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Zofia Romanowicz

Zofia Romanowicz (née Zofia Górska; 18 octobre 1922-28 mars 2010), romancière, essayiste, poète, et traductrice polonaise établie en France après 1945, fut une éminente personnalité parmi les romanciers polonais émigrés de la seconde moitié du XXe siècle.

Zofia Romanowicz
Zofia Romanowicz à Jours-lès-Baigneux en 1987.
Biographie
Naissance
Décès
(à 87 ans)
Lailly-en-Val
Nom de naissance
Zofia Górska
Pseudonyme
Claudia
Nationalités
Activités
Conjoint
Kazimierz Romanowicz (d)
Enfant
Autres informations
Membre de
Association des écrivains polonais (en)
Lieu de détention
Distinction

Biographie

Née à Radom en Pologne, Zofia Górska avait 16 ans lorsque la Seconde guerre mondiale éclata le 1er septembre 1939. Depuis Radom, elle s’engagea dans l’organisation de résistance Związek Walki Zbrojnej. Arrêtée avec son père par la Gestapo en janvier 1941, elle fut condamnée à mort et emprisonnée à Skarżysko-Kamienne, Kielce, et Pinczów (Pologne). En Avril 1942, elle fut transportée au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück au nord de Berlin (Allemagne), où elle resta jusqu’à son transport en septembre 1943 au camp de travail de Neu-Rohlau près de Carlsbad (Tchécoslovaquie), où elle travailla dans une usine de faïence. À la fin de la guerre, elle rejoignit les lignes américaines puis arriva à Rome (Italie), où elle fut encadrée par Melchior Wańkowicz et obtint en 1946 son diplôme du Lycée polonais établi à Porto San Giorgio par le 2e corps polonais. Elle s’installa à Paris (France) et s’inscrivit à la Sorbonne dans le programme de philologie romane sous la direction du professeur Jean Boutière. En 1948, elle fit la connaissance de Kazimierz Romanowicz (1916-2010), qui avait travaillé comme spécialiste du département français de la librairie polonaise Gebethner & Wolff et était officier du 2e corps polonais. Après leur mariage en juillet 1948 ils dirigèrent la librairie et maison d’édition Libella fondée par Kazimierz Romanowicz rue Saint-Louis-en-l’Île à Paris en 1946 comme branche culturelle du 2e corps polonais. Ensemble, Zofia et Kazimierz Romanowicz fondèrent la galerie Lambert en 1959 dans un local jouxtant la librairie. Ces deux sites furent parmi les principaux centres culturels polonais en émigration pendant la guerre froide. Engagée dans la défense des droits civils, Zofia Romanowicz signa en 1976 avec 66 intellectuels polonais la Lettre de 59 pour protester contre les restrictions apportées aux libertés civiles par une réforme constitutionnelle. Elle fut une personnalité culturelle importante des cercles polonais émigrés et des milieux intellectuels parisiens. Après la fermeture de la galerie Lambert et de la librairie Libella en 1993, elle se consacra à ses activités littéraires en France et en Pologne. Elle décéda à la Maison de retraite du Fonds humanitaire polonais à Lailly-en-Val (France) en 2010 à l’âge de 87 ans.

Carrière littéraire

Zofia Górska écrivit ses premiers poèmes pendant ses années de lycée à Radom, et elle en écrivit un grand nombre pendant ses incarcérations entre 1941 et 1944. Recopiés par ses co-détenues de Ravensbrück dans de tout petits carnets, ces poèmes voyagèrent avec elle vers la liberté. Elle publia son premier récit, Tomuś et plusieurs poèmes de Ravensbrück dans les publications du 2e corps polonais à Rome. Après 1948, elle signa ses œuvres de son nom d’épouse, Zofia Romanowicz. Elle publia d’abord plusieurs traductions en polonais ainsi que des récits sur ses expériences pendant la guerre. La totalité de ses poèmes de guerre fut publiée en 1961 dans un ouvrage collectif, Ravensbrück. Wiersze obozowe [Ravensbrück. Poèmes du camp] in 1961. À la Sorbonne, elle devint spécialiste de la poésie des troubadours, participa à des conférences internationales, et produisit en 1963 une anthologie de poésie des troubadours provençaux dans sa traduction en polonais, Brewiarz miłości [Bréviaire d’amour], qui fut publié en Pologne et réédité en 2000.

En 1955, elle écrivit des essais et des récits qui furent publiés dans les revues Wiadomości Literackie (Londres) et Kultura (Paris). Son premier roman, Baśka i Barbara, lui fut inspiré par sa fille et traitait de l’éducation bilingue et biculturelle d’un enfant en émigration. Il fut publié par Libella en 1956, puis réédité deux fois en Pologne en 1958, où il connut un vif succès. En 1964, la maison d’édition de Varsovie, Państwowy Instytut Wydawniczy (PIW), annula la publication de son roman  Szklana kula [La Boule de verre] parce que Libella envoyait en Pologne des publications interdites par le régime communiste. Libella publia ce roman en 1964 et PIW le republia en 2021 à l’occasion du 70e anniversaire de cette maison d’édition. Les romans des années 1960 furent traduits en anglais, français, allemand, roumain, macédonien, et hébreu et lui valurent le prix Kościelski en 1964.


En 1965 Zofia Romanowicz regroupa 17 récits dans le volume Próby i zamiary [Essais et tentatives] et commença à publier ses romans auprès de la Fondation Littéraire Polonaise de Londres et de l’Institut littéraire de Maisons-Laffitte, Kultura, ce qu’elle continua à faire jusqu’en 1984. Après une interruption de publication en Pologne de 26 ans, son roman Łagodne oko błękitu [Le Chandail bleu], probablement sa contribution la plus importante à la littérature des camps, fut réédité par la maison d’édition catholique PAX en 1987 à Varsovie et elle reçut cette année-là le prix de la Fondation littéraire de Varsovie pour la contribution littéraire la plus importante de l’année. Après la réunification des communautés littéraires et culturelles polonaises et émigrées qui fut rendue possible par la fin de la guerre froide, elle publia ses deux derniers romans, Ruchome schody [L’Escalier roulant] et Trybulacje proboszcza P. [Les Tribulations du curé P.] en Pologne. Elle collabora avec Tygodnik Solidarności à partir de 1991 et avec Odra à partir de 1999, et ses articles et essais furent également publiés dans Tygodnik Powszechny et Nowa Kultura.

Zofia Romanowicz apporta des contributions majeures à la littérature européenne de la seconde moitié du XXe siècle. Bien qu’elle soit interdite de séjour et de publication en Pologne pendant la guerre froide, elle y maintint des contacts littéraires, et ses publications tant à l’émigration qu’en Pologne reflétèrent les fluctuations politiques et culturelles de la guerre froide. Elle écrivit en polonais mais aimait aussi produire la première version française de ses œuvres. En 1976, elle devint membre du jury du prix littéraire annuel décerné par la revue Wiadomości Literackie de Londres. Elle était membre de l’Union des Écrivains Polonais en Exil de 1946 à 1989, et membre de l’Union des écrivains polonais de 1989 à 2010.

Prix et distinctions

  • 1960 : Przejście przez Morze Czerwone [Le Passage de la mer Rouge] nommé meilleur livre polonais de l’année publié en émigration par Radio Free Europe
  • 1964 : prix de la Fondation Kościelski
  • 1966 : prix de “Wiadomiści Literackie” du meilleur livre polonais publié en émigration en 1965 pour Próby i zamiary [Essais et tentatives]
  • 1971 : prix Alfred-Jurzykowski pour l’ensemble de son œuvre
  • 1973 : Groby Napoleona [Les tombeaux de napoléon] nommé meilleur livre polonais de 1972 publié en émigration par Radio Free Europe
  • 1976 : médaille d’or pour l’ensemble de son œuvre poétique, décernée par les Amis de l’Art polonais de Détroit (USA) à l’occasion de leur 200e anniversaire
  • 1981    prix Hermina-Naglerowa pour meilleur livre polonais de 1980 publié en émigration, décerné par l’Union des écrivains polonais en exil pour Skrytki [Oubliettes]
  • 1985    prix Zygmunt-Hertz pour Skrytki [Oubliettes], décerné par l’Institut littéraire de Maisons-Laffitte
  • 1987    prix de la Fondation Littéraire de Varsovie pour Łagodne oko błękitu [Le Chandail bleu], qui récompense la contribution littéraire la plus importante
  • 1988 : lauréate du prix de l’Union des écrivains polonais pour l’ensemble de son œuvre
  • 1994 : croix de chevalier de l’ordre du mérite de la République polonaise
  • 1994 : diplôme du ministre des Affaires étrangères de la République de Pologne pour contributions exceptionnelles à la culture polonaise
  • 1994 : prix des Éditeurs du PEN-Club polonais
  • 1994 : distinction honoraire de l’Association polonaise des éditeurs de livres
  • 2000 : prix littéraire du ministère polonais de la Culture et de l’Héritage national

Œuvres

Brewiarz miłości. Varsovie: Ossolineum, 1963.

Baśka i Barbara. Paris, Libella, 1956. Warsaw: PIW, 1958.

Przejście przez Morze Czerwone. Paris, Libella, 1960. Warsaw: PIW, 1961.

Ravensbrück. Wiersze obozowe. Varsovie: Zarząd główny, Klub Ravensbrück, 1961.

Słońce dziesięciu linii. Paris, Libella, 1963.

Szklana kula. Paris, Libella, 1964. Varsovie: PIW, 2021.

Próby i zamiary. Londres, Polska Fundacja Literacka, 1965.

Łagodne oko błękitu. Paris: Libella, 1968. Warsaw: PAX, 1987. Audio book, Varsovie, Zakład nagrań i Wydawnictw Związku Niewidomych, Pax, 1989.

Groby Napoleona. Londres, Polska Fundacja Literacka, 1972.

Sono felice. Londres, Polska Fundacja Literacka, 1977.

Skrytki. Paris: Instytut Literacki, 1980.

Na wyspie. Paris: Instytut Literacki, 1984.

Ruchome schody. Varsovie: PIW, 1995.

Trubadurzy prowansalscy: liryki najpiękniejsze. Édité par Jerzy Kapica. Réédition de Brewiarz miłości par Algo (Toruń) en 2000.

Trybulacje proboszcza P. Toruń, Archiwum emigracji, 2001.

Ouvrages traduits

Passage Through the Red Sea. Traduit par Virgilia Peterson. New York, NY: Harcourt Brace, 1962.

Le Passage de la Mer Rouge. Traduit par Georges Lisowski. Paris: Seuil, 1961.

Der Zug durchs Rote Meer. Berlin: Suhrkampf, 1962, 2nd edition in 1964. Réédité in 1982, 1992, and 1996.

Edhe një ditë shprese. Traduction de fragments du Passage de la Mer Rouge par Eqrem Basha. Macédonie: Rilindja, 1978.

Ha-ma’abar b-Yam Sup. Traduction du Passage de la Mer Rouge par Ada Pagis. Tel Aviv: Hoca’ah Am Obed, 1995.

Tricoul albastru. Bucarest, Albatros, 1973.

Le Chandail bleu. Traduit par l’auteur et Jean-Louis Faivre d’Arcier. Paris: Seuil, 1971.

Île Saint-Louis. Traduit par Erik Veaux. Paris: Éditions du Rocher, 2002.

“Les galettes de pommes de terre.” Traduit par Alice-Catherine Carls. Les Cahiers bleus, Printemps 1983. Pp. 63-65.

“Oubliettes. Chapitre XV.” Adapté par l’auteur avec la collaboration de Patrick Waldberg. Cahiers de l’Est, No. 18-19, 1979. Pp. 159-176.

“The Screen.” Traduit par Jan Solecki. The Antioch Review, Vol. 20, No. 3 (Automne 1960). Pp. 347-364.  https://www.jstor.org/stable/4610272

Références

“Zofia Romanowicz, la plus française des écrivains polonais du XXe siècle.” Revue de Litterature Comparée. 28 août 2019. https://www.amazon.com/Revue-Litterature-Comparee-Romanowicz-Francaise/dp/2252042699

Anna Jamrozek-Sowa. Życie powtórzone. O pisarstwie Zofii Romanowiczowej. Rzeszów. Biblioteka Frazy, 2008.

Arkadiusz Morawiec. “O recepcji Baśki i Barbary Zofii Romanowiczowej “ [La réception de Baśka i Barbara de Zofia Romanowicz]. Białostockie Studia Literaturoznawcze, No. 6, 2015. Pp. 99-120. https://www.ceeol.com/search/article-detail?id=421281

Arkadiusz Morawiec. Zofia Romanowiczowa. Pisarka nie tylko emigracyjna [Zofia Romanowicz. Une écrivaine pas seulement émigrée]. Łódż: Wydawnictwo Universytetu Łódzkiego, 2016.

Mirosław A Supruniuk, ed. Libella – Galerie Lambert. Toruń, Uniwersytet Mikołaja Kopernika, 1998.

Zofia Romanowicz. Produit par Tadeusz Śmiarowski. Documentaire, 2008.

Alice-Catherine Carls. “The Renaissance of Zofia Romanowicz.” World Literature Today, September 13, 2016. https://www.worldliteraturetoday.org/author/zofia-romanowicz

Alice-Catherine Carls. “Staging, Philosophizing, Witnessing: The Aesthetics of Brokenness in Zofia Romanowicz’s Work.” The Polish Review, Vol. 47, No. 1 (2002), pp. 3-10. https://www.jstor.org/stable/25779301

Alice-Catherine Carls. “In memoriam : Felicja Zofia Górska-Romanowicz (1922-2010).” Archiwum Emigracji : studia, szkice, dokumenty 1-2 (12-13), 2010. Pp. 343-345. https://9lib.org/document/oy80ko2q-in-memoriam-felicja-zofia-gorska-romanowicz.html

Erik Veaux. “Zofia Romanowiczowa (1922-2010).” Archiwum Emigracji : studia, szkice, dokumenty, 1-2 (12-13). Pp. 336-342.

Maria Hernandez-Paluch. “40 lat ‘Libelli’” [Quarante ans de ‘Libella’]. Kultura (Paris), No. 12/471, 1986. Pp. 101-106.

Liens externes

Les papiers de Zofia Romanowicz sont déposés dans les Archives de l’Émigration, à la bibliothèque de l’université de Toruń.

https://www.bu.umk.pl/Archiwum_Emigracji/Osoby.htm#r50

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