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Cortes de Valladolid (1295)

Les Cortes de Valladolid de 1295 sont une session des Cortes de Castille tenue pendant l’étĂ© 1295 sur convocation de la reine MarĂ­a de Molina, rĂ©gente du royaume de Castille et LĂ©on, au nom de son fils le jeune roi Ferdinand.

María de Molina présentant son fils Fernando IV aux Cortes de Valladolid en 1295, tableau d'Antonio Gisbert Pérez, 1863, CongrÚs des députés d'Espagne

Contexte

Cette assemblĂ©e survient dans une pĂ©riode d'instabilitĂ© politique : entre 1282 et 1369, le royaume est plusieurs fois confrontĂ© Ă  des crises de succession et Ă  des rĂ©voltes de la haute noblesse. La rĂ©gente MarĂ­a de Molina devra en dĂ©nouer plusieurs pour le compte de son fils Ferdinand IV et plus tard de son petit-fils Alphonse XI[1]. Face Ă  l'insoumission des infants et des ricos-hombres (grands seigneurs, futurs grands d’Espagne), la royautĂ© s'appuie de plus en plus sur les conseils communaux (consejos)[2] reprĂ©sentant la classe des caballeros (chevaliers ou cavaliers), roturiers et citadins Ă  l'origine mais de plus en plus assimilĂ©s Ă  la petite noblesse (hidalgos)[3]. Les Cortes, assemblĂ©es de reprĂ©sentants de la haute noblesse, du clergĂ© et des consejos, sont rĂ©unies de façon irrĂ©guliĂšre (23 fois sous le rĂšgne d'Alphonse X) dans diffĂ©rentes villes afin de voter les impĂŽts et autres rĂ©formes. Elles permettent aux Ă©lites urbaines de conseiller le roi et de faire entendre leurs dolĂ©ances mĂȘme si leur avis n'a pas valeur d'obligation[4]. Entre 1282 et 1295, l'action des consejos est complĂ©tĂ©e par la formation des hermandades, ligues ou confrĂ©ries urbaines destinĂ©es Ă  maintenir l'ordre et empĂȘcher les abus[5].

Selon le médiéviste Georges Martin, le cycle poétique des Enfances de Rodrigue (es), récit romancé de la jeunesse de Rodrigo Díaz de Vivar, le futur Cid, pourrait remonter au rÚgne de Ferdinand IV et traduire l'opposition sociale entre l'orgueil de la haute noblesse, représentée par le comte de Gormaz, et les valeurs de la chevalerie incarnées par Rodrigue[6].

Une succession difficile

À la mort du roi Sanche IV de Castille, le , son fils Ferdinand n’a que huit ans et sa lĂ©gitimitĂ© est contestĂ©e car sa mĂšre, MarĂ­a de Molina, Ă©tait cousine du roi Sanche Ă  un degrĂ© prohibĂ© : il est donc prĂ©sentĂ© comme bĂątard par ses cousins Jean de Castille (es) et Alphonse de la Cerda qui revendiquent le trĂŽne. Le , cependant, le lendemain de la mort de son pĂšre, Ferdinand est proclamĂ© roi dans la cathĂ©drale de TolĂšde. Sa mĂšre, aprĂšs une pĂ©riode de deuil, assure la rĂ©gence.

Le royaume est menacĂ© car Jean de Castille est soutenu par le roi Denis de Portugal, Alphonse de la Cerda par le roi de France Philippe IV le Bel et par le roi Jacques II d'Aragon. En outre, l’infant Henri de Castille le SĂ©nateur, oncle de Sanche IV et dernier fils survivant du roi Alphonse X de Castille, rĂ©clame la rĂ©gence pour lui-mĂȘme.

Assemblée royale, miniature de l'Histoire de l'Espagne du roi Alphonse X de Castille, XIIIe siÚcle.

La reine dĂ©cide de chercher le soutien de la noblesse et des villes de Castille en convoquant les Cortes. Avant leur rĂ©union, elle prend une sĂ©rie de mesures pour dĂ©samorcer l’opposition. Elle abolit la sisa (es), taxe sur les marchandises instaurĂ©e par Sanche IV en 1293. Elle reconnaĂźt la possession de la seigneurie de Biscaye Ă  Diego Lopez V de Haro, sauf les villes d’Orduña et Balmaseda qu’elle lui demande de restituer Ă  sa sƓur Maria Diaz de Haro, Ă©pouse de Jean de Castille. Enfin, elle accorde Ă  Henri de Castille les titres de tuteur du jeune roi et gardien des deux royaumes, elle-mĂȘme se rĂ©servant la garde et l’éducation du garçon.

Les Cortes

Les dĂ©putĂ©s de Castille, LeĂłn, Galice, Asturies, EstrĂ©madure et Andalousie et de l’archevĂȘchĂ© de TolĂšde se rĂ©unissent Ă  la fin de juillet ou au dĂ©but d’aoĂ»t Ă  Valladolid. L’évĂȘchĂ© de JaĂ©n n’envoie pas de reprĂ©sentants car il est engagĂ© dans une guerre contre le royaume de Grenade.

Au dĂ©but de la session, les dĂ©putĂ©s de l’archevĂȘchĂ© de TolĂšde, de l’évĂȘchĂ© de Cuenca et des villes de SĂ©govie et Ávila refusent de reconnaĂźtre l’infant Henri comme tuteur du roi. La reine parvient Ă  les en dissuader et obtient que tous les dĂ©putĂ©s rendent hommage Ă  Ferdinand IV et reconnaissent Henri comme tuteur.

Les Cortes, les premiĂšres du rĂšgne de Ferdinand IV, se terminent par la proclamation de deux grandes ordonnances, l’une de portĂ©e gĂ©nĂ©rale, l’autre sur les questions ecclĂ©siastiques.

Le texte de ces ordonnances indique qu’elles ont Ă©tĂ© rĂ©solues en prĂ©sence des prĂ©lats, des magnats, des ricos-hombres et des grands maĂźtres des ordres militaires. Mais, selon la CrĂłnica de Fernando IV, l’archevĂȘque de TolĂšde, Gonzalo GarcĂ­a Gudiel, rĂ©digera une protestation devant notaire affirmant qu’elles n’ont Ă©tĂ© dĂ©battues que devant les reprĂ©sentants des villes, ceux de la noblesse et du clergĂ© ayant Ă©tĂ© exclus des sĂ©ances.

Pour conclure, selon l’usage des assemblĂ©es royales, Ferdinand promet de maintenir ce qui a Ă©tĂ© rĂ©solu et demande Ă  son oncle Henri de prĂȘter serment en son nom sur les Évangiles.

Ordonnances

Ordonnance générale

La campagne espagnole vue du chĂąteau de Gormaz, province de Soria

Elle comprend les dispositions suivantes :

  • Ceux qui ont occupĂ© des postes sous le roi Sanche IV devront rendre compte de leurs actions.
  • Les hautes charges de l'administration doivent rester ouvertes aux gens de bien des villes et des citĂ©s.
  • Les offices de la maison royale devront ĂȘtre attribuĂ©s Ă  des gens de bien.
  • La collecte des impĂŽts ne doit plus ĂȘtre confiĂ©e aux Juifs mais aux gens de bien.
  • Les terres et domaines qui ont Ă©tĂ© confisquĂ©s par les prĂ©cĂ©dents monarques devront ĂȘtre restituĂ©s aux villes.
  • Les municipios (communes) ne pourront ĂȘtre cĂ©dĂ©s aux infants, infantes, ricos-hombres, ricas-hembras ou magnats.
  • Les forteresses et chĂąteaux seront sous la garde des chevaliers et hommes de bien.
  • Les hermandades urbaines seront confirmĂ©es et approuvĂ©es.
  • Quand le roi sĂ©journera dans une localitĂ©, il devra payer sa dĂ©pense, les habitants seront affranchis de l'impĂŽt du yantar (obligation de nourrir le roi ou les princes de passage), et les frais de ce type causĂ©s par le dĂ©funt roi Sanche ou par la reine MarĂ­a de Molina seront remboursĂ©s par le nouveau roi.
  • Les merinos mayores (fonction d'administration territoriale correspondant Ă  l'adelantado) de Castille, LeĂłn et Galice ne devront plus ĂȘtre confiĂ©s Ă  des ricos-hombres mais Ă  des personnes d'une intĂ©gritĂ© prouvĂ©e et aimant la justice.

Ordonnance ecclésiastique

Sarcophage de la reine MarĂ­a de Molina au monastĂšre de las Huelgas Reales (es) Ă  Valladolid, 1321.

La reine et l'infant Henri, soucieux de s'assurer le soutien du clergé, confirment les privilÚges des églises d'Ávila, Palencia, Valladolid, Burgos, Badajoz, Tuy, Astorga, Osma et de plusieurs collégiales et monastÚres (es).

Par la mĂȘme ordonnance, la reine et Henri promettent de mettre fin aux abus des agents royaux concernant les siĂšges vacants, les Ă©lections, les contributions fiscales et les fueros ecclĂ©siastiques et s'efforcent de rassurer le clergĂ© sur les atteintes Ă  ses privilĂšges commises par les hermandades urbaines.

Sources et bibliographie

  • (es) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en espagnol intitulĂ© « Cortes de Valladolid (1295) » (voir la liste des auteurs) dans sa version du .
  • GonzĂĄlez MĂ­nguez, CĂ©sar, Fernando IV (1295-1312), Volumen IV de la ColecciĂłn Corona de España: Serie Reyes de Castilla y LeĂłn (1ÂȘ ediciĂłn), DiputaciĂłn Provincial de Palencia y Editorial La Olmeda S. L., 1995.
  • Menjot, Denis, Les Espagnes mĂ©diĂ©vales, 409-1474, Hachette, 1996.

Références

  1. Menjot, Denis, Les Espagnes médiévales, 409-1474, Hachette, 1996, p.178-179.
  2. Menjot, Denis, Les Espagnes médiévales, 409-1474, Hachette, 1996, p.122-124.
  3. Menjot, Denis, Les Espagnes médiévales, 409-1474, Hachette, 1996, p.143-144.
  4. Menjot, Denis, Les Espagnes médiévales, 409-1474, Hachette, 1996, p.108.
  5. Menjot, Denis, Les Espagnes médiévales, 409-1474, Hachette, 1996, p.178.
  6. Martin, Georges, Les Juges de Castille, Mentalités et discours historique dans l'Espagne médiévale, Klincksieck, Paris, 1991, p.577-5778 .
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