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Assurance maladie

L’assurance maladie est un dispositif chargé d'assurer un individu face à des risques financiers de soins en cas de maladie, ainsi qu'un revenu minimal lorsque l'affection prive la personne de travail.

Dans la plupart des pays occidentaux, une grande part de l'assurance maladie est prise en charge par l'État. C'est d'ailleurs une des composantes fondamentales de la sécurité sociale, et un devoir de l’État selon la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948.

Un système d'assurance maladie public peut être géré par un organisme d’État, délégué à des organismes privés ou être mixte.

Le fonctionnement, comme toutes les autres assurances, est fondé sur la mutualisation du risque : chaque personne cotise, et en échange, elle est remboursée selon un barème fixé.

Pour un système d'assurance maladie public, la prime d'assurance payée par l'assuré ne suit pas forcément les règles de l'assurance pure, et elle peut ne pas être fondée sur le risque seul. En effet, le système public remplit à la fois une fonction d'assurance pure et une fonction de répartition dans lequel les plus aisés payent l'assurance des plus défavorisés.

Histoire

Jusqu'au XVIIIe siècle, les protections contre les risques de la vie sont assurées le plus souvent par la richesse personnelle, la solidarité locale (familiale, villageoise) ou professionnelle (guildes, jurandes) et la charité. On connaît néanmoins plusieurs cas de sociétés privées qui, au XVIIe siècle en Espagne, offraient à leurs salariés le remboursement des frais médicaux pour eux et leurs familles[1].

Au XIXe siècle, la Révolution industrielle concentre les populations dans les villes où la solidarité locale ne peut plus jouer, et le nombre d'accidents du travail augmente[2]. De plus se développe un mouvement intellectuel et scientifique, qui promeut la prévoyance individuelle (à l'origine des assurances privées), les sociétés d'assurance mutuelle qui apportent la prévoyance collective et la notion de « dette sacrée » apportée par la Révolution française dont l'article 21 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1793 reconnaît pour chaque citoyen le droit à l'assistance et à la protection sociale, donnant naissance à la sécurité sociale[3].

Ces nouvelles conceptions sont appliquées en Prusse où Otto von Bismarck, souhaitant un État fort, développe le premier système d'assurances sociales obligatoires avec les projets de loi sur l'assurance contre les accidents du travail et l’assurance-maladie sociale adoptés en 1883 et 1884[4].

Modèles d'assurance maladie

L'assurance maladie peut prendre deux formes différentes :

  • soit il s'agit simplement d'une assurance financière : l'individu est assurĂ© pour un risque (l'accident, la maladie), et ses soins (rĂ©munĂ©ration des praticiens, coĂ»t des produits et mĂ©dicaments, prothèses, orthèses…) sont remboursĂ©s selon le barème ;
  • soit l'organisme assureur constitue un rĂ©seau de soins : il contacte des praticiens, fournisseurs.... L'assurance achète une sorte d'abonnement Ă  ce rĂ©seau de soins et le revend Ă  l'usager ; dans sa forme la plus extrĂŞme, l'assurĂ© n'a pas le choix de son praticien, du moins s'il veut bĂ©nĂ©ficier de la gratuitĂ© des soins ou de leur remboursement.

On peut avoir une coexistence de ces deux modèles.

L'assurance maladie peut être un organisme purement étatique (public), ce qui peut être uniquement des assureurs privés ou bien on peut avoir un système mixte : l'usager dispose d'une assurance publique et peut contracter une assurance privée auprès d'une compagnie ou mutuelle d'assurance (appelée « complémentaire santé » en France), qui complète le remboursement ou fournit un accès à un réseau de soins complémentaire.

On constate que les pays ayant adopté un système purement privé et concurrentiel sont également ceux pour lesquels les dépenses sont les plus élevées. Ainsi, alors que les pays développés dépensent en moyenne 10 % de leur PIB dans leur système de soins, les États-Unis en dépensent 14 % et la Suisse 13 %. Néanmoins, dans un système d'assurance en concurrence, les assurés choisissent le niveau de dépense qu'ils souhaitent par rapport au niveau de couverture santé qu'ils souhaitent. Le niveau de dépense dans un système en concurrence révèle donc le niveau de dépense souhaité par les consommateurs. Dans un système public, l'État fixe le niveau des dépenses et rationne l'usage des services de santé pour les limiter (par exemple, médecin traitant en France). La comparaison des niveaux de dépenses entre systèmes publics et systèmes en concurrence est donc biaisée du fait qu'il s'agit de systèmes non comparables dans leur usage.

Dans le monde

Allemagne

Fondé sur les principes d'une assurance professionnelle dans le cadre de l'entreprise et de la prévoyance sociale, le système allemand se trouve dans un processus de réforme depuis la fin des années 1980 intégrant une dimension financière et organisationnelle.

En 1883, la loi sur l'assurance maladie instaure la mise en place de l'assurance obligatoire pour les ouvriers dans l'industrie. Entré en vigueur en 1914, ce système demeure la principale base juridique de la législation sur l'assurance maladie jusqu'à l'adoption en 1988 de la première loi sur la réforme du système de santé.

  • RĂ©gime public : 88 % des habitants y sont affiliĂ©s. Une assurance maladie est obligatoire en dessous d'un certain seuil de revenus. Les cotisations correspondent Ă  14,6 % du salaire brut plus une surcharge moyenne de 1,3%[5]. La moitiĂ© de la contribution est payĂ©e par l'employeur[6].
  • RĂ©gime privĂ© : 12 % des habitants y sont affiliĂ©s. Au-delĂ  d'un certain seuil de revenus (64 350 € bruts[7]), les salariĂ©s peuvent opter pour le rĂ©gime de l'assurance privĂ©e. Les fonctionnaires, les travailleurs indĂ©pendants et les Ă©tudiants peuvent affilier Ă  cette assurance privĂ©e sans atteindre un seuil de salaire[8]. Les Ă©tudiants peuvent demander Ă  ĂŞtre exemptĂ©s de leur obligation d’assurance publique pour s'affilier au système privĂ©. Les Ă©tudiants de plus de 25 ans qui ne sont pas couverts par l’assurance maladie de leurs parents peuvent alors s'affilier au rĂ©gime privĂ©, qui se veut bien souvent moins onĂ©reux que le système public[9]. Cette assurance privĂ©e couvre 10 % de la population qui a ainsi la possibilitĂ© de ne pas choisir le système d’adhĂ©sion obligatoire au-delĂ  d’un seuil de revenus mais qui peut aussi cumuler les deux types de protection publique et privĂ©e. Contrairement au rĂ©gime public, les cotisations sont dĂ©cidĂ©es en fonction de l'âge et de la condition de santĂ© des affiliĂ©s[7].

Les caractéristiques du système allemand sont les suivantes :

  • les cotisations sociales (salariales et patronales) financent majoritairement le risque maladie ;
  • les caisses d'assurance maladie au sein desquelles siègent des reprĂ©sentants des financeurs (syndicats de salariĂ©s et organisations patronales) ont un rĂ´le gestionnaire ;
  • une très grande diversitĂ© (près de trois cents caisses publiques diffĂ©rentes) et une grande autonomie des caisses d'assurance maladie (elles fixent chacune librement leur taux de cotisation, qui sont diffĂ©rents d'une caisse Ă  l'autre) ;
  • le tiers-payant gĂ©nĂ©ralisĂ© ;
  • le rĂ´le important de la nĂ©gociation collective entre les caisses et les reprĂ©sentants des mĂ©decins et avec les hĂ´pitaux ;
  • le système fĂ©dĂ©ral qui donne un rĂ´le important aux Länder (en particulier dans le domaine hospitalier).

Le système d'assurance maladie allemand est proche du modèle français dans sa philosophie et doit faire face à des difficultés comparables[10].

Depuis le , une nouvelle loi est passée en vigueur, éliminant la discrimination qui pouvait avoir lieu parfois envers les femmes et parfois envers les hommes : le tarif unisexe pour les assurances[11]. Les assurances proposaient jusque fin 2012 des tarifs préférentiels pour le sexe masculin et parfois pour le sexe féminin. Les assurances automobile étaient par exemple nettement moins chères pour les femmes car la majorité des accidents étaient dus à des étudiants masculins[12]. La différenciation des prix était présente pour de nombreuses assurances jusqu'à ce que la cour européenne, dans un esprit d'unicité à l'égard des autres pays européens, déclare que ces différences n'avaient plus lieu d'être. Dorénavant, les femmes paient ainsi leurs assurances auto plus cher qu'auparavant et les hommes profitent d'un rabaissement de ces frais d'assurance pour arriver à une moyenne unisexe. Les assurances maladie ont été très peu modifiées mais ont tout de même été unifiées entre les deux sexes (notamment pour les assurances au niveau des cancers). Dans le fond la mesure n'a pas eu d'incidence budgétaire importante, il s'agissait avant tout de réduire toute forme de discrimination.

Belgique

L'assurance maladie-invalidité est une assurance « soin de santé » obligatoire gérée par l'Institut national d'assurance maladie invalidité (l'INAMI). C'est un des fondements de la sécurité sociale belge.

Cette assurance est en dĂ©ficit de 634 millions d'euros en 2004, notamment Ă  cause du vieillissement de la population et de la dĂ©gradation du rapport « nombre de cotisants » / « nombre de bĂ©nĂ©ficiaires ».

Le gouvernement fédéral belge en accord avec les acteurs du secteur médical recherchent différentes solutions à ce problème. L'usage accru de médicaments génériques, à l'efficacité équivalente aux médicaments de grande marque mais nettement moins chers, permettrait par exemple de réduire les coûts des médicaments (aux dépens de l'industrie pharmaceutique). La réduction des examens médicaux superflus est une autre piste. D'autres plaident pour la régionalisation de l'assurance maladie, arguant que les flamands subsidient des wallons surconsommateurs de soin de santé.

Canada

En Éducation et Santé, il appartient aux provinces canadiennes d'administrer les politiques et les enveloppes budgétaires dans ces secteurs, suivant le partage des autorités et responsabilités fédérale, provinciale, régionale et municipale.

Québec

Les soins de santé de base des citoyens du Québec sont couverts depuis 1970 par la Régie de l'assurance-maladie du Québec (RAMQ), un organisme du gouvernement québécois relevant du Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.

États-Unis

Aux États-Unis, l'assurance maladie dépend surtout d'assureurs privés[13]. Les pouvoirs publics garantissent les soins aux personnes âgées (Medicare) ou démunies (Medicaid). D'autre part, et contrairement à une idée répandue, même les non-assurés ont accès à des soins de santé gratuits offerts par les hôpitaux publics, centres de santé communautaires, hôpitaux universitaires, etc.[14]. D’après les données de l’OCDE, les dépenses publiques de santé sont de 2 464 $ par habitant.

En 2010, 83,5 % des AmĂ©ricains possĂ©daient une assurance maladie et 50 millions en Ă©taient privĂ©s[15]. Ce taux doit cependant ĂŞtre relativisĂ© : la moitiĂ© des individus non assurĂ©s ont moins de 35 ans[16] et la rĂ©partition des personnes non assurĂ©es par classes d'âge fait que 95 % des problèmes de santĂ© touchent les populations assurĂ©es[16]. En outre, les deux tiers des non assurĂ©s ont des revenus supĂ©rieurs Ă  25 000 $ et les mĂ©nages dont les revenus se situent en dessous du seuil de pauvretĂ© ne reprĂ©sentent qu'un cinquième des non-assurĂ©s[17]. Selon Bundorf et Pauly dans le Journal of Health Economics, « jusqu'Ă  trois quarts des non-assurĂ©s amĂ©ricains pourraient s'offrir une assurance santĂ© sans enfreindre leur contrainte budgĂ©taire »[18]. Il s'agit donc plutĂ´t de non-assurance volontaire.

Une partie importante des cotisations, 30 %, n'est pas rĂ©investie dans la santĂ© mais part en frais administratifs, marketing et bĂ©nĂ©fices. L'assurance maladie revient deux fois plus cher qu'en France : 5 500 dollars par personne en 2005, cela reprĂ©sente 16 % du PIB.

La rĂ©forme de l'assurance maladie voulue par le prĂ©sident amĂ©ricain Barack Obama est votĂ©e par le SĂ©nat en novembre 2009 et par la Chambre des reprĂ©sentants le [19]. Elle contraint tous les AmĂ©ricains Ă  souscrire une assurance avant 2014 sous peine d'amende[15]. Elle interdit aux assurances de refuser de couvrir leurs assurĂ©s en raison de leurs antĂ©cĂ©dents mĂ©dicaux[15]. Elle octroie une aide financière aux familles qui ont des revenus infĂ©rieurs Ă  88 000 dollars par an[15]. La rĂ©forme devrait coĂ»ter 940 milliards de dollars(695 milliards d'euros) sur dix ans[15]. Son financement devrait ĂŞtre assurĂ© par des taxes sur les revenus Ă©levĂ©s et la baisse des dĂ©penses de soins[15].

Organisation

Il existe en Suisse plusieurs dizaines de caisses d'assurance maladie qui sont toutes des sociétés privées. Il n'existe pas en Suisse de caisse maladie publique.

Notes et références

  1. (es) Lutgardo García Fuentes, La Casa de la Contratación y la navegación entre España y las Indias, Sevilla, Universidad de Sevilla, Consejo Superior de Investigaciones Científicas and Fundación El Monte, (ISBN 978-84-00-08206-2, lire en ligne), « Los libros de Armada, la Casa de la Contratación y los orígenes del Estado del Bienestar », p. 1033–1059
  2. Pierre-Louis Bras, Didier Tabuteau, Les assurances maladie, PUF, , 128 p. (ISBN 978-2-13-059158-0).
  3. Du « droit individualiste » au « droit social ». Une histoire de la juridicisation du social (1789-1939).
  4. Des assurances sociales libres aux assurances obligatoires.
  5. (de) « Zusatzbeitrag », sur meine-krankenkasse.de
  6. (de) « Gesetzliche Krankenversicherung : Diese Änderungen sind wichtig für Kassenpatienten », sur stern.de, (consulté le ).
  7. (en-US) Nicolas Bouliane, « How to choose German health insurance », sur allaboutberlin.com (consulté le )
  8. (de) « Private Krankenversicherung : Voraussetzungen, Tarife & Leistungen 2020 », sur Krankenversicherung.net (consulté le ).
  9. (de) « Private Krankenversicherung für Studenten - hier gibts alle Infos! », sur testprivatekrankenversicherung.de (consulté le ).
  10. Groupe d'intérêt public : Santé et protection sociale internationale (GPI-SPSI).
  11. Der kleine Unterschied spielt keine Rolle mehr, Birgit Schmeitzner, BR-Hörfunkstudio Brüssel (journal allemand), .
  12. Die neuen Unisex-Tarife ab 21. Dezember 2012 (les nouveaux tarifs unisexe), Jean-Baptiste Richard, .
  13. Lætitia Mailhes, Quand les États-Unis réinventent la sécurité sociale, Les Échos, .
  14. Il est temps de démystifier le système de santé américain, Institut économique de Montréal.
  15. Corine Lesnes, « Assurance-santé : la ténacité de Barack Obama », Le Monde, (consulté le ).
  16. Mathieu Mucherie, 45 millions de personnes sans assurance-maladie aux États-Unis : oui mais!, SociĂ©tal, 4e trimestre 2007, p. 48-52.
  17. Bundorf Kate et Pauly Mark (2002), Is health insurance affordable for the uninsured, National Bureau of Economic Research.
  18. repris par Mathieu Mucherie in Sociétal.
  19. Sylvain Cypel, « Barack Obama emporte à l'arraché la réforme de la santé », Le Monde, (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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