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Blog de mode

Un blog de mode, sur Internet, est un blog qui s'intĂ©resse Ă  la mode et qui Ă  l'origine prĂ©sentait parfois des photographies de mode de passants consentants prises dans les lieux publics d'une ville. Les blogs de mode se sont ensuite spĂ©cialisĂ©s pour traiter plus en profondeur des diffĂ©rents sujets connexes Ă  la mode : photographie de mode, communication, ou encore Ă©conomie.

Historique

L'apparition des blogs date de la fin des annĂ©es 1990, ressemblant le plus souvent Ă  un journal intime[1]. L'idĂ©e de dĂ©part "Web-log" Ă©tait de partager ses centres d'intĂ©rĂŞt avec les autres. L'un des premiers blog de mode notable reste l'amĂ©ricain « The Budget Fashionista Â», suivi par bien d'autres tel Style Rookie[2]. En quelques annĂ©es, la popularitĂ© des blogs de mode grossit de façon exponentielle, jusqu'Ă  ce que ceux-ci deviennent une « alternative et/ou complĂ©ment » de la presse traditionnelle[3]. Leur succès se base parfois sur leur « point de vue subjectif et le ton dĂ©sinvolte », mais surtout sur une dĂ©mocratisation de la mode et une proximitĂ© parfois, le tout très Ă©loignĂ© des mĂ©dias plus classiques[2]. Pourtant au cours des annĂ©es, presse et marques de mode ont appris Ă  s'inspirer des blogs puis Ă  collaborer[4].

Au cours des annĂ©es 2010, le trafic de ces blogs dĂ©cline et se voit reportĂ© sur des rĂ©seaux sociaux comme Instagram[n 1] ou Facebook[5] : les « blogueuses Â», utilisant de multisupports et se professionnalisant, troquent alors leur titre pour celui d'« influenceuses Â»[1] - [5]. Au-delĂ  du traditionnel blog, la communautĂ© s’élargit aux vlogs et chaĂ®nes YouTube.

Modèles économiques

Depuis la fin des années 2000, le secteur se professionnalise avec l’arrivée des premières blogueuses à plein temps (Garance Doré, La Revue de Kenza, Le Blog de Betty, The Cherry Blossom Girl), souvent autodidactes[6]. « Toutes ces influenceuses ont créé un nouveau métier, le leur[7]. » Elle se voient suivies par la blogosphère de la mode masculine à l'instar de BonneGueule ou Comme un camion.

Aujourd’hui les blogs à fort trafic passent, à l’instar des médias classiques, par des régies qui regroupent plusieurs blogueurs, et se chargent de la commercialisation des espaces publicitaires. Les deux principales agences (Talent Agency, Glam Media (en)) ont toutes deux levé plusieurs millions d’euros en 2013 pour poursuivre leur développement[8]. « Rien n'est vraiment gratuit avec les blogueuses. toutes les grandes influenceuses disposent d'un agent qui gère leurs droits » précise Eric Briones[9]. C'est le cas de Chiara Ferragni par exemple dont le manager multiplie les partenariats entre la blogueuse et les marques[9]. Outre l'aspect financier, cette multiplication des contrats permet de démontrer une relative indépendance vis-vis des marques[9]. De toutes façons, « les entreprises ont tout intérêt à respecter l’indépendance du blogueur »[10].

Face aux audiences importantes de ces blogs, de plus souvent ciblées[10], les commentaires sur chaque publication, ainsi que la bonne gestion de ceux-ci, concourent à augmenter encore le trafic et à attirer les annonceurs[9]. La dimension de la communauté fidèle au blog reste primordiale. Plus ce trafic et le ranking sont élevés, plus les tarifs augmentent[6].

Les quatre principales mĂ©thodes de monĂ©tisation des blogs sont :

La monétisation des blogs repose donc en partie sur les mêmes fondements que les médias traditionnels, avec des annonceurs (les marques et les sites de vente en ligne) qui passent commande pour réaliser ou diffuser un message publicitaire[6], parfois pudiquement appelé « recommandation éditoriale »[10]. Des modèles économiques alternatifs sont apparus, comme la création de contenu de marque, le développement leur propre marque de vêtements en parallèle[11], les modèles freemium sans publicité, ni sponsors ou affiliation. Si les marques refusent parfois de rémunérer les blogues, elles peuvent investir dans des productions parallèles comme des web-séries[12]. Les rémunérations dégagées par ces divers types de revenus reste pourtant un sujet tabou, où peu de chiffres circulent[7] - [10].

En parallèle, nombre de blogueur publient également des livres dont certains sont des best-sellers[4]. D'autres commercialisent des collections à leur nom, avec le lancement de marques en propre[5].

Tous ces revenus que gĂ©nèrent ces blogs de mode a parfois engendrĂ© une certaine dĂ©ception auprès du lectorat ainsi que de vives critiques de la part de mĂ©dias classiques, reprochant aux auteurs un manque de professionnalisme[13] ou d’objectivitĂ© quant Ă  leurs annonceurs et, finalement, de crĂ©dibilitĂ©[10]. Recevant rĂ©munĂ©ration ou « cadeaux Â», leur indĂ©pendance est remise en cause, d'autant plus que les « reportages Â» sponsorisĂ©s ne sont pas toujours indiquĂ©s comme tels[6] alors que la loi les y oblige[10]. « Ça a Ă©tĂ© une erreur de les accepter et de se vanter » affirme Leandra Medine (en)[4] Ă  la suite de ces polĂ©miques. Les notions d'Ă©thique ou de dĂ©ontologie apparaissant dans le dĂ©bat[6] - [10].

Rivalité entre les journalistes et les blogueurs

L'arrivĂ©e en masse des blogueurs dans le monde de la mode n'est pas forcĂ©ment vue d'un très bon Ĺ“il par tous. Les journalistes en premier lieu puisqu'ils ou elles se retrouvent ainsi en concurrence avec un nouvel adversaire qui plus est très Ă  l'aise avec les diffĂ©rentes plateformes numĂ©riques. Une Ă©volution majeure pour ceux qui tenaient les rĂŞnes sans partage jusqu'alors de la diffusion de contenu. Cette rivalitĂ© — une « guerre ouverte » — dĂ©bute en 2008 pour le dĂ©filĂ© Dolce & Gabbana oĂą les blogueurs modes, clairement des habituĂ©s du « street style Â», sont au premier rang[n 3] au cĂ´tĂ© des plus importantes rĂ©dactrices de mode. Ainsi, Anna Wintour ou Suzy Menkes cĂ´toient Bryanboy (en), Tommy Ton (en), Garance DorĂ©, postant en direct grâce aux ordinateurs fournis par la marque italienne[4].

En tête de file lorsqu'il s’agit de relancer le débat, le magazine féminin Vogue qui ne cachait pas son mépris vis-à-vis de ces nouvelles pratiques. En atteste, en 2011, les déclarations de Franca Sozzani, alors rédactrice en chef du magazine Vogue Italie, relayées par Géraldine Dormoy sur L'Express Styles[n 4] : « Pourquoi les blogueurs sont-ils placés au premier rang des défilés ? » « Avons-nous besoin d'eux ? Ils n'expriment aucune opinion, ils ne font que parler d'eux-mêmes et se prennent en photo dans des tenues absurdes. » « Comme les papillons de nuit, ils sont inoffensifs car ils ne vivent qu'une nuit. »[14] Ces déclarations ne sont pas passées inaperçues même si elle a toutefois tenue à préciser qu'il existait des exceptions « certains blogueurs sont remarquables » avant de finalement en remettre une petite couche « Attendons une minute avant de les acclamer ou de les détester. Il existe encore beaucoup de gens qui ne savent pas ce qu'est un blogueur. […] Nous n'en sommes qu'à la phase d'observation. La seule chose que je sais avec certitude, c'est que s'ils étaient une maladie, on appellerait ça un virus. Une épidémie ! »[14] La respectée Suzy Menkes reste critique envers les sorties de défilés mélangeant blogueurs et invités[4] - [n 5] qu'elle compare à des paons qui « paradent en faisant la roue »[15]. Elle affirme que « ces individus sont uniquement connus grâce à leur page Facebook, leur blog »[15]. Les réactions à ce billet d'humeur sont nombreuses, de Susie Lau (en) à Leandra Medine (en) qui remarque le manque « d'ouverture d'esprit » de la journaliste américaine alors que d'autres soulignent « la frustration des rédactrices de mode exaspérées par ce mouvement […], la prolifération des blogs sur la toile »[15].

Imran Amed (en), qui a débuté par un petit blog personnel avant de fonder The Business of Fashion, surenchérit en racontant que « les premiers blogs ont été lancés par passion, pas pour permettre à leurs créateurs de s'asseoir au premier rang des défilés et de devenir célèbres[4] », des « stars éphémères »[15]. Pourtant, seulement quelque temps après, ce même magazine L'Express Styles, qui relaie largement ces anicroches, qualifie les blogueurs d'« acteurs incontournables de l'industrie de la mode[16] » et en 2015, ce sont 25 blogueurs présents au défilé Louis Vuitton[5]. Avec la numérisation de la communication, les marques telles Vuitton ont besoin de cette instantanéité des réseaux sociaux que la presse écrite ne peut fournir, même si cela peut poser la question de l'expertise réelle des blogueurs face aux journalistes avec des décennies d'ancienneté[17]. La même Suzy Menkes précise que « certaines grandes marques se sont engouffrées dans la brèche, pour essayer de récupérer le contrôle sur le multimédia »[15].

Parfois cette rivalité perd son sens quand les blogs sont créés et animés par des journalistes produisant un contenu avec la même rigueur journalistique que pour les journaux qui les emploient.

Notes

  1. En complément, lire l'article Instagirl.
  2. Ce « billet sponsorisĂ© Â» est souvent comparĂ© au publireportage utilisĂ© par la presse sauf que le blogueur rĂ©alise cet article alors que pour la presse, c'est souvent l'annonceur.
  3. Le premier rang des défilés, souvent appelé front row puis frow à cause de la réduction de lettres usitée sur Twitter, est une place stratégique représentant la hiérarchie du domaine de la mode, mais également une forme de reconnaissance sociale. Voir l'article Défilé de mode en complément.
  4. GĂ©raldine Dormoy est alors chef de rubrique mode Ă  L'Express Styles et tient un blog, « CafĂ© Mode Â», hĂ©bergĂ© par L'Express.
  5. L'article de Suzy Menkes, The Circus of Fashion de février 2013 dans le New York Times a eu un retentissement important dans le domaine de la mode.

Références

  1. Magal 2017, défaire les modes.
  2. Represa 2013, p. 159 Ă  160.
  3. Represa 2013, p. 159.
  4. Represa 2013, p. 160.
  5. Dromard 2016, p. 50.
  6. L'Obs 2013.
  7. Magal 2017, coulisses.
  8. https://techcrunch.com/2013/08/13/glam-media-raises-25m/
  9. Dromard 2016, p. 51.
  10. Foin 2012.
  11. « Quoi BonneGueule, qu'est-ce qu'il a BonneGueule ? », sur journaldunet.com (consulté le )
  12. Dromard 2016, p. 50 Ă  51.
  13. « Rue 89 », sur Rue89 (consulté le ).
  14. « Un nouveau pavé dans la mare blogueuses VS journalistes », madmoiZelle.com,‎ (lire en ligne, consulté le )
  15. Laurelli 2013.
  16. Represa 2013, p. 158.
  17. MCDowell 2013.

Voir aussi

Sources

Articles connexes

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