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Caméra Technicolor

La camĂ©ra Technicolor est une camĂ©ra argentique 35 mm, fabriquĂ©e par Mitchell Camera Corporation, pour utiliser le procĂ©dĂ© Technicolor de prise de vues noir et blanc Ă  sĂ©lection tri-chrome (3 pellicules, deux panchromatiques pour le rouge et le vert ainsi qu'une orthochromatique pour le bleu) chargĂ©es en mĂŞme temps dans la camĂ©ra). Le prix de la camĂ©ra et sa triple consommation de mĂ©trage, bien qu’en noir et blanc, limita son utilisation de 1935 Ă  1953 en tant que matĂ©riel de prise de vues. Le tirage des copies Technicolor — qu’on pourrait qualifier « d’imprimerie » — restera en usage beaucoup plus longtemps[1].

TECHNICOLOR
Image associée à la caméra
Caméra Technicolor trichrome (1935-1953)

Marque Technicolor Motion Picture Corporation
Visée Viseur reflex et viseur clair
Format Format 35 mm
Chargement Magasin coplanaire Ă  3 galettes de 300 m de pellicule noir et blanc

Histoire

Synthèse soustractive des couleurs.

Trois associĂ©s amĂ©ricains, tous trois ingĂ©nieurs, crĂ©ent en 1915 la sociĂ©tĂ© Technicolor Motion Picture Corporation : Herbert Kalmus, Daniel Frost Comstock et W. Burton Westcott. Ils centrent d’abord leurs recherches sur un brevet Comstock et Westcott, qui est presque une contrefaçon du procĂ©dĂ© bi-chrome KinĂ©macolor, inventĂ© par le Britannique George Albert Smith (c’est Ă  lui que l’on doit les premiers gros plans du cinĂ©ma et le premier montage[2]) et l’AmĂ©ricain Charles Urban. De cette Ă©tude ne sort qu’un court-mĂ©trage en 1917 : The Gulf Between, dont il ne reste que des fragments. Ce procĂ©dĂ© bi-chrome est basĂ© sur une double impression de photogrammes noir et blanc pris en mĂŞme temps grâce Ă  un prisme qui divise l’image filmĂ©e en deux flux : l’un d’eux passe au travers d'un filtre rouge et impressionne les composantes bleues et vertes de l'image. Le deuxième flux passe au travers d'un filtre bleu et impressionne les composantes rouges de l'image. Les deux images sont disposĂ©es l'une au-dessus de l'autre sur un film 35 mm qui dĂ©file Ă  deux fois la cadence normale de l’époque du muet, soit 32 images par seconde mais prend Ă  chaque fois deux photogrammes. Il est tirĂ© un positif dans lequel les images alternent : une image du premier flux (l’image du second flux correspondante est supprimĂ©e), une image du second flux (l’image du premier flux correspondante est supprimĂ©e), etc. Une image sur deux Ă©tant « oubliĂ©e », la cadence est ainsi diminuĂ©e de moitiĂ© et rejoint la normale (16 images par seconde). Le « tri » chromatique est effectuĂ© Ă  la projection, par l’alternance de filtres adĂ©quats disposĂ©s entre les pales de l’obturateur de l’appareil de projection (rouge, vert, rouge, vert, etc) spĂ©cialement construit pour cela. Cependant, la qualitĂ© laisse Ă  dĂ©sirer. Herbert Kalmus prĂ©sente alors un nouveau procĂ©dĂ© dĂ©but 1920, qui relève de la synthèse soustractive : on colle dos Ă  dos deux positifs qu’on a prĂ©alablement virĂ©s en couleur (rouge et vert). Ce procĂ©dĂ© prĂ©sente lui aussi des imperfections, mais est utilisĂ© par plusieurs longs-mĂ©trages : The Toll of the Sea (1922), Wanderer of the Wasteland (1923) et surtout Le Pirate noir (1926), avec Douglas Fairbanks, qui est un Ă©norme succès. L’inconvĂ©nient majeur du procĂ©dĂ© est sa fragilitĂ©, les deux couches de pellicule collĂ©es ayant tendance Ă  gondoler et Ă  Ă©voluer chimiquement. Ainsi, Le Vagabond du dĂ©sert s’est autodĂ©truit au fil du temps. Enfin, après une autre version du Technicolor, qui ne rencontre pas la faveur du public, le procĂ©dĂ© dĂ©finitif trichrome est mis au point.

Description de la caméra

1935 : derrière le réalisateur de Becky Sharp, Rouben Mamoulian, et sa vedette Frances Dee, on aperçoit la masse énorme de la caméra Technicolor dans son blimp (caisson insonorisé).
Caméra TECHNICOLOR trichrome ouverte.

La camĂ©ra est une version spĂ©cifique de la camĂ©ra Mitchell BNC et reprend donc des mĂ©canismes qui ont fait leurs preuves. Mais les dĂ©biteurs dentĂ©s sont triplĂ©s et comptent ainsi 6 rangĂ©es de dents afin d’entraĂ®ner en continu 3 galettes de pellicule au format 35 mm noir et blanc. Seulement deux mĂ©canismes intermittents s’activent dans cette camĂ©ra. En effet, si l’une des pellicules se prĂ©sente frontalement face Ă  l’objectif unique, et nĂ©cessite, en plus d’un couloir du film individuel et d’une fenĂŞtre de cadrage du film, un système sĂ©parĂ© de griffes et de contre-griffes, les deux autres pellicules sont chargĂ©es dos Ă  dos et elles ont en commun un seul couloir, une seule fenĂŞtre et les mĂŞmes griffes et contre-griffes.

Cette étrange répartition dédoublée ou triplée s’explique par la partie optique de la caméra. L’image produite par son objectif traverse un bloc constitué de deux prismes de haute qualité, collés sur l’une de leurs faces. Cet assemblage est complété sur ces deux faces collées par une couche très fine d’or pur (plus tard, l’argent sera utilisé à sa place). L’image, en pénétrant dans ce bloc, d’une part le traverse et d’autre part est déviée à 90° par la couche d'or qui fait office de miroir semi-réfléchissant. Le premier flux, qui va tout droit, et selon la même quantité, traverse un filtre vert qui ne laisse passer que les composantes vertes de l’image qui vont impressionner la première pellicule noir et blanc. Le second flux, dévié à 90°, « traverse un filtre de couleur violette et laisse donc passer les rayons rouges et bleus. Or derrière la fenêtre passent deux films accolés de telle sorte que leurs émulsions se touchent : le premier film possède une émulsion sensible uniquement au bleu et colorée dans sa masse de façon à absorber ces rayons bleus et à ne laisser arriver sur l'émulsion panchromatique du film que les rayons rouges. Nous avons donc enregistré par ce moyen trois films sur lesquels se trouvent les images élémentaires vertes, bleues et rouges[3]. »

Technicolor, sélections chromatiques (procédé photographique à la prise de vues) et matrices d'impression (procédé d'imprimerie sur pellicule pour le tirage des copies). Une quatrième matrice — mélange des trois sélections — sera ajoutée par la suite pour mieux soutenir les noirs, absents en tant qu'eux-mêmes dans les sélections sur les trois négatifs. Le Technicolor trichrome est ainsi le résultat de quatre impressions à partir de films noir et blanc, ce n’est pas un film couleur.
L'émir de Boukhara, photo de Sergei Mikhailovich Prokudin-Gorskii (1911). À droite, le triple négatif en noir et blanc sur plaque de verre, montré ici en positif. À rapprocher du procédé Technicolor trichrome.

« La domination de Technicolor s’explique en premier lieu par son marketing bien visible, voire agressif, laissant penser qu’il s’agit du seul procédé capable de créer des couleurs naturelles. Les différentes productions travaillant en Technicolor avaient pour obligation contractuelle de promouvoir le procédé dans les bandes annonces ou les affiches[4]. »

Références

  1. Le Technicolor trichrome : histoire d'un procédé et enjeux de sa restauration par Céline Ruivo, directrice des collections films de la Cinémathèque française. https://www.theses.fr/178208531, consulté le 27/04/2020.
  2. Georges Sadoul, Histoire du cinéma mondial, des origines à nos jours, Paris, Flammarion, , 719 p., p. 43.
  3. Jean Vivié, "Le procédé Technicolor trichrome est présenté en France dans le film Becky Sharp", La Gazette cinématographique, no 9, octobre 1935, p. 133-134, cité dans https://www.cinematheque.fr/fr/catalogues/appareils/collection/camera-film-35-mmap-15-3041-1-3.html, consulté le 27/04/2020.
  4. Céline RuivoCéline Ruivo, directrice des collections films de la Cinémathèque française. https://www.theses.fr/178208531, consulté le 27/04/2020.

Articles connexes

Articles externes

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