Voiture radiologique
Une voiture radiologique est un véhicule équipé d'unités mobiles de radiologie utilisé sur le front franco-belge lors de la PremiÚre Guerre mondiale.
Dix-huit de ces voitures, Ă©quipĂ©es par Marie Curie, sont surnommĂ©es « Petite Curie » Ă la suite de la parution de la biographie de Marie Curie par sa fille Ăve en 1938[1].
Historique
Les premiÚres voitures radiologiques sont testées avant guerre. M. Lesage conçoit un prototype testé en 1912. Le médecin principal Busquet et l'ingénieur Massiot construisent deux voitures sur chùssis Lorraine, qui défilent le . DÚs fin août 1914, deux autres voitures sont équipées par l'ingénieur Gallot[2].
Claudius Regaud, directeur du pavillon Pasteur de l'Institut du radium (Ă ce titre, il est l'homologue de Marie Curie qui dirige le Pavillon Curie de l'Institut), est mobilisĂ© le pour la Grande guerre comme mĂ©decin major de 2e classe. Chef d'une ambulance divisionnaire, il est chargĂ© d'organiser l'hĂŽpital d'Ă©vacuation de GĂ©rardmer. C'est dans ces circonstances qu'il rencontre le mĂ©decin Henri Coutard (en) qui y assure la responsabilitĂ© des services de radiologie. Tous deux constatent les dĂ©gĂąts de la doctrine de l'Ă©vacuation systĂ©matique des blessĂ©s et du manque d'expĂ©rience des praticiens en radiologie (175 mĂ©decins radiologues affectĂ©s dans 21 postes de radiologie fixes loin du front) dont la discipline naissante permet de faciliter le repĂ©rage des projectiles (balles de shrapnel, Ă©clats d'obus) et des lĂ©sions osseuses. Regaud est attachĂ© Ă partir du au cabinet de Justin Godart, sous-secrĂ©taire d'Ătat de la Guerre, pour participer Ă la rĂ©forme du Service de santĂ© des armĂ©es. Marie Curie, aprĂšs ĂȘtre relevĂ©e de ses obligations universitaires pour participer Ă l'effort de guerre, dĂ©veloppe Ă cette Ă©poque la radiologie de terrain, encouragĂ©e par les deux hommes[3].
Avec l'aide de la Croix-Rouge et d'Antoine BĂ©clĂšre, directeur du service radiologique des armĂ©es, Marie Curie, prix Nobel de physique et de chimie, participe Ă la conception dâunitĂ©s chirurgicales mobiles de radiologie. Dix-huit camionnettes lĂ©gĂšres, achetĂ©es grĂące Ă des dons privĂ©s ainsi qu'au Patronage national des blessĂ©s[4], sont Ă©quipĂ©es de matĂ©riel de radiologie et se rendent sur les fronts des diffĂ©rentes batailles qui ont opposĂ© les armĂ©es françaises et allemandes, notamment lors de la bataille de la Marne, Ă Verdun et sur la Somme. Ces « voitures radiologiques », surnommĂ©es « petites Curie » par sa fille Ăve en 1938[4], sont des vĂ©hicules de tourisme Ă©quipĂ©s d'appareils Röntgen avec une dynamo alimentĂ©e par le moteur du vĂ©hicule, pouvant donc se rendre au plus prĂšs des champs de bataille et ainsi limiter les dĂ©placements sanitaires des blessĂ©s[5] - [6]. Elles permettent aussi de prendre des radiographies des malades, opĂ©rations trĂšs utiles pour situer plus prĂ©cisĂ©ment l'emplacement des Ă©clats d'obus et des balles et faciliter les chirurgies.
Marie Curie arrive le avec une voiture de radiologie Ă lâhĂŽpital militaire de Furnes (frontiĂšre franco-belge). Elle y reste une semaine avec sa fille IrĂšne. Elle rĂ©alise environ trente missions ou voyages aux hĂŽpitaux et ambulances du front, pour installation de postes radiologiques, examen de blessĂ©s et instruction de personnel, notamment dans la rĂ©gion de Furnes, Poperinghe, Dunkerque, Amiens, LunĂ©ville, Verdun [7].
En 1916, Marie Curie obtient son permis de conduire[8]. Ă lâInstitut du radium, elle forme 150 aide-radiologistes.
Marie Curie a conçu 18 voitures radiologiques (sur 114 produites en France[6]) et installĂ© 250 (la fiche de Marie Curie indique 150) postes fixes de radiologie dans les hĂŽpitaux. Elle indique avoir elle-mĂȘme directement fait 1000 examens radiologiques[4] - [9] - [10].
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Béatrice NicodÚme, D'un combat à l'autre : les filles de Pierre et Marie Curie, Paris, Nathan, coll. « Un regard sur ... », , 157 p. (ISBN 978-2-09-255223-0, OCLC 897580903).
- Marie-Noëlle Himbert, Marie Curie : portrait d'une femme engagée, 1914-1918 : récit, Arles, Actes Sud, , 221 p. (ISBN 978-2-330-03678-2, OCLC 897802232).
- Marie Curie, La radiologie et la guerre, Librairie Felix Alcan, , 104 p. (lire en ligne).
- Ăve Curie, Madame Curie, Paris, Gallimard, (prĂ©sentation en ligne).
- Jean-Michel Boniface et Jean-Gabriel Jeudy, Les camions de la victoire : le service automobile pendant la Grande guerre, 1914-1918, Paris, Massin, (ISBN 9782402439756, OCLC 963220189).
Voir aussi
- Marie Curie, une femme sur le front, téléfilm d'Alain Brunard, 2014
- MĂ©decine militaire
- Musée Curie
Notes et références
- Natalie Pigeard-Micault, « Les biographies sur Marie SkĆodowska-Curie comme outil de construction des stĂ©rĂ©otypes et des idĂ©ologies », dans Joanna Godlewicz-Adamiec et al., Femmes et le Savoir / Women and Knowledge / Frauen und Wissen, Classiques Garnier, coll. « Rencontres » (no 450), (ISBN 978-2-406-09681-8, DOI 10.15122/isbn.978-2-406-09681-8.p.0241).
- Boniface et Jeudy 1996, p. 73.
- Marie-Noëlle Himbert 2014, p. 121.
- « La Grande Guerre, creuset de la radiologie mĂ©dicale », Le Monde,â (lire en ligne, consultĂ© le ).
- Biographie de Marie Curie-Sklodowska (1867-1934), sur le site du musée Curie, p. 2.
- J.-J. Ferrandis, A. Ségal, « L'essor de la radiologie osseuse pendant la guerre de 1914-1918 » [PDF], p. 50.
- Maxime Leroux, Marie Curie et son engagement pendant la Grande Guerre [PDF], mĂ©moire pour le diplĂŽme universitaire dâhistoire de la mĂ©decine, no 2016-06, annexe 15 : « Liste des missions de guerre de Marie Curie en zone militaire. Gallica/BNF ».
- Louis-Pascal Jacquemond, IrĂšne Joliot-Curie, Paris, O. Jacob, , 369 p. (ISBN 978-2-7381-3033-4, lire en ligne), p. 1925, note 48.
- Docufiction Marie Curie, une femme sur le front d'Alain Brunard, 2014, 90 minutes.
- « Les petites Curies », sur mariecurie-llm.blogspot.be (consulté le ).