1917 en dadaïsme et surréalisme
Éphémérides
Janvier
André Breton est affecté comme infirmier à Paris, puis comme externe au centre neurologique de la Pitié[1].
Antonin Artaud est réformé temporairement.- À Barcelone, paraît le premier numéro de la revue 391[2] créée par Francis Picabia : « C'est mieux que rien, car vraiment ici, il n'y a rien[3]. »
- Philippe Soupault est hospitalisé à Paris (Boulevard Raspail), pour une bronchite, séquelle probable de l'expérimentation d'un vaccin contre la typhoïde. Il envoie son poème Départ à Guillaume Apollinaire qui le transmet à Pierre Albert-Birot.
- Au Café de Flore, Apollinaire présente Soupault à Pierre Reverdy, Max Jacob, Blaise Cendrars, Francis Carco, Raoul Dufy, Jean Cocteau et le présentant à Breton, il ajoute : « Il faut que vous deveniez amis[4]. »
Février
Paul Eluard obtient une permission pour épouser Gala arrivée à Paris depuis septembre dernier[5].
Mars
Parution du premier numéro de la revue Nord-Sud créée par Pierre Reverdy[6].
Guillaume Apollinaire, L’Horloge de demain, calligramme publié dans la revue de Francis Picabia 391.- Lettre d'Apollinaire à Paul Dermée : « Tout bien examiné, je crois en effet qu'il vaut mieux adopter surréalisme que surnaturalisme que j'avais d'abord employé. Surréalisme n'existe pas encore dans les dictionnaires, et il sera plus commode à manier que surnaturalisme déjà employé par MM. les Philosophes. »[7]
- Georges Ribemont-Dessaignes, Civilisation
- Eluard victime des gaz, est évacué du front[8].
Avril
Fontaine de Marcel Duchamp, photographie d'Alfred Stieglitz
Marcel Duchamp, Fontaine[9], ready-made. Proposée dans le cadre d'une exposition « sans jury et sans médaille » organisée à New York par la Société des artistes indépendants, l'œuvre est refusée pour cause d'« obscénité et de non-art ». Photographiée par Alfred Stieglitz, elle est aussitôt publiée dans la revue The Blind man.- André Masson est grièvement blessé pendant l'offensive du Chemin des Dames (Aisne).
Lettre de Jacques Vaché à Breton : « Êtes-vous sûr qu'Apollinaire vit encore, et que Rimbaud ait existé ? Pour moi je ne crois pas - je ne vois guère que Jarry (Tout de même, que voulez-vous, tout de même - UBU)[10]. »
Mai
- À Zurich, exposition Dada Musique et danse nègre[11].
- Pressé par Pierre Albert-Birot qui veut imprimer le programme des Mamelles de Tirésias, Apollinaire tranche définitivement pour drame surréaliste au lieu de drame surnaturaliste[12].
Juin
- Hugo Ball rompt avec Dada.
Première représentation, houleuse et interrompue, des Mamelles de Tirésias d'Apollinaire, mis en scène par Pierre Albert-Birot, à Paris. La légende veut que Jacques Vaché, déguisé en officier anglais et revolver au poing, aurait sommé de faire cesser le spectacle sous menace d'user de son arme contre le public et que Breton serait parvenu à le calmer. Même si l'authenticité de l'anecdote est discutée : Marc Polizzotti note que sur une vingtaine de comptes rendus de ce spectacle, aucun ne mentionne la « spectaculaire » réaction de Vaché[13]. Seul Louis Aragon a relaté cet incident, bien qu'il ne fut pas présent. Quant à Pierre Albert-Birot, il « doute qu'il ait pu avoir lieu »[14]. Breton cite ce geste comme un premier acte surréaliste qui symbolise « le fossé » qui sépare « deux styles de vie » et « deux styles de pensée[15]». Apollinaire apparaît sur la scène et crie au public « Cochons ! ». Philippe Soupault faisait office de souffleur.
Soupault achète à la librairie Ars et vita, située en face de l'hôpital du boulevard Raspail, un ouvrage broché dont le titre et l'auteur lui sont inconnus : Les Chants de Maldoror, Comte de Lautréamont. Soupault : « Depuis ce jour-là, véritable jour de ma naissance, personne ne m'a reconnu. Je ne sais plus moi-même si j'ai du cœur[16].»
Juillet
- Parution à Zurich du premier numéro de la revue Dada créée par Tristan Tzara[17].
Paul Eluard, Le Devoir et l'inquiétude, publié par les soins de son ami Jules Gono, éditeur et relieur d'art[18].- Nord-Sud fait paraître dans son numéro de juin-juillet des poèmes de Tzara.
Août
Septembre
- 1er septembre
Breton, interne à l'hôpital du Val-de-Grâce y fait la connaissance de Louis Aragon[20].
Breton : « Vraiment un poète avec des yeux levés très haut, sans rien dans le geste de convenu et si mal adapté[21] ! » - Adrienne Monnier solde le numéro de la revue "Vers et prose" contenant le premier des Chants de Maldoror de Lautréamont. Aragon et Breton achètent le lot, en distribuent les exemplaires à leurs amis et passent leurs nuits de garde au service des aliénés à se les lire à haute voix[22]. Aragon : « Parfois, derrière les portes cadenassées, les fous hurlaient, nous insultant, frappant les murs de leurs poings. Cela donnait au texte un commentaire obscène et surprenant. Les brusques trous de silence étaient plus impressionnants encore que le vacarme démentiel. »[23].
Octobre
- Tristan Tzara publie une « Note sur l'art nègre » et le poème « retraite » dans le no 21-22 de SIC, ce qui marque le début de sa collaboration avec cette revue française d'art dirigée par Pierre Albert-Birot.
- À Bruxelles, Clément Pansaers fonde la revue Résurrection[24] qui publie ses propres gravures sur bois et des textes de Carl Einstein, Pierre Jean Jouve, Charles Vildrac et Franz Werfel.
Novembre
Conférence de Guillaume Apollinaire L'Esprit nouveau et les poètes : « Un mouchoir qui tombe peut être pour le poète le levier avec lequel il soulèvera tout un univers. » Déception de Breton quand il entend Apollinaire parler de « bon sens français » et de son « horreur du chaos ou du désordre ».
Décembre
- Artaud est réformé définitivement.
Cette année-là
- Séjour d'Artaud à Divonne-les-Bains (Ain). Un médecin croit reconnaître dans les symptômes une syphilis héréditaire et prescrit un traitement par piqûres à base d'arsenic, de mercure et de bismuth.
- À New York, invité à participer à une conférence sur l'humour, Arthur Cravan se met à rire sans rien dire et commence à se déshabiller jusqu'à l'intervention de la police.
- Georges Ribemont-Dessaignes est démobilisé.
- Contraints de fermer le Cabaret Voltaire, les dadaïstes ouvrent une galerie dans l'artère principale de Zurich, la Bahnhofstrasse[25].
Œuvres
- Guillaume Apollinaire
- Les Mamelles de Tirésias, sous-titré « drame surréaliste en deux actes et un prologue »
- Jean Arp
- Fleur-marteau, papiers découpés[26]
- Larmes d'Enak : formes terrestres[27]
- La Mise au tombeau des oiseaux et papillons (Portrait de Tristan Tzara)[28], reliefs : planches de bois aux contours sinueux, découpées, fixées et peintes ou non
- Série de collages comportant le titre récurrent […] selon les lois du hasard[29]
- Hugo Ball
- Karawane, poème non-sensique[30]
- Marc Chagall
- Les Amoureux au-dessus de la ville, huile sur toile
- Serge Charchoune
- Chant-canon, huile sur toile
- Giorgio De Chirico
- Marcel Duchamp
- Apolinère Enameled, huile sur toile[37]
- Fontaine, ready-made : urinoir renversé et signé « R. Mutt »[38]
- Trébuchet, readymade : portemanteau en bois et métal, fixé au sol[39]
- Paul Eluard
- Le Devoir et l'inquiétude
- Elsa von Freytag-Loringhoven
- God, sculpture : tuyau de plomb fiché dans un socle en bois
- George Grosz
- Francis Picabia
- La Musique est comme la peinture, vernis sur linoléum[42]
- Parade amoureuse[43]
- Portrait de Marie Laurencin, Four in hand[44]
- Man Ray
- Trois parasoleils pour dames et cavaliers délicats, dessin[45]
- Georges Ribemont-Dessaignes
- Civilisation : « Il est avéré désormais que le plus pur moyen de témoigner de l'amour à son prochain est bien de le manger. [...] Posséder par le cœur, ou posséder par l'estomac ? Celui-ci est plus certain. Et puis, en cas de contre-ordre, il y a toujours la nausée. »
- Philippe Soupault
- Aquarium
- Sophie Taeuber
- Beatrice Wood
- Un peut d'eau dans du savon, tableau composite[47]
Notes et références
Références
- Marguerite Bonnet, André Breton, Œuvres complètes, tome 1 : chronologie, Bibliothèque de la Pléiade, éditions Gallimard, Paris, 1988, p. XXXV.
- Laurent Le Bon (sous la direction de), Dada, Éditions du Centre Pompidou, Paris, 2005, p. 65 et suivantes.
- Lettre à Alfred Stieglitz, Le Bon, op. cit., p. 64.
- Lydie Lachenal, Philippe Soupault. Littérature et le reste, Gallimard, Paris, 2006, p. 323.
- Marcelle Dumas & Lucien Scheler, Paul Eluard, poésies complètes : chronologie, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, Paris, 1968, p. LXI.
- Bonnet, op. cit., p. XXXV et note 3, p. 1075.
- Adam Biro & René Passeron (sous la direction de), Dictionnaire général du surréalisme et de ses environs, Office du livre, Genève & Presses universitaires de France, Paris, 1982, p. 28 et Pierre-Marcel Adéma, Guillaume Apollinaire, La Table ronde, 1968, p. 304 et suivantes.
- Référence disparue à cause d'une wikification forcenée et absconse !
- Serge Lemoine, Dada, éditions Hazan, Paris, 1991-2005, p. 25.
- Jacques Vaché, Lettres de guerre, éd. Mille et une nuits, 2001, p. 19.
- Lemoine, op. cit., p. 91.
- Albert-Birot explique comment cette hésitation a été tranchée lors d'une conversation « en mai, quand [il] prépare l'impression du programme », « Naissance et vie de SIC », les Lettres nouvelles, no 2, septembre 1953.
- Marc Polizzotti, André Breton, Gallimard, 1995, p. 73.
- Marie-Louise Lentengre, Pierre Albert-Birot ou l'invention de soi, Jean-Michel Place, 1993, p. 122.
- André Breton, Entretiens, Paris, Gallimard, 1969, p. 35.
- Lachenal, op. cit., p. 322.
- Lemoine, op. cit., p.91.
- Référence perdue à cause de la wikification forcenée !
- Pierre Daix La Vie quotidienne des surréalistes, 1917-1932, Hachette, Paris, 1993, p. 38.
- Daix, op. cit., p. 26
- Lettre à Théodore Fraenkel, citée dans Bonnet, op. cit., p. XXXV.
- Daix, op. cit., p. 26.
- Daix, op. cit., p. 28.
- Magazine littéraire, n° 256, juillet 1988, p. 10.
- Lemoine, op. cit., p. 21.
- Reproduction dans José Pierre, L'Univers surréaliste, Somogy, Paris, 1983, p. 115.
- Reproduction dans Gérard Durozoi, Le Surréalisme, éditions Hazan, Paris, 2002, p. 12.
- Reproduction dans Lemoine, op. cit., p. 21.
- Reproduction dans Le Bon, op. cit., p. 465.
- Lemoine, op. cit., p. 22.
- Museo d'arte moderna di Ca'Pesarfo, Venise. Reproduction dans Dossier de l'art n° 160, février 2009, p. 70.
- Reproduction dans Gabriele Crepaldi, L'Art moderne 1900-1945, Gründ, 2006, p. 189.
- 95,5 × 70,5 cm. Reproduction dans Beaux Arts magazine n° 335, mai 2012, p. 162.
- Reproduction dans Crepaldi, op. cit., p. 186.
- Crepaldi, op. cit., p. 186.
- Reproduction dans Crepaldi, op. cit., p. 190.
- Reproduction dans Le Bon, op. cit., p. 82.
- Reproduction dans Lemoine, op. cit., p. 25.
- 11,7 x 100 cm. Disparu. Reproduction dans Janis Mink, Duchamp, Taschen & Le Monde, Paris, 2006, p. 51.
- Reproduction dans Beaux arts magazine n° 132, mars 1996, p. 66.
- 68 × 47,6 cm, New York, Museum of Modern Art. Reproduction dans Le Bon, op. cit., p. 336 et Lemoine, op. cit., p. 42.
- Reproduction dans Crepaldi, op. cit., p. 200.
- André Breton, Le Surréalisme et la Peinture, Gallimard, 1928-1965, p. 20.
- Reproduction dans Lemoine, op. cit., p. 27.
- Reproduction dans Beaux Arts magazine n° 82, septembre 1990, p. 25.
- Reproduction dans Durozoi, op. cit., p. 13.
- Il n'y a pas d'erreur d'orthographe : il faut écrire peut. Reproduction dans Le Bon, op. cit., p. 977.
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