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Danica Seleskovitch

Danica Seleskovitch est née à Paris le et morte à Cahors le [1]. Interprète de conférence, elle fonda, entre autres, la Théorie interprétative de la traduction.

Danica Seleskovitch
Nom de naissance Nicole Danica Seleskovitch
Naissance
9e arrondissement de Paris
Décès
Cahors
Nationalité Drapeau de la France Française
Domaines Traductologie
Institutions ESIT - Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
Renommée pour Élaboration de la théorie interprétative de la traduction)

Biographie

Danica Seleskovitch[2] est née d’une mère française, issue d’une famille de la bourgeoisie du Nord et d’un père serbe, philosophe, appartenant à une lignée d’intellectuels yougoslaves. Orpheline de mère à 4 ans, Danica Seleskovitch reporte son affection sur son père et sur sa grand-mère maternelle, qui l’élève à partir de ce moment avec son frère aîné Zoran. En 1931, les enfants rejoignent leur père, entre-temps remarié et installé à Berlin où il enseigne à l’université. C’est ainsi qu'elle fait toutes ses études secondaires en Allemagne. En 1939, quand éclate la guerre, elle et les siens rentrent à Belgrade et elle reste dans la capitale yougoslave jusqu’en 1945. Pour échapper au régime communiste instauré par Tito, elle retourne alors à Paris, grâce à une bourse attribuée par le gouvernement français.

Depuis l’enfance, elle maîtrise plusieurs langues : d’abord le français, sa langue maternelle (chez les Seleskovitch, on a toujours parlé français) ; elle parle l’allemand comme s'il s'agissait de sa langue maternelle, et elle connaît le serbo-croate, la langue de son père. Dès l'adolescence, elle acquiert de bonnes notions d’anglais, qu’elle va parfaire lors d’un séjour aux États-Unis à partir de 1950.

Dès son arrivée à Paris, en 1946, elle s'inscrit à la Sorbonne, où elle entreprend simultanément deux licences, d’allemand et d’anglais. Elle s’inscrit ensuite à l’agrégation, mais doit rapidement abandonner, faute d’argent. La bourse du gouvernement français est arrivée à son terme et son père en Yougoslavie n’a pas les moyens de l’aider financièrement. C'est alors qu'elle découvre une formation en interprétation de conférence à HEC, qu'elle suit entre 1949 et 1950.

Son père meurt au printemps 1950. Danica Seleskovitch vient de réussir son diplôme d’interprète de conférence. À ce moment-là, le département d'État des États-Unis organise à Paris des tests de recrutement d’interprètes francophones pour servir lors des missions de productivité aux États-Unis, organisées dans le cadre du Plan Marshall. Ce programme de six semaines était destiné à permettre à des Français d’horizons divers (syndicalistes, employeurs, journalistes, architectes) accompagnés d'interprètes français de découvrir les secrets de la productivité américaine. Au printemps 1950 Danica Seleskovitch embarque pour Washington, accompagnée de sa grand-mère. Elles restent aux États-Unis jusqu’en 1953.

Peu de temps après son retour en France, Danica Seleskovitch repart pour le Luxembourg. Elle est embauchée à la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) mise sur pied par Jean Monnet et Paul-Henri Spaak où l’on a besoin d’interprètes d’allemand. Toujours accompagnée de sa grand-mère, elle reste au Luxembourg jusqu’en 1955. Elle revient ensuite à Paris, où elle restera cette fois définitivement. Interprète de conférence free-lance, elle adhère à l’AIIC (Association internationale des interprètes de conférence) en 1956 et s’engage en tant que secrétaire exécutif de l'AIIC entre 1959 et 1963.

Dès le début de sa carrière d'interprète de conférence, elle réfléchit à son métier et à la façon dont le sens passe en interprétation. À partir des années soixante, elle couche ses réflexions sur le papier. Son premier livre, L’Interprète dans les conférences internationales - Problèmes de langage et de communication est publié en 1968. Langage, langues et mémoire, étude de la prise de note en interprétation consécutive, préfacé par Jean Monnet et issu de sa thèse de doctorat d’État soutenu en 1973, est publié en 1975. En collaboration avec Marianne Lederer, elle élabore la théorie du sens, qui deviendra la théorie interprétative de la traduction (TIT.). Délaissant l'optique linguistique qui a longtemps prévalu dans les études traductologiques, cette théorie, qui s'appuie sur la psychologie et les sciences cognitives (alors à leurs premiers balbutiements), considère que traduire (et bien sûr interpréter), c'est d'abord comprendre, puis restituer dans une autre langue ce qui a été compris en laissant de côté les aspects purement linguistiques de l'original tout en tenant compte de ses effets de style.

À partir des années quatre-vingt, à la direction de l’École supérieure d'interprètes et de traducteurs (ESIT), Université Paris III - Sorbonne Nouvelle), elle cesse progressivement son activité d'interprète pour se consacrer à l’enseignement de l’interprétation et la recherche en traductologie. Au cours de sa carrière d'enseignante et de chercheur, elle a formé à travers le monde d'innombrables disciples, qui continuent à faire vivre ses idées.

Danica Seleskovitch meurt à Cahors le 17 avril 2001 dans sa 80e année.

Le prix Danica Seleskovitch

En 1991, des collègues, amis et anciens élèves de Danica Seleskovitch créent l'Association pour le prix Danica Seleskovitch, rebaptisée en 2011 Association Danica Seleskovitch[3]. L'objet de l'Association, tel qu'il est défini à l'article 2 de ses statuts, est le suivant : « Perpétuer l’œuvre intellectuelle et l'action de Danica Seleskovitch, notamment en décernant un prix Danica Seleskovitch, soit pour services rendus à la profession d'interprète de conférence, soit pour distinguer un travail de recherche original en traductologie. » Le prix Danica Seleskovitch est décerné en règle générale tous les 2 ans par l'Association après sélection par un jury de huit membres.

Liste des lauréats du prix Danica Seleskovitch depuis sa création :

AnnéeLauréat
1992Walter Keiser
1994Philippe SĂ©ro-Guillaume
1996GĂ©rard Ilg
1999Jungwha Sohee Choi
2002Marianne Lederer
2005Jennifer Mackintosh et Christopher Thiéry
2007Renée Van Hoof-Haferkamp
2009Miriam Shlesinger
2012Ingrid Kurz
2014Christiane Driesen
2016 Myriam de Beaulieu
2018 Luigi Luccarelli
2020 Barbara Moser-Mercer

Notes et références

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. Anne-Marie Widlund-Fantini, Danica Seleskovitch. Interprète et témoin du XXe siècle, éditions L'Âge d'Homme, 2007
  3. Site officiel de l'Association Danica Seleskovitch

Publications

Ouvrages

  • 1968 L’interprète dans les confĂ©rences internationales, problèmes de langage et de communication, Paris, Minard Lettres Modernes, 262 p., 2e Ă©dition 1983. Traduit en anglais, allemand, chinois, corĂ©en, japonais, serbe.
  • 1975 Langage, Langues et mĂ©moire, Ă©tude de la prise de notes en interprĂ©tation consĂ©cutive, (prĂ©face de Jean Monnet), Paris, Minard Lettres Modernes, Paris, 273 p.
  • 1984 InterprĂ©ter pour traduire, en collaboration avec Marianne Lederer, Didier Érudition, Paris, 312 p, 4e Ă©dition, 2001. Traduit en arabe, chinois, gĂ©orgien.
  • 1989 PĂ©dagogie raisonnĂ©e de l’interprĂ©tation, en collaboration avec Marianne Lederer, coĂ©dition Office des publications officielles des communautĂ©s europĂ©ennes et Didier Érudition, Luxembourg-Paris, 282 p. 2e Ă©dition revue et augmentĂ©e, 2002. Traduit en anglais, chinois, serbe.

Principaux articles

  • 1974 "Zur Theorie des Dolmetschens", in Kapp V. (ed.), Ăśbersetzer und Dolmetscher, Heidelberg, Quelle und Meyer, 2e Ă©dition 1983, p. 37–49.
  • 1976 "Interpretation, a Psychological Approach to Translation", in Brislin R.W. (ed) Translation: Applications and Research, New York, Gardner Press, p. 92–116.
  • 1976 "Traduire, de l’expĂ©rience aux concepts", Études de Linguistique AppliquĂ©e (ELA), no 24, Paris, Didier., p. 64–91. Traduit en anglais et en espagnol.
  • 1977 "Take care of the sense and the sounds will take care of themselves or Why Interpreting is not tantamount to Translating Languages", The Incorporated Linguist, London, Vol. 16, p. 27–33.
  • 1978 "Language and Cognition", in David Gerver and Sinaiko H. Wallace (eds.), Language Interpretation and Communication, New York, Plenum Press, p. 333–342.
  • 1980 "Pour une thĂ©orie de la traduction inspirĂ©e de sa pratique", MontrĂ©al, META, Vol. 25, no 4, Presses de l’UniversitĂ© de MontrĂ©al, p. 401–408.
  • 1981 "Recherche universitaire et thĂ©orie interprĂ©tative de la traduction", MontrĂ©al, META, Vol. 26, no 3, Presses de l’UniversitĂ© de MontrĂ©al, p. 304–308.
  • 1982 "Impromptu Speech and Oral Translation", in Enkvist N.E. (ed.), Impromptu Speech: A symposium, Abo, Research Institute of the Abo Akademi Foundation, p. 241-254.
  • 1982 "Traduction et comparatisme", in Contrastes (hors-sĂ©rie A1), Paris, p. 15–29.
  • 1982 "La comprĂ©hension d’une pensĂ©e Ă  travers son expression", Multilingua, Amsterdam, Mouton, 1.1.1982, p. 33–41.
  • 1985 "InterprĂ©tation ou interprĂ©tariat", META, Vol.30, no 1, MontrĂ©al, Presses de l’UniversitĂ© de MontrĂ©al, p. 19–24.
  • 1985 "Les notions de signifiant/signifiĂ©, de concept et de sens en interprĂ©tation" in H. BĂĽhler (ed.), Actes du 10e Congrès Mondial de la FIT, Vienne, Wilhelm BraumĂĽller, p. 178–186.
  • 1985 "De la possibilitĂ© de traduire", ConfĂ©rence plĂ©nière, Actes du Congrès 1984 de l’Association internationale de linguistique appliquĂ©e (AILA) Vol.V., p. 1781–1796.
  • 1986 "Translation: Corresponding Words or Equivalent Texts?" in TexTconText, Heidelberg, Julius Groos Verlag, p. 128–140.
  • 1987 "Traduction et crĂ©ativitĂ©" in Études de lexicologie, lexicographie et stylistique offertes en hommage Ă  Georges MatorĂ©, Paris, Publications de la Sorbonne, p. 263–276.. Traduit en hongrois.
  • 1987 "Context-free Language and Sense in Translation", in Wolfgang Lörscher et Rainer Schulze (eds.), Perspectives on Language in Performance, Gunter Narr Verlag, TĂĽbingen, p. 441–446.
  • 1987 "La traduction interprĂ©tative" in Palimpsestes no 1, Paris, Publication de la Sorbonne Nouvelle, p. 41–50.
  • 1988 "Quelques phĂ©nomènes langagiers vus Ă  travers l’interprĂ©tation simultanĂ©e", in Hommage Ă  Bernard Pottier, Paris, Klincksieck, p. 709–717.
  • 1990 "Quelques rĂ©flexions sur la traductologie française (1975-1986)", Les Sciences du langage en France au XXe siècle, supplĂ©ment, SELAF, Paris, p. 479–489.
  • 1990 "La traduction des hypĂ©ronymes et autres termes de grande extension", META, Vol. 5, MontrĂ©al, Presses de l’UniversitĂ© de MontrĂ©al, p. 91–95.
  • 1991 "Fundamentals of the Interpretive Theory of Translation" in Expanding Horizons, J. Plant-Moeller (ed.), Washington, RID, p. 1–13.
  • 1991 "De la pratique de l'interprĂ©tation Ă  la traductologie", in Lederer Marianne et IsraĂ«l Fortunato (eds) La LibertĂ© en traduction, Paris, Didier Erudition, p. 289–299.
  • 1992 "Von der Praxis zur Theorie", in Salevsky Heidemarie. (ed.) Wissenschaftliche Grundlagen der Sprachmittlung, Frankfurt/Main, Peter Lang, p. 38–54.
  • 1995 "Interpretation and Verbal Communication", in Ăśbersetzungswissenchaft im Umbruch, TĂĽbingen, GĂĽnter Narr Verlag, p. 301 Ă  306.
  • 1998 "Le dilemme terminologique de la retraduction", in Traduire no 175 - 1/98, p. 17–28.
  • 1999 "The Teaching of Conference Interpretation in the Course of the Last 50 Years", in B.Moser-Mercer (ed.), Interpreting Vol. 4 (1/2), John Benjamins Publishing Co., p. 55–66.
  • 2004 "The Practice and Theory of Consecutive and Simultaneous Interpretation", in An International Encyclopaedia of Translation Studies, Vol.I, Berlin, New York, Walter de Gruyter, p. 779–789.

Bibliographie

  • Études traductologiques : en hommage Ă  Danica Seleskovitch, textes rĂ©unis par Marianne Lederer, Lettres modernes Minard, 1990.
  • Fortunato IsraĂ«l et Marianne Lederer (eds) La ThĂ©orie interprĂ©tative de la traduction (vol. I : Genèse et dĂ©veloppement, vol.II : Convergences, mises en perspectives, Vol.III : De la formation... Ă  la pratique professionnelle), Lettres modernes Minard, 2005.
  • Anne-Marie Widlund-Fantini, Danica Seleskovitch - Interprète et tĂ©moin du XXe siècle, Éditions L'Ă‚ge d'Homme, 2007 [prĂ©sentation en ligne].

Liens externes

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