Émile Gilliard
Émile Gilliard[note 1], né à Malonne le et mort à Liège le [1], est un écrivain belge de langue wallonne.
Naissance | |
---|---|
Décès |
(à 94 ans) Liège |
Nationalité | |
Activités |
Membre de |
---|
Biographie
Émile Gilliard a passé son enfance et son adolescence à Moustier-sur-Sambre. Sa grand-mère paternelle résidait à Jemeppe-sur-Sambre, où il a vécu plusieurs années auprès d'elle ; sa famille maternelle, quant à elle, était originaire de Spy. Les grands parents de cet auteur ne parlaient que le wallon ; il l'a donc appris à leur contact[2]. Il était fier de ces origines[3].
Il a effectué l'essentiel de sa carrière à la bibliothèque des Comtes de Hainaut à Mons, en tant que bibliothécaire, puis en tant que directeur. Auparavant, il a été enseignant au Collègue du Sacré-Cœur de Profondeville, de 1954 à 1957, puis a été employé comme secrétaire, jusqu'en 1959. Il prend sa retraite en 1993[4].
Il épouse Jeanine Schmitz le 27 novembre 1957[4]. Elle est le sujet d'un grand nombre de ses poèmes[3], et en particulier du dernier recueil inédit paru du vivant de l'auteur, Zouprale. Sauvageonne (2022). Son frère, Fernand Gilliard, est peintre ; c'est lui qui a réalisé l'illustration de couverture de Dès djins à paurt.
Émile Gilliard est l'auteur de nombreux recueils de poèmes comme Chîmagrawes (wa) (1955), Pâtërs po tote one sôte di djins (1959), Vias d’mârs´ (wa) (1961), Rukes di tëre (1966), Li dêrène saison (1976), Sillicose valley et tchökmwâr (1989), Vicadje (1992). En poésie, il se considère comme un « disciple proche » de Jean Guillaume[5].
Ses efforts dans cette veine sont très tôt remarqués. En 1959, il obtient le Prix de littérature wallonne de la Ville de Liège pour son deuxième recueil et, en 1965, il est finaliste du Prix biennal de littérature wallonne, qui est finalement remis à Géo Libbrecht pour la période 1958-1963. À cette occasion, le jury note le caractère prometteur de son œuvre :
« M. Gilliard est poète, indiscutablement. Son meilleur recueil, Pâtërs po tote one sôte di djins, a été fort apprécié par le jury. Toutes les ressources du wallon de Moustier-sur-Sambre, dialecte de M. Gilliard, y sont maîtrisées et contribuent à donner à une pensée claire, à une chaude sensibilité, à une belle imagination, du relief et de l'éclat. Le vers, sans s'assujettir totalement aux normes classiques, est toujours mesuré et coule sans effort. Il transmet au lecteur une poésie aux accents profondément humains. Considérant ces qualités, le jury souhaite voir M. Gilliard persévérer dans la poésie dialectale et serait heureux si des mérites aussi incontestables pouvaient recevoir leur récompense[6]. »
Également auteur de proses, il a notamment traduit en wallon le roman Collines de Jean Giono sous le titre Su lès tiènes.
Il a reçu le Prix triennal de l'œuvre en prose en 1996 et le Prix triennal de poésie en 2005. En 2000, il publie Conjugaison et lexique de 5000 verbes wallons (wa) et, en 2008, il obtient le Prix biennal de philologie pour son Dictionnaire wallon. Niyau d' ratoûrnûres èt d' mots walons d'après Moustî èt avaur la (wa). Le linguiste Jean Germain a qualifié ce dernier ouvrage de « nouveau monument de la lexicographie namuroise »[7].
Émile Gilliard est reçu comme membre des Rèlîs namurwès en 1953 et comme membre titulaire de la Société de langue et de littérature wallonnes en 1977[8]. En 1995, il est élu président de cette dernière société[4] ; il occupe cette fonction de 1996 à 1998[9]
Il est cité dans l'anthologie Poètes wallons d’aujourd’hui[8] et dans l'Anthologie de la littérature wallonne, toutes deux dirigées par Maurice Piron. Il est également présent dans l'anthologie The Colour of the Weather. An anthology of walloon poetry (1980), de Yann Lovelock (en)[10]. De son vivant, il collaborait aux périodiques littéraires Les Cahiers wallons et micRomania[11].
Émile Gilliard est inhumé à Moustier-sur-Sambre, le village dont il est originaire[8].
Œuvre[note 2]
Poésie
- Chîmagrawes (wa), Moustier-sur-Sambre, éd. Imprimerie Léonard, 1955, 64 p.
- Al craye dèl vîye, 1959, 16 p.
- Pâtêrs po tote one sôte di djins, Namur, éd. Imprimerie Servais, 1959, 40 p.
- Vias d’mârs´ (wa), 1961, 30 p.
- Rukes di têre, Mons, éd. de Diffusion du livre wallon, 1966, 32 p.
- Li Dêrène saison, Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Littérature dialectale d’aujourd’hui », no 2, 1976, 44 p.
- N'alez nin dîre qu'i baure ! (Carmina Walonica I), 1981, 16 p.
- Silicose Valley & Tchōkmwâr, Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Littérature dialectale d’aujourd’hui », no 20, 1989, 51 p.
- Paurt èt r'vindje, 1990, 20 p.
- Pâtêr po nosse payis walon, éd. Union culturelle wallonne, 1990, 15 p.
- À ipe. Limites (wa), préface de Jean-Marie Pierret, Mons, éd. de Diffusion du livre wallon, 1992, 72 p.
- Vicadje, Mons, éd. de Diffusion du livre wallon, 1992, 48 p.
- Li navia dèl pîrète, Mons, éd. de Diffusion du livre wallon, 1992, 40 p.
- Frûts, 1993
- Come dès gayes su on baston et autres poèmes, 1995, 16 p.
- Crèchinces, 1998, 24 p.
- Pâtërs po tote one sôte di djins, Vias d’ mârs et Rukes di tëre, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2001, 106 p.
- Bokèts dèl dêrène chîje : Skèrnaches, Plomions, Crèchinces, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2004, 90 p.
- Wayemadje (wa), Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Littérature dialectale d’aujourd’hui », no 38, 2013 (ISBN 978-2-930505-16-9)
- Céncante powézîyes rèlîtes foû d’ mès scriyadjes, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2010, 62 p.
- On-èsté dins vos-ouy et Noste Ârcadîye da nos-ôtes, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2011, 46 p.
- Zouprale. Sauvageonne (wa), Charleroi, éd. CROMBEL, coll. « micRomania », no 37, 2022, 56 p. (ISBN 978-2-931107-05-8)
- Su lès spales do novia djoû (wa), Bruxelles, éd. Fédération Wallonie-Bruxelles, Service général des Lettres et du Livre, coll. « Fureur de Lire », 2022, 24 p. (ISBN 978-2-930964-75-1)
Prose
- Su lès tiènes (wa), trad. de Collines de Jean Giono, Mons, éd. de Diffusion du livre wallon, 1991, 144 p.
- Rodjimont, paskéyes di todi, récits en prose, 1991, 144 p.
- A chîjes trawéyes (wa), recueil de nouvelles, 1996, 20 p.
- On vî fuzik èruni èt sacants-ôtès paskèyes, Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Littérature dialectale d’aujourd’hui », no 29, 1997, 56 p.
- Dèl Ruwane au Bwès Djilèt (wa), recueil de nouvelles, 2000, 36 p.
- Dès djins à paurt, recueil de nouvelles, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2001, 80 p.
- Lès djoûs racoûtichenut. Ratûzadjes dèl dêrène bèguène di Goyèt (wa), roman, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2002, 115 p.
- Lès coméres dèl coû èt sacants paskéyes, recueil de nouvelles, 70 p.
- Paskéyes d’ avaur ci (wa), Charleroi, éd. CROMBEL, coll. « micRomania », no 19, 2009, 328 p.
- Su lès trîs dès Golètes (wa), roman, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2011, 82 p.
- S’apinse Seûr Lidîye. Nouveaux ratûzadjes dèl dêrène bèguène di Goyèt (wa), 2014, 97 p.
- Dèviè l'an carante. Sovenances rassërcîyes (wa), Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Littérature dialectale d’aujourd’hui », no 40, 2017, 109 p.
Essais
- L'Œuvre poétique wallonne de Franz Dewandelaer (1909-1952) (coécrit avec Yvan Dewandelaer, Émile Lempereur & Jean-Marie Pierret), Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Mémoire wallonne », no 7, 2003, 76 p.
- Le Centième anniversaire des Rèlîs namurwès (coécrit avec Joseph Dewez, Jean Germain & Bernard Louis), Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Mémoire wallonne », no 14, 2011, 128 p. (ISBN 978-2-930505-10-7)
- Défense et promotion de la langue wallonne, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2013, 160 p.
- Hommage à Gabrielle Bernard (1893-1963) (coécrit avec Bernard Louis), Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Mémoire wallonne », no 20, 2018, 94 p. (ISBN 978-2-930505-26-8)
Ouvrages philologiques
- Conjugaison et lexique de 5000 verbes wallons. Wallon central. Parler de Moustier-sur-Sambre (wa), Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2000, 240 p.
- Dictionnaire wallon. Niyau d' ratoûrnûres èt d' mots walons d'après Moustî èt avaur la (payis d' Nameur) (wa), Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2007, 690 p.
- Complément au Dictionnaire wallon, Liège, éd. Dîre èt scrîre è walon, 2012, 112 p.
- Spots èt ratoûrnûres. Proverbes et expressions typiques du wallon de Moustier-sur-Sambre (wallon central) (wa), Charleroi, éd. CROMBEL, coll. « micRomania Lingva », no 10, 2019, 239 p. (ISBN 978-2-930364-84-1)
Prix et Distinctions
- 1951 et 1956 : Prix Chîjes èt pasquéyes de Vers l'Avenir[12]
- 1952 : Prix Joseph-Durbuy de la Ville de Huy[12]
- 1953 : admission à la société des Rèlîs namurwès
- 1953 : Prix du journal Nosse Pèron[12]
- 1959 : Prix de littérature wallonne de la Ville de Liège, pour l'ensemble de son œuvre[12]
- 1969 : Prix des Rèlîs Namurwès[12]
- 1970 : Prix du Gouvernement[12] - [13]
- 1977 : admission à la Société de langue et de littérature wallonnes, en tant que successeur d'Auguste Laloux
- 1980 : Prix Georges Michaux de la Ville de Namur, pour N'alez nin dîre qu'i baure ![12] - [14]
- 1996 : Prix triennal de l'œuvre en prose de la Fédération Wallonie-Bruxelles (ex-æquo avec Laurent Hendschel), pour On vî fuzik èruni èt sacants-ôtès paskèyes et À chîjes trawéyes
- 2005 : Prix triennal de poésie de la Fédération Wallonie-Bruxelles, pour Bokèts po l' dêrène chîje
- 2008 : Prix biennal de philologie de la Fédération Wallonie-Bruxelles, pour Dictionnaire wallon. Niyau d' ratoûrnûres èt d' mots walons d'après Moustî èt avaur la
Notes et références
Notes
- Certains wallophones ont parfois adapté son nom de l'une ou l'autre manière suivante : « Mile Jiyârd », « Mimile Djiyåd ». L'auteur, quant à lui, a toujours signé Émile Gilliard, sans chercher à adapter ni son prénom ni son patronyme.
- À la suite d'évolutions dans les conventions orthographiques adoptées par l'auteur, certains sons sont marqués « ê » dans les premières éditions, et « ë » dans les secondes éditions. C'est notamment le cas pour les titres Pâtêrs po tote one sôte di djins et Rukes di têre. L'auteur justifie ce choix dans son article « Le wallon tel qu'on le parlait à Moustier » : « Nous possédons également à Moustier un son è long (proche de â très ouvert ou de in) : fiêr ‘fer’, tchêr ‘cher’, poûssêre ‘poussière’, notamment. On le retrouve également dans les verbes conjugués comme ètèrer, intrer où le son è est suivi d'une syllabe avec e muet : on l'ètêrerè, nos-intêrerans, i mostêreront. Il est typique de notre entité. Pour permettre au lecteur de le distinguer facilement, en practicien régional que je suis, je l'écris ë, graphie que j'ai adoptée pour mon dictionnaire et dans mes œuvres les plus récentes. » (Émile Gilliard, « Le wallon tel qu'on le parlait à Moustier », dans Bernard Louis & Émile Gilliard, Hommage à Gabrielle Bernard (1893-1963), Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Mémoire wallonne », no 20, 2018, p. 41.)
Références
- J.No., « Namur - Jemeppe: le wallon pleure son écrivain Emile Gilliard », dans L'Avenir, 25 mars 2023.
- Émile Gilliard, « Le wallon tel qu'on le parlait à Moustier », dans Bernard Louis & Émile Gilliard, Hommage à Gabrielle Bernard (1893-1963), Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Mémoire wallonne », no 20, 2018, p. 36.
- Joseph Dewez, « Émile Gilliard èst mwârt », dans Les Cahiers wallons, 86e année, no 2, mars-avril 2023, p. 33-34.
- Elizabeth Sleeman (dir.), International Who's Who in Poetry 2004, Londres-New York, éd. Europa Publications, 2003, p. 123.
- Émile Gilliard, « 1950. Pacifique révolution chez les Rèlîs », dans Joseph Dewez, Jean Germain, Émile Gilliard & Bernard Louis, Le Centième anniversaire des Rèlîs namurwès, Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Mémoire wallonne », no 14, 2011, p. 32.
- Pierre Ruelle, « Rapport sur le Prix biennal de littérature Wallonne (poésie — période 1958-1963) », dans Bulletin de l'Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises, t. XLIII, no 1, Bruxelles, Palais des Académies, 1965, p. 55-56.
- Jean Germain, « La lexicographie namuroise. Deux siècles de dictionnaires et de glossaires wallons en province de Namur », dans Joseph Dewez, Jean Germain, Émile Gilliard & Bernard Louis, Le Centième anniversaire des Rèlîs namurwès, Liège, éd. Société de langue et de littérature wallonnes, coll. « Mémoire wallonne », no 14, 2011, p. 92.
- Julien Noël, « Décès d'Émile Gillard », sur le portail Objectif plumes, 2023 (page consultée le 4 avril 2023).
- Baptiste Frankinet, « In memoriam. Émile Gilliard (1928-2023) », dans Chronique de la Société de langue et de littérature wallonnes, 2e trimestre 2023, p. 5.
- Jean-Luc Fauconnier, « Émile Gilliard (Malonne 1928 - Liège 2023) », dans Èl Bourdon, no 755, avril 2023, p. 5.
- « In memoriam. Émile Gilliard (Malonne 1928 - Liège 2023 », dans micRomania, no 125, juin 2023, p. 41.
- Baptiste Frankinet, « In memoriam. Émile Gilliard (1928-2023) », dans Chronique de la Société de langue et de littérature wallonnes, 2e trimestre 2023, p. 2-3.
- Jean-Luc Fauconnier, « Émile Gilliard (Malonne 1928 - Liège 2023) », dans Èl Bourdon, no 755, avril 2023, p. 2.
- Les Cahiers wallons, 44e année, no 2, février 1981, p. 17.