Check-list
Une check-list, en français liste de vĂ©rifications, est un document construit dans le but de ne pas oublier les Ă©tapes nĂ©cessaires dâune procĂ©dure pour quâelle se dĂ©roule avec le maximum de sĂ©curitĂ©. Cette opĂ©ration peut se dĂ©rouler Ă voix haute et/ou en cochant une liste Ă©crite de procĂ©dure. Elle est utilisĂ©e en particulier dans les domaines de l'aĂ©ronautique et de la santĂ©.
Terminologie
En anglais, check-list ou checklist est un terme général. Sa définition dans le Webster's New World Dictionary of American English (1988) est : « a list of things, names, etc. to be checked off and referred to for verifying, comparing, ordering, etc. » (liste de choses, de noms, etc., à marquer d'une coche et auxquels se reporter afin de vérifier, comparer, ordonner, etc.). Le Comprehensive Dictionary of Engineering and Technology (sens anglais-français) (1984) donne les équivalences suivantes :
- check list (aero) : liste f de vérification (ELF),
- check list (ind. eng) : liste f de recherche,
- check listing : pointage.
Selon le linguiste Jean Tournier, check-list / checklist est « un emprunt partiel intégré mais inutile ». Le français use également de l'expression « bordereau de contrÎle » et « le J.O. (09-11-76) recommande liste de vérification » (p. 316)[1] .
Dans le domaine de l'aviation
En aviation, la check-list est une procĂ©dure de sĂ©curitĂ©, consistant Ă vĂ©rifier mĂ©thodiquement si lâappareil est en Ă©tat d'effectuer la phase de vol suivante. On vĂ©rifie, par exemple, si les composants sont en bon Ă©tat, si les critĂšres de lâĂ©tape suivante sont remplis et si les commandes sont rĂ©glĂ©es aux bons endroits. On vĂ©rifie aussi la puissance des gaz, les volets, le train dâatterrissage, lâautomanette, le pilote automatique, la distance par rapport Ă un lieu prĂ©cis, les phares et dâautres Ă©lĂ©ments qui diffĂšrent selon le type et le modĂšle de lâavion.
Le vol 5022 Spanair sâest Ă©crasĂ© au dĂ©collage Ă Madrid en 2008 Ă cause dâune checklist non effectuĂ©e.
Types
- roulage
- avant-décollage
- aprÚs-décollage
- croisiĂšre
- descente
- approche
- atterrissage
- aprĂšs-atterrissage
Exemples
AprÚs-décollage
- Train : rentré verrouillé
- Pompe : off
- Phare : off
- Volets : rentrés
- ParamÚtres moteur : normaux / affichés
Atterrissage
- Train : sorti verrouillé : 3 vertes
- Pompe : on
- Phare : on
- Volets : 10°
Dans le domaine de la santé
Sécurité du patient
La sĂ©curitĂ© du patient a pour objectif de rĂ©duire le nombre dâĂ©vĂšnements indĂ©sirables liĂ© aux soins. On appelle Ă©vĂšnement indĂ©sirable tout Ă©vĂšnement inattendu qui perturbe ou retarde le processus de soin, ou influe directement sur la santĂ© du patient. Ces Ă©vĂšnements peuvent ĂȘtre plus ou moins graves (Ă©vĂ©nement porteur de risque - EPR - ou Ă©vĂ©nement indĂ©sirable grave - EIG) et plus ou moins Ă©vitables.
Le rapport de lâAcadĂ©mie de MĂ©decine AmĂ©ricaine (IOM) « To err is Human â Building a safer health system » a dĂ©montrĂ© que la cause de ces Ă©vĂšnements est rarement liĂ©e au manque de connaissance des professionnels mais le plus souvent aux dĂ©fauts dâorganisation, de manques de vĂ©rification, coordination, communication, bref liĂ©s Ă un manque de culture commune de sĂ©curitĂ©[2].
Ces Ă©lĂ©ments peuvent ĂȘtre prĂ©venus par la mise en Ćuvre dâune check-list adaptĂ©e. Le monde hospitalier en gĂ©nĂ©ral, et les quartiers opĂ©ratoires en particulier, peuvent apprendre beaucoup de l'industrie aĂ©ronautique qui recourra au concept de check-list dĂ©jĂ en 1935 aprĂšs le crash du prototype du bombardier B19 de Boeing Ă la fin d'une dĂ©monstration. Le concept de check-list fut entiĂšrement rĂ©Ă©valuĂ© et adaptĂ© en 1977 aprĂšs la catastrophe de Tenerife oĂč un Boeing 747 de la Pan Am entra en collision sur la piste avec un 747 de la KLM[2].
Une Ă©tude a Ă©tĂ© conduite en 2007 et 2008 sur 3 733 patients devant subir une chirurgie non cardiaque dans 8 hĂŽpitaux de 8 pays[3]. 3 955 des patients ont bĂ©nĂ©ficiĂ© dâune check-list et ont Ă©tĂ© suivis un mois aprĂšs lâopĂ©ration.
LâĂ©tude publiĂ©e en 2009 a conclu que dans le cas dâune opĂ©ration chirurgicale, que ce soit dans un hĂŽpital moderne de pays riche, ou dans un pays dit « pauvre », la vĂ©rification systĂ©matique et Ă voix haute de 19 points (recommandĂ©s par les guides de bonnes pratiques et lâOMS) pendant et aprĂšs lâopĂ©ration, rĂ©duisait de 36 % le risque de complication (dont la mort) dans le mois suivant lâopĂ©ration.
Cette liste inclut des items aussi simples que : vĂ©rifier lâidentitĂ© du patient, vĂ©rifier quâil a bien reçu un traitement antibiotique prĂ©ventif, recompter les instruments aprĂšs lâopĂ©ration. Sans check-list, 1,5 % des opĂ©rĂ©s dĂ©cĂšdent dans les 30 jours suivant lâopĂ©ration, et avec cette procĂ©dure de contrĂŽle ce taux nâest plus que de 0,8 % (P = 0,003). Le taux de complications non mortelles est passĂ© de 11,0 % des patients Ă 7,0 % aprĂšs lâintroduction de la liste de contrĂŽle (P <0,001)[4]. Le temps qui peut sembler perdu au moment de lâopĂ©ration est largement rĂ©cupĂ©rĂ© par la diminution des Ă©checs et des rĂ©cidives. Sachant quâen 2008, on estimait (selon les auteurs de cette Ă©tude) que 234 millions dâopĂ©rations chirurgicales Ă©taient rĂ©alisĂ©es chaque annĂ©e, le nombre de personnes sauvĂ©es ou mieux soignĂ©es ne serait pas nĂ©gligeable si cette pratique Ă©tait gĂ©nĂ©ralisĂ©e ou obligatoire.
Une procĂ©dure similaire de diagnostic diffĂ©rentiel poussĂ© et mĂ©thodique en amont, permettrait peut-ĂȘtre dâencore amĂ©liorer le service aux patients.
En France, oĂč 6,5 millions dâinterventions chirurgicales sont rĂ©alisĂ©es chaque annĂ©e, on estime que 60 000 Ă 95 000 Ă©vĂ©nements indĂ©sirables graves (EIG) surviendraient dans la pĂ©riode pĂ©ri opĂ©ratoire, dont prĂšs de la moitiĂ© sont considĂ©rĂ©s comme Ă©vitables[5] : erreurs de patient, erreurs de site opĂ©ratoire, oublis de corps Ă©tranger. Dâautres Ă©vĂšnements plus frĂ©quents nĂ©cessitent Ă©galement dâĂȘtre prĂ©venus : dĂ©faut de mise en Ćuvre de lâantibioprophylaxie, infection du site opĂ©ratoire, insuffisance dâidentification de prĂ©lĂšvement ou dĂ©faut de coordination dans la prise en charge des soins post opĂ©ratoires. Ces Ă©lĂ©ments peuvent ĂȘtre prĂ©venus par la mise en Ćuvre dâune check-list adaptĂ©e.
Check-list de lâOMS[6] version française
LâamĂ©lioration de la sĂ©curitĂ© du patient est un axe prioritaire pour tous : patients, institutionnels et professionnels. La notion de sĂ©curitĂ©, enjeu Ă©conomique[7] et social, implique tant au niveau national quâĂ lâĂ©chelon de chaque Ă©tablissement la mise en place de programmes, protocoles ou dĂ©marches, dont la check-list « SĂ©curitĂ© du patient au bloc opĂ©ratoire ».
Rédacteurs de la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire »
En France, les collĂšges professionnels et organismes agrĂ©Ă©s de chirurgie et dâanesthĂ©sie, les reprĂ©sentations professionnelles des personnels infirmiers travaillant au bloc opĂ©ratoires ainsi que les fĂ©dĂ©rations dâĂ©tablissements hospitaliers ont participĂ© Ă la rĂ©daction de la check-list actuelle « SĂ©curitĂ© du patient au bloc opĂ©ratoire » ; les patients Ă©taient reprĂ©sentĂ©s par le LIEN, membre du collectif inter associatif sur la santĂ© (CISS).
AprĂšs une premiĂšre version parue le , la version actuelle de la check-list « SĂ©curitĂ© du patient au bloc opĂ©ratoire » retient 11 types dâĂ©lĂ©ments Ă vĂ©rifier, avant induction, avant lâintervention, avant la sortie du patient du bloc opĂ©ratoire. La Check-list « sĂ©curitĂ© du patient au bloc opĂ©ratoire » et son mode dâemploi sont diffusĂ©s en France par la Haute AutoritĂ© de SantĂ©[8]
Responsabilité de la direction et de la CME
Le dispositif de gestion des risques cliniques dans le bloc opĂ©ratoire doit comporter explicitement la mise en Ćuvre de programmes et dĂ©marches spĂ©cifiques type check-list.
La responsabilitĂ© de la Direction et des instances, notamment mĂ©dicales (CME[9], conseil de bloc), est dâaccompagner et, le cas Ă©chĂ©ant, dâadapter cette dĂ©marche check-list en fonction dâobjectifs spĂ©cifiques, ainsi que de vĂ©rifier le suivi de ces programmes collaboratifs et en particulier leur appropriation par les professionnels.
Notes et références
- Jean Tournier, ââLes mots anglais du françaisââ, Belin, 1998, p. 316, article « check-list ».
- Michel L. « The World Health Organisation Surgical Checklist. A surgeon's viewpoint » Acta Chirurgica 2010;110:423-431.
- Les hÎpitaux concernés étaient à Toronto, Canada, New Delhi, Inde ; Amman, en Jordanie, Auckland, Nouvelle-Zélande, Manille, Philippines ; Ifakara, en Tanzanie, Londres, Angleterre, et de Seattle, WA).
- (en) A.B. Haynes et al. « A Surgical Safety Checklist to Reduce Morbidity and Mortality in a Global Population » N Engl J Med. 2009;360:491-9.
- EnquĂȘte Nationale sur les Ă©vĂ©nements indĂ©sirables liĂ©s aux soins, ENEIS 2005.
- Une chirurgie plus sure pour épargner des vies, Alliance mondiale pour la sécurité des patients, OMS, 2008.
- Le coût de la qualité et de la non qualité, ANAES, 2004.
- La Check-list « Sécurité du Patient au Bloc opératoire » Haute Autorité de Santé, octobre 2011.
- Le rĂŽle des CME dans la mise en place de la gestion des risques, a Ă©tĂ© prĂ©cisĂ© par les dĂ©crets no 2010-439 du 30 avril 2010 relatif Ă la commission mĂ©dicale dâĂ©tablissement dans les Ă©tablissements publics de santĂ© et no 2010-1408 du 12 novembre 2010 relatif Ă la lutte contre les Ă©vĂ©nements indĂ©sirables associĂ©s aux soins dans les Ă©tablissements de santĂ©.
Voir aussi
Bibliographie
- (en) Royaume-Uni Haynes A., Weiser T., Berry, W., Lipsitz S., Breizat, Dellinger, Herbosa, Joseph, S., Kibatala, P., Lapitan, C., Merry, A., Moorthy, K., Richard K, Taylor B., A. Gawande, A. A Surgical Safety Checklist to Reduce Morbidity and Mortality in a Global Population, N Engl J Med 2009;360:491â9
- (en) Royaume-Uni ElBardissi A., Regenbogen S., Greenberg C.; Berry W., Arriaga, A; Moorman, D.; Retik, A.; Warshaw, A., Zinner, M., Gawande, Atul Communication Practices on 4 Harvard Surgical Services: A Surgical Safety Collaborative Annals of surgery, 2009, 250(6):861â865
- (en) Ătats-Unis Neily J., Mills P., YoungâXu Y., Carney, B., West P., Berger D., Mazzia D., Paull D., Bagian J. Association Between Implementation of a Medical Team Training Program and Surgical Mortality, JAMA, 2010;304(15):1693â1700
- (en) Pays-Bas De Vries, E., Prins H., Crolla R., and the SURPASS group, Effect of a Comprehensive Surgical Safety System on Patient Outcomes, N Eng J. Med 2010, 363:1928â1937
Vulgarisation
- (en) Ătats-Unis Atul Gawande: How do we heal medicine? ConfĂ©rence TED http://www.ted.com/talks/atul_gawande_how_do_we_heal_medicine.html