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Abbaye de Sedlec

L'abbaye de Sedlec est fondée en 1142, ce qui en fait la plus ancienne fondation cistercienne dans le royaume de Bohême. Abbaye-fille de Waldsassen, donc de la filiation de Morimond, Sedlec est une abbaye relativement prospère, qui fonde à son tour plusieurs abbayes-filles, Zbraslav, Skalice et Brno.

Abbaye de Sedlec
Photographie couleur d'une église gothique
L'abbatiale Notre-Dame-et-Saint-Jean-Baptiste de Sedlec

Nom local Sedlecký klášter
Diocèse Prague
Numéro d'ordre (selon Janauschek) CXCI (191)[1]
Fondation 1143
Dissolution 1784
Abbaye-mère Waldsassen
Lignée de Morimond
Abbayes-filles 688 - Zbraslav (1292-1785)
709 - Skalice (1357-1783)
Brno (1323-1782)
Période ou style
Protection Monument culturel sous le numéro 17408/2-1080
Patrimoine mondial au titre du centre-ville de Kutná Hora

Coordonnées 49° 57′ 36″ nord, 15° 17′ 25″ est[2]
Pays Drapeau de la Tchéquie République tchèque
Royaume originel Bohême
Région Bohême centrale
District Kutná Hora
Commune Kutná Hora
Géolocalisation sur la carte : Tchéquie
(Voir situation sur carte : Tchéquie)
Abbaye de Sedlec

Incendié lors des guerres hussites, le monastère est abandonné durant plus de trente ans, puis végète pendant plus de deux siècles. Au début du XVIIIe siècle, l'abbatiale, actuelle église de l'Assomption de Sedlec, est entièrement rebâtie et les bâtiments conventuels sont reconstruits, sous la direction de l'architecte Pavel Ignác Bayer (cs). Elle est achevée par Jan Blažej Santini-Aichel. Les fresques baroques du réfectoire sont l'œuvre de Juda Tadeáš Super (cs).

Les bâtiments sont abandonnés à la fin du XVIIIe siècle. En 1812, une manufacture de tabac s'installe dans les lieux et continue d'occuper une partie des bâtiments.

À la fin du XXe siècle, l'abbaye est déclarée Monument culturel et, en 1995, elle fait partie du périmètre du secteur inscrit au Patrimoine mondial par l'UNESCO.

Histoire

Fondation

L'abbaye de Sedlec est la première fondée sur le territoire de la Bohême, puisque sa fondation remonte à 1142. Le premier donateur est un noble nommé Miloslav[3].

Prospérité au Moyen Âge

Plan d'une église à cinq nefs.
Le plan de l'église abbatiale d'Heidenreich (1280-1320).

Les débuts de l'abbaye, malgré des donations importantes, sont assez modestes. La région est frappée à la fin du XIIIe siècle par la famine et la misère s'installe à l'abbaye. Mais, en 1282, les mines d'argent de Kutná Hora sont découvertes et leur exploitation commence ; or, une partie de ces mines est située dans les possessions de l'abbaye. L'abbé Heidenreich met en place une organisation efficace, devient le créancier de plusieurs princes, et le conseiller de Vaclav II. Il met aussi en place un système de taxes sur les maisons, les bains et les moulins de la ville Dès 1300, Sedlec est une des abbayes les plus riches de Bohême[3] - [4].

Après la mort de Venceslas III, qui éteint la dynastie des Přemyslides, Heidenreich, soutenu par Konrad abbé de Zbraslav, appuie la candidature de la Maison de Luxembourg au trône de Bohême puis négocie avec l'empereur Henri VII le mariage d'Eliška Přemyslovna avec Jean de Luxembourg, et frappe monnaie pour lui[3] - [4].

La construction de l'abbatiale (1280-1320) ayant excité la jalousie des bourgeois de Kutná Hora, ceux-ci cherchent à rivaliser avec les moines en construisant l'église Sainte-Barbe, qui prend le contre-pied de la sobriété cistercienne, en multipliant les ornements, les vitraux et les statues[4].

Outre le renforcement de l'abbaye elle-même, Heidenreich favorise l'essaimage, avec la fondation de plusieurs abbayes-filles : Zbraslav, Skalice[2] et Brno[5].

Crises, guerres et destructions

Gravure représentant un paysage en ruines dans lequel se distinguent plusieurs bâtiments intacts. L'église, au premier plan à droite, est très endommagée.
Le monastère à la fin du Moyen Âge. L'abbatiale de Heidenreich, en très mauvais état, est placée sur la droite.

Mais les dépenses somptuaires en objets de culte coûteux, la reconstruction à grands frais de l'abbaye et les nombreux prêts au trône de Bohême finissent pas épuiser les finances de la communauté, qui s'effondrent après l'abbatiat d'Heidenreich, entraînant une crise durable qui ne prend fin que sous le règne de Charles IV, soit plus d'un demi-siècle après. Même après son redressement, en 1409, Sedlec encourt toujours une dette énorme. Toutefois, à cette date, elle dispose d'une base économique solide, avec des possessions comprenant cinquante villages, deux petites villes, Malín (cs) et Malešov, ainsi que plus de vingt granges[3] - [4].

En 1421, durant les guerres hussites, l'abbaye de Sedlec est mise à sac et détruite. De nombreux moines sont tués, quelques-uns arrivent à prendre la fuite. En 1454, après trente-trois ans d'absence, une petite communauté monastique se reforme à Sedlec ; mais, trop faible pour être indépendante, elle dépend alors de l'abbaye de Skalice[3] - [4].

Renouveau et fermeture au XVIIIe siècle

Plan d'une église dont les voûtes de la nef sont entrelacées, et les travées des bas-côtés voûtés en coupoles.
Le plan de l'église du XVIIIe siècle.

Ce n’est qu'en 1700 que l'abbaye de Sedlec redevient autonome ; à cette époque, Sedlec est une centre intellectuel important en Bohême. L'église abbatiale est alors reconstruite sur les plans de Jan Blažej Santini-Aichel, qui y réalise un des exemples du style baroque gothique en la dotant en particulier de voûtes à nervures entrelacées[3] - [4].

Architecture

Abbaye de Sedlec *
Image illustrative de l’article Abbaye de Sedlec
Fresques baroques du réfectoire du XVIIIe siècle
Pays Drapeau de la Tchéquie République tchèque
Subdivision Kutná Hora, Bohême centrale
Type Culturel
Critères (ii) (iv)
Numéro
d’identification
732
Zone géographique Europe et Amérique du Nord **
Année d’inscription 1995 (19e session)
Autre protection Monument culturel
* Descriptif officiel UNESCO
** Classification UNESCO
Photographie couleur de la voûte d'une grande église, dont les nervures se croisent en formant des motifs courbes.
Les voûtes gothique à nervures entrelacées conçues par Jan Blažej Santini-Aichel.

Ancienne église abbatiale gothique

L'église abbatiale, reconstruite sous l'abbatiat d'Heidenreich, est la première église gothique de Bohême ; elle s'inspire explicitement des cathédrales d'Île-de-France, avec ses quatre nefs (une nef centrale, deux bas-côtés au nord, mais un seul au sud pour laisser de l'espace au cloître). Pour autant, elle s'inscrit dans la tradition bernardine d'un art cistercien très dépouillé, exempt de représentations que ce soit dans les vitraux (non figuratifs, voire absents des verrières) ou l'absence de statues[3] - [6].

Les études archéologiques récentes ont montré les étapes de la construction de cette première abbatiale. Suivant la méthode employée dans les chantiers comparables en France, ce sont le chœur et le transept qui ont été bâtis en premiers, puis la nef en allant vers la façade. La particularité de Sedlec est la construction de la nef centrale et de ses deux bas-côtés, puis l'adjonction postérieure du bas-côté septentrional[6]. Ce bas-côté avait une toiture comportant une pente beaucoup plus forte que celle de l'église baroque[7].

Le chœur revêt chez les cisterciens une importance toute particulière, et le traitement architectural choisi à Sedlec le met en valeur, en plaçant les chapelles latérales du déambulatoire en retrait, et en perçant les murs de celles-ci de vastes et lumineuses verrières afin d'éclairer l'espace central. Vues de l'extérieur, ces chapelles ne forment pas des ajouts à un corps de bâtiment principal, mais y sont intégrées par une unification de la charpente et de la toiture, qui couvre d'un seul tenant, sans rupture, mais avec une pente forte, l'ensemble du plan[8].

Une des particularités de l'abbatiale gothique de Sedlec par rapport à ses modèle de Royaumont et surtout d'Altenberg est l'absence totale d'arcs-boutants, où, de même quà Doberan (de) et dans un souci de dépouillement architectural, les cisterciens ont caché le report de poids et donc de forces à l'intérieur de la toiture pour pouvoir se passer de supports extérieurs visibles, ce qui montre de la part du maître d'œuvre du système d'ogives et de voûtes une excellente connaissance des principes constructifs[8].

L'inspiration architecturale de cette première église était à chercher dans les grandes abbatiales cisterciennes édifiées après la mort de Bernard de Clairvaux, qui était très opposé à ce luxe qu'il jugeait ostentatoire. On trouve des plans très proche de celui de Sedlec dans l'abbatiale de Clairvaux II, à Longpont et surtout à Royaumont, plan qui a servi également de modèle à Altenberg près de Cologne, ces deux dernières étant toutefois plus vastes que Sedlec[9].

Église abbatiale actuelle gothico-baroque

L'abbatiale du XVIIIe siècle est une église à cinq nefs (avec deux bas-côtés de part et d'autre de la nef principale), qui respecte le plan initial ainsi qu'un certaine sobriété propre aux cisterciens, notamment dans le traitement des verrières, mais qui se distingue par une voûte spectaculaire à nervures entrecroisées, ainsi que par un déambulatoire entourant le chœur[3] - [4]. Les nefs de l'église comptent neuf travées, la dixième étant déjà considérée comme faisant partie du transept gauche, qui est plus large que le droit, ce dernier ayant été amputé[6].

Cette église reprend de nombreux éléments de l'église initiale, notamment structurels. Les erchreches archéologiques récentes n'ont pas encore premis de déterminer jusqu'à quel niveau les structures initiales ont été ré-employées dans l'édifice gothico-baroque de Jan Blažej Santini-Aichel[10].

Une des particularités de l'église actuelle est d'avoir conservé quatre petits escaliers en colimaçon qui servaient durant le chantier aux ouvriers pour accéder aux étages supérieurs ou monter du petit matériel non pris en charge par les grues. Ces escaliers ont été construits avant les structures qui les englobent, et laissés en place après la construction[11].

Notes et références

  1. (la) Leopold Janauschek, Originum Cisterciensium : in quo, praemissis congregationum domiciliis adjectisque tabulis chronologico-genealogicis, veterum abbatiarum a monachis habitatarum fundationes ad fidem antiquissimorum fontium primus descripsit, t. I, Vienne, Vindobonae, , 491 p. (lire en ligne), p. 78.
  2. (it) Luigi Zanoni, « Sedlec », sur http://www.cistercensi.info, Certosa di Firenze (consulté le ).
  3. Bernard Peugniez, Routier cistercien, Gaud, , 1156 p. (ISBN 2-84080-044-6, présentation en ligne), « 1 - Sedlec », p. 1080-1081.
  4. Jean-François Leroux-Dhuys (photogr. Henri Gaud), Les abbayes cisterciennes : en France et en Europe, Paris, Place des Victoires, , 399 p. (ISBN 9782844590008, OCLC 1040417411), « Sedlec », p. 332-333.
  5. Bernadette Barrière et Marie-Élisabeth Montulet-Henneau, Cîteaux et les femmes : architectures et occupation de l'espace dans les monastères féminins : modalités d'intégration et de contrôle des femmes dans l'Ordre : les moniales cisterciennes aujourd'hui, Paris, Éditions Créaphis, , 353 p. (ISBN 9782907150996, lire en ligne), p. 57-68.
  6. Petr Kroupa 2002, Rekonstrukce stfiedovûké podoby - Gotický půdorys, p. 51 & 52.
  7. Petr Kroupa 2002, Rekonstrukce stfiedovûké podoby - Gotická elevace, p. 55.
  8. Petr Kroupa 2002, Architektonický typ - Exteriér cisterckých kostelů a Sedlec, p. 59.
  9. Petr Kroupa 2002, Architektonický typ - Katedrální půdorys a cisterciáci, p. 57.
  10. Petr Kroupa 2002, Rekonstrukce stfiedovûké podoby - Gotická elevace, p. 54.
  11. Petr Kroupa 2002, Rekonstrukce stfiedovûké podoby - Gotická elevace, p. 53.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • [Handbuch der historischen Stätten 1982] (de) Joachim Bahlcke (de), Winfried Eberhard et Miloslav Polívka, Böhmen und Mähren, t. 15, Stuttgart , Kröner, coll. « Kröners Taschenausgabe / Handbuch der historischen Stätten » (no 329), , 889 p. (ISBN 9783520329011, OCLC 632495034), p. 564-565
  • [Jiří Kuthan 1982] (de) Jiři Kuthan, Die mittelalterliche Baukunst der Zisterzienser in Böhmen und Mähren, Munich et Berlin, Deutscher Kunstverlag, (ISBN 9783422007383, OCLC 906449510), p. 564-565
  • [Charvátová & Líbal 1994] (cs) Kateřina Charvátová (cs) et Dobroslav Líbal, « Sedlec », dans Daniela Housková, Řád cisterciáků v českých zemích ve středověku. Sborník vydaný k 850. výročí založení kláštera v Plasech, Prague, Unicornis, , 143 p. (ISBN 9788090158719, OCLC 246531375), p. 38-43
  • [Marie Bláhová 1994] (cs) « Cisterciácké dějepisectví ve středověkých Čechách », Historický obzor, no 12, , p. 275-280 (ISSN 1210-6097, OCLC 23130809)
  • [Klára Benesovská 1996] (cs) Klára Benesovská, « Aula Regia près de Prague et Mons Regalis près de Paris », dans Kateřina Charvátová (cs), Cisterciáci ve středověkém českém státě. Sborník z kolokvia v Kutné Hoře 9.- 13. června 1993, t. 47, Abbaye de Westmalle, , 346 p. (OCLC 715502481, présentation en ligne), p. 321-323
  • [Petr Kroupa 2002] (cs) Petr Kroupa, « Klášterní kostel v Sedlci u Kutné Hory v kontextu cisterckého stavitelství ; dílčí úvaha k problematice gotické architektury », Průzkumy památek, vol. 9, nos 2002-2, , p. 51–74 (ISSN 1212-1487, présentation en ligne, lire en ligne)
  • [Štěpán Vácha 2008] (de) Štěpán Vácha, « Antiquitatis illustre monimentum ; Die Restaurierung der Klosterkirche in Sedletz in den Jahren 1700–1709 », Umění, no 56, , p. 384-408
  • [Teplý & Vácha 2009] (de) Libor Teplý et Štěpán Vácha, Splendissima basilica : Chrám Nanebevzetí Panny Marie a sv. Jana Křtitele v Sedlci u Kutné Hory, Kutná Hora, Římskokatolická farnost Kutná Hora-Sedlec, , 67 p. (ISBN 9788025460177, OCLC 607524760)
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