chrysanthemi.
  • le genre Brenneria contenant les espĂšces provoquant des maladies affectant les arbres comme Erwinia alni.
  • le genre Pantoea fondĂ© en 1989[5] comprend les Erwiniae Ă  pigment jaune comme Ewinia herbicola.

DerniÚrement, une étude de différentes séquences nucléotidiques a amené Samson et al.[1] à renommer Erwinia chrysanthemi : Dickeya dadantii. Cette étude suggÚre fortement que Dickeya dadantii est proche du genre Yersinia.

Virulence : maladie de la pourriture molle

La maladie de la pourriture molle touche de nombreuses cultures des rĂ©gions tempĂ©rĂ©es et tropicales. De plus, le spectre d'hĂŽte de Dickeya dadantii est large ce qui conduit Ă  de nombreux dĂ©gĂąts. Les plantes touchĂ©es sont le tubercule de pomme de terre, la betterave, l'endive, la tomate, l’ananas, etc.

La période d'incubation est assez longue. Elle peut durer plusieurs mois et est asymptomatique. La pathogénicité de Dickeya dadantii est étudiée depuis plus de quatre-vingt ans. De réelles avancées dans la compréhension de la maladie ont été réalisées ces vingt derniÚres années grùce notamment à des approches génétiques et moléculaires.

Évolution de la maladie

Différents paramÚtres favorisent la maladie. Tout d'abord, l'eau est un élément indispensable pour un développement optimal de la maladie. Ensuite, une concentration en oxygÚne limitée semble également nécessaire. Enfin, la température est un facteur important. Il a été démontré que la variation de la température avait des répercussions sur la production d'enzyme de dégradation de la paroi cellulaire. De plus, une température de 20 °C est une température seuil en deçà de laquelle on n'observe plus de pathogénicité[6].

SĂ©crĂ©tion d’enzymes

La pathogĂ©nicitĂ© de la bactĂ©rie repose sur la macĂ©ration des tissus. Cette macĂ©ration est permisse par la sĂ©crĂ©tion d’exoenzymes :

  • des pectinases qui sont les enzymes majeures du dĂ©veloppement de la maladie. Ces pectinases forment une grande famille d'isoenzyme codĂ©e par des gĂšnes indĂ©pendants. La composition en pectinases dĂ©pend du milieu oĂč se dĂ©veloppe la bactĂ©rie. Les substrats sont aussi variĂ©s qu'il existe d'isoenzymes [7].
  • des cellulases avec une activitĂ© endoglucanase qui dĂ©gradent la cellulose de la paroi vĂ©gĂ©tale. Cela permet la libĂ©ration de sucres nĂ©cessaires Ă  la croissance. Cependant l'activitĂ© cellulase semble jouer un rĂŽle mineur dans la pathogĂ©nicitĂ©.

Ces exoenzymes dĂ©gradent la paroi des cellules vĂ©gĂ©tales ce qui, d’une part fournit des nutriments nĂ©cessaires Ă  la croissance bactĂ©rienne et d’autre part, permet l’extension de la maladie. Ces enzymes sont sĂ©crĂ©tĂ©s par diffĂ©rents systĂšmes et notamment par le systĂšme de sĂ©crĂ©tion de type II. Ce systĂšme de sĂ©crĂ©tion permet de traverser le pĂ©riplasme et les deux membranes.

RĂ©gulation de la virulence

La virulence de ‘’Dickeya dadantii’’ est rĂ©gulĂ©e trĂšs finement. En effet, le dĂ©veloppement de la maladie est corrĂ©lĂ© Ă  l’enchaĂźnement dĂ©terminĂ© d’étapes exigeant l’adaptation de la bactĂ©rie Ă  son nouvel environnement, la plante[8]. Une bonne virulence repose sur un grand nombre de rĂ©gulateurs qui vont moduler l’expression des gĂšnes de virulence dans le temps.

Le répresseur KdgR

KdgR est un régulateur global des gÚnes impliqués dans le catabolisme de la pectine et des systÚmes associés[9] - [10].

Le répresseur PecS

PecS est un rĂ©gulateur des gĂšnes pel, de la cellulase celV, des gĂšnes prtA,B,C et G ainsi que du systĂšme out et de l’opĂ©ron indABC impliquĂ© dans la production d’un pigment bleu : l’indigoĂŻdine [11].

Les systĂšmes Ă  deux composants et les phosphorelais

Les systĂšmes Ă  deux composants ou phosphorelais sont les acteurs terminaux de la transmission du signal[12]. Ces systĂšmes sont la clef de la plasticitĂ© de l’expression des gĂšnes en fonction des conditions environnementales et nombre d’entre eux sont indispensables pour l’établissement de l’infection chez les bactĂ©ries pathogĂšnes. Ils se composent d’au moins deux protĂ©ines. Un capteur, localisĂ© dans la membrane cellulaire s’autophosphoryle sur un rĂ©sidu histidine en rĂ©ponse Ă  un stimulus et transfĂšre le groupement phosphate Ă  son rĂ©gulateur cytoplasmique sur un rĂ©sidu aspartate. Ce dernier modulera alors l’expression des divers gĂšnes cibles. Cette fine modulation s’effectue selon le ratio rĂ©gulateur phosphorylĂ©/rĂ©gulateur non phosphorylĂ©. Plusieurs Ă©tudes ont montrĂ© le rĂŽle crucial de certains phosphorelais dans la virulence de bactĂ©ries zoo- et phyto-pathogĂšnes. Cependant, bien que l’on connaisse de mieux en mieux le fonctionnement molĂ©culaire de ces phosphorelais, les stimulus et leur mode de transmission du milieu extĂ©rieur vers le capteur de la membrane cellulaire sont encore mal connus.

Chez Dickeya dadantii, trois phosphorelais sont connus pour ĂȘtre directement impliquĂ©s dans la virulence : PhoP/PhoQ [13] - [14], GacA/GacS (ou BarA/UvrY) [15] ou RcsCD/RcsB [16].

La réponse de la plante

Pour se dĂ©fendre, la plante utilise des processus de dĂ©fense classiques. Elle peut crĂ©er un stress oxydant comme l’H2O2, la principale forme active d’oxygĂšne produite lors du burst oxydatif vĂ©gĂ©tal. Certaines plantes sont Ă©galement capable de produire des peptides antimicrobiens ce qui montre l'existence de gĂšnes de rĂ©sistance.

Bilan

La virulence de Dickeya dadantii ne repose qu'en partie sur la sécrétion d'enzymes. La bactérie met en place en parallÚle des systÚmes de captures du fer, des systÚmes de défenses contre le stress oxydant et contre les peptides antimicrobiens de la plante, la motilité. L'ensemble de ces facteurs permettent le développement de la maladie de la pourriture molle.

Les glucanes périplasmiques osmorégulés (OPG) chez Dickeya dadantii

Chez Dickeya dadantii, les glucanes pĂ©riplasmiques osmorĂ©gulĂ©s (OPG) sont des oligosaccharides de taille intermĂ©diaire dont la concentration augmente lorsque l’osmolaritĂ© du milieu diminue. Leur squelette est uniquement constituĂ© de molĂ©cules de glucose. Dickeya dadantii possĂšde des OPG linĂ©aires branchĂ© ÎČ-1,2 ou ÎČ-1,6 pour les branches avec un seul glucose. La synthĂšse du squelette des OPG nĂ©cessite le produit de l’opĂ©ron opgGH. La protĂ©ine OpgH code une glucosyl-transfĂ©rase qui assure l’élongation des chaĂźnes en ÎČ-1,2 alors que la protĂ©ine OpgG permet la formation des liaisons ÎČ-1,6 [17].

Les mutants opgG ou opgH conduisent à une absence totale de synthÚse de glucanes périplasmisques provoquant une perte de motilité, une baisse de synthÚse/sécrétion d'exoenzymes, une augmentation de la production d'exopolysaccharides (Aspect muqueux)[18] . Cela se traduit par une perte totale de virulence - [19]. Cette perte de virulence est partiellement restaurée lorsque le systÚme EnvZ-OmpR est muté également[20].

GĂ©nome de Dickeya dadantii

Le génome de Dickeya dadantii a été entiÚrement séquencé et est disponible sur le site Asap : http://asap.ahabs.wisc.edu/asap/query_features.php?LocationID=WIS&GenomeID=ECH3937. Il sera prochainement publié[21] voir http://asap.ahabs.wisc.edu/research-projects/plant-pathogen-genome-projects/dickeya-dadantii-erwinia-chrysanthemi-3937-genome-project.html.

Sources bibliographiques et articles de référence

  1. (en) RĂ©gine Samson, Jean Bernard Legendre, Richard Christen et Marion Fischer-Le Saux, « Transfer of Pectobacterium chrysanthemi (Burkholder et al. 1953) Brenner et al. 1973 and Brenneria paradisiaca to the genus Dickeya gen. nov. as Dickeya chrysanthemi comb. nov. and Dickeya paradisiaca comb. nov. and delineation of four novel species, Dickeya dadantii sp. nov., Dickeya dianthicola sp. nov., Dickeya dieffenbachiae sp. nov. and Dickeya zeae sp. nov. », International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology, vol. 55, no 4,‎ , p. 1415–1427 (ISSN 1466-5026 et 1466-5034, DOI 10.1099/ijs.0.02791-0, lire en ligne, consultĂ© le )
  2. Winslow, C-EA ; Broadhurst, J ; Buchanan, RE ; Krumwiede, C ; Rogers, LA ; Smith, GH. 1920. The families and genera of bacteria. Final report of the Committee of the Society of American Bacteriologists on characterization and classification of bacterial types. H. J. Bacteriol : 191-229.
  3. Hauben, L ; Moore, ER ; Vauterin, L ; Steenackers, M ; Mergaert, J ; Verdonck, L ; Swings, J. 1998. Phylogenetic position of phytopathogens within the Enterobacteriaceae. Syst Apll Microbiol 21 : 384-397.
  4. Kwon, SW; Go, SJ; Kang, HW; Ryu, JC; Jo, JK. 1997. Phylogenetic analysis of "Erwinia" species based on 16S rRNA gene sequences. Int J Syst Bacteriol 47 : 1061-1067.
  5. Gavini, F ; Mergaert, J ; Beij, A. ; Mielcarek, C ; Izard, D ; Kersters, K ; De Ley, J. 1989. Transfert of Enterobacter aggomerans to pantoea gen nov as Pantoea aggomerans comb. Nov. And description of Pantoea dispersa sp. Nov. Int J Syst Bacteriol 39 : 337-345.
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  8. Nasser, W., Reverchon, S., Vedel, R., Boccara, M. (2005) PecS and PecT coregulate the synthesis of HrpN and pectate lyases, two virulence determinants in Erwinia chrysanthemi 3937. Mol Plant Microbe Interact. 18, 1205-1214.
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  11. Reverchon, S ; Nasser, W ; Robert-Baudouy, J. 1994. pecS : a locus controlling pectinase, cellulase and blue pigment production in Erwinia chrysanthemi. Mol Microbiol 11:1127-1139.
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