Pour les articles homonymes, voir Arène (homonymie) et gore.
L'arène[1], aussi appelé gore[2] ou gorrhe (orthographe en vigueur dans le Beaujolais), est un sable grossier formant une roche sédimentaire meuble souvent de couleur ocre en raison de présence d'oxyde de fer.
Elle est issue de l'arénisation, altération in situ de roches magmatiques ou métamorphiques riches en quartz et feldspaths (en particulier les granites et leur évolution métamorphique, les gneiss) due au contact permanent des eaux de lessivage. La désagrégation des feldspaths et l'altération des micas se produit sous la surface et peut déboucher sur la création de cuvettes en lieux et places de massifs granitiques, et/ou, sur le littoral, au nourrissage de plages de sables clairs car composés presque uniquement de grains de quartz peu altérables.
Ce sable ni transporté, ni érodé car resté très proche de sa source, a des grains anguleux[3]. Les arènes granitiques sont des formations résiduelles (ou altérites)[3] constituées d'une « pâte » ou « poudre » argileuse rouge (car colorée par les oxydes de fer) non soluble enrobant de nombreux grains de quartz inaltérés et peu de cristaux de feldspath et micas non encore décomposés[2].
Ce matériau, qui se compacte à la pression, est souvent utilisé comme revêtement des aires ou allées.
En gisement, l'arène granitique (roche meuble) peut être surmontée d'une strate argileuse de couleur « rouille » (couleur rouge-marron due à l'altération des feldspaths et des micas en silicate d'alumine hydraté et oxydes de fer) plus ou moins épaisse tandis qu'elle surmonte le granite altéré (roche friable : granite « pourri[4] » blanchâtre dû à la présence de cristaux de quartz blanc), le granite diaclasé, et le granite sain représentant une couche de quelques centimètres à plusieurs mètres d'épaisseur, dans le Massif armoricain, les Vosges, les Ardennes et dans le Massif central (Auvergne, Bourbonnais, région de Lyon, etc.). Dans la couche d'arène granitique peuvent se trouver incluses de nombreuses boules de granite non arénisé (roche cohérente).
Le sol correspondant est de type acide, filtrant et assez pauvre. Il est apprécié des viticulteurs.
Sommaire
Étymologie
Ce mot est dérivé du latin arena, qui signifie sable.
L'arénisation : exemple de la formation d'un chaos granitique
L'arènisation correspond à la formation d'une arène par désagrégation des feldspaths et altération des micas au contact permanent avec l'eau[3]. Cette arènisation se fait donc nécessairement en profondeur[3] et son action est d'autant plus importante dans les zones de climat tempéré[2] où les processus de gélifraction et d'altération coexistent avec une action importante.
La suite de cet article s'intéresse au devenir d'un pluton allochtone au stade où il est proche de la surface, sans être à l'affleurement, et décrit son évolution jusqu'à ce qu'il arrive à la surface.
L'eau comme agent d'érosion majeur
Le processus d'arènisation fait majoritairement appel aux propriétés d'érosion chimique de l'eau qui, s'infiltrant au travers de réseaux de diaclases[2], altère la roche-mère.
Au contact de l'eau d'infiltration, le matériel plutonique, dont la composition est semblable à celle d'un granite, verra certains de ses minéraux constituants subir une hydrolyse. Cela sera le cas principalement des phyllosilicates, des plagioclases, voire des orthoclases. On peut, en simplifiant, dire que les minéraux essentiels présentent une vulnérabilité à l'altération croissante suivant l'ordre de la cristallisation de Bowen[5]. Plus un minéral cristallise dans des conditions de température et de pression élevées, plus il est éloigné de ses conditions de stabilité en se rapprochant de la surface (la température et la pression diminuent) et donc plus il est dans un état de métastabilité. Les plagioclases calciques seront donc, par exemple, altérés plus rapidement par l'eau que les plagioclases sodiques, etc. Cette hydrolyse engendrera une déstabilisation des réseaux cristallins et fera s'effondrer l'édifice de la charpente atomique constituant les minéraux[6] pour donner des argiles.
Les minéraux plus résistant à l'altération (comme l'orthoclase et le quartz) formeront des grains individualisés, pris dans une pâte argileuse, la roche ayant perdu sa cohésion avec la transformation de minéraux en argiles. Ce processus s'appelle la désagrégation[3] et c'est ce dernier qui donne naissance à l'arène granitique.
L'altération en boule
Il s'agit ici d'une des explications permettant d'obtenir une altération en boule. Cette partie n'est donc pas exhaustive.
Les processus même de refroidissement des magmas engendrent des fractures, qui se forment de façon perpendiculaire à l'interface entre ce dernier et l'encaissant. Un phénomène de rétractation thermique se produit (la matière en cristallisant passe d'un état désordonné à ordonné, faisant diminuer son volume), provoquant une facturation centripète de la roche (le principe est analogue à celui qui permet d'obtenir les orgues basaltiques). En imaginant que la chambre magmatique soit réalimentée au cours de son refroidissement, on produit des phénomènes d'inflation et de déflation du volume magmatique, produisant une fracturation centrifuge de la roche, parallèle à la surface morphologique du pluton. En couplant ces deux évènements, on obtient donc un réseau perpendiculaire de diaclases découpant la roche en volumes parallélèpipèdiques décimétriques à métriques, par lequel l'eau pourra pénétrer lors des précipitations.
Avec le temps, les eaux d'infiltrations vont altérer ces blocs, diminuant continuellement leurs surfaces spécifiques et érodant préférentiellement les angles. La sphère étant l'objet géométrique permettant d'obtenir le plus gros volume avec le moins de surface spécifique[7], l'altération des parallélépipèdes tend vers un objet sphérique.
Dénudation du complexe granitique
Les temps géologiques avançant, les périodes de bio-rhexistasie se succédant, le pluton qui était à quelques mètres de la surface apparaît maintenant à l'affleurement. Les eaux de ruissellement emportent alors avec elles les argiles et même l'arène granitique, libérant alors les boules de granite. On peut ainsi décrire l'une des successions d’événements possibles faisant intervenir l'arénisation du granite et aboutissant à la formation d'un chaos.
Culture
Les sols d'arène sont très pauvres mais peuvent toutefois être adaptés à la culture de la vigne (et notamment de certains cépages comme le gamay) ou de certaines plantes comme les plantes carnivores[8]. En effet, l’arène granitique étant un minéral, elle est bien moins propice aux moisissures et autres maladies fongiques et ne se dégrade que peu au fil du temps. Selon certaines observations, l’arène granitique permettrait d’avoir des plantes plus colorées.
Notes et références
- du latin arena, sable
- Charles Pomerol, Yves Lagabrielle et Maurice Renard 2006, p. 505
- Alain Foucault et Jean-François Raoult 2001
- Terme des carriers.
- Charles Pomerol, Yves Lagabrielle et Maurice Renard 2006, p. 499
- Charles Pomerol, Yves Lagabrielle et Maurice Renard 2006, p. 502
- (en) Cabiria Andreian Cazacu, Olli Lehto, Simion Stoilow et Themistocles M. Rassias, Analysis and Topology : A Volume Dedicated to the Memory of S. Stoilow, World Scientific Publishing Co Pte Ltd, , 723 p. (ISBN 978-981-02-2761-6, présentation en ligne), p. 617
- Source: Carniguide
Voir aussi
Bibliographie
- Alain Foucault et Jean-François Raoult, Dictionnaire de Géologie, Dunod, 5e éd. (ISBN 978-2-10-005836-5)
- Charles Pomerol, Yves Lagabrielle et Maurice Renard, Éléments de Géologie, Paris, Dunod, 13e éd., 762 p. (ISBN 978-2-10-048658-8, notice BnF no )
Articles connexes
- Altérite
- Arkose (grès feldspatique)
- Grèzes
- Latérisation
- Roche cohérente