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Agriculture au ViĂȘt Nam

Si, en quelques dĂ©cennies[1] - [2], le Vietnam a connu tout comme de nombreux pays du Sud une urbanisation soutenue, symptomatique d’un rapide dĂ©veloppement Ă©conomique, il n’en reste pas moins un pays profondĂ©ment rural, marquĂ© par le poids historique de son agriculture, qui reprĂ©sente d'aprĂšs la Banque asiatique de dĂ©veloppement 39 % de l'emploi et 17 % du PIB (2017)[1]. Le secteur de l'Ă©levage n'a pas Ă©chappĂ© Ă  cette modernisation rapide issue des rĂ©formes Ă©conomiques du Doi Moi[3].

Production de légumes au Vietnam

Production

Le Vietnam a produit, en 2018:

  • 44,0 millions de tonnes de riz (5e producteur mondial, derriĂšre la Chine, l'Inde, l'IndonĂ©sie et le Bangladesh);
  • 17,9 millions de tonnes de canne Ă  sucre (16e producteur mondial);
  • 14,8 millions de tonnes de lĂ©gumes;
  • 9,8 millions de tonnes de manioc (7e producteur mondial);
  • 4,8 millions de tonnes de maĂŻs;
  • 2,6 millions de tonnes de noix de cajou (1re producteur au monde);
  • 2,0 millions de tonnes de banane (20e producteur mondial);
  • 1,6 million de tonnes de cafĂ© (2e producteur mondial, seulement derriĂšre le BrĂ©sil);
  • 1,5 million de tonnes de noix de coco (6e producteur mondial);
  • 1,3 million de tonnes de patate douce (9e producteur mondial);
  • 1,2 million de tonnes de pastĂšque;
  • 1,1 million de tonnes de caoutchouc naturel (3e producteur mondial, derriĂšre la ThaĂŻlande et l'IndonĂ©sie);
  • 852 mille tonnes d'orange (18e producteur mondial);
  • 779 mille tonnes de mangue (y compris mangoustan et goyave);
  • 654 mille tonnes d'ananas (12e producteur mondial);
  • 270 mille tonnes de thĂ© (6e producteur mondial);

En plus de petites productions d'autres produits agricoles[4].

1950-1988 : Une agriculture malade de ses réformes

DĂšs le dĂ©but des annĂ©es 1950, l’agriculture vietnamienne est l’objet d’une vaste rĂ©forme agraire qui vise, sur les bases d’une approche socialiste, Ă  collectiviser les terres agricoles et Ă  en soumettre l’exploitation Ă  des coopĂ©ratives afin d’accroĂźtre notamment le rendement des cultures de riz. Cette pĂ©riode ne dure finalement qu’une petite dĂ©cennie dans la mesure oĂč l’État engage dĂšs le dĂ©but des annĂ©es 1960, la fusion des coopĂ©ratives afin de crĂ©er de nouvelles structures plus vastes au sein desquelles le paysan semble se voir, moins comme un acteur impliquĂ© mais plus comme un exĂ©cutant.

Alors que les autoritĂ©s vietnamiennes consacrent un budget croissant Ă  la rĂ©novation de l’agriculture, le rendement du capital investi chute entre 1961 et 1965, de mĂȘme que le revenu moyen par paysan dĂ©croit alors de 26 %, provoquant dĂšs le milieu des annĂ©es 1970 une sĂ©rieuse crise alimentaire. Une crise attribuĂ©e en partie Ă  la structure mĂȘme du systĂšme agraire dĂ©veloppĂ© par l’État vietnamien et renforcĂ©e dans ses consĂ©quences catastrophiques, par la hausse dĂ©mographique de la population du pays, qui atteint dans la mĂȘme pĂ©riode (au cours des annĂ©es 1970) les 3 % de croissance annuelle.

La fin des annĂ©es 70 marque le dĂ©but d'une prise en main de l’organisation de la gestion des terres par l’État au niveau central tout en reconnaissant la propriĂ©tĂ© individuelle au dĂ©triment du systĂšme des coopĂ©ratives[5].

Afin de faire obstacle Ă  la baisse gĂ©nĂ©rale de la production agricole et d’impliquer davantage les paysans dans le travail de la terre, l’État vietnamien lance au dĂ©but des annĂ©es 1980, le dĂ©cret no 100, qui doit permettre aux agriculteurs d’investir leur capital ainsi que leur travail sur des terres contractuelles et d’en retirer au passage tous bĂ©nĂ©fices. Une mesure qui se solde Ă  nouveau dĂšs le milieu des annĂ©es 1980 par un Ă©chec et oblige alors le gouvernement vietnamien Ă  revoir totalement son approche politique de la rĂ©alitĂ© agricole du pays.

D'une agriculture de subsistance Ă  une agriculture d'exportation

Culture traditionnelle du riz Ă  Mai ChĂąu, dans la province de HĂČa BĂŹnh (2011).

En 1988, la promulgation de la rĂ©solution no 10 jette les bases d’une nouvelle agriculture vietnamienne qui repense principalement les questions d’ordre Ă©conomique et revient sur le rĂŽle Ă  donner aux acteurs agricoles pour plus de stabilitĂ© et de pĂ©rennitĂ© dans le secteur. Le pays connaĂźt alors une production alimentaire croissante qui passe de 18,5 millions de tonnes en 1986 Ă  31,8 millions en 1998 notamment sous l’action de l’augmentation des surfaces cultivables (principalement au sud, dans le delta du MĂ©kong) mais aussi grĂące Ă  une certaine optimisation des rĂ©coltes de riz par la sĂ©lection d’espĂšces Ă  haut rendement. L’État vietnamien poursuit sa structuration et crĂ©e en 1994 au sein du MinistĂšre des ressources naturelles et de l'environnement, un DĂ©partement gĂ©nĂ©ral de l'administration des terres (General Department of land Administration, GDLA) en charge de l'allocation des terrains et de la certification fonciĂšre[6].

Alors que la production gĂ©nĂ©rale augmente, le ViĂȘt Nam se spĂ©cialise dans des cultures Ă  plus forte valeur ajoutĂ©e, qu’il destine principalement Ă  l’exportation. Parmi celles-ci on retrouve d’abord le riz, qui, poussĂ© Ă  des niveaux de qualitĂ© supĂ©rieure, rĂ©pond depuis le courant des annĂ©es 1980 aux exigences des marchĂ©s internationaux, propulsant le pays au 2e rang mondial des exportateurs en 1998, juste derriĂšre la ThaĂŻlande (2e rang en 2005). Le ViĂȘt Nam est Ă©galement devenu depuis 1999 le second producteur mondial de cafĂ©[7]. Aujourd'hui, la plante de riz est devenue stratĂ©gique pour l’économie d’un des cinq pays plus gros exportateurs du monde de cette denrĂ©e[8].

Les surfaces agricoles consacrĂ©es Ă  la culture d’arbres fruitiers augmentent Ă©galement, passant de 8,37 % en 1989 Ă  14,80 % en 1999, au mĂȘme titre que les exploitations de canne Ă  sucre par exemple, qui connaissent une expansion record jusqu’à voir la superficie de leur culture doubler entre 1990 et 1999.

Élevage traditionnel de canards (2013).

Les progrĂšs de l’élevage, dopĂ©s par la hausse du niveau de vie d’une population majoritairement urbaine et demandeuse en produit animal, sont Ă©galement perceptibles et se concentrent aux abords des centres urbains, notamment au niveau de l’agglomĂ©ration d’HĂŽ-Chi-Minh-Ville, premiĂšre ville du pays en nombre d'habitants.

Un progrĂšs agricole Ă  relativiser

Le premier point qui peut amener Ă  relativiser le caractĂšre exceptionnel de la croissance agricole vietnamienne, c’est d’abord la question de l’authenticitĂ© des donnĂ©es officielles, reprises dans cet article. Une question que l’on peut se poser lĂ©gitimement dans la mesure oĂč par le passĂ©, les autoritĂ©s ont fourni localement de fausses informations, avançant dans certains cas des chiffres 10 Ă  13 % supĂ©rieurs Ă  la production rĂ©elle[9].

On peut aussi souligner le fait qu'il existe des disparitĂ©s rĂ©gionales et locales importantes qui sont notamment exacerbĂ©es par un manque effectif d’infrastructures de qualitĂ©. Des disparitĂ©s qui sont d’autant plus Ă  souligner, qu’elles ne semblent pas faire l’objet d’un rĂ©Ă©quilibrage de la part de l’État vietnamien qui prĂ©fĂšre, Ă  la redistribution intĂ©rieure totale des ressources, privilĂ©gier les exportations plus rentables.

Ainsi dans certaines régions, spécialisées dans la production de denrées non alimentaires ou vouées à l'exportation telles que l'hévéa pour le caoutchouc ou bien encore le café, le manque de certaines ressources alimentaires se fait particuliÚrement criant.

Notes et références

  1. Manuelle Franck, « Une gĂ©ographie de l’Asie du Sud-Est », sur GĂ©oconfluences,
  2. Jean-Daniel Cesaro, « Transformation des agricultures en Asie du Sud-Est : la paysannerie face aux défis de la mondialisation », sur Géoconfluences,
  3. Jean-Daniel Cesaro, « L’industrialisation de l’élevage au Vietnam, entre marginalisation et spĂ©cialisation de la paysannerie », sur GĂ©oconfluences,
  4. Production vietnamienne en 2018, par la FAO
  5. Marie Mellac, Frederic Fortunel et Dan Tran Dac, La réforme fonciÚre au Vietnam. Analyse des jeux d'acteurs et du processus de transformation des institutions aux échelons central et provincial, Comité Technique "Foncier et développement, Agence française du développement (AFD) et MinistÚre des affaires étrangÚres (MAE), , 195 p. (lire en ligne)
  6. (en) Philip Hirsch, Marie Mellac et Natalia Scurrah, The Political Economy of Land Governance in Viet Nam, Mekong Region Land Governance, , 20 p. (lire en ligne), p.7
  7. AprÚs le Brésil. Voir FAO, Food and Agriculture Data, consulté le 2 juillet 2017.
  8. « Le riz vietnamien, bien plus qu'une simple denrée alimentaire », sur vietnamdecouverte.com (consulté le )
  9. G. Kolko, « Toujours moins de riz pour les Vietnamiens », Le Monde diplomatique, juillet 1996, no 27.

Pour approfondir

Sources et bibliographie

  • Jean-Daniel Cesaro, « Transformation des agricultures en Asie du Sud-Est : la paysannerie face aux dĂ©fis de la mondialisation », GĂ©oconfluences,‎ (ISSN 2492-7775, lire en ligne).
  • Jean-Daniel Cesaro, « L’industrialisation de l’élevage au Vietnam, entre marginalisation et spĂ©cialisation de la paysannerie », GĂ©oconfluences,‎ (ISSN 2492-7775, lire en ligne)
  • Service Économique de Hanoi, « L'agriculture au Vietnam », TrĂ©sor-Éco, Direction gĂ©nĂ©rale du TrĂ©sor - MinistĂšre de l'Économie et des Finances,‎ (lire en ligne [PDF], consultĂ© le ).
  • Bui Ngoc Hung et Nguyen Duc Tinh, « Le dĂ©veloppement de l'agriculture vietnamienne au cours des 15 derniĂšres annĂ©es », VertigO - La revue en sciences de l'environnement sur le WEB, vol. 3, no 2,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  • Moustier P., Vagneron I. et Bui Thi Thai, « Organisation et efficience des marchĂ©s de lĂ©gumes approvisionnant HanoĂŻ (Vietnam) », Cahiers agricultures, no 13,‎ (lire en ligne [PDF], consultĂ© le ).
  • (en) Daniel Schearf, « Vietnam Aims to Improve Coffee Supplier Reputation », VOA News,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
  • Steve DĂ©ry, La colonisation agricole au ViĂȘt Nam : Contribution Ă  l'Ă©tude de la construction d'un État moderne; du bouleversement Ă  l'intĂ©gration des Plateaux centraux, QuĂ©bec, Presses de l'UniversitĂ© du QuĂ©bec, (lire en ligne).

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