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Demeter (marque de certification)

Demeter est une marque de certification internationale pour les produits issus de l'agriculture biodynamique créée en 1932 qui s'inspire des réflexions de Rudolf Steiner (occultiste autrichien), fondateur de l'anthroposophie.

Label Demeter
Histoire
Fondation
Organisation
Membres
7700
Fondateur
Erhard Bartsch (de), Franz Dreidax
Président
Helmy Abouleish (Demeter international)
Pierre Mainaud (Demeter France)
RĂ©compense
Goldenes Brett ()
Site web

Les produits certifiés Demeter respectent avant tout le ou les cahiers des charges de l'agriculture biologique en vigueur dans les pays producteurs, et puis ceux, ésotériques et pseudo-scientifique de l'agriculture biodynamique.

Historique

À ses origines, Demeter est une entreprise coopérative spécialisée dans la transformation des produits de l’agriculture biodynamique.

Fondée en , à Berlin, son administration est d'abord confiée à l'agronome allemand Erhard Bartsch (de), directeur de l’Union des Agriculteurs Biodynamiques en Allemagne. Franz Dreidax devient responsable du développement des critères de qualité et de contrôle. C'est à Günther Wachsmuth (responsable de la section des Sciences naturelles du Goethéanum, et directeur général de la Société anthroposophique universelle) que l'on doit le choix du nom de la déesse de la fécondité et mère de la Terre dans la mythologie grecque pour la marque introduite sur le marché en . C'est ce nom qui est également choisi pour leur mensuel.

En , à la suite de la liquidation de la coopérative survenue deux ans plus tôt, l’Union Économique Demeter est créée et installe son siège à Bad Saarow, près de Berlin[1]. Pour les agriculteurs partenaires, il s'agit d'un organisme de contrôle, de certification, de transformation des céréales par des moulins et des boulangeries et même de distribution de ces productions aux représentations régionales chargées de fournir les magasins partenaires. Cette même année et pour la première fois, le logo et la marque sont déposés auprès de l’office allemand des marques à Munich.

À la fondation du Troisième Reich, l’Union est généralement administrée par la Reichsverband für biologisch-dynamische Wirtschaftsweise (Union du Reich pour la méthode de production biodynamique). Interdite puis dissoute en 1941 à l'arrestation de son dirigeant principal, Erhard Bartsch (de), Franz Dreidax reprend la marque en son propre nom pour ne pas qu'elle soit perdue. Toutefois, la pratique de la méthode biodynamique en agriculture n'aura jamais été interdite.

En , le Cercle de Recherche des Fermiers Anthroposophiques est créé, avant d'être renommé en Cercle de Recherche pour l’Agriculture Biodynamique[2], et devient le nouveau propriétaire de la marque Demeter (cession protégée par un acte notarié).

À sa création en , la Demeter-Bund dépose la marque auprès de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) à Genève et assure sa protection au niveau mondial. Jusqu’en , c'est elle qui attribuait aux pays qui en faisaient la demande le droit d’utiliser la marque, date à laquelle, Demeter International est créée. Fondée peu après le congrès de Järna (groupe constitué des dirigeants des fédérations Demeter dans le monde), c'est elle qui détient les droits de propriété intelectuelle sur la marque.

Le , Demeter International et l'International Biodynamic Association fusionnent pour fonder la Fédération Biodynamique Demeter Internationale (FBDI) qui reprend les droits sur le label, les organisations Demeter nationales restant chargées de la certification dans leur pays[3].

Cahier des charges

La certification recouvre aussi bien l'alimentation que des produits cosmétiques, de soins corporels, de l'habillement (vêtements, chaussures), de la maroquinerie, des plantes et des semences[4].

Prérequis

La marque Demeter repose sur le respect de quatre cahiers des charges reconnus pour être très stricts[5] qui s'appuient d'une part sur des principes énoncés par Rudolf Steiner avant sa mort concernant l'agriculture productiviste[6] ainsi que d'autre part sur les travaux d'agronomes partisans de l'anthroposophie, comme Ehrenfried Pfeiffer, Lili Kolisko (de), Alex Podolinsky, Peter Proctor ou François Bouchet[7].

La certification Demeter est présentée comme complémentaire à l'agriculture écologique en Europe et s'en distingue en associant à des pratiques traditionnelles (tisanes, huiles essentielles, rotation des cultures)[7] des pratiques en rapport avec l'anthroposophie, lui valant d'être critiqué[8] - [9]. Ainsi, l'exploitant agricole souhaitant acquérir ce label doit avoir au préalable obtenue celui pour l'agriculture biologique dans son pays (Agriculture biologique en France[10], Bio Suisse en Suisse[11]).

Principes

Le magazine français 60 Millions de consommateurs présente quelques-uns des engagements notables que doivent prendre les exploitants, comme[6]: «vivifier» la terre en employant des préparations naturelles spécifiques, s'appuyer sur les flux énergétiques du sol et des astres, limiter la taille de son exploitation, réutiliser au maximum les sous-produits de l’activité (déchets végétaux et animaux).

Un certain nombre d'usages sont proscrits, comme ceux des intrants chimiques (pesticides) ou tout autre produits dits « néfastes pour les sols », ou encore la culture des OGM[5].

En matière d'élevage, les animaux doivent pouvoir accéder aux pâturages et ne pas être attachées en permanence, les volailles ont interdictions d'être mises en cage[5]. L'alimentation animale conventionnelle est proscrite[5].

La part des ingrĂ©dients certifiĂ©s Demeter dans les produits transformĂ©s doit ĂŞtre d'au moins 90 %, complĂ©tĂ© par 10 % de produits issus de l'agriculture biologique. L'emploi d'additifs tels que les sels nitriques dans la charcuterie et les arĂ´mes, mĂŞmes ceux « naturels », ne sont pas autorisĂ©s dans le cadre du label[5].

En viticulture, là où la législation européenne tolère une concentration de soufre de l'ordre 100 mg/L, avec la certification Demeter, celle-ci ne doit pas dépasser 70 mg/L[12].

Les organismes certifiants

Dans l'Union Européenne

Les productions certifiées Demeter s'inscrivent dans le cadre juridique européen tel que définit par le règlement n ° 834/2007 du Conseil de l'Europe du sur la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques[13] - [14].

La première année, c'est l'organisme membre de la FBDI du pays où est localisée l'exploitation qui se charge de contrôler sa conversion à l'agriculture biodynamique. Ce sont ensuite des certificateurs officiels (Ecocert ou Qualité France, pour la France) qui opèreront des contrôles, sur la base des cahiers des charges Demeter et celui du label bio européen[6].

En Europe

La FBDI est partenaire de l'Alliance Européenne d’Initiatives pour l’Anthroposophie Appliquée-, lobby chargé de défendre les intérêts des anthroposophes auprès des institutions européennes[8].

Drapeau de la Suisse Suisse

En 2016, Demeter a passé des accords de collaboration avec les deux plus grands distributeurs suisses, Coop et Migros[15]. Traditionnellement, les produits Demeter étaient vendus directement à la ferme et dans des magasins spécialisés ; la production des agriculteurs suisses labellisés Demeter dépasse cependant les capacités d'absorption de ces canaux de distribution, ce qui amenait ces agriculteurs à devoir déclasser une partie de leur production et à la vendre à moindre coût[15] - [16].

Drapeau de la Belgique Belgique et Drapeau des Pays-Bas Pays-Bas

La Strichtling Demeter est l'organisation titulaire du label en Belgique flamande et aux Pays-Bas. Le label se retrouve sur des produits cosmétiques et des produits alimentaires[13].

Les membres

En 2020, 7 700 domaines agricoles et entreprises sont conformes à la certification Demeter, dans plus de 60 pays, surtout dans la viticulture (environ 1% des surfaces de vignes cultivées)[9] - [1].

Drapeau de la France France : Entre 2005-2006 et 2021, le nombre d'exploitations agricoles certifiĂ© par Demeter France a doublĂ©, comptant 985 fermes en 2021. Cette mĂŞme annĂ©e, sur les 2,3 millions ha de surfaces agricoles cultivĂ©es en bio en France, 17 000 ha d'entre elles (0,74 %) Ă©taient officiellement cultivĂ©es de façon biodynamique. De plus, deux exploitations françaises certifiĂ©es Demeter sur trois sont des exploitations viticoles, soit 621[7].

Drapeau de la Suisse Suisse : En 2018, Demeter regroupe 300 exploitants certifiĂ©s, pour une surface Ă©valuĂ©e Ă  5 000 hectares. Cette mĂŞme annĂ©e, en suisse romande, la quasi totalitĂ© des 50 vignerons-encaveurs Ă©taient certifiĂ©s Demeter[16].

Controverses

L'agriculture biodynamique que certifie Demeter est controversée pour ses origines anthroposophiques. Ses détracteurs dénoncent un manque de scientificité pour l'usage de ces pratiques dénoncées comme « ésotériques » et « magiques », dans lesquelles certains s'inquiètent de voir « la poussée de l’anti-science » ainsi que « le recul de la raison » derrière cette « promotion » des idées de Steiner qu'ils pensent être indissociables[9] - [7].

Ils remettent aussi en question l'intérêt des techniques promues par le label par rapport à celles de l'agriculture biologique (hors labelisaton inclus)[9]. Olivier de Moor (vigneron en bio à Chablis) affirme que certains usages de la biodynamie ont précédés Steiner et qu'il en applique lui aussi une partie (tisanes, huiles essentielles, rotation des cultures)[10] - [7]. Ils critiquent également un risque de confusion entre l'agriculture biologique et l'agriculture biodynamique, ainsi que celle de leurs labels (Demeter et Biodyvin[17]).

Valéry Rasplus (sociologue) critique les médias qui, selon lui, lissent et banalisent le discours des anthroposophes et certaines de leurs dérives sectaires en mettant en avant la qualité des productions, à défaut d'historiciser et de contextualiser les pratiques biodynamiques[9] - [7]. Aussi, il précise qu'aucune étude ne peut valider les justifications des anthroposophes[9] et qu'il reconnait l'utilité de certains programmes d'études, comme ÉcoVitiSol, mené entre 2019 et 2022 par Jean Masson[18] et Lionel Ranjard[19] - [20] (directeurs de recherches à l'INRAE)[9] - [7] destiné à mesurer l'impact des cultures biodynamiques sur la qualité des sols.

Si pour Aubert de Villaine (cogérant du domaine Romanée-Conti) la biodynamie est « une étape supplémentaire [...] après le passage au bio », les aspects spirituels et cosmiques liés à l'anthroposophie sont décriés comme étant pseudoscientifiques[9].

Le journaliste Jean-Baptiste Malet dénonce, lui, un « druidisme [qui] impose [à l'agriculteur] de manipuler des cornes remplies de bouse et des vessies de cerf et de respecter un calendrier cosmique » ainsi qu'un « mysticisme » imposant de « [respecter] une codification rituelle » comme celles pratiquées par certaines religions[8].

De plus, la méthode de cristallisation sensible utilisée dans le cadre du label comme méthode de test des procédés agroalimentaires fait aussi l'objet de critiques.

Notes et références

  1. (fr + en) Claire Lamine et StĂ©phane Bellon, Transitions vers l'agriculture biologique : Pratiques et accompagnements pour des systèmes innovants, Éducagri Ă©ditions, coll. « Sciences en partage », , 316 p. (DOI 10.3917/edagri.lamin.2009.01 Accès limitĂ©)
  2. (en) « History », sur Demeter international (consulté le )
  3. « Fondation de la Biodynamic Federation Demeter International » Accès libre, sur sektion-landwirtschaft.org, site de la section d'agriculture du Goetheanum (consulté le )
  4. « Demeter », sur Labelinfo.ch, (consulté le )
  5. « AB, Bio cohérence, Demeter… Que valent vraiment les labels bio français ? », sur Madame Figaro, (consulté le )
  6. « A quel label bio se fier ? » Accès libre, 60 Millions de consommateurs, (consulté le )
  7. Ophélie Neiman, « Rudolf Steiner, le philosophe qui a fait germer la biodynamie », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne Accès payant, consulté le )
  8. Jean-Baptiste Malet, « L’anthroposophie, discrète multinationale de l’ésotérisme : Éducation, santé, agriculture, banques : les bonnes affaires des disciples de Rudolf Steiner », Le Monde diplomatique, no 772,‎ , p. 16 - 17 (lire en ligne Accès libre).
  9. Cédric Mathiot, « L'agriculture biodynamique est-elle une pseudo-science ? », CheckNews,‎ (lire en ligne Accès libre)
  10. Hélène Binet, « Le secret de la corne de bouse et autres subtilités de l’agriculture « biodynamique » », magazine de La Ruche qui dit oui !,‎ (lire en ligne Accès libre)
  11. « Le bio et ses labels : comment s'y retrouver ? », Le dauphiné libéré,‎ (lire en ligne Accès libre, consulté le )
  12. « Label Demeter - alimentation » Accès libre, sur écoconso.be, (consulté le )
  13. « Demeter », sur www.labelinfo.be (consulté le )
  14. Règlement (CE) n°  834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif Ă  la production biologique et Ă  l'Ă©tiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n°  2092/91, (prĂ©sentation en ligne, lire en ligne)
  15. « Le label bio Demeter à l'assaut du marché suisse », 24heures.ch,‎ (lire en ligne, consulté le )
  16. Claire Muller, « La biodynamie part à la conquête des campagnes et des étals suisses », Terre & Nature,‎ (lire en ligne, consulté le )
  17. Clemence R, « Le vin biodynamique, c’est quoi ? » Accès libre, sur VinSocialClub.fr, Réseau communautaire autour du vin, (consulté le )
  18. (en) Jean E. Masson, Isabelle Soustre-Gacougnolle, Mireille Perrin et Carine Schmitt, « Transdisciplinary participatory-action-research from questions to actionable knowledge for sustainable viticulture development » (Humanities and Social Sciences Communications), Nature, vol. 8, no 1,‎ , p. 1–9 (ISSN 2662-9992, DOI 10.1057/s41599-020-00693-7 Accès libre, HAL hal-https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03216347)
  19. « Les bactéries et les champignons interagissent 30 fois plus en biodynamie » Accès libre, sur Biodynamie Recherche, (consulté le )
  20. « Lionel RANJARD | French National Institute for Agriculture, Food, and Environment (INRAE), Paris | INRAE | Agroécologie », portail de publications des recherches menées par Lionel Ranjard Accès libre, sur researchgate.net (consulté le )

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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