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Volcanisme sur VĂ©nus

La surface de Vénus est dominée par un intense volcanisme, et comporte plus de volcans que les autres planètes du système solaire. Elle a une surface composée à 90 % de basalte, et environ 80 % de la planète est constitué d'une mosaïque de roches volcaniques et de plaines de lave, indiquant que le volcanisme a joué un rôle majeur dans l'élaboration de sa surface.
Les scientifiques pensent que la planète a dû connaitre un grand évènement de resurfaçage (renouvellement quasi complet de sa surface) il y a environ 300 ou 500 millions d'années[1], d'après la densité des cratères d'impact sur la surface. L'absence de tectonique des plaques suggère que la chaleur s'accumule périodiquement sous la croûte. Lorsque la pression devient trop forte, toutes les quelques centaines de millions d'années, la planète entre en éruption généralisée, libérant d'énormes quantités de lave, entrainant alors le renouvellement de la surface[2] - [3].

Le volcan Maat Mons, haut de km. Reconstitution en trois dimensions du Maat Mons à partir des données radar et altimétrique de la sonde Magellan. L'amplitude des reliefs est exagérée 22,5 fois.

MĂŞme s'il y a plus de 1 600 principaux volcans sur VĂ©nus, aucun n'Ă©tait connu pour ĂŞtre en Ă©ruption actuellement ; la plupart sont depuis longtemps Ă©teints. Le plus haut volcan de la planète est le Maat Mons, dont aucune Ă©ruption n'a Ă©tĂ© confirmĂ©e. Toutefois en 2015, des observations dĂ©taillĂ©es de la sonde europĂ©enne Venus Express ont apportĂ© la preuve de points chauds actifs et de coulĂ©es de lave Ă  plus de 800 °C dans la rĂ©gion de Ganis Chasma ; les fortes variations du dioxyde de soufre atmosphĂ©rique sont attribuables Ă  un important volcanisme[4]. En 2023, un rĂ©examen des images acquises par la sonde Magellan rĂ©vèle par ailleurs la survenue d'une Ă©ruption volcanique entre fĂ©vrier et [5] - [6].

Mise en Ă©vidence

En 1991, les radars de la sonde Magellan ont révélé une topographie caractéristique (boucliers, caldeiras, coulées solidifiées) et une relative absence de cratères, preuve d'une activité volcanique majeure sur Vénus il y a moins de 500 millions d'années.

En 2010, S. E. Smrekar et ses collègues ont annoncĂ© la dĂ©couverte de trois volcans rĂ©cemment en activitĂ© (moins de 2,5 millions d'annĂ©es)[7], dont Idunn Mons qui pourrait avoir des coulĂ©es de lave âgĂ©es de 10 000 ans[8], grâce Ă  l'instrument spectro-imageur infrarouge VIRTIS embarquĂ© Ă  bord de la sonde Venus Express.

En 2012, une forte variabilité du dioxyde de soufre atmosphérique, dans le temps et dans l'espace, est mise en évidence à partir des observations des sondes Pioneer en 1970-1980 et de Venus Express[9]. Ces variations ne semblent s'expliquer que par un volcanisme actif ou par des oscillations de l'atmosphère, encore incomprises.
En 2014, la 45e Conférence sur la science lunaire et planétaire a permis de présenter une première observation d'un volcanisme en cours sur la planète. En effet, grâce à sa VMC (Venus Monitoring Camera) et par le biais d'observations effectuées les 22 et puis le de la même année, la sonde européenne Venus Express aurait détecté des taches brillantes et éphémères dans la région de Ganis Chasma. Il s'agit d'un réseau de fractures jouxtant la plaine de Ganiki, et situé non loin des grands volcans Ozza Mons et Maat Mons. Réalisées à une longueur d'onde d'un micromètre, ces détections mettent en évidence des températures au sol anormalement élevées, au sein d'un rift localisé dans une région assez jeune, pouvant être dues à une éruption ou une coulée de lave[10]. La nature de ces taches n'a toutefois pas été formellement identifiée, celles-ci pouvant également être dues à l'atmosphère de la planète[11].

En , VĂ©nus devient officiellement la deuxième planète active du système solaire[12]. En reprenant les donnĂ©es de 2008 de l'instrument VIRTIS embarquĂ© Ă  bord de VĂ©nus Express, une Ă©quipe allemande apporte la preuve d'un volcanisme en cours sur la planète[13]. Leur article dĂ©taille l’observation de trois points chauds Ă  nouveau dans la rĂ©gion de Ganiki Chasma. Cette fois-ci, les contributions infrarouge en provenance du sol et celles en provenance des nuages sont correctement distinguĂ©es. Les points chauds dĂ©couverts sont prĂ©sents sur plusieurs enregistrements, ce qui exclut un artefact alĂ©atoire de mesure ou un phĂ©nomène atmosphĂ©rique. Très supĂ©rieure Ă  celle du sol (460 °C en moyenne), la tempĂ©rature des points chauds s'Ă©lève Ă  830 °C. Sur Terre les coulĂ©es de lave ont une tempĂ©rature comprises entre 700 et 1 200 °C.

Caractéristiques

Image radar sur 65 km de large de dômes en crêpes dans la région Eistla.
Vue en perspective par ordinateur de dĂ´mes en crĂŞpe sur VĂ©nus (Alpha Regio).

La surface de Vénus possède :

  • des volcans boucliers. Sur VĂ©nus, oĂą il n'y a pas de plaques tectoniques ou de l'eau de mer, les volcans sont de type bouclier. NĂ©anmoins, la morphologie des volcans boucliers de VĂ©nus est diffĂ©rente : sur la Terre, les volcans boucliers peuvent mesurer quelques dizaines de kilomètres de large et jusqu'Ă  10 kilomètres de haut (dans le cas de Mauna Kea et mesurĂ©e Ă  partir du plancher ocĂ©anique). Sur VĂ©nus, ces volcans peuvent couvrir des centaines de kilomètres, mais ils sont relativement plats, avec une hauteur moyenne de 1,5 kilomètre ;
  • des coulĂ©es de lave gĂ©nĂ©ralisĂ©e (plaines de laves) ;
  • des volcans inhabituels appelĂ©s farra et plus familièrement pancakes (« galettes »), par rĂ©fĂ©rence aux Ă©paisses crĂŞpes amĂ©ricaines. C'est une forme de volcanisme typique de VĂ©nus. Il s'agit de dĂ´mes en forme de galettes, de 25 km de diamètre environ, pour une altitude assez unifome de 750 m au maximum. Ils auraient Ă©tĂ© formĂ©s par des Ă©ruptions de lave visqueuse, ne pouvant s'Ă©couler loin du volcan, riche en silice, sous la forte pression atmosphĂ©rique de VĂ©nus, peut-ĂŞtre au cours de plusieurs Ă©ruptions successives, chacune augmentant un peu l’altitude, et obstruant la cheminĂ©e ;
  • des couronnes ou coronae. C'est un mot crĂ©Ă© par des chercheurs soviĂ©tiques, pour dĂ©signer des structures elliptiques observĂ©es sur les images des sondes Venera 15 et 16. Le centre est plus ou moins irrĂ©gulier. Il est cernĂ© par des anneaux concentriques de rides sĂ©parĂ©es par des sillons. On peut compter jusqu'Ă  12 rides autour d'une corona. Ce sont des structures typiques de VĂ©nus, rares dans les basses terres, frĂ©quentes dans les plaines vallonnĂ©es. On a recensĂ© 176 coronae, dont les diamètres vont de 60 Ă  2 000 km, le diamètre moyen Ă©tant de 250 km, et couvrant 49 000 km2. La largeur de l'anneau va de 10 Ă  150 km. Les coronae sont assez bien rĂ©parties sur la planète, mais avec tout de mĂŞme un regroupement entre Aphrodite Terra (Atla Regio) et le groupe Beta, Phoebe et Themis Regiones[14] ;
    ArachnoĂŻdes Ă  la surface de VĂ©nus.
  • d'autres caractĂ©ristiques uniques de la surface de VĂ©nus, les novas (novae) (rĂ©seaux radiaux de dykes ou grabens) et les arachnoĂŻdes (structures analogue Ă  la prĂ©cĂ©dente : la croĂ»te se fracture autour d'une corona, en de nombreux grabens radiaux). Une nova est formĂ©e lorsque de grandes quantitĂ©s de magma sont extrudĂ©es sur la surface pour former des crĂŞtes et des tranchĂ©es qui sont très rĂ©flĂ©chissantes pour les radars. Elles forment un rĂ©seau symĂ©trique autour d'un point central d'oĂą la lave Ă©merge, et oĂą il peut y avoir une dĂ©pression causĂ©e par l'effondrement de la chambre magmatique. Les arachnoĂŻdes (dont le diamètre peut atteindre plusieurs centaines de km) sont ainsi nommĂ©s parce qu'ils ressemblent Ă  une toile d'araignĂ©e, avec plusieurs ovales concentriques entourĂ©s par un rĂ©seau complexe de fractures radiales similaires Ă  ceux d'une nova. On ne sait pas si celles-ci partagent une origine commune, ou sont le rĂ©sultat de diffĂ©rents processus gĂ©ologiques ;
  • Des « tick-like », appelĂ©s aussi en anglais scalloped margin domes, des structures qui ne sont pas prĂ©sentes sur la Terre. Ils sont communĂ©ment appelĂ©s « tiques », car ils apparaissent comme des dĂ´mes avec de nombreuses pattes. Ils sont considĂ©rĂ©s comme ayant subi des mouvements tels que les glissements de terrain. Parfois, des dĂ©pĂ´ts de dĂ©bris sont dispersĂ©s autour d'eux.

Relevé quantitatif

Une analyse préliminaire des données de la sonde Magellan, couvrant plus de 90 % de la surface, donne le décompte suivant[15] :

  • plus de 550 zones de boucliers (des groupes de petits volcans, de diamètre infĂ©rieur Ă  20 km) ;
  • 274 volcans de taille intermĂ©diaire (entre 20 et 100 km de diamètre), de morphologies variĂ©es ;
  • 156 volcans de diamètre supĂ©rieur Ă  100 km ;
  • 86 structures caldĂ©riques (indĂ©pendamment de celles qui sont associĂ©es Ă  des volcans-boucliers), de diamètre gĂ©nĂ©ralement compris entre 60 et 80 km ;
  • 175 coronae ;
  • 259 arachnoĂŻdes ;
  • 50 novae, c'est-Ă -dire des groupes de fractures disposĂ©es radialement (en forme d'Ă©toile sur les images radar) ;
  • 53 champs de lave ;
  • 50 chenaux de lave sinueux, tous longs d'au moins 100 Ă  1 000 km (correspondant sans doute Ă  des laves plus fluides, peut-ĂŞtre des laves ultramafiques).

Notes et références

  1. Magellan: A new view of Venus' geology and geophysics (en)D.L. Bindschadler American Geophysical Union
  2. New York Times 9 avril 2010 Spacecraft Spots Active Volcanoes on Venus (en)
  3. science (journal) 30 avril 2010 Recent Hotspot Volcanism on Venus from VIRTIS Emissivity Data Smrekar, Suzanne E.; Stofan, Ellen R.; Mueller, Nils; Treiman, Allan; Elkins-Tanton, Linda; Helbert, Joern; Piccioni, Giuseppe; Drossart, Pierre
  4. (en) E. V. Shalygin, W. J. Markiewicz, A. T. Basilevsky, D. V. Titov, N. I. Ignatiev et J. W. Head, « Active volcanism on Venus in the Ganiki Chasma rift zone », Geophysical Research Letters, vol. 42, no 12,‎ , p. 4762-4769 (DOI 10.1002/2015GL064088, lire en ligne).
  5. (en) Alex Lopatka, « Old data show new evidence for Venusian volcanism », Physics Today,‎ (DOI 10.1063/PT.6.1.20230330a Accès libre).
  6. (en) Robert R. Herrick et Scott Hensley, « Surface changes observed on a Venusian volcano during the Magellan mission », Science, vol. 379, no 6638,‎ , p. 1205-1208 (DOI 10.1126/science.abm77 Accès libre).
  7. (en) Suzanne E. Smrekar, « Recent Hotspot Volcanism on Venus from VIRTIS Emissivity Data », Science, no 5978,‎ (lire en ligne)
  8. (en) « Venus Express evidence for recent hot-spot volcanism on Venus » (consulté le )
  9. (en) E. Marcq et al., « Variations of sulphur dioxide at the cloud top of Venus’s dynamic atmosphere », Nature Geoscience, no 6,‎ (DOI 10.1038/ngeo1650, lire en ligne)
  10. « Bright transient spots in Ganiki Chasma, Venus », (consulté le )
  11. « LPSC 2014: The Curious Case of Active Volcanism on Venus », (consulté le )
  12. (en) « Hot lava flows discovered on Venus » (consulté le )
  13. (en) Eugene V. Shalygin, « Active volcanism on Venus in the Ganiki Chasma rift zone », Geophysical Research Letters, nos 42-12,‎ (DOI 10.1002/2015GL064088, lire en ligne)
  14. « Le volcanisme planétaire : le volcanisme Vénusien. »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) Le blog de Bernard Duyck.
  15. (en) James W. Head, L. S. Crumpler, Jayne C. Aubele, John E. Guest et R. Stephen Saunders, « Venus Volcanism: Classification of Volcanic Features and Structures, Associations, and Global Distribution from Magellan Data », Journal of Geophysical Research, vol. 97, no E8,‎ , p. 13153-13197.

Voir aussi

Articles connexes

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