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Barrière thermique

Les systèmes barrières thermiques sont des revêtements en plusieurs couches déposées sur les pièces chaudes des turbomachines pour les isoler des gaz à très hautes températures. C’est la dernière technologie (cinquième depuis l’invention du turboréacteur) opérationnelle sur les moteurs, mais elle est encore étudiée et n'est pas pleinement exploitée.

Historique

Le rendement thermodynamique d’un réacteur dépend de la température des gaz produits. Contrairement à un moteur à piston où la combustion est intermittente, dans un réacteur les gaz chauds sont produits d’une manière continue, partant de la chambre à combustion, traversent les roues aubées, puis sont canalisés à travers la tuyère vers l’extérieur.

Les aubes des turbines se trouvent alors sĂ©vèrement contraintes thermiquement et cycliquement. Ă€ cela s’ajoutent des contraintes mĂ©caniques produites par les champs de pression d’une part et les forces centrifuges dues aux vitesses de rotation Ă©levĂ©es ; la corrosion par des sulfates portĂ©s Ă  850 °C et l’oxydation au-delĂ  de 1 000 °C.

Depuis l’apparition du rĂ©acteur durant la Seconde Guerre mondiale, on a cherchĂ© Ă  augmenter la tempĂ©rature des gaz en recourant Ă  des alliages de plus en plus rĂ©sistants aux hautes tempĂ©ratures (fluage). On a introduit les alliages Ă  base de nickel qui exhibent de bonnes caractĂ©ristiques de fluage jusqu'Ă  environ 950 °C. L’étape suivante a Ă©tĂ© l’introduction des aubes en alliages Ă  structure Ă  solidification dirigĂ©e (1 000 °C), puis en monocristal (1 100 °C).

Dans les années 1960 sont apparues les aubes refroidies, de l’intérieur, par un débit d’air prélevé du compresseur.

Les revĂŞtements cĂ©ramiques isolants, ou barrières thermiques (thermal barrier coatings, TBC), exploitĂ©s durant les annĂ©es 1990, ont permis d’autres progrès, grâce Ă  leurs caractĂ©ristiques de rĂ©sistance aux hautes tempĂ©ratures ; des tempĂ©ratures d’environ 1 200 °C ont Ă©tĂ© atteintes sur les surfaces des aubes. Les cĂ©ramiques sont gĂ©nĂ©ralement de mauvais conducteurs de l’électricitĂ© et de la chaleur ; on les utilise frĂ©quemment comme diĂ©lectriques et comme isolants thermiques. Leurs tempĂ©ratures de fusion sont très Ă©levĂ©es. Ces caractĂ©ristiques exigent leur Ă©laboration par frittage pour les pièces ; les revĂŞtements en cĂ©ramique sont dĂ©posĂ©s par plusieurs techniques.

L’ensemble de ces technologies permet le fonctionnement avec des gaz chauffĂ©s Ă  plus de 1 500 °C autour des aubes.

Les revêtements en céramiques

Généralement, la composition des films isolants est l’alumine Al2O3, la magnésie MgO, ou très souvent la zircone ZrO2. La zircone yttriée possède une très faible conductivité thermique par rapport aux autres oxydes, environ W/mK, et un coefficient de dilatation élevé, caractéristiques exigées sur les revêtements pour aubes ; les coefficients de dilatation du revêtement et du matériau de base doivent être, idéalement, égaux.

Plusieurs procédés de dépôt de couches minces en céramiques ont été développés. Sur les aubes de turbines, on utilise les procédés de dépôt par projection plasma (à air) et les dépôts en phase vapeur.

La technique de projection plasma consiste à fondre une poudre puis à la projeter sur le substrat à l’aide d’un courant gazeux. Elle est appliquée sur les aubes fixes moins chargées car, comparativement à la seconde technique, le revêtement produit possède une résistance à la microfissure plus faible.

Le dépôt (physique) en phase vapeur consiste à produire une phase gazeuse par évaporation puis son transport vers le substrat sous pression réduite. Il produit une morphologie poreuse et colonnaire (colonnes perpendiculaires au substrat) qui produit une conductivité thermique plus élevée que celle obtenue par la technique plasma, mais une meilleure résistance aux contraintes thermomécaniques due à la présence de pores intercolonnes ; d’où son application pour les aubes mobiles très chargées.

Systèmes barrières thermiques

En pratique, sur les aubes de turbines, les revêtements isolants sont constitués de plusieurs matériaux formant un « système barrière thermique ». En effet, la diversité des phénomènes d’endommagement rencontrés (érosion, corrosion, oxydation, fatigue thermique, chaleur intense) a imposé le recours à un revêtement de trois couches, chacune assurant une fonction.

La couche externe exposĂ©e aux gaz chauds a pour fonction principale l’isolation thermique ; elle est faite de zircone partiellement stabilisĂ©e Ă  l’oxyde d'yttrium (ZrO2 + 6-8 % masse Y2O3) dĂ©posĂ©e par Ă©vaporation pour ses qualitĂ©s de rĂ©sistance aux contraintes thermomĂ©caniques. D’une Ă©paisseur moyenne de 150 microns, cette couche cĂ©ramique poreuse a Ă©tĂ© choisie pour sa très faible conductivitĂ© thermique (~ 1,5 W/mK) et son coefficient de dilatation Ă©levĂ©. Cette première couche permet des diffĂ©rences de tempĂ©rature de l’ordre de 100 °C.

Une couche intermĂ©diaire, l’alumine, très fine (environ 7 microns), a pour fonction principale la protection contre l’oxydation du matĂ©riau de base de l’aube, le superalliage. En effet la couche externe est permĂ©able Ă  l’oxygène des gaz chauds.

La couche de liaison, Ă©paisse de 50 Ă  100 microns et en alliage NiAl(Pt), a pour fonction principale la production et le maintien de la couche intermĂ©diaire. C’est une sorte de rĂ©servoir d’aluminium. Au dĂ©part, l’alumine n’existe pas, elle est initiĂ©e par un traitement thermique.

La principale raison d’endommagement des couches provient de la différence importante des coefficients de dilatation des trois couches, particulièrement entre l’alumine et la couche liaison. Des contraintes de compression apparaissent sur l’alumine, qui se traduisent, à l’interface alumine-couche liaison, par des contraintes de traction responsables d’un phénomène de décollement de la couche d’alumine appelé « rumpling »[1]. C’est l’évolution de ces défauts qui ruine l’ensemble de la barrière. De plus, la microstructure de la couche de liaison évolue par des phénomènes de diffusion avec le superalliage, rendant son analyse difficile.

La technologie thermal barrier coatings (TBC) est encore étudiée et n’est pas pleinement exploitée. La difficulté se situe au niveau de la physique du comportement thermomécanique de la couche liaison, au sujet laquelle des travaux d’expérimentations sont nécessaires. Les développements futurs passeront par la recherche d’autres céramiques pour la couche externe, car la zircone évolue morphologiquement et est limitée en température par des phénomènes de diffusion propres au frittage. Ils passeront aussi par des systèmes TBC plus élaborés faits de plusieurs couches.

Notes et références

  1. Vaunois 2013, p. 14.

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Jean-Roch Vaunois, ModĂ©lisation de la durĂ©e de vie des barrières thermiques, par le dĂ©veloppement et l’exploitation d’essais d’adhĂ©rence (thèse de doctorat en MatĂ©riaux composites et construction), UniversitĂ© de Grenoble, , 237 p. (prĂ©sentation en ligne, lire en ligne [PDF]). Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article
  • A. Villemiane, Comportement mĂ©canique d'alliages pour couches de liaison de barrière thermique par microindentation instrumentĂ©e Ă  haute tempĂ©rature (thèse de doctorat), Institut national polytechnique de Lorraine, (prĂ©sentation en ligne, lire en ligne [PDF])
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